Intervention de Xavier Iacovelli

Réunion du 4 juin 2020 à 14h30
Création de points d'accueil pour soins immédiats — Rejet d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Xavier IacovelliXavier Iacovelli :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, tout d’abord, je veux associer mon groupe à l’hommage rendu aux soignants durant la crise que nous connaissons encore aujourd’hui.

Comme l’a dit mon collègue Bernard Jomier, depuis vingt ans, le nombre de passages aux urgences ne fait qu’augmenter dans notre pays. Il a même doublé depuis 1996.

Confrontés à la douleur et à l’angoisse, nos concitoyens privilégient massivement les services d’urgence afin d’obtenir une réponse rapide et un diagnostic précis. Ainsi, en 2016, on comptait plus de 21 millions de passages aux urgences, contre 10, 1 millions en 1996. Plusieurs facteurs expliquent ce recours aux urgences.

Nous avons en tête l’image de services d’urgence engorgés, de personnels à bout de force, mais aussi déterminés et qui ont tenu bon. Nous leur sommes évidemment reconnaissants.

Nous devons apporter des réponses concrètes au problème de l’engorgement des services d’urgence, pour les personnels comme pour les patients.

Dans son rapport de 2017, la Cour des comptes estimait à 3, 6 millions par an le nombre de passages dits « inutiles » aux urgences. Ce chiffre doit malgré tout être relativisé, puisque, selon une autre étude parue en octobre 2019, ces visites inadéquates ou inutiles seraient notamment liées à un manque patent de médecins généralistes dans nos territoires.

Selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère des solidarités et de la santé, près de 60 % des patients se rendent aux urgences parce que les soins y sont accessibles et qu’ils peuvent y réaliser rapidement des examens complémentaires.

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui permet en partie de répondre à la demande croissante de diagnostic et de soins rapides des patients, par la création de points d’accueil pour soins immédiats. Ces points d’accueil auraient trois missions : assurer les soins non programmés relevant de la médecine générale, lorsque le pronostic vital du patient n’est pas engagé ; caractériser l’état de santé physique et psychique du patient par un avis obtenu par un médecin généraliste ; orienter si nécessaire le patient vers un service d’urgence ou un service spécialisé.

La crise que traversent les services d’urgence ne date pas d’hier. Elle est le fruit du manque d’investissements qui, depuis de nombreuses années, a fragilisé le secteur et impacté les conditions de travail des professionnels de santé.

Nous saluons les objectifs de cette proposition de loi. Celle-ci vise à participer à une meilleure gradation de la réponse à la demande de soins non programmés, en maillant plus finement le territoire. À cet égard, la création des points d’accueil pour soins immédiats dédiés à la prise en charge de soins rapides des patients dont le pronostic vital n’est pas engagé constituerait un début de réponse face à l’engorgement des services d’urgence.

En 2017, un rapport d’information de nos collègues Laurence Cohen, Catherine Génisson et René-Paul Savary faisait déjà état d’un changement de mentalité de la part de nos concitoyens et d’une évolution sociétale valorisant l’immédiateté de l’accès aux soins, ce qui expliquerait notamment le recours aux urgences hospitalières chez les patients.

Une autre recommandation est la prévention. Celle-ci se traduit tout d’abord par une meilleure information de la population. Elle constitue l’un des enjeux importants du désengorgement des services d’urgence, auxquels on recourt parfois par méconnaissance de l’état de santé des patients.

L’éducation à la santé de la population, c’est aussi permettre à chacun de savoir vers quel professionnel se tourner en fonction de son état de santé. Il nous paraît essentiel de permettre à ces points d’accueil pour soins immédiats de jouer ce rôle. Tel est l’objet de l’amendement que nous avons déposé sur ce texte.

L’examen de cette proposition de loi intervient dans un contexte particulier, celui d’une crise sanitaire survenue à peu près un an après la crise de l’hôpital. La crise sanitaire qui frappe notre pays a une fois de plus démontré la nécessité que nous disposions de services d’urgence efficaces et, surtout, les difficultés auxquelles font face celles et ceux qui, chaque jour, sauvent des vies dans des conditions toujours plus difficiles.

Conscient de cette réalité – nous le sommes tous –, le Gouvernement a lancé, la semaine dernière, le Ségur de la santé. Cette concertation avec l’ensemble des acteurs du système de santé, de l’hôpital, de la ville et du secteur médico-social fait suite à l’engagement pris par le Président de la République le 25 mars dernier dans le discours qu’il a tenu à Mulhouse, dans lequel il a exprimé son souhait qu’un plan massif d’investissement et de revalorisation de l’ensemble de carrières soit conduit à l’issue de la crise. L’une des priorités est la mise en place d’organisations plus proches des territoires et plus collectives entre l’hôpital, la médecine de ville et le secteur médico-social.

Bien évidemment, l’adoption de cette proposition de loi ne sera qu’une petite pierre à l’édifice qu’il nous faut construire. Le Ségur de la santé permettra – nous l’espérons sincèrement – de refonder notre système de santé face aux difficultés rencontrées par les professionnels et les patients. Cependant, ce texte nous paraît aller dans le bon sens. Il s’appuie sur des expériences de terrain et donne aux professionnels la faculté de s’organiser dans un cadre souple.

Pour toutes ces raisons, notre groupe le votera.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion