Intervention de Odette Herviaux

Réunion du 4 décembre 2007 à 15h10
Loi de finances pour 2008 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de Odette HerviauxOdette Herviaux :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un grand nombre de mes collègues vous ayant déjà fait part de leurs remarques, je me bornerai à analyser les financements annoncés pour certaines actions du programme 154 et à vous interroger sur quelques points d'intérêt plus local.

Contrairement à tous les discours actuels - dont ceux qui sont tenus par le Gouvernement et le Président de la République - sur la nécessité de renforcer l'attractivité des territoires ruraux par le maintien de la population, notamment agricole, par le développement de l'emploi et la diversité des activités économiques, des crédits en baisse remettent en cause les politiques d'accompagnement du développement de ces territoires.

Dotée d'environ 70 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 80 millions d'euros en crédits de paiement, la ligne budgétaire de l'action 1 : « Soutien aux territoires et aux acteurs ruraux » est en diminution, respectivement de 16 % et de plus de 7 %.

Certes, cette diminution s'explique, en partie, par le transfert des crédits de personnel à un autre programme, mais elle n'en esquisse pas moins une tendance inquiétante, tant sont importants et prioritaires les besoins de financement du développement rural, et ce au moment même où les contrats de projets État-régions mettent en évidence la baisse drastique du volet territorial et inquiètent fortement tous les acteurs locaux.

L'avenir des pôles d'excellence ruraux nous préoccupe également. Ils ne concernent votre ministère qu'à hauteur de 34 millions d'euros sur les 235 millions annoncés. Ce chiffre global n'est certes pas négligeable en valeur absolue mais, rapporté aux 379 pôles labellisés, il demeure limité et pourrait, si l'on n'y prend garde, favoriser un « saupoudrage » des crédits dont l'effet de levier sur le développement local reste à démontrer, d'autant que les critères d'intervention sont complexes et restrictifs. Ne sont, en effet, le plus souvent subventionnés que les investissements de nature matérielle, là où les investissements d'ingénierie ou d'animation seraient tout aussi nécessaires, car la mise en concurrence des territoires peut parfois être un facteur déclenchant de projets pour obtenir des subventions. Quid de leur pérennité ? Quid également des notions de solidarité et de péréquation, qui ont toujours garanti un aménagement réussi et équilibré du territoire ?

Pour en revenir à des questions plus spécifiquement agricoles, mais relevant toujours de la même préoccupation de garder nos territoires ruraux vivants et attractifs, le premier impératif est bien de conserver dans nos campagnes un maximum d'exploitations viables et d'actifs agricoles. Malheureusement, là aussi, les crédits alloués à l'installation et au maintien des nouveaux exploitants sont en baisse, de 2, 5 millions d'euros en crédits de paiement et de 100 000 euros en autorisations d'engagement.

Comment expliquer une telle décision, alors que le nombre de départs ne cessera d'augmenter, vu l'âge moyen des exploitants, que le nombre d'installations recommence à croître - et c'est heureux - dans certaines régions et, surtout, que le nombre de jeunes cherchant à s'installer, dans certains départements, est supérieur à celui des cédants ?

J'avais pourtant bien écouté le discours de M. le Président de la République, en septembre, à Rennes. Il avait déclaré que la France avait besoin de jeunes agriculteurs pour assurer l'avenir de son agriculture. Malheureusement, je ne vois pas, dans ce budget, la concrétisation de ses propos.

Quant à ce que vous nous avez dit vous-même de vos préoccupations et de vos orientations, monsieur le ministre, je dois reconnaître que je ne suis pas loin d'en partager la plus grande part.

Mais, si nous pouvons nous rejoindre sur les objectifs, je crains que ce ne soit une autre histoire concernant les moyens ! Ils sont insuffisants au regard de ce que nécessite, en termes de courage et de détermination, la volonté de s'installer en tant qu'agriculteur, malgré une image du métier encore trop souvent dévalorisée, malgré un travail réputé long et pénible, malgré des perspectives de revenus plus qu'incertaines et malgré des lourdeurs administratives, des contrôles et des contraintes qui ne cessent d'augmenter.

Alors, comment favoriser au mieux le plus grand nombre d'installations et de reprises d'exploitations rentables, afin que ces exploitations, au lieu d'être surdimensionnées et financiarisées à outrance, devenant ainsi intransmissibles, continuent à être dynamiques et productives mais diversifiées, sources d'emplois et respectueuses de l'environnement, c'est-à-dire - comme vous l'avez dit vous-même, monsieur le ministre - durables ?

La réponse dépasse sûrement le seul aspect budgétaire. Cependant, des crédits importants sont toujours nécessaires pour permettre à un maximum de candidats à l'installation de trouver des exploitations, transmissibles et viables je le répète, et éviter que pratiquement 80 % des terres des cédants aillent à l'agrandissement, comme dans ma région.

Cette année déjà, de nombreux jeunes agriculteurs ont rencontré de sérieuses difficultés pour obtenir des prêts bonifiés et, même si vous avez pris en compte la hausse des taux d'intérêts, on s'accorde partout à dire - même au sein du le syndicat majoritaire - que l'enveloppe prévue pour 2008 sera sûrement insuffisante pour satisfaire tous les dossiers déposés.

Le problème me semble identique pour les prêts bonifiés aux coopératives d'utilisation en commun de matériel agricole, les CUMA, car les compléments à l'enveloppe pour 2007 n'ont pas été suffisants, dans mon département, par exemple.

Face aux demandes de nos collègues députés, vous vous êtes engagé, monsieur le ministre, à amputer de 2 millions d'euros le programme « Forêt », de un million d'euros le programme 215 et à redéployer 2 millions d'euros d'autorisations d'engagement au sein du programme 154. Ces mouvements prouvent, premièrement, que cette ligne budgétaire posait un véritable problème et, deuxièmement, que ce budget global souffre d'une faiblesse évidente.

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