Intervention de Olivier Jacquin

Réunion du 2 juin 2020 à 14h30
Soutien des entreprises victimes d'une menace ou d'une crise sanitaire majeure — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié, amendements 2018 56

Photo de Olivier JacquinOlivier Jacquin :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il est intéressant de clore une discussion générale : cela permet d’intervenir en ayant entendu tous les orateurs. Je salue d’ailleurs ma – brillante – collègue Sophie Taillé-Polian ; je ne retire rien à ses propos et les miens seront complémentaires.

Il existe une certaine ambiguïté en ce qui concerne cette proposition de loi, parce que son titre « Définir et coordonner les rôles respectifs des assurances et de la solidarité nationale dans le soutien des entreprises victimes d’une menace ou d’une crise sanitaire majeure » laisse entendre qu’elle va apporter des solutions à la crise. Or ce n’est pas tout à fait la réalité…

Dans sa communication, notre collègue Jean-François Husson anticipe : il parle d’engager la participation des assureurs à l’effort national, mais, si c’est toujours une bonne chose de faire de la prospective, la création de cet outil qui permettrait de protéger les entreprises ne concernera que les prochaines crises.

En outre, même si un tel outil est nécessaire pour l’avenir, la création de ce nouveau marché s’annonce comme particulièrement intéressante pour les assureurs – cette idée a d’ailleurs été inspirée par les acteurs du secteur, comme vient de le dire notre collègue Éric Bocquet.

Dans ces conditions, comment payer la crise actuelle ? La main sur le cœur, les auteurs de cette proposition de loi évoquent des contributions volontaires et le devoir moral d’intervention et de soutien qui s’impose aux assureurs ; mais si de telles contributions volontaires fonctionnaient, personne, nulle part, n’aurait jamais imaginé la notion d’impôt, puisque la générosité aurait suffi… On peut le regretter, mais la vie est ainsi faite !

Lors de l’examen du deuxième projet de loi de finances rectificative, nous avons eu un débat sur la question de taxer ou non les sociétés d’assurance. J’avais alors proposé d’agir de manière pragmatique, en prélevant une partie des économies liées à la baisse de la sinistralité et en orientant ces sommes vers un fonds de soutien aux entreprises.

Avec Claude Raynal et Sophie Taillé-Polian, j’ai traduit cette idée, en l’améliorant, dans une proposition de loi visant à instaurer une contribution exceptionnelle sur les assurances pour concourir à la solidarité nationale face aux conséquences économiques et sociales d’une crise sanitaire majeure – elle a été déposée au Sénat sous le numéro 477 (2019-2020). C’est un dispositif simple, juste, pragmatique et proportionné qui s’appliquerait à d’autres crises. Il prend en compte les éventuels effets rebond dans la sinistralité – à une baisse des sinistres peut en effet succéder une hausse –, en prévoyant de prélever une partie de l’augmentation du résultat d’exploitation durant la période de crise avec la moyenne des trois années précédentes comme point de comparaison.

Les auteurs de la proposition de loi parlent d’un « paratonnerre », mais celui-ci vise surtout à protéger la rente future du secteur de l’assurance, en socialisant les pertes et en privatisant les bénéfices.

D’ailleurs, lors de l’examen du deuxième projet de loi de finances rectificative, M. Retailleau a proposé un amendement, qui a été adopté, pour augmenter la taxe sur les excédents des provisions des sociétés d’assurance. Cet amendement n’était pas chiffré, ce qui m’avait étonné. J’ai alors cherché combien d’argent allait entrer dans les caisses de l’État par ce biais. Résultat : quasiment rien, quelques dizaines de millions d’euros, alors qu’en 2018 les primes des assurances dommages s’élevaient à plus de 56 milliards d’euros…

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