La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui a été adoptée par l’Assemblée nationale en novembre 2019, alors que de nombreux services d’urgence des hôpitaux publics connaissaient depuis des mois un mouvement social.
Nos collègues Laurence Cohen et René-Paul Savary ont parfaitement analysé les difficultés des services d’urgence. Ils doivent être regardés non comme un point d’entrée défaillant dans le système de soins, mais comme un miroir grossissant des dysfonctionnements de l’ensemble de notre système de santé. Leurs difficultés résultent moins de leur organisation propre que de leur positionnement original au confluent, en amont, des carences de la médecine de ville et de la permanence de soins ambulatoires et, en aval, des rigidités hospitalières.
Nous avons régulièrement eu l’occasion d’évoquer dans cet hémicycle et au sein de la commission des affaires sociales le problème que pose pour notre système de santé la gestion de la permanence des soins et, plus généralement, de l’accueil des soins non programmés – madame la rapporteure, je préfère cette terminologie à celle de soins immédiats, qui semble accréditer l’idée d’immédiateté.
Nous avons été conduits à examiner plusieurs dispositions sur ce sujet ces dernières années avec la mise en place de mesures diverses directement liées à la prise en charge des soins non programmés. Je pense notamment aux communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), qui, je le rappelle, ont pour mission de permettre aux patients du territoire concerné d’obtenir un rendez-vous le jour même ou dans les vingt-quatre heures, dès lors qu’il s’agit d’une urgence non vitale.
Depuis la signature en juin dernier de l’accord conventionnel interprofessionnel, les CPTS s’organisent sur l’initiative des professionnels de santé des territoires pour construire une offre de soins coordonnée. Le ministère de la santé estimait qu’il serait nécessaire de créer environ un millier de CPTS pour couvrir l’ensemble du territoire conformément aux objectifs du plan Ma santé 2022. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai une première question : pouvez-vous nous donner un état des lieux de la mise en place de ces CPTS ?
Par ailleurs, le pacte de refondation des urgences, annoncé en octobre dernier par Mme la ministre de la santé, prévoyait la création d’un service d’accès aux soins (SAS). Ma deuxième question est la suivante : où en sommes-nous ? Là encore, la coordination entre les centres 15 et les médecins de ville est une question primordiale, et j’imagine que la participation des médecins libéraux sera valorisée sur ce sujet. Monsieur le secrétaire d’État, la négociation conventionnelle entre les médecins libéraux et l’assurance maladie est-elle engagée ?
Enfin, les professionnels de santé se sont organisés sur leurs territoires, en créant des maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), des maisons médicales de garde, etc. Même si toutes ces initiatives ne sont pas suffisantes au regard de l’engorgement des services d’urgence, la réponse à la question qui nous est posée réside-t-elle dans la création d’un nouveau label par l’ARS ? Honnêtement, je ne le pense pas.
Comme je l’ai décrit à l’instant, les points d’accueil pour soins non programmés existent déjà, mais sous d’autres appellations. Ajouter une énième structure dans l’organisation des soins ne nous semble pas pertinent, d’autant plus que le Gouvernement vient d’installer le Ségur de la santé – Mme la rapporteure l’a rappelé –, qui, je l’espère, ne sera pas que le Ségur de l’hôpital…
Pour conclure, monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi de former le vœu que ce Ségur ne soit pas un catalogue de demandes, mais qu’il apporte des solutions concrètes pour améliorer les conditions de travail de tous les professionnels de santé : médecins, infirmiers, paramédicaux… Je prendrai un exemple : la question du temps que les personnels, tous secteurs confondus, consacrent à leurs tâches administratives. Des solutions pratiques et rapides pour augmenter le temps médical doivent être mises en place ; tout le monde y gagnera, patients comme soignants.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez commencé votre intervention par un hommage aux soignants – permettez-moi, comme Mme la rapporteure, de le faire à mon tour –, mais cet hommage ne pourra se matérialiser que si des mesures concrètes et acceptées par les professionnels de santé sont effectivement adoptées.