Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui comporte des mesures visant à améliorer le régime des aides au logement. Ces dispositions sont importantes, car elles sont porteuses de justice sociale et d’équité. Elles sont d’autant plus nécessaires qu’elles interviennent dans un contexte de début de crise économique et sociale.
La pandémie et les mesures prises pour l’endiguer ont eu de graves effets sur notre économie, mais aussi sur celles de nos voisins et partenaires économiques. L’économie française va faire face à une récession jugée historique il y a quelques jours par le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire.
Avec une contraction de 11 % du PIB en 2020, ainsi qu’un déficit public d’au moins 9 % et une dette publique aux alentours de 115 %, la crise économique qui est devant nous aura malheureusement des conséquences fortes sur les ménages. Or le logement demeure l’un des premiers postes de dépenses des Français. C’est donc notamment dans ce domaine qu’il faut apporter un soutien aux plus fragiles de nos concitoyens.
Au-delà de son caractère social, la politique du logement est également un outil majeur de relance économique. Elle apporte un soutien actif au secteur du bâtiment et à de nombreux corps de métier. Certains bailleurs sociaux qui maillent nos territoires sont déjà très vulnérables ; ils le seront encore davantage en cas de crise. Ils sont des acteurs importants de l’aménagement de nos territoires. Il faut donc soutenir leur capacité d’intervention, d’investissement et de rénovation.
Les aides au logement sont un pilier ancien et essentiel de la politique sociale française. Elles sont inscrites dans le paysage français depuis 1948. En 2018, ce sont 17 milliards d’euros qui étaient versés à un peu plus de 6 millions de bénéficiaires. Il importe donc de ne pas faire de petites économies sur les aides sociales au logement, car elles sont souvent lourdes de conséquences.
La proposition de loi que nous examinons comportait deux mesures qui ont été supprimées en commission.
Il s’agissait, en premier lieu, de la suppression du seuil de non-versement de l’APL fixé à 10 euros. Même si j’approuve son objectif, qui est à première vue louable, cette disposition doit toutefois être confrontée à un principe de réalité et de bonne gestion des fonds publics, notamment au regard du coût de gestion qui est supérieur à l’aide versée. Je partage donc pleinement l’avis de la commission et de Mme la rapporteure.
Il s’agissait, en second lieu, de maintenir le versement de l’APL en cas de loyers impayés. La commission a heureusement supprimé cette disposition, qui vidait de sa substance le principe même d’une aide au logement. Si le loyer n’est pas payé, comment pourrait-on justifier le versement d’une telle aide, qui vise à couvrir partiellement le paiement du loyer ? Je suis conscient de la nécessité d’appréhender les difficultés de paiement des loyers pour certains foyers en ces temps à venir, mais une telle mesure ne me semble pas opportune.
Outre ces suppressions pertinentes, la commission a approuvé deux mesures auxquelles je souscris totalement.
Le versement de l’APL pour le premier mois de loyer me semble tout à fait justifié : si l’aide est due, elle doit être payée dès que les conditions sont remplies. C’est là aussi une question de justice et d’équité.
Je suis également favorable au rétablissement de l’indexation de l’APL sur l’indice de révision des loyers. Pour garder toute son efficacité, le montant de cette aide doit être réactualisé régulièrement. C’est là aussi un enjeu d’équité, car cette non-indexation conduit inexorablement à voir s’éroder le montant relatif de l’APL, alors même que les loyers, eux, peuvent faire l’objet d’une indexation.
Nous avons fait face ensemble à la crise sanitaire. Pour tenir face à la crise économique, nous avons besoin de soutenir les entreprises, bien évidemment, mais aussi les ménages, car ils sont un des moteurs importants de la consommation et donc de la croissance.
Dans ce sens, l’APL accession était un dispositif utile dont je regrette la disparition. Il permettait aux ménages les plus modestes d’accéder plus facilement à la propriété. Les différentes composantes de notre société sont interdépendantes ; il importe de n’en négliger aucune.
Cette proposition de loi ne suffira pas à régler toutes les difficultés, mais elle contribuera utilement à préserver la situation des plus fragiles de nos concitoyens et permettra un certain nombre d’ajustements du dispositif des aides au logement. Nous voterons donc le texte tel qu’il a été amendé par la commission et sur proposition de Mme la rapporteure.