Séance en hémicycle du 4 décembre 2007 à 15h10

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La séance

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La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures dix, sous la présidence de M. Philippe Richert.

Photo de Philippe Richert

La séance est reprise.

Nous poursuivons l'examen des crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » et du compte spécial « Développement agricole et rural ».

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Daniel Soulage.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà longtemps que ce budget n'avait pas été présenté dans un contexte économique aussi favorable.

En effet, cette année, une envolée spectaculaire des cours tire l'ensemble du secteur vers le haut : en juillet, les prix pour les grandes cultures étaient en hausse de plus de 38 % par rapport à 2007, ceux des vins d'appellation l'étaient de près de 10 %, et l'on a assisté, en septembre, à une augmentation des prix des fruits et légumes, des produits carnés, des oeufs et du beurre. Les agriculteurs ne sont pas responsables de cette hausse des prix, qui limite le pouvoir d'achat des consommateurs, sujet dont on parle beaucoup actuellement.

Nous avons donc des raisons de nous réjouir, même s'il convient que nous restions prudents.

Tout d'abord, si cette hausse spectaculaire des prix des céréales résulte de la conjonction de plusieurs facteurs, à la fois économiques et climatiques, elle est aussi le résultat de forts mouvements de spéculation qui pourraient s'inverser rapidement.

Mais surtout, c'est en s'appuyant sur cette nouvelle conjoncture économique que la Commission européenne entend proposer la révision, à mi-parcours, des instruments de régulation des marchés agricoles, à l'occasion du « bilan de santé » de la PAC, alors que, parallèlement, elle semble réticente à s'engager dans l'instauration de mécanismes de gestion des risques et des aléas à l'échelon communautaire.

En présentant officiellement sa feuille de route pour le « bilan de santé » de la PAC, le 20 novembre dernier, Mariann Fischer Boel a, en fait, ouvert un nouveau cycle de négociations qui déboucheront sur une réforme annoncée, en principe, pour la fin de l'année 2008.

On connaît les grands traits des objectifs de la Commission : quotas laitiers vidés progressivement de leur effet, intervention limitée au blé tendre, jachère rayée de la carte, amplification de la conditionnalité des aides, plafonnement, modulation, accent mis sur le développement rural... En clair, on fait confiance au marché pour réguler les équilibres économiques.

Dans ce contexte, monsieur le ministre, j'ai beaucoup apprécié votre intervention ce matin lorsque, évoquant le développement de l'agriculture, vous avez indiqué que l'on ne pouvait se satisfaire d'un libéralisme absolu. J'espère que votre voix sera entendue et écoutée au niveau européen.

Ce mécanisme ne peut fonctionner si nous voulons conserver une agriculture productive. L'agriculture est au coeur de tous les défis de nos sociétés : croissance, sécurité alimentaire, développement durable, indépendance énergétique. Mais sa fonction première est de produire pour satisfaire les besoins vitaux de l'humanité, qui seront multipliés par deux d'ici à 2050. Elle justifie, plus que jamais, des outils de stabilisation des marchés adaptés et renouvelés.

La dernière réforme de la PAC, avec le découplage des aides, a déjà introduit un système très pervers. En caricaturant à peine, monsieur ministre, je peux vous assurer que, si le découplage s'appliquait à la lettre, il n'y aurait plus un seul prunier dans mon département du Lot-et-Garonne !

À cet égard, je me félicite que le Gouvernement ait obtenu un dispositif transitoire pour les fruits transformés, notamment pour le pruneau, dont la profession se satisfait. Je souhaite que ce règlement se poursuive au-delà des cinq ans qui viennent, afin que la filière perdure.

Jusqu'ici, les aides étaient versées au kilo. En 2008, pour la première année, l'aide sera versée intégralement à l'hectare. Néanmoins, et fort heureusement, l'entretien du verger sera exigé. Au bout de la troisième année, un quart de l'aide sera découplé et donnera droit au versement de droits à paiement unique, ou DPU. Nous souhaitons vivement que vous puissiez obtenir la limitation du découplage à ce seuil.

Monsieur le ministre, je salue votre engagement en faveur des cultures territoriales. Il est nécessaire, en effet, que les régions conservent les cultures traditionnelles qui font partie de leur patrimoine. Le découplage met en danger des équilibres fragiles et nous risquons de voir disparaître des pans entiers de notre agriculture, et, avec eux, le secteur agroalimentaire.

Par ailleurs, le Grenelle de l'environnement, qui a permis certaines avancées, ne doit pas conduire à remettre en cause l'activité agricole conventionnelle. Il est, certes, possible de progresser encore sur les quantités de matières actives utilisées par les agriculteurs. Toutefois, monsieur le ministre, il ne faut pas sous-estimer les progrès importants qui ont déjà été réalisés par la profession en la matière et la motivation même des agriculteurs.

Cela étant, ces intrants sont nécessaires pour préserver la productivité de l'agriculture, à moins de faire le choix des OGM, mais c'est un autre débat ...

De même, je regrette que les crédits pour l'hydraulique soient aussi limités. Il ne peut y avoir d'agriculture sans eau. L'enveloppe allouée à l'hydraulique agricole est, depuis de nombreuses années, largement inférieure aux besoins. Par ailleurs, les aides qui sont accordées dans ce domaine entrent dans le cadre du programme de développement rural hexagonal et sont limitées aux retenues de substitution. Or, localement, des besoins existent pour l'adaptation au changement climatique et/ou pour le développement de nouvelles filières. C'est particulièrement vrai dans le Sud-Ouest.

En ce qui concerne l'assurance récolte, sujet qui me tient particulièrement à coeur, la hausse de 2 millions d'euros des crédits constitue un signal positif. Là encore, la bonne conjoncture pourrait reléguer cette question au second plan.

Néanmoins, si l'on doit s'orienter, comme le préconise dans son excellent rapport notre collègue Dominique Mortemousque, vers l'abandon du régime des calamités agricoles et vers une diffusion rapide de l'assurance récolte, de nombreuses questions restent en suspens. L'accompagnement du développement de l'assurance et l'octroi d'une enveloppe limitée posent, en effet, le problème de la capacité des assureurs à surmonter un événement de grande ampleur. Une réassurance demeure indispensable, de même qu'une meilleure couverture des productions les plus sensibles, même si ces dernières ne se sont pas regroupées en organisations de producteurs.

Sans volontarisme visant à augmenter l'assiette des primes de risque, il n'y aura pas de développement à long terme de l'assurance en France. À titre d'illustration, l'État espagnol a versé 260 millions d'euros au titre de l'assurance récolte en 2007.

La question de l'articulation du fonds des calamités avec l'assurance récolte mérite également d'être repensée dans la perspective du prochain décret, en 2008. Il faut veiller, en particulier, à ne pas exclure de ce fonds les cultures où le taux de pénétration de l'assurance récolte est très faible ; je pense, notamment, chez moi, aux cultures légumières et fruitières. Cela est d'autant plus important que les enveloppes des dispositifs AGRIDIFF et du fonds d'allègement des charges ont été drastiquement diminuées. Ces dispositifs sont pourtant essentiels.

Il en est de même du budget des fruits et légumes. La dotation à VINIFLHOR a baissé de près de 40% et devrait être en partie compensée par la vente du siège de l'ONIC, l'Office national interprofessionnel des céréales.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Je ne reviendrai pas sur les arguments qu'a développés M. le rapporteur spécial, auxquels j'adhère complètement.

Cette situation se traduit, en région, par une baisse importante pour la filière fruits et légumes en matière d'organisation économique, de recherche et de promotion.

Vous le savez, monsieur le ministre, les fruits et légumes ne bénéficient que très peu du financement communautaire, soit 3, 7% du financement européen agricole. Leurs prix à la production n'ont pas connu de hausses similaires à celles des céréales et du lait. Ces productions restent fragiles et ont besoin d'un soutien. Or, depuis cinq ans, les crédits ont presque été divisés par deux. Il ne reste que 10 millions d'euros pour la communication collective : c'est peu !

Je sais que, sur le plan national, votre ministère oeuvre pour la mise en place d'associations d'organisations de producteurs pour les productions importantes. Je me permets tout de même d'insister sur l'importance de l'échelon régional. C'est à ce niveau que de nombreuses initiatives peuvent être prises et c'est le seul où l'on retrouve les responsables agricoles, l'interprofession à l'échelon national étant largement contrôlée par les différents représentants du commerce.

J'aborderai rapidement la question des biocarburants.

Lors de l'examen de la première partie du projet de budget, la défiscalisation dont bénéficient les différentes filières de biocarburants a été diminuée. Je déplore la remise en cause partielle de ce dispositif, alors que les différentes filières sont en train de se structurer sur le plan industriel.

Il est absolument indispensable que la France soit présente sur ces filières en particulier et, plus généralement, mette en place une véritable expertise dans le secteur de la « chimie verte » pour faire face à la montée en puissance des États-Unis et du Brésil. II est primordial que nous nous investissions tous dans ce secteur, qui non seulement représente une solution de rechange, moins polluante et moins coûteuse, aux énergies fossiles que nous utilisons actuellement, mais offre également un avenir très prometteur à l'agriculture française.

Je me félicite également des avancées qui ont été faites en un an en ce qui concerne les huiles végétales pures. Le décret du 25 mars 2007 clarifie, en effet, les mesures auxquelles doivent se conformer les distributeurs et les utilisateurs d'huiles végétales pures, garantissant ainsi un cadre juridique à cette troisième filière de biocarburants.

Enfin, je reviendrai brièvement sur un aspect de la mission « Sécurité sanitaire », que je n'ai malheureusement pas pu rapporter. Les éleveurs français d'ovins et de bovins sont confrontés à une épidémie de fièvre catarrhale durable et d'ampleur encore inégalée. Or le projet de budget ne tient à l'évidence ni compte du développement ni de l'installation durable de la maladie de la langue bleue dans le paysage national.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Je termine, monsieur le président !

Il ne comporte pas les crédits indispensables, que l'on se place dans l'hypothèse où un vaccin serait disponible et diffusé dans tout ou partie du cheptel avant le début de la saison vectorielle ou dans celle, plus regrettable, où une reprise de la maladie aurait lieu faute d'une campagne de vaccination menée dans les temps.

Pour terminer, je tiens à saluer l'excellent travail réalisé par le rapporteur spécial, M. Joël Bourdin, et par les rapporteurs pour avis, MM. Gérard César, Jean-Marc Pastor et Gérard Delfau.

Je veux également souligner, monsieur le ministre, la qualité de votre action ainsi que votre engagement personnel sur des sujets qui nous passionnent. En outre, je salue votre initiative d'instaurer des assises de l'agriculture, qui permettront notamment de préparer la position française sur le « bilan de santé » de la PAC en 2008.

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

M. le président. Mes chers collègues, permettez-moi de saluer notre nouvelle collègue, Mme Catherine Dumas, qui remplace M. Philippe Goujon, et qui participe pour la première fois à l'une de nos séances.

Applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

C'est la soixantième sénatrice à siéger parmi nous, ce qui me donne l'occasion de souligner une nouvelle avancée vers plus d'égalité, pour ne pas dire vers la parité.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

Nous faisons mieux que l'Assemblée nationale !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Nous verrons ce que les échéances futures nous réserveront. En tout cas, je suis persuadé que nous continuerons à faire progresser la représentation des femmes au Parlement.

Ma chère collègue, nous vous souhaitons la bienvenue au Sénat et nous espérons que vous aurez beaucoup de satisfaction dans l'exercice de vos responsabilités.

Debut de section - PermalienPhoto de Yolande Boyer

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le cadre de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », mon intervention portera uniquement sur la pêche.

Ce débat intervient dans un contexte particulièrement difficile, c'est-à-dire sur fond de crise due à l'augmentation du coût du gazole.

Vous tentez, monsieur le ministre, après la visite du Président de la République au Guilvinec et les engagements qu'il a pris, de mettre en musique ce que le chef d'orchestre a proposé. Mais nous sommes dans un domaine très complexe, avec des limites imposées par l'Union européenne, et dans un monde où tout est aléatoire, d'où les crises et explosions sociales récurrentes et la fragilité de ce métier. Je m'explique.

Pour un marin pêcheur, rien n'est assuré, ni la météo, ni la ressource, ni le financement des bateaux, ni le prix du gazole, ni la vente du poisson, sans compter les difficultés de recrutement qu'il rencontre. Combien de bateaux restent à quai faute d'équipage ? Combien de chalutiers naviguent avec quatre hommes à bord au lieu de cinq « habituellement », sinon « réglementairement » ? À cela s'ajoutent les difficultés de formation et la dangerosité du métier que vous avez évoquées ce matin.

Le tableau que je brosse est bien noir, mais il correspond à une réalité, celle de l'activité de pêche dans notre pays. Elle mérite donc une politique volontariste de la part du Gouvernement.

Vous nous avez dit que le budget était stable à 60, 5 millions d'euros - 1 million d'euros de plus qu'en 2007 - et qu'il s'agissait d'un bon budget, puisque l'an passé il avait doublé. Certes ! Mais il faut le comparer à l'ensemble de la mission. Il faut aussi le comparer aux fonds européens attribués à la France, soit 63 millions d'euros en 2008. Il convient également d'analyser à quoi ont servi les fonds octroyés l'an passé. Quel est leur intérêt si l'essentiel sert à la casse des bateaux ?

Je constate parallèlement la baisse des sommes consacrées à la modernisation et à la restructuration de la flottille.

Les crédits alloués devaient servir à faire vivre le plan d'avenir pour la pêche présenté en juin 2006. Constitué de dix mesures, il fixait des objectifs et proposait de nouveaux outils pour adapter les filières des pêches maritimes aux contraintes, qui se multiplient ; il devait aussi leur permettre de se moderniser.

Aujourd'hui, peu d'actions sont en cours, en particulier sur la rentabilité des entreprises, qui est une urgence. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous éclairer sur ce point ?

Autre interrogation : le fonds européen pour la pêche, mis en place en 2006 - en remplacement de l'IFOP, l'instrument financier d'orientation de la pêche - pour la période 2007-2013, n'est toujours pas effectif. Or il est supposé soutenir les restructurations nécessaires et faciliter la mise en oeuvre de la nouvelle politique commune des pêches. Dans le contexte actuel, particulièrement sensible, nous sommes en droit de nous inquiéter.

Comment, dans un environnement très libéral, permettre à une filière de vivre de façon pérenne ? Car, il s'agit bien d'une filière, et il est essentiel de rappeler qu'un emploi en mer en induit près de quatre à terre ! Malgré une division par deux du nombre de bateaux de pêche en vingt ans, le volume capturé est resté stable grâce aux gains de productivité.

Rappelons aussi que la France importe 80 % de son poisson. Les 20% restants de ce marché en expansion servent à faire vivre une filière sur l'ensemble de notre littoral. Il faut maintenir un niveau d'activité dans les ports si l'on ne veut pas fragiliser les équipements et, par conséquent, l'existence de l'économie nationale de la pêche.

Je veux, d'ailleurs, saluer la responsabilité d'un département comme le mien, le Finistère, et de la région Bretagne, qui mènent une politique d'accompagnement résolument active. Il est à noter également que, lors de la crise récente, les collectivités locales et les chambres de commerce et d'industrie ont accepté des baisses significatives des redevances portuaires. Dans ce domaine comme dans d'autres, l'État ne doit pas se désengager sur les collectivités !

J'en viens aux actions indispensables qu'il convient de mettre en oeuvre pour garantir une pêche durable dans notre pays.

Tout d'abord, il faut maintenir et moderniser la flottille. Or on note, dans le projet de budget pour 2008, seulement 1, 3 million d'euros en crédits de paiement.

Ensuite, il convient de mener une politique de recherche et de développement permettant de « pêcher autrement ». Ce serait une garantie de préservation de la ressource, d'une part, et un gain important de dépense d'énergie, d'autre part.

À cet égard, je vous donnerai un exemple tout simple : pour la pêche au chalut, on compte en moyenne deux litres de gazole pour un kilo de poissons. On sait aussi qu'un chalutier naviguant à dix noeuds utilise cent litres de gazole et, à 10, 5 noeuds, cent cinquante litres. Cela illustre bien la nécessité de naviguer autrement, d'une prise de conscience et d'une formation pour pêcher différemment.

Des mesures simples et de bon sens s'imposent donc ; je pense, notamment, à l'installation d'économètres sur tous les bateaux et à des contraintes concernant les chaluts, mais je pourrais en ajouter d'autres. Toutefois, cela prendra du temps.

En attendant, vous avez créé un groupe de travail afin d'étudier la possibilité d'une éco-contribution, qui se répercuterait sur le prix du poisson à l'étal. On annonce une taxe de 1 % à 2 %. Mais jusqu'à quand le consommateur assumera-t-il une hausse récurrente dans le contexte difficile de pouvoir d'achat que nous connaissons ? Le poisson va-il devenir un produit de luxe ? Tout cela n'est acceptable ni pour la santé des Français ni pour le maintien de la filière.

En outre, quelles marges de manoeuvre l'Union européenne vous laisse-t-elle ? Quelle est la compatibilité du mécanisme proposé avec les règles communautaires ?

Des évolutions structurelles majeures pour sortir la pêche de cette situation sont indispensables.

Des techniques de pêche plus économes en énergie permettant d'améliorer la situation économique des entreprises de pêche sont indispensables. Car pêcher autrement impose non seulement un nouveau regard sur la ressource, mais aussi une valorisation de l'image de la pêche et du métier de pêcheur. Ce métier doit être attractif pour les jeunes afin de favoriser le renouvellement des équipages et des patrons de pêche.

La pêche est aussi un gisement d'emplois au service d'une filière clairement positionnée sur la qualité des poissons pêchés et sur la gestion durable de la ressource.

L'État doit affirmer sa volonté d'avoir une véritable politique portuaire, qui doit s'inscrire dans une authentique politique d'aménagement du territoire. On ne peut se contenter d'annonces ponctuelles, concédées durant la crise récente, alors que des mesures structurelles, gages de pérennisation de la filière, auraient dû être mises en place depuis quelques temps déjà.

Tels sont les éléments, monsieur le ministre, que je souhaitais vous soumettre sur ce sujet difficile.

Vous nous l'avez dit ce matin : vous croyez en l'avenir de la pêche et de l'aquaculture. Je m'en réjouis ! Cependant, même si le projet de budget que vous nous proposez affiche un certain nombre d'intentions louables, les retards pris dans la mise en oeuvre des mesures attendues nous conduisent à nous interroger sur votre volonté réelle de constituer une filière de la pêche française qui soit solide et durable.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Doublet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission que nous examinons aujourd'hui doivent répondre à un enjeu majeur, celui du défi alimentaire. C'est un défi pour la France, pour l'Europe, mais également pour le reste de la planète. En effet, la population mondiale va s'accroître dans les années à venir, augmentant par là même les besoins en productions agricoles.

Ce défi est une immense chance pour notre pays dont le savoir-faire est reconnu dans le monde entier. Il faut, ici, instaurer une démarche de développement durable.

Ce n'est qu'en favorisant la biodiversité, en préservant les ressources naturelles de notre pays, comme l'eau, et en valorisant les équilibres du paysage que l'on pourra répondre aux besoins de production et aux attentes de la société.

Le Grenelle de l'environnement s'est, d'ailleurs, largement fait l'écho de tous ces problèmes. Les débats ont accordé une place majeure à l'agriculture, l'une des priorités affichées étant la biodiversité.

Or, certaines mesures contenues dans le programme « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural » font l'objet de restriction budgétaires. Je veux parler ici des mesures agro-environnementales, les MAE. Destinées à favoriser la diversification des cultures dans l'assolement, elles visent à encourager la pratique de rotations plus longues et d'assolements plus diversifiés, avec pour objectif d'améliorer la qualité de l'eau et des sols.

Par ailleurs, la France et l'Europe sont déficitaires dans certaines cultures comme le pois protéagineux ou la luzerne.

À l'heure actuelle, les crédits de paiement ne permettront pas de financer les contrats en cours. Dès lors, qu'en sera-t-il, monsieur le ministre, des contrats arrivant à expiration ? Pour le département de la Charente-Maritime, plus de quatre-vingt-dix agriculteurs sont concernés.

Cet outil doit être doté de véritables moyens qui soient à la hauteur des ambitions annoncées par la France, et ce d'autant plus que nous sommes à l'aube du « bilan de santé » de la PAC. Nous devons donc être très vigilants sur le sujet.

Je veux également évoquer, dans le cadre de l'examen du programme « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et du développement rural », les programmes de maîtrise des pollutions d'origine agricole, les PMPOA.

Ce dispositif vise à limiter la pollution des eaux en accompagnant la mise aux normes des exploitations. Je me félicite des engagements qui sont tenus, mais force est de constater que les besoins restent importants. Certains agriculteurs s'inquiètent de ne pas pouvoir bénéficier des soutiens nécessaires à la réalisation de travaux. Il faut donc les rassurer.

La notion d'environnement, on le voit bien, sera de plus en plus présente dans notre vie de tous les jours. L'un des secteurs les plus concerné par cette notion est celui des transports.

La France s'est engagée, dans le cadre du protocole de Kyoto en 1997, à réduire ses gaz à effet de serre. C'est ce qui est prévu aux termes de la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006. Nous devons donc, à l'échelon national, développer les biocarburants et les agrocarburants de deuxième génération.

Le développement de cette filière passe obligatoirement par le maintien d'une fiscalité adaptée et par l'encouragement de la préférence nationale. Il faut également augmenter le nombre de pompes distribuant de l'éthanol.

Par ailleurs, cette politique doit d'appuyer sur une évaluation rationnelle des performances, tant sur le plan énergétique que sur le plan économique. Pouvez-vous à ce sujet, monsieur le ministre, nous en dire un peu plus sur le bilan environnemental que l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, doit présenter le 1er janvier 2008 ?

Il faut, en effet, rester attentif quant à l'utilisation des terres agricoles et à l'équilibre entre productions alimentaires et productions non alimentaires. Ainsi, le développement des agrocarburants ne doit pas provoquer de flambée des prix des céréales.

À l'heure actuelle, le marché alimentaire connaît une situation très tendue en raison des aléas climatiques à répétition et de l'augmentation de la demande des pays en voie de développements. Il ne faudrait pas que le développement sans contrôle de cette filière nous conduise à une catastrophe écologique majeure.

Les agrocarburants n'empêchent pas, aujourd'hui, les exploitants agricoles de subir de plein fouet la flambée des cours du pétrole et de ses dérivés. Les agriculteurs pourront-ils bénéficier d'un remboursement de la TIPP à hauteur de 5 centimes d'euros par litre comme en 2005 ? C'est, en effet, le seul moyen pour eux de préserver la compétitivité de leurs exploitations.

Je souhaite, à présent, mettre l'accent sur deux sujets qui me tiennent à coeur et qui touchent à l'élevage et à la viticulture.

Les éleveurs ovins doivent faire face à une crise sans précédent. La baisse de leurs revenus est flagrante et leurs marges de manoeuvre sont extrêmement réduites dans un secteur où la concurrence fait rage. C'est ainsi que la région Poitou-Charentes a perdu plus de 20 000 brebis en 2006 sur un cheptel de 600 000 têtes, et que le revenu des éleveurs a été divisé par deux en trois ans.

La capacité d'adaptation de la filière ne suffira pas à surmonter la crise, et c'est tout l'avenir de cette production qui est en péril. Une gestion plus saine des marchés et une amélioration de la trésorerie des éleveurs sont nécessaires.

La situation des éleveurs bovins n'est, aujourd'hui, guère plus enviable. On ne peut que constater une baisse des cours, une concurrence déloyale des viandes étrangères ainsi que des problèmes sur le plan de la politique pratiquée par la grande distribution.

Des solutions existent ; il faut favoriser le redressement de la consommation. Cela passe par un relèvement des cours, une baisse des prix de vente au détail et un soutien sans faille à la filière « viande française » en raison des efforts réalisés en termes de qualité et de traçabilité.

De plus, les actions menées en faveur de l'élevage et de la viande bovine française doivent être renforcées. Il faut que ces deux filières d'élevage sortent de la crise qu'elles traversent : il en va de la survie de nombre d'exploitations sur notre territoire.

Quant au prix du lait, il connaît actuellement une hausse qui devrait se poursuivre. Toutefois, les professionnels restent prudents et pensent qu'il faudrait anticiper une baisse dans quelques années. Ils souhaiteraient donc, si la conjoncture actuelle perdure, que les provisions faites par les agriculteurs pour les mauvaises années ne soient pas soumises à l'impôt.

J'en viens à la viticulture. Celle-ci connaît des difficultés et les perspectives d'avenir, à moyen terme, inquiètent la profession.

Le projet de réforme de l'Organisation commune des marchés, l'OCM, avec la libéralisation de l'étiquetage et celle des plantations, conduira nécessairement à une surproduction, à une chute des prix, à une perte de la valeur patrimoniale des terrains et à la remise en cause des efforts qualitatifs.

L'autorisation d'utiliser le cépage pour les vins de table serait catastrophique pour la production des vins de pays de la région Poitou-Charentes. Cette politique va totalement à l'encontre de la viticulture française et européenne.

Quant à la libéralisation des plantations, elle est particulièrement risquée dans un contexte économique très tendu, en raison de la surproduction mondiale de vins. L'arrachage définitif doit être limité et encadré afin d'éviter la déprise de certaines zones géographiques.

Il faut que le Gouvernement pèse de tout son poids dans les négociations pour que la mention « cépage » soit limitée aux vins à indication géographique.

Je parlerai, dans le cadre de l'examen du programme « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés », des prêts bonifiés.

Je me félicite que le Gouvernement ait maintenu ce mécanisme d'aide aux jeunes agriculteurs et je me réjouis de sa décision de dégager 20 millions d'euros supplémentaires. Cet outil reste, en effet, essentiel pour l'installation de nos jeunes.

Cependant, malgré son abondement, le volume des crédits ne va pas augmenter de manière significative. Or, compte tenu de l'annualité budgétaire, je me demande ce qui se passera pour les jeunes agriculteurs qui s'installeront au 1er janvier. Quelles solutions peut-on envisager dans ce cas précis, monsieur le ministre ?

Dans les missions interministérielles concernant l'agriculture, je dirai un mot de l'enseignement technique agricole.

Les différentes baisses de la dotation globale horaire et les plafonnements d'effectifs entraînent une dégradation de la situation de l'enseignement agricole public.

La mission d'insertion professionnelle de l'enseignement technique agricole est primordiale pour le développement des territoires ruraux et de l'agriculture. En effet, cette formation est indispensable pour les jeunes qui veulent s'installer et reprendre une exploitation.

Nous le savons, l'installation des jeunes pour assurer le renouvellement des générations est l'une de vos priorités. J'attirerai votre attention sur la conclusion des baux cessibles hors cadre familial, car peu de contrats ont été signés en raison des conditions exigées. Il faudrait améliorer les règles mises en place en 2006 pour que cet outil réponde mieux aux souhaits des exploitants.

De plus, toujours en ce qui concerne les baux, j'aimerais avoir votre avis, monsieur le ministre, sur la demande de la Fédération nationale de la propriété privée rurale, FNPPR, au sujet de la mise en place d'une nouvelle composition de l'indice de fermage.

Concernant le fonds de financement des prestations sociales agricoles, j'évoquerai le dossier des retraites. En effet, les petites retraites restent faibles au regard du minimum vieillesse. Il convient de réformer ce système de protection sociale et d'améliorer le montant des prestations vieillesse pour les agriculteurs, plus particulièrement pour les femmes et les veuves.

Quels sont vos projets, monsieur le ministre, pour le rendez-vous de 2008 ? Peut-on envisager que les retraites pour carrières complètes soient portées à 85 % du SMIC ?

Avant de conclure, je dirai un mot de la PAC.

Bon nombre d'agriculteurs de mon département s'inquiètent des perspectives d'évolution de la politique agricole commune. Il nous faut la redéfinir, afin de préserver notre indépendance alimentaire.

Sachant pouvoir compter sur nos agriculteurs pour relever les défis qui s'imposent à nous en ce début de xxie siècle, et ne doutant pas de la volonté du Gouvernement de tout mettre en oeuvre pour les y aider, je voterai en confiance les crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ».

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la première fois depuis longtemps, effectivement, on peut penser que l'agriculture et les agriculteurs en France vont mieux. Les hausses de prix des matières premières agricoles ont rendu le sourire à nombre d'entre eux.

Le renversement brutal de la conjoncture a même surpris les experts ainsi que les responsables politiques nationaux et européens.

Globalement, les prix ont augmenté de 15, 9 % par rapport à octobre 2006. Je citerai, à titre d'exemples, les céréales - plus 61 % -, les fruits et légumes - plus 6, 1 % -, le lait - plus 6 % -, les oeufs - plus 39 % -, les produits animaux - plus 5, 5 %.

Dans le même temps, le prix des gros bovins enregistre une baisse de 1, 5 %, tandis que celui du porc dégringole et que celui des pommes de terre diminue de 16 %.

Cependant, il ne faut pas se laisser emporter par cette euphorie ambiante, car elle peut cacher des lendemains qui déchantent. Le bon sens paysan est emprunt de beaucoup de perplexité. La peur du feu de paille s'exprime au détour de multiples réflexions que vous ne devez pas ignorer, monsieur le ministre.

L'extension des surfaces cultivées en Europe, avec la suppression des jachères, ou en Amérique du Sud, pourrait très bien retourner la conjoncture très rapidement.

Il faut donc rappeler que les prix agricoles sont toujours en déphasage excessif, en positif comme en négatif, par rapport à la réalité de l'évolution de la production. Un faible déficit ou un faible excédent conduit toujours à des hausses ou à des baisses de prix plus fortes que la réalité du marché. Cela signifie que les prix agricoles sont, par nature, très volatils. L'exemple de l'évolution du prix du porc à la baisse le prouve amplement à l'heure actuelle.

Cela doit nous appeler à la prudence dans l'appréciation de la situation. Les renversements de conjoncture restent toujours imprévisibles, parce qu'ils sont liés structurellement aux aléas climatiques ; les mauvaises récoltes de céréales ces temps dernier, en Australie, en apportent une nouvelle fois la preuve.

De plus, ces hausses ont aussi un caractère spéculatif. Les fonds d'investissement dans le domaine agricole sont passés de 10 milliards d'euros en 2001 à 150 milliards d'euros en 2007. On sait bien, cependant, que ces fonds pourraient très rapidement se désengager si la conjoncture devenait moins favorable.

Le deuxième élément à apprécier est, en contrepartie, pour les agriculteurs, la hausse des coûts des intrants, de l'énergie, du matériel agricole, des engrais azotés - phosphate, potasse.

Ainsi, l'ammonitrate est passé de 200 euros la tonne à 248 euros la tonne, sans parler du prix du gazole, des pesticides ou de celui des aliments destinés au bétail, qui est passé de 165 euros la tonne en 2006 à 240 euros la tonne en 2007.

Tout cela vient contrebalancer la hausse des prix de vente des produits agricoles.

Par ailleurs, de nombreux agriculteurs pensent que ces hausses de revenus récentes viennent à peine compenser les baisses des années précédentes. Ils ont le sentiment, pour le moment, d'éponger les pertes des années difficiles et de se reconstituer une trésorerie.

Cette fragilité est encore accrue par la succession des crises sanitaires qui touchent l'élevage : ESB, fièvre aphteuse, grippe aviaire, peste porcine, fièvre catarrhale ovine et bovine.

L'extension géographique inexorable de la fièvre catarrhale, partie des départements du Nord et des Ardennes, pour atteindre aujourd'hui le Massif central, le Limousin, l'Auvergne et les Pyrénées-Atlantiques, a des conséquences financières désastreuses pour bon nombre d'élevages qui sont, par ailleurs, excellemment tenus.

Aujourd'hui, plus de 30 000 cas ont été relevés dans l'Union européenne.

La mortalité, les avortements s'accroissent. On note également une baisse de la production de lait de 30 % à 40 %, une diminution de la fertilité et des problèmes de commercialisation. Je peux en témoigner dans ma propre région du Nord-Pas-de-Calais, en particulier dans l'Avesnois, où un certain nombre d'élevages connaissent des conditions financières extrêmement difficiles du fait de cette crise.

Nous devons donc, monsieur le ministre, assurer une bonne maîtrise des mesures sanitaires, avec la désinsectisation et par la restriction intelligente des mouvements d'animaux agricoles. L'économie agricole liée à l'élevage ne doit pas être complètement paralysée ; il faut permettre des dérogations qui facilitent l'abattage des bêtes dans les abattoirs de proximité.

Il convient également d'améliorer encore la trésorerie de ces exploitants en facilitant les allégements de charges, ce qui a déjà été fait en partie, l'indemnisation des mortalités et la prise en charge de la sérologie de contrôle.

Il faut aussi obtenir de Bruxelles, monsieur le ministre -- et c'est peut-être là l'enjeu principal -, la création d'un fonds d'intervention pour les crises sanitaires.

Par ailleurs, il convient d'intervenir afin que soit rapidement élaboré un vaccin qui soit disponible au printemps 2008. Il faut espérer que la providence nous apportera, cet hiver, une longue période de gel intense qui permettrait d'éliminer cette maladie. Mais en ces temps de réchauffement climatique annoncé, j'ai peur que ce ne soit qu'un voeu pieux !

En conclusion, j'estime que ce serait une erreur de diminuer l'effort de la collectivité nationale en faveur de l'agriculture en prenant prétexte de la hausse des prix agricoles. Il convient de profiter de cette période pour fortifier les relations entre agriculture et environnement, et pour trouver un équilibre plus judicieux qui préserve le revenu des agriculteurs tout en favorisant l'effort vers de meilleures pratiques culturales et en cassant la tendance, parfois mal maîtrisée, à une intensivité excessive qui se justifie encore moins qu'auparavant.

Il nous faut donc garder le cap de la régulation et de l'encadrement des marchés agricoles, national et européen, et conserver les outils de régulation. Leur suppression, déjà en cours, est lourde de menaces pour l'avenir de notre agriculture. Ainsi, je me demande, par exemple en ce qui concerne la gestion de la betterave sucrière, si l'on ne regrettera pas, dans les années qui viennent, les diminutions de quotas et les fermetures d'usines, autant d'outils indispensables à cette industrie sucrière.

Toutes les réflexions actuelles sur la suppression éventuelle des quotas laitiers s'inscrivent dans cette démarche des néolibéraux, qui veulent tout déréglementer. Ce n'est pas acceptable, cela conduirait à la création d'énormes usines à lait et à la quasi-disparition des petits et des moyens éleveurs.

Assurer l'alimentation de la population de notre pays est un objectif stratégique de toute la nation, qui garantit notre indépendance. Maîtriser le marché reste une nécessité absolue de notre politique agricole. Comment accepter qu'aujourd'hui nous importions 500 000 tonnes de viande quand on nous dit que, demain, nous en importerons peut-être 1, 2 million de tonnes ?

Ma dernière réflexion personnelle s'inscrit aussi dans la vision que l'on peut avoir de l'agriculture dans les dix ou vingt ans qui viennent. La chute continue et permanente du nombre des agriculteurs a atteint un seuil qui me paraît dangereux.

Ce mouvement séculaire de concentration des exploitations, qui voyait les hectares libérés par des exploitants partis en retraite être repris par de jeunes exploitants qui y trouvaient un moyen de rentabiliser un matériel agricole de plus en plus performant mais aussi de plus en plus coûteux, a atteint, me semble-t-il, ses limites. Aujourd'hui, c'est l'existence même de l'agriculture qui est en péril.

La diminution du nombre des éleveurs fait que la France n'arrive même pas, actuellement, à tenir le quota laitier qui lui est annuellement attribué par l'Union européenne. Cela doit nous interpeller. La collecte du lait a affiché un repli de 1, 9 % par rapport à la même période de l'année dernière, et le déficit est estimé à 600 000 tonnes.

Je crois donc qu'il nous faut mieux prendre en compte l'impact des évolutions socioculturelles dans le monde agricole, et aider davantage les agriculteurs qui s'installent.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

Je conclus, monsieur le président.

À travers ce budget, les aides à l'installation, en particulier, restent très largement insuffisantes et inefficaces. Il faut également assurer un effort plus important en matière d'enseignement agricole.

Pour ces raisons, monsieur le ministre, je ne pourrai voter votre budget, même si je partage certaines de vos ambitions.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Barraux

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, je suis l'un des représentants d'un territoire d'élevage, l'Allier, qui s'honore d'être le deuxième département français en troupeaux allaitants...

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Barraux

... et d'avoir le septième troupeau ovin. Je voudrais donc, monsieur le ministre, vous entretenir des problèmes d'épizootie à répétition, qui nous rendent la vie bien difficile.

Au début de l'été, la fièvre catarrhale était à nos frontières et voilà qu'elle a déjà envahi plus de cinquante départements.

Bien que cette maladie n'affecte que les ruminants et n'inspire donc, normalement, aucune inquiétude pour les consommateurs et pour l'ensemble de la population, elle reste néanmoins extrêmement préoccupante s'agissant des conséquences qui affectent l'équilibre économique de la filière animale.

Ces conséquences sont dramatiques parce qu'un très grand nombre de broutards sont aujourd'hui bloqués. Certes, l'interdiction d'exporter a été levée, mais il y a tellement de marchandises sur le marché que les prix se sont effondrés. On estime qu'en France 100 000 broutards attendent de partir pour l'Italie, dont 40 000 dans le seul département de l'Allier. Vous voyez donc la situation dans laquelle nous nous trouvons.

Cette maladie contagieuse touche de plein fouet aussi bien les ovins que les bovins. Des mesures de protection sanitaire ont été adoptées, mais, aujourd'hui, dans l'attente de l'élaboration d'un vaccin, qui sera peut-être bientôt disponible, nous sommes dans une situation extrêmement difficile.

Les risques sanitaires sont, bien sûr, accentués par l'augmentation des échanges à l'échelle de la planète puisque, aujourd'hui, tout le monde va et vient partout. Après l'encéphalopathie spongiforme bovine, l'ESB, la grippe aviaire, j'en passe et des meilleures, c'est maintenant la fièvre catarrhale !

Les éleveurs, les agriculteurs se posent donc beaucoup de questions sur l'avenir de leurs métiers. Après une période d'incertitude, c'est maintenant l'angoisse qui prédomine.

Il est, par conséquent, de plus en plus nécessaire de soutenir notre filière d'élevage, d'autant qu'aujourd'hui elle subit la folle augmentation des matières premières servant pour l'alimentation animale. Cet enchérissement des coûts est une véritable menace pour la pérennité des élevages, particulièrement de porcs et de volailles, car les éleveurs ne peuvent pas, hélas ! le répercuter dans leurs prix de vente.

Avouez, monsieur le ministre, que, pour être éleveur aujourd'hui, il faut avoir le caractère mieux fait que la figure !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Barraux

Par moment, nous nous sentons tous un peu responsables. On se regarde dans la glace en se disant qu'on a fait une « politique de gribouille » !

Il y avait trop de lait, à une époque ; on avait peur d'être emporté par le fleuve blanc qui coulait de partout, c'était le grand drame ! Alors, on a « cabossé » les vaches, en oubliant seulement que, pour se reconvertir, il fallait un certain temps et que nos éleveurs n'avaient pas de baguette magique ; que je sache, Cendrillon, elle, s'était spécialisée dans la production de citrouilles !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Barraux

Donc, on se retourne, c'est fini, il n'y a plus de vaches, plus de lait et, un de ces quatre matins, on aura, j'en suis sûr, des cartes de lait !

Les céréales, c'est pareil, il y en a trop ! Il faut vite arrêter d'en produire ! En plus, cela pollue, il faut répandre des insecticides, c'est dramatique, mettons vite en place des jachères ! Ainsi, on va pouvoir faire un pied de nez à tous ces marchands de pétrole qui nous agacent et enfin « rouler bio », grâce aux carburants produits à partir des céréales. L'ennui, c'est qu'il n'y a plus de blé ! Son prix a doublé ! Mais on a oublié, dans nos petits calculs, qu'un milliard de gars crevaient de faim et que, OGM ou pas, en Afrique, ils seraient quand même bien contents de se remplir le ventre !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Barraux

C'était une petite parenthèse, en passant...

Je ne vous parle pas des ovins, parce que nos éleveurs, en plus de subir la fameuse fièvre catarrhale, avec toutes les conséquences qui en découlent en termes de mortalité - les vétérinaires présents dans cette salle le savent mieux que moi - doivent endurer la concurrence des Australiens, qui est épouvantable, puisque le gigot n'est rien d'autre pour eux qu'un sous-produit de leur production de laine et qu'ils veulent s'en débarrasser à n'importe quel prix.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs de l'Ump

Eh oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Barraux

Nous comptons donc beaucoup sur vous, monsieur le ministre, et sur la présidence française de l'Union européenne, pour qu'ait lieu, enfin, un nouveau débat sur l'avenir de toutes ces productions et sur la meilleure façon de soutenir les éleveurs.

Pour ce qui concerne la situation des anciens agriculteurs, je tiens à exprimer toute ma reconnaissance, au nom de mes vieux copains anciens paysans, à M. Jean-Pierre Raffarin.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Barraux

En effet, tous ses prédécesseurs promettaient de revaloriser un peu les retraites, mais jamais un seul n'avait inscrit au budget les crédits qui auraient permis d'améliorer la situation de ces pauvres gars qui touchaient quatre sous.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Barraux

Je vous remercie, en leur nom à tous, de l'avoir fait, monsieur Raffarin !

Il me reste aussi à remercier M. le ministre, qui a prévu d'inscrire 5 millions d'euros pour l'installation des jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Barraux

M. Bernard Barraux. C'est une question à laquelle il a raison de penser. Cinq millions d'euros en plus, cela nous fait immensément plaisir. Il y a dans mon propos un peu de vertu, mais aussi de l'intérêt, car s'il n'y a plus de jeunes pour travailler et payer les cotisations, qui financera nos retraites ?

Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un grand nombre de mes collègues vous ayant déjà fait part de leurs remarques, je me bornerai à analyser les financements annoncés pour certaines actions du programme 154 et à vous interroger sur quelques points d'intérêt plus local.

Contrairement à tous les discours actuels - dont ceux qui sont tenus par le Gouvernement et le Président de la République - sur la nécessité de renforcer l'attractivité des territoires ruraux par le maintien de la population, notamment agricole, par le développement de l'emploi et la diversité des activités économiques, des crédits en baisse remettent en cause les politiques d'accompagnement du développement de ces territoires.

Dotée d'environ 70 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 80 millions d'euros en crédits de paiement, la ligne budgétaire de l'action 1 : « Soutien aux territoires et aux acteurs ruraux » est en diminution, respectivement de 16 % et de plus de 7 %.

Certes, cette diminution s'explique, en partie, par le transfert des crédits de personnel à un autre programme, mais elle n'en esquisse pas moins une tendance inquiétante, tant sont importants et prioritaires les besoins de financement du développement rural, et ce au moment même où les contrats de projets État-régions mettent en évidence la baisse drastique du volet territorial et inquiètent fortement tous les acteurs locaux.

L'avenir des pôles d'excellence ruraux nous préoccupe également. Ils ne concernent votre ministère qu'à hauteur de 34 millions d'euros sur les 235 millions annoncés. Ce chiffre global n'est certes pas négligeable en valeur absolue mais, rapporté aux 379 pôles labellisés, il demeure limité et pourrait, si l'on n'y prend garde, favoriser un « saupoudrage » des crédits dont l'effet de levier sur le développement local reste à démontrer, d'autant que les critères d'intervention sont complexes et restrictifs. Ne sont, en effet, le plus souvent subventionnés que les investissements de nature matérielle, là où les investissements d'ingénierie ou d'animation seraient tout aussi nécessaires, car la mise en concurrence des territoires peut parfois être un facteur déclenchant de projets pour obtenir des subventions. Quid de leur pérennité ? Quid également des notions de solidarité et de péréquation, qui ont toujours garanti un aménagement réussi et équilibré du territoire ?

Pour en revenir à des questions plus spécifiquement agricoles, mais relevant toujours de la même préoccupation de garder nos territoires ruraux vivants et attractifs, le premier impératif est bien de conserver dans nos campagnes un maximum d'exploitations viables et d'actifs agricoles. Malheureusement, là aussi, les crédits alloués à l'installation et au maintien des nouveaux exploitants sont en baisse, de 2, 5 millions d'euros en crédits de paiement et de 100 000 euros en autorisations d'engagement.

Comment expliquer une telle décision, alors que le nombre de départs ne cessera d'augmenter, vu l'âge moyen des exploitants, que le nombre d'installations recommence à croître - et c'est heureux - dans certaines régions et, surtout, que le nombre de jeunes cherchant à s'installer, dans certains départements, est supérieur à celui des cédants ?

J'avais pourtant bien écouté le discours de M. le Président de la République, en septembre, à Rennes. Il avait déclaré que la France avait besoin de jeunes agriculteurs pour assurer l'avenir de son agriculture. Malheureusement, je ne vois pas, dans ce budget, la concrétisation de ses propos.

Quant à ce que vous nous avez dit vous-même de vos préoccupations et de vos orientations, monsieur le ministre, je dois reconnaître que je ne suis pas loin d'en partager la plus grande part.

Mais, si nous pouvons nous rejoindre sur les objectifs, je crains que ce ne soit une autre histoire concernant les moyens ! Ils sont insuffisants au regard de ce que nécessite, en termes de courage et de détermination, la volonté de s'installer en tant qu'agriculteur, malgré une image du métier encore trop souvent dévalorisée, malgré un travail réputé long et pénible, malgré des perspectives de revenus plus qu'incertaines et malgré des lourdeurs administratives, des contrôles et des contraintes qui ne cessent d'augmenter.

Alors, comment favoriser au mieux le plus grand nombre d'installations et de reprises d'exploitations rentables, afin que ces exploitations, au lieu d'être surdimensionnées et financiarisées à outrance, devenant ainsi intransmissibles, continuent à être dynamiques et productives mais diversifiées, sources d'emplois et respectueuses de l'environnement, c'est-à-dire - comme vous l'avez dit vous-même, monsieur le ministre - durables ?

La réponse dépasse sûrement le seul aspect budgétaire. Cependant, des crédits importants sont toujours nécessaires pour permettre à un maximum de candidats à l'installation de trouver des exploitations, transmissibles et viables je le répète, et éviter que pratiquement 80 % des terres des cédants aillent à l'agrandissement, comme dans ma région.

Cette année déjà, de nombreux jeunes agriculteurs ont rencontré de sérieuses difficultés pour obtenir des prêts bonifiés et, même si vous avez pris en compte la hausse des taux d'intérêts, on s'accorde partout à dire - même au sein du le syndicat majoritaire - que l'enveloppe prévue pour 2008 sera sûrement insuffisante pour satisfaire tous les dossiers déposés.

Le problème me semble identique pour les prêts bonifiés aux coopératives d'utilisation en commun de matériel agricole, les CUMA, car les compléments à l'enveloppe pour 2007 n'ont pas été suffisants, dans mon département, par exemple.

Face aux demandes de nos collègues députés, vous vous êtes engagé, monsieur le ministre, à amputer de 2 millions d'euros le programme « Forêt », de un million d'euros le programme 215 et à redéployer 2 millions d'euros d'autorisations d'engagement au sein du programme 154. Ces mouvements prouvent, premièrement, que cette ligne budgétaire posait un véritable problème et, deuxièmement, que ce budget global souffre d'une faiblesse évidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Se pose également, monsieur le ministre, la question cruciale de l'annualité budgétaire : ne serait-il pas possible d'assouplir le principe d'antériorité des autorisations de financement données par les directions départementales de l'agriculture et de la forêt, les DDAF, car tout retard dans les démarches risque d'entraîner des situations de blocage et de report que vivent très mal les nouveaux installés ?

Autre point important : les crédits ouverts au titre de la dotation aux jeunes agriculteurs, la DJA, restent identiques à ceux de 2007. Malgré le chiffre stable, pour la troisième année consécutive, des installations aidées, ce montant sera-t-il suffisant ?

Enfin, en ce qui concerne l'expérimentation de la simplification du parcours d'acquisition des capacités professionnelles, auquel mon département, le Morbihan, participe depuis le mois de juin 2007, mais dont la mise en oeuvre n'est effective que depuis septembre, il paraît pour le moins étonnant que le cadrage du futur dispositif ait déjà été annoncé au dernier CNI, alors que l'expérimentation ne fait que commencer. Des propositions concrètes seraient-elles déjà remontées du terrain ? Sinon, un bilan et des débats sont-ils prévus, ou bien les décisions sont-elles prises avant même d'engager l'expérimentation ?

Je ne peux terminer mon intervention, monsieur le ministre, sans vous interroger sur deux sujets qui fâchent : la découverte, en Bretagne, d'un champ de maïs génétiquement modifié, interdit en France et en Europe, le BT 11, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

... et le problème de l'indemnisation des éleveurs victimes de la dioxine.

Dans ces deux cas, monsieur le ministre, si l'on applique les principes du contrevenant responsable et du pollueur-payeur, les systèmes d'assurances privées, que vous prônez par ailleurs pour couvrir les aléas climatiques en agriculture, permettraient sûrement d'éviter à l'avenir des dépenses supplémentaires pour l'État. Encore faut-il pouvoir - et vouloir - réellement trouver les véritables responsables !

Je terminerai en vous remerciant, monsieur le ministre, de la rapidité de vos réponses et de la qualité des informations constantes et complètes dont vous-même et vos services nous rendez destinataires.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Mme Odette Herviaux. Mais cela ne suffira pas à nous faire voter votre budget, décidément trop restreint !

Exclamations sur les travées de l'UMP. - Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits du ministère de l'agriculture traduisent la volonté du Gouvernement de maîtriser la dépense publique et de réduire les déficits.

Vous avez dû faire des choix difficiles, monsieur le ministre, nous en sommes bien conscients. Vos priorités vont à certains dispositifs comme l'enseignement et la recherche, la gestion des crises, la sécurité alimentaire ou les actions qui contribuent au développement d'une agriculture durable, choix pertinents dans le contexte du Grenelle de l'environnement.

Certes, la situation budgétaire est difficile et nous apprécions d'autant plus l'effort que vous avez consenti devant l'Assemblée nationale en accordant 5 millions d'euros supplémentaires pour l'installation des jeunes agriculteurs, le renouvellement des générations étant tout à fait prioritaire.

Il faut dire que le contexte est particulièrement nouveau, cette année, pour le monde agricole : aléas climatiques très importants, politique volontariste de développement des biocarburants, aux États-Unis entre autres, évolution de la demande et des habitudes alimentaires dans certains pays de la planète.

Le cumul de ces facteurs a fait flamber le cours des matières premières agricoles et, pour la première fois depuis vingt ans, les prix cessent de baisser. Nous assistons, en effet, à un renversement complet de tendance avec une hausse spectaculaire des prix des céréales ; je crois, à cet égard, que la suppression des jachères est une bonne chose.

Cependant, la situation est loin d'être la même pour toutes les productions. En tant que président du groupe d'études de l'élevage du Sénat, je ne peux qu'être sensible au fait que les exploitations d'élevage bovin, porcin, ovin et de volailles souffrent aujourd'hui de la hausse des prix des aliments du bétail, qui profite à certains agriculteurs mais en pénalise durement d'autres.

L'évolution désordonnée des prix des céréales crée de grandes difficultés pour ces éleveurs, mais aussi pour les producteurs laitiers, qui sont pénalisés également par la vente de leurs petits veaux. Ils subissent une baisse des prix de plus de moitié, due à la pression des engraisseurs qui ont vu le prix de la poudre de lait augmenter de plus de 70 %. Les producteurs de fromages, eux, n'ont pas encore perçu la hausse du prix du lait.

Tout cela contribue à des disparités croissantes de revenus entre agriculteurs. J'ajouterai - dans la prolongation du discours du Président de la République à Rennes, en septembre dernier - que nous sommes particulièrement attentifs à la réforme de la loi Galland, préparée par Luc Chatel, et au cadre spécifique réservé aux produits agricoles, afin que les agriculteurs bénéficient d'une juste rémunération.

Les revenus de ces éleveurs vont subir de très fortes baisses occasionnées par la hausse du coût de l'alimentation complémentaire - non produite dans les zones de plateaux et de montagne, et qu'il faut acheter -, celle des prix de l'énergie et le prix de vente catastrophique des veaux.

Monsieur le ministre, je veux attirer votre attention sur ce sujet auquel, j'en suis sûr, vous devez être déjà sensibilisé par les éleveurs de votre département et de votre région. Il est indispensable que le montant de l'indemnité compensatrice de handicaps naturels, l'ICHN, soit relevée dans les meilleurs délais.

Vous avez fait un effort afin de résorber les dossiers en attente - plus de 8 000 - pour la modernisation des bâtiments d'élevage et nous apprécions les 29 millions d'euros supplémentaires consentis par l'État, ainsi que le déblocage des crédits communautaires. Il fallait répondre à l'engorgement actuel, mais il est aussi impératif d'allouer les crédits de paiement nécessaires au programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole, le PMPOA, répondant ainsi aux objectifs environnementaux des élevages.

Je veux évoquer aussi l'inquiétude des éleveurs touchés par les crises sanitaires qui s'ajoutent aux crises structurelles ou conjoncturelles : vache folle, grippe aviaire, fièvre aphteuse et, maintenant, fièvre catarrhale ovine. Ces crises se multiplient, entraînant de graves conséquences sur les revenus et les courants économiques : produits vétérinaires à acheter, analyses à effectuer, etc.

Le développement de la fièvre catarrhale touche aussi, vous le savez, la filière bovine, qui a connu de grosses difficultés de commercialisation des animaux. C'est notamment le cas pour les broutards français. S'ajoutent des pertes financières, résultant des baisses de production de lait et de viande dues aux avortements et à l'infertilité, qui sont encore difficilement évaluables et ne seront pas prises en charge.

Je sais, monsieur le ministre, que vous avez tout mis en oeuvre afin qu'un vaccin soit disponible l'an prochain. Mais les crédits que vous prévoyez pour 2008 seront-ils suffisants pour faire face aux frais des campagnes de vaccination, d'autant plus que le développement de cette maladie risque de s'étendre à tout notre pays et de conduire à indemniser des éleveurs en grande difficulté ?

C'est sans conteste dans la filière ovine que le problème est le plus grave, car le développement de la FCO fait peser sur elle une menace supplémentaire alors que sa situation structurelle est déjà très préoccupante. Chargé en ce moment même, avec mon collègue des Hautes-Pyrénées, François Fortassin, d'une mission sur l'élevage ovin, j'ai pu me rendre compte, au cours de nos déplacements sur les territoires concernés, de la grande détresse de ces éleveurs - principalement, dans les massifs - qui se sentent abandonnés face à leurs problèmes et dont les revenus sont les plus faibles du secteur agricole.

Les cheptels ovins diminuent rapidement, puisque nous sommes passés de 12, 8 millions de têtes en 1990 à 8, 4 millions aujourd'hui. De ce fait, nous ne couvrons que 45 % des besoins de notre marché national. Notre collègue Dominique Mortemousque m'a demandé de vous signaler qu'il ne reste plus que 54 000 brebis en Dordogne, alors qu'on en comptait encore 100 000 il y a dix ans. La filière, avec son indication géographique protégée « agneau du Périgord », est en réel péril. Ce n'est qu'un exemple parmi d'autres, mais la situation est plus dramatique encore en montagne où il n'existe qu'un palliatif : la friche.

Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes très conscient de ce problème, puisque, dans un contexte difficile, vous avez arrêté des mesures d'urgence : prise en charge des intérêts d'emprunt pour les éleveurs les plus vulnérables, report sur la prise en charge des cotisations sociales et aide de minimis complémentaire.

Mais, pour survivre, la profession a réellement besoin de mesures structurelles. Mon collègue François Fortassin et moi-même nous emploierons à vous présenter, dans quelques semaines, des propositions concrètes. Au titre de ces urgences, il convient de renforcer très vite ces productions grâce à une augmentation très significative des aides de la PAC, si nous ne voulons pas que se poursuive l'hémorragie des troupeaux ovins dans nos montagnes et dans les zones difficiles.

Par ailleurs, la présence de prédateurs conduit les éleveurs à une véritable révolte. C'est pourquoi j'ai proposé, avec quinze de mes collègues, un amendement visant à amputer de 3 millions d'euros les crédits destinés au maintien ou à la réintroduction des prédateurs. J'aurais souhaité, monsieur le ministre, que cette somme puisse être réaffectée au soutien au pastoralisme et à la filière ovine, à laquelle il est important d'adresser un signal.

Même s'il est très peu développé dans mon département, je tiens à mettre en garde contre la disparition de l'élevage ovin, qui aurait des conséquences bien plus graves pour l'environnement et serait bien pire que « l'absence de présence » du loup ou de l'ours. Il faut choisir : « Prédateurs et pastoralisme : priorité à l'homme », comme l'écrivait Christian Estrosi dans son rapport rendu en mai 2003, au nom de la commission d'enquête constituée par l'Assemblée nationale.

Il convient, très vite, de lutter contre la disparition de la production ovine - respectueuse de l'environnement, soulignons-le -, qui contribue tant à structurer nos territoires agricoles et à entretenir ceux de montagne.

Vous déclariez il y a peu, monsieur le ministre, à propos des pistes d'aménagement de la PAC que la Commission européenne vient de présenter, que vous souhaitiez que le redéploiement des aides ne se fasse pas uniquement en faveur des questions environnementales, mais s'effectue au profit d'une activité de production dynamique dans les territoires, plus encore aujourd'hui qu'hier, compte tenu des besoins des marchés mondiaux. Vous citiez, parmi les affectations possibles, la production laitière en montagne, le soutien à l'élevage, ovin notamment, et l'agriculture biologique.

Bien que j'approuve tout à fait vos orientations, je tiens néanmoins à vous alerter sur les dangers du découplage que souhaitent certains pays. J'aimerais avoir votre sentiment sur ce sujet. Prenons garde de primer sans être obligés de produire, surtout maintenant que nos marchés sont porteurs ! C'est ce qu'attendent nos filières agroalimentaires créatrices d'emplois dans nos territoires ruraux.

Pour l'heure, monsieur le ministre, je soutiens votre budget. Mais permettez-moi de vous dire, comme d'autres collègues ici présents, que les agriculteurs retraités attendent avec impatience la revalorisation de leurs retraites, qui doit être une priorité dans les prochains budgets.

En outre, soyons vigilants, car sans une hausse de leurs revenus, nous verrons se reconvertir bon nombre d'éleveurs vers les grandes cultures, moins exigeantes en termes de présence, et ce dans toutes les régions propices.

Monsieur le ministre, votre expérience européenne nous réjouit dans la perspective du grand rendez-vous du second semestre de 2008. Vous y jouerez un rôle très important. Soyez assuré de notre collaboration. Vous serez une chance pour notre pays et, comme vous l'avez dit ce matin, pour « le grand retour de l'agriculture ».

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je supplée en cet instant mon collègue et ami Jacques Muller, sénateur du Haut-Rhin, qui, cloué au lit par une très forte fièvre, ne peut malheureusement pas être parmi nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial. Une fièvre catarrhale !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Le Grenelle de l'environnement a permis de dresser un constat quasi consensuel sur les difficultés engendrées par une agriculture productiviste, dopée depuis de trop longues années à coups de crédits publics, et de tracer un axe de travail dont je tiens à souligner ici la pertinence : s'engager résolument vers une agriculture HVE, à haute valeur environnementale.

Dans cette perspective, ses conclusions préconisant la réduction drastique de l'emploi des pesticides et le développement de l'agriculture biologique constituent d'excellents objectifs intermédiaires pour la nouvelle politique agricole française. Nos choix budgétaires ne peuvent pas ne pas intégrer cette rupture attendue par nos concitoyens.

En matière de pesticides, le temps est venu de mettre en place une fiscalité réellement incitative, d'une part, pour dissuader l'emploi de produits globalement indésirables pour l'environnement et dangereux pour la santé humaine, et plus particulièrement pour leurs utilisateurs, d'autre part, pour donner aux agences de l'eau les moyens nécessaires, aujourd'hui totalement insuffisants, pour inciter et soutenir la reconversion à l'agriculture biologique dans les zones sensibles de captages.

Je propose, par conséquent, une révision en profondeur de la « pollutaxe » actuelle sur les pesticides. Il faut qu'elle devienne effectivement dissuasive, de manière à s'inscrire dans la logique du « pollueur-payeur », qui est l'un des concepts économiques de base du développement soutenable. Elle est le seul moyen crédible, non réglementaire, de faire évoluer en profondeur les pratiques agricoles dans le sens d'une forte réduction de l'emploi des pesticides, à l'instar de ce que l'on peut déjà observer, par exemple, au Danemark.

En matière de développement de l'agriculture biologique, les intentions affichées dans le plan d'action ministériel vont dans le bon sens, mais je reste perplexe face au diagnostic et à la faiblesse des moyens qui seront mis en oeuvre.

S'il est louable, pour la santé de nos enfants, d'afficher un premier objectif de 20 % de repas « bio » dans les cantines publiques, cela ne répond pas aux enjeux présents : notre pays est de plus en plus déficitaire en produits biologiques, car l'offre nationale est de moins en moins capable de répondre à une demande croissante pour ce type de produits.

Par conséquent, compte tenu de la faiblesse des marges de manoeuvre de l'action budgétaire, qui est due en bonne partie aux mauvais choix opérés cet été en faveur des plus riches - 8 milliards d'euros cette année, 15 milliards d'euros l'an prochain -, notre priorité doit aller à une politique ambitieuse de l'offre de produits.

Il nous faut soutenir efficacement le développement de la production biologique pour marquer des points sur plusieurs tableaux : pour la santé des utilisateurs de pesticides, dont les cocktails de molécules sont aujourd'hui considérés comme dangereux pour la santé humaine, même à faible dose ; pour la santé des consommateurs, s'agissant surtout des produits frais, plus particulièrement des fruits et légumes, sur lesquels nous enregistrons les chiffres les plus inquiétants en matière de résidus de pesticides ; pour l'équilibre de l'environnement, concernant la qualité des eaux et de l'air, la biodiversité et, notamment, la protection des abeilles pollinisatrices ; pour la diffusion de techniques, de savoir-faire et d'approches en termes de systèmes de production agricoles durables, qui ne concernent pas uniquement le développement de l'agriculture biologique, mais qui seront indispensables pour passer d'une agriculture productiviste, aujourd'hui dominante, à une agriculture HVE telle que le Grenelle de l'environnement l'a conceptualisée, mais qui n'est pas forcément biologique stricto sensu ; enfin, pour la diminution de notre déficit commercial en produits biologiques.

S'agissant des filières, alors que le Conseil général de l'agriculture, de l'alimentation et des espaces ruraux, le CGAAER, recommandait, dans son rapport publié en août dernier, « le soutien spécifique à l'aval de la filière » biologique en « s'inspirant de l'expérience allemande et du rapport de la FAO », je suis au regret de devoir relever la timidité des dispositions proposées.

Une partie - la proportion n'est pas clairement définie -des 387 millions d'euros inscrits au titre de « l'adaptation des filières à l'évolution des marchés » doit servir à cet effet. Mais l'indicateur de performance utilisé laisse perplexe quant à l'ambition du Gouvernement : faire passer la part des superficies cultivées en agriculture biologique de 2, 45 % à 2, 55 % de la surface agricole utile. Cela en dit long sur l'ambition affichée par le Gouvernement de développer l'agriculture biologique : une augmentation grandiose de 0, 1 % en un an, soit 1 % en dix ans et 10 % en cent ans !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Concernant la production, des initiatives sont prises, mais, comme pour la filière, elles sont très loin de répondre aux enjeux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Le marché existe, mon cher collègue. En revanche, on ne peut pas en dire autant de l'offre !

En termes de soutien financier, le crédit d'impôt était une initiative intéressante, mais son niveau actuel est jugé par tous notoirement insuffisant pour inciter au passage à l'agriculture biologique, qui correspond à un bouleversement en profondeur du système de production agricole. Nos voisins européens font deux à trois fois mieux que nous dans ce domaine !

En réalité, le développement de la production biologique exige que l'on se donne les moyens de financer enfin correctement, non seulement la reconversion, mais encore le maintien. Les outils existent déjà - il s'agit des mesures agro-environnementales -, mais les moyens mis en jeu pour 2008 sont symboliques. En termes de crédits publics nationaux, les 71 millions d'euros dédiés globalement aux MAE pèsent moins de 7 % du milliard d'euros consacré par notre pays à « la gestion durable de l'agriculture ». C'est franchement dérisoire par rapport au noble objectif affiché pour prétendre développer la production biologique !

Compte tenu de la faiblesse des marges de manoeuvre déjà évoquée, il existait pourtant un véritable levier pour doper les concours publics destinés à développer l'agriculture biologique et à haute valeur environnementale, à budget constant : le redéploiement des crédits européens déversés chaque année sur l'agriculture.

En effet, ce sont quelque 10 milliards d'euros en provenance de l'Union européenne qui viennent chaque année irriguer directement l'agriculture française, des crédits que la France a décidé, sous la pression du lobby céréalier, de distribuer de la pire manière qui soit.

Plus de 52 % des aides aux marchés et aux revenus agricoles sont des aides découplées, liées aux droits à paiement unique, les DPU. Je tiens à préciser quelle en est la teneur exacte, afin que chacun puisse se faire une opinion précise. Ces aides découplées à la française sont des droits à primes liés à la terre, calculés sur la base des anciennes primes dites « compensatoires » touchées par les exploitants agricoles entre 2000 et 2002.

À titre d'exemple, la prime MAE à l'herbe s'élevait à l'époque à quelque 60 euros l'hectare, tandis que la prime dite « compensatoire » pour le maïs irrigué s'élevait à 490 euros l'hectare.

« Compensatoire », ai-je dit ? En effet, la réforme de la PAC, réalisée en 1993 sous la pression de l'Organisation mondiale du commerce et des contraintes internes à l'Union européenne, s'était accompagnée d'une baisse importante des prix garantis, dont le dispositif de soutien était particulièrement coûteux.

Le budget agricole européen s'en trouva réparti selon des principes nouveaux : beaucoup moins de soutien aux marchés et aux prix, ainsi que deux innovations, à savoir les MAE, qui auront toujours la portion congrue, et les fameuses primes « compensatoires », qui permettront de maintenir le système inique en vigueur depuis des décennies.

L'argent public continuait ainsi de financer prioritairement les exploitations les plus grandes et les plus productivistes : prime à l'hectare, prime au capital, et donc prime à l'agrandissement des exploitations et à la destruction du monde paysan au profit d'agromanagers amateurs de primes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je tiens à souligner ce paradoxe : les pouvoirs publics subventionnent le capital au détriment du travail, tout en déplorant officiellement la désertification de nos campagnes !

Avec la réforme de 2006, ces DPU à la française apparaissent comme une véritable rente de situation, dont le caractère franchement indécent saute encore plus aux yeux aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je conclus, monsieur le président.

Vous comprendrez, monsieur le ministre, que, pour toutes ces raisons, les sénatrices et sénateurs Verts ne peuvent voter les crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » que vous nous présentez.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Le Grand

M. Jean-François Le Grand. Nous avons raté une chance historique !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme l'a rappelé le rapporteur spécial, notre collègue et ami Joël Bourdin, les crédits du programme 149, relatif à la forêt, représentent 11 % des crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ». Or, en surface, la forêt occupe 28 % du territoire !

Je reconnais que ce rapprochement n'a qu'une valeur tout à fait relative, mais il parle à l'esprit, surtout au lendemain du Grenelle de l'environnement.

Il est vrai qu'il faut tenir compte des dépenses fiscales, pour 87 million d'euros, notamment l'exemption des forêts privées de l'impôt de solidarité sur la fortune, des financements communautaires, pour quelque 58 millions d'euros, et des ressources propres à l'ONF, pour 446 millions d'euros, soit quelque 624 millions d'euros, un peu moins du double des crédits budgétaires que vous demandez pour 2008 et qui s'élèvent à 321 millions d' euros.

Avec quelque surprise, j'ai noté que M. Bourdin semblait vous faire grief des 144 millions d'euros de versement compensateur à l'ONF. Haro sur les crédits de fonctionnement, semblait-il dire !

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

J'ai peut-être mal compris.

Ce versement compensateur, dont vous avez-vous-même fait l'éloge et expliqué l'utilité, monsieur le ministre, a pour objet de permettre le financement du régime forestier dans les forêts communales, lequel s'impose à nos 11 000 collectivités forestières. Sans ce crédit, les frais de garderie payés par les communes à l'ONF dépasseraient les faibles capacités de ces dernières, qui sont souvent très petites, et la forêt péricliterait dans nos zones rurales, alors que le pays attend d'elle, entre autres, la fourniture de bois-matériau et de bois-énergie, la lutte contre l'effet de serre, la protection de la biodiversité, et j'en passe.

Pour ma part, tout en étant moi aussi, comme Joël Bourdin, un modeste servant de la « sainte LOLF »

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Aussi ne reviendrai-je pas sur les quelques petites déceptions récentes que nous avons éprouvées.

D'une part, un amendement, adopté à l'Assemblée nationale, a privé de 2 millions d'euros les investissements forestiers au profit des agriculteurs. Il faut bien faire des concessions au Parlement...

D'autre part, un amendement qui nous a été distribué retire 750 000 euros à la forêt pour les bâtiments d'élevage, « en raison de la file d'attente et du profil particulier de l'échéancier de paiement propre à ces bâtiments », précise son objet.

Quoi qu'il en soit, tout cela est second, sinon secondaire, par rapport à la très grande satisfaction que vous nous avez donnée.

Dans ce débat fleuve sur l'agriculture, la forêt dispose de peu de temps. Je passerai donc sur bien des questions pour aller à l'essentiel, c'est-à-dire à l'avenir.

Nous sortons, monsieur le ministre, du Grenelle de l'environnement, dont vous avez été un acteur majeur avec Jean-Louis Borloo. Dans ce cadre, vous vous préparez à lancer les Assisses de la forêt. La semaine dernière, vous en avez défini l'ambitieux programme devant le Conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois, où siègent presque tous les acteurs de l'interprofession : forêt-bois, élus, hauts fonctionnaires, forestiers privés et publics, regroupés dans l'association France-Forêt, industriels et savants de haut niveau. Il apparaît, si l'on en croit M. Roman-Amat, que notre forêt est menacée, qu'à l'échelle du demi-siècle le réchauffement climatique modifiera l'implantation géographique, voire la survie de certaines essences, tels le hêtre, le chêne pédonculé et l'épicéa. D'ores et déjà, les contributions aux futures assises s'élaborent.

Se fondant sur l'accord que l'on pourrait qualifier d'historique, et que vous-même avez salué, entre les forestiers, publics et privés, et les écologistes de « France Nature Environnement », l'association France-Forêt vous a présenté trois jeux de fiches. Partant des « références Grenelle » et présentant des plans d'action, elles portent sur le climat et le développement économique - bois-matériau, bois-énergie -, la biodiversité - c'est la fameuse « trame verte » -, l'adaptation de notre sylviculture à la nouvelle donne.

L'ambition affichée d'une mobilisation de la production forestière passe par une amplification de la densité forestière, en montagne comme en plaine, et par une généralisation de la certification. Vous avez fait vôtres ces orientations ambitieuses, monsieur le ministre. À cet égard, vous avez constitué trois groupes de travail qui préparent les Assises de la forêt et qui doivent vous remettre des propositions précises pour le 8 décembre.

Il va de soi que le document budgétaire qui nous est soumis dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008 -c'est là que je voulais en venir - est très en-deçà de ces perspectives. Dans votre communiqué du 21 novembre, vous soulignez le rôle essentiel de la forêt - vous l'avez redit ce matin -, qui « stocke chaque année autant de C02 que le volume que l'on demande à nos industriels de réduire dans leurs émissions ».

Il faudra donc bien - ou le Grenelle ne sera qu'un mythe - qu'une étape nouvelle et volontariste s'ouvre dans l'action des pouvoirs publics. Comment seront financées ces mesures multiformes et importantes ? Un tel financement n'appelle-t-il pas le rappel à la vie du défunt Fonds forestier national, qui fut un magnifique instrument au service de la forêt française ?

On parle ici et là d'un « Fonds chaleur », auquel participeraient les activités économiques et fondé sur des combustibles fossiles. Ne pourrait-il s'agir - la nature même du sujet le suggère - d'un programme européen, puisque le réchauffement climatique menace toutes les forêts d'Europe ? Étant donné vos fonctions antérieures - bien connues - et vos convictions européennes - non moins bien connues !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

-, une telle suggestion ne devrait pas vous laisser insensible.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

Monsieur le ministre, je ne ferai pas l'analyse de votre budget, puisque les rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques se sont livrés à cet exercice ce matin même. Je partage, bien sûr, leurs conclusions.

Je souhaiterais simplement poser quatre questions -deux au ministre chargé de l'agriculture, deux au ministre chargé de la pêche - et faire une suggestion.

La première question concerne la production sucrière. La Seine-Maritime a été un très grand département sucrier. Presque chaque année, pour le tonnage de sucre par hectare, la Seine-Maritime arrivait en tête. Aujourd'hui, nous produisons sur près de 10 000 hectares, alors que notre potentiel est de 60 000 hectares environ.

Très longtemps, la production de sucre était répartie entre le quota B et le quota C, pour maintenir l'activité des entreprises, même si le cours mondial ne permettait pas de rémunérer à leur juste prix les tonnes de betteraves livrées. Le Brésil s'orientant vers la production d'éthanol et réduisant, par conséquent, sa production de sucre - ce n'est pas la seule cause -, les cours mondiaux ont augmenté. À ce moment-là, nous aurions bien voulu développer notre production de sucre pour pouvoir bénéficier d'un résultat économique intéressant, mais l'Europe ne l'a pas accepté !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Ce sont des technocrates qui ont pris cette décision ! C'est un scandale !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

Monsieur le ministre, ces données ne peuvent manquer d'interpeler toute personne de bon sens. ! Peut-être faudrait-il regarder cette situation afin de permettre à nos agriculteurs de relancer une activité économique importante de ce type et d'avoir de meilleurs revenus. De plus, pour l'équilibre de notre balance commerciale, cela ne pourrait être que positif.

Ma deuxième question s'adresse également au ministre de l'agriculture. Peut-être pourriez-vous nous dire un mot sur l'évolution des quotas laitiers. On dit beaucoup de choses, mais 2013, c'est demain ! Alors que va-t-il se passer ? Vous avez affirmé que vous feriez tout pour maintenir cette production laitière. Cela représente une sécurité pour ceux qui ont beaucoup investi, et Dieu sait que, dans ce domaine, il faut investir, et pour longtemps ! Nous souhaiterions que vous nous indiquiez l'orientation qui va être prise en ce domaine.

Mes deux dernières questions ont trait à la pêche. Monsieur le ministre, j'ai eu l'honneur et la chance d'être, dans les années quatre-vingt, l'un des représentants de la France à l'ONU lors de la conférence sur le droit de la mer.

À cette occasion, j'ai découvert beaucoup de choses, notamment la richesse des grandes profondeurs, avec les nodules polymétalliques. Mais ce n'est pas l'objet de mon propos. J'ai aussi découvert que la France était la deuxième puissance au monde de par sa zone économique. Cela signifie que nous avons un potentiel extraordinaire. Or nous sommes largement déficitaires, puisque 75 % des produits de la mer consommés par les Français sont importés. C'est tout de même assez étonnant !

Il serait bon de procéder à une analyse de la situation. Je saisis cette occasion, monsieur le ministre, pour vous adresser, ainsi qu'au Président de la République, tous mes remerciements pour les dispositions que vous avez prises rapidement. Elles étaient indispensables pour aider nos pêcheurs côtiers, qui étaient confrontés à des difficultés importantes et qui auraient pu voire leur situation empirer du fait de l'augmentation du coût du carburant. Vous avez réagi très vite, ce qui a permis, de calmer les choses et de les sécuriser.

J'ai longtemps représenté - et je représente encore, puisqu'elle se situe à quelques encablures de chez moi - la grande ville de Fécamp, qui a été une zone de pêche très importante. Elle le demeure en matière de pêche côtière, mais le temps des grands chalutiers est révolu. Il est donc inutile de se poser des questions sur les mesures que nous pourrions être conduits à prendre pour relancer cette grande pêche.

Par ailleurs, compte tenu de l'étendue de nos côtes et de notre zone économique, l'alimentation en produits de la mer ne se fera pas uniquement à partir de la pêche faite au large. Dès lors, le développement de l'aquaculture devrait prendre plus d'importance. Là encore, nous sommes extrêmement faibles, monsieur le ministre, mais notre potentiel est extraordinaire.

Peut-être pourriez-vous nous apporter quelques précisions. Je vous suggérerai d'organiser une table ronde, et non pas de grands colloques, où nous sommes trop nombreux et qui nous font perdre notre temps. Ainsi, nous serions à même d'examiner la situation des intéressés, d'analyser les causes et d'envisager une disposition pour relancer cette activité. Importer 75 % des produits de la mer pour couvrir nos besoins alimentaires est, d'une certaine manière, inacceptable !

Telles sont les réflexions que je souhaitais vous soumettre. Monsieur le ministre, nous somme à vos côtés. L'agriculture et la pêche sont à un tournant extraordinaire. Comme vous l'avez dit, c'est peut-être le moment de rebondir. Nous comptons sur vous et nous voterons votre budget.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fournier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen des crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » intervient une nouvelle fois dans un contexte budgétaire contraint. L'essentiel des mesures à destination du monde agricole sont néanmoins préservées.

Je ne reviendrai pas sur les chiffres qui ont été largement et très bien commentés par les rapporteurs ce matin. Je voudrais, dans le temps qui m'est imparti, insister sur plusieurs points.

Tout d'abord, je me félicite de la reconduction de la prolongation des dispositifs de remboursement partiel de taxe intérieure sur les produits pétroliers, ou TIPP, et de taxe intérieure sur le gaz naturel au profit des exploitants agricoles. Cette mesure était très attendue par la profession, qui doit faire face, comme chacun le sait, à l'augmentation du coût des carburants, ce qui induit des hausses importantes, notamment des engrais.

Je serai plus nuancé sur la situation du financement des investissements en bâtiments, qui est un sujet de préoccupation très fort, car les subventions du plan national pour le bâtiment sont insuffisantes, alors que les prêts bonifiés ont été quasiment supprimés. La situation de certains jeunes agriculteurs est difficile, voire précaire.

Je sais, monsieur le ministre, que vous avez pris en compte une partie de ces considérations, puisque nous avons appris, le 24 novembre dernier, que vous aviez mobilisé pour les prêts bonifiés des crédits complémentaires sur le budget du ministère de l'agriculture et obtenu du Premier ministre une ouverture complémentaire.

Pouvez-vous me confirmer, monsieur le ministre, d'une part, que la région Rhône-Alpes, qui nous est chère, recevra bien une enveloppe de 1, 85 million d'euros et, d'autre part, que vous travaillerez prochainement avec le président des jeunes agriculteurs à une adaptation du mécanisme des prêts bonifiés en 2008, afin d'éviter les files d'attentes ?

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

C'est « oui » à ces deux questions !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fournier

Il y va de la modernisation et de l'amélioration des outils et des conditions de travail des exploitants, ainsi que de la difficile préparation de nos régions à une prochaine révision de la PAC, que la commissaire européenne a annoncé et qui risque fort de fragiliser les agriculteurs.

Ensuite, le projet du ministère prévoit une baisse de 1 million d'euros du budget des préretraites et de 50% des crédits destinés aux agriculteurs en difficulté, alors que les enveloppes sont déjà très insuffisantes.

Deux points relatifs au budget social me semblent très importants.

Le premier concerne la revalorisation des petites retraites, annoncée par le Président de la République au cours de sa campagne, et qui est très attendue. Je sais que ce sujet vous tient particulièrement à coeur et que, depuis plusieurs années, des avancées ont été obtenues sur ce dossier, notamment sous le gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fournier

Il convient de poursuivre ces efforts.

Le second point est relatif à l'équilibre du budget global de la MSA, qui connaît un nouveau déficit de 2, 7 milliards d'euros pour 2008, soit un cumul de 8, 5 milliards d'euros sur quatre ans. Cette situation inquiète beaucoup la profession. Les prévisions de hausse des cotisations agricoles sont évaluées, me semble-t-il, à 2, 4 % alors que la compensation démographique baisse pour la quatrième année consécutive. En d'autres termes, les bases de calcul de la compensation démographique entre régimes doivent être impérativement revues.

Dans le domaine de l'eau, le projet du ministère prévoit des possibilités de financement uniquement pour les retenues dites de substitution. Or les organisations professionnelles, notamment dans mon département, souhaitent une relance vigoureuse de la politique de stockage de l'eau, car les besoins sont très importants que ce soit pour irriguer les cultures ou pour abreuver les cheptels.

Lors de la sécheresse de 2003, certains réseaux publics ont été en quasi-rupture de disponibilité. Il s'agit d'une politique à long terme, nécessaire, qui ne peut se résumer à la simple substitution des pompages actuels par des retenues. Le soutien à tous les projets de retenues collinaires est indispensable.

Une ambition doit être clairement affichée sur ce point, d'autant plus que des solutions de stockage d'eau « écologiquement » acceptables existent aujourd'hui.

Que cette eau soit stockée pour irriguer les champs ou pour abreuver les animaux, notre principal souci est de sécuriser les exploitations confrontées aux aléas climatiques, afin de garantir les volumes de production et d'assurer une qualité constante, conformément aux demandes des marchés. Faute de quoi nous risquons, par manque de marchandises, de perdre des clients, ce qui serait dramatique, car une grande partie de nos débouchés est tournée vers le marché local.

Je profite de mon intervention pour relayer la très forte inquiétude des agriculteurs frappés par la crise porcine qui sévit depuis la fin du printemps dernier, et qui va fragiliser, voire anéantir, de nombreuses exploitations.

Du fait du renchérissement du coût des aliments de base et de la baisse des prix de vente, la perte s'élève à 33 euros par porc, et la Commission européenne refuse d'autoriser à nouveau les aides à l'exportation, seul moyen de soulager le marché.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

Elle a accepté la semaine dernière !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fournier

Je m'en réjouis.

En conclusion, en ma qualité d'élu d'un département couvert par un domaine forestier de 125 000 hectares - soit près de 30 % de sa superficie -, les deux tiers en résineux et un tiers en feuillus, réparti entre 50 000 propriétaires, je conclurai en évoquant la forêt.

Monsieur le ministre, je ne peux qu'être satisfait de l'ouverture, le 21 novembre dernier, des Assises de la forêt. Elles ont pour objectif de renforcer la production forestière en l'inscrivant dans une gestion durable, prenant en compte la biodiversité forestière et la gestion des risques.

Je souscris aux propos que vous avez tenus devant nos collègues députés lorsque vous avez envisagé « un doublement de la récolte commercialisée à l'échelle de dix ans, ce qui est compatible avec les capacités physiques de notre forêt, mais qui nécessite une gestion soutenue ». Et vous ajoutiez : « Pour ce faire, nous prendrons des mesures afin d'obtenir une augmentation rapide de la récolte, non seulement dans les forêts domaniales, mais aussi dans les forêts privées. »

Ce sont des engagements très forts et j'espère que nous pourrons les tenir. C'est un choix économique, mais aussi écologique, puisque les espaces forestiers constituent le plus grand réservoir de biodiversité de notre pays. Ils préservent les sols, les ressources en eau, l'air, les paysages.

Le seul bémol vient de l'augmentation des normes européennes, de plus en plus contraignantes, qui obligent à une modernisation et à une ouverture vers les nouvelles technologies, s'agissant en particulier du bois de charpente; qui seront, me semble-t-il, difficiles à mettre en oeuvre.

Vous avez aussi répondu à l'inquiétude des sylviculteurs en réaffirmant que le plan chablis sera bien poursuivi et ce, a priori, dans les mêmes conditions. Il continuera donc à bénéficier des cofinancements communautaires.

Monsieur le ministre, vous avez, bien sûr, tout mon soutien et je vous remercie à nouveau très chaleureusement et très sincèrement de l'attention que vous portez au monde agricole et au développement de nos territoires ruraux.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Panis

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos portera essentiellement sur la filière équestre, qui n'a pas encore été évoquée mais à laquelle bon nombre d'entre vous sont, comme moi-même, très attachés. Je pense, notamment, aux membres du groupe « Cheval » du Sénat.

Sur le plan européen, la filière « cheval » est remise en cause à deux niveaux distincts.

En premier lieu, la fin du monopole du PMU et l'ouverture maîtrisée des jeux en France inquiètent fortement les professionnels de la filière qui, forte de 60 000 emplois directs, défend le système français alliant agriculture, sport et éducation.

A cet égard, monsieur le ministre, est-il prévu, à l'instar des obligations pesant sur le PMU, qu'une partie des gains obtenus lors des paris soit reversée à la filière équestre via le fonds Éperon ?

En second lieu, la Commission européenne a mis en demeure les Pays-Bas et interrogé sept autres pays, dont la France, sur le passage d'un taux réduit à un taux plein de TVA applicable à la vente d'équidés non destinés à la consommation alimentaire.

Monsieur le ministre, quelle est votre position sur ce sujet ? Vous concevez aisément les lourdes conséquences d'une telle décision, la filière équestre faisant partie intégrante de l'agriculture.

Par ailleurs, sur le plan national, pouvez-vous nous apporter des éclaircissements sur l'application du bouclier fiscal afférent à la filière équestre ? En effet, un crédit d'impôt est envisagé pour l'acquisition ou l'élevage d'un cheval français destiné au sport de haut niveau, selon une liste définie par arrêté ministériel, dans la limite de 25 % et de 60 000 euros annuels.

Cette mesure vise à conserver en France les chevaux de haut niveau et à les valoriser, dès lors que le coût de la mise au travail de ce type d'équidés ne peut être compensé avant plusieurs années, du fait de quasi-absence de gains en compétition.

Pouvez-vous nous confirmer cette mesure et nous apporter quelques précisions sur son application ?

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Monsieur le ministre, je tiens tout d'abord à souligner que vous êtes contraint, eu égard aux orientations gouvernementales clairement dirigées vers la réduction des déficits et la maîtrise des dépenses publique, de vous contenter d'une enveloppe en baisse de 2, 1 % en crédits de paiement pour la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ».

Je constate que vous avez su opérer des choix stratégiques, parmi de multiples axes d'intervention, afin de privilégier les dispositifs les plus efficaces, et je tiens à vous en féliciter.

Ce projet de budget s'inscrit dans une conjoncture très importante pour notre agriculture, puisque 2008 sera l'année du « bilan de santé » de la PAC et celle des Assises de l'agriculture, auxquelles le Parlement sera associé, ce dont je vous remercie.

Ces différents rendez-vous seront essentiels afin de répondre aux nombreuses préoccupations exprimées par le monde agricole, qui subit des crises sanitaires à répétition, souffre de l'augmentation du prix du gazole, du coût des céréales qui fragilise les filières porcines et aviaires, ainsi que du partage, toujours délicat, de la valeur ajoutée avec la grande distribution.

Le 20 novembre dernier, la Commission européenne a présenté une série de recommandations en vue de l'élaboration de la réforme destinée à moderniser la politique agricole commune. L'objectif affiché est de l'adapter à la flambée des cours mondiaux du secteur. A titre d'exemple, le cours du blé à la cotation de Chicago s'est envolé, avec une hausse de 58 % en un an ; à Paris, le cours du maïs a augmenté de plus de 27%.

L'explosion de la demande dans des pays tels que la Chine et l'Inde est à l'origine de cette hausse des prix qui, nous en sommes tous convaincus, va durer.

On constate, sur ce point, un parallélisme saisissant avec l'évolution des prix des matières premières industrielles.

Ce renchérissement a remis au goût du jour le besoin de produire plus, après des décennies de maîtrise de la production au sein de l'Union européenne. Il démontre l'importance de la réactivité dont doivent faire preuve les agriculteurs de notre pays.

Cependant, l'approche esquissée par la Commission européenne ne semble pas conforme aux traités dont elle est censée être la gardienne ni à l'esprit du « modèle agricole européen ».

Une PAC fondée pour l'essentiel sur des aides totalement découplées et des programmes de développement rural ne paraît pas susceptible, d'une part, de répondre de manière adéquate à certaines attentes légitimes des citoyens européens et, d'autre part, d'assurer la vocation exportatrice de la filière européenne de l'agroalimentaire. Je vous rappelle que l'excédent de notre balance commerciale agroalimentaire est de 7 milliards à 8 milliards d'euros par an.

Je tiens, par ailleurs, à souligner le rôle éminemment stratégique de l'agriculture. Il ne me semble pas opportun de lui étendre, tant pour les politiques internes que pour le commerce international, un modèle économique élaboré pour l'industrie et pour certains services.

En effet, différents facteurs tels que l'accroissement démographique mondial, le réchauffement climatique, le renchérissement des coûts de transport des produits agricoles, plaident en faveur du maintien d'une agriculture dynamique, capable de répondre aux besoins des Européens et d'être présente sur les marchés mondiaux.

Partisan d'une politique agricole plus ambitieuse et plus active, je considère que le système des aides directes découplées devra évoluer vers un meilleur ciblage, ce qui permettra d'améliorer leur efficacité et leur légitimité. Des aides ciblées pourraient éventuellement contribuer à conforter la vocation productive et exportatrice de l'agriculture au sein des organisations de producteurs, par contractualisation avec l'industrie de transformation.

Par ailleurs, il est désormais acquis que, demain, le revenu des agriculteurs sera assuré davantage par le marché. Parallèlement, il convient de mettre en place différentes garanties.

Monsieur le ministre, je salue votre volonté de considérer la gestion des risques et des aléas comme un sujet important, puisque vous abondez de deux millions d'euros les crédits consacrés à l'assurance récolte. C'est un signal positif. En effet, le développement de l'assurance récolte, qui permet, par d'autres voies, une garantie de revenus, m'apparaît pertinente. Elle est un peu dans l'esprit des mécanismes de soutien qui existent aux États-Unis.

Je me réfère sur ce sujet à l'excellent rapport de notre collègue Dominique Mortemousque. Après avoir constaté l'impossibilité de laisser coexister, à terme, deux systèmes concurrents, l'un fondé sur une indemnisation assuré par les pouvoirs publics et l'autre sur une individualisation de la gestion du risque, il évoque plusieurs scénarii de développement de l'assurance récolte reposant sur un engagement financier constant de l'État et sur une offre publique de réassurance, indispensable afin de couvrir les aléas climatiques de grande ampleur.

En effet, le régime des calamités agricoles ne répond plus aujourd'hui aux besoins des exploitants agricoles, qui doivent en permanence s'adapter aux demandes du marché, donc bénéficier d'une couverture plus forte contre les aléas.

Dans le même ordre d'idées, compte tenu de la répétition des crises sanitaires, il convient de mettre en place un dispositif d'assurance contre les aléas sanitaires.

En tout état cause, si l'on souhaite que la gestion des crises et des risques soit un thème majeur du « bilan de santé » de la PAC et de la réforme de la politique agricole pour l'après-2013, la France doit jouer un rôle précurseur et s'engager à proposer rapidement une offre assurantielle de base, accessible à tous, pour toutes les productions.

Enfin, j'insiste sur le fait que le soutien à la recherche et à l'innovation devrait devenir une dimension essentielle de la PAC, favorisant ainsi, dans le respect de l'environnement, l'émergence de nouvelles pratiques culturales assurant à la fois une forte productivité, une gestion durable des ressources naturelles, le développement de la « chimie verte » et des bioproduits.

Nous ne pouvons absolument pas ignorer l'évolution technologique mondiale, sauf à créer irrémédiablement une distorsion de concurrence à l'égard de nos propres agriculteurs. Notre collègue M. Fournier l'a également évoqué tout à l'heure à propos de la crise porcine : il est bien évident qu'aujourd'hui le différentiel du prix du maïs en Europe et aux Etats-Unis - il varie du simple au double - est en partie sous-tendu, précisément, par le recours aux biotechnologies.

Vous savez, monsieur le ministre, que, surveillant ces sujets depuis sept ou huit ans, je considère que notre approche en matière de biotechnologies doit s'intégrer dans l'évolution de la sélection variétale, comme cela fut le cas, il y a une cinquantaine d'années, à travers notre engagement pour la création d'hybrides, qui a permis de multiplier par dix ou quinze les rendements des céréales.

Je me réjouis donc de l'examen prochain par le Parlement d'un projet de loi sur les OGM, et je salue votre courage politique sur ce point. Permettez-moi simplement de vous demander d'être beaucoup plus sensible aux avis, que ce soient ceux de l'Autorité européenne de sécurité alimentaire, de l'AFSSA, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, ou, justement, du commissaire européen M. Dimas.

Je crois très sincèrement que nous ne pouvons pas rester plus longtemps à l'écart de cette évolution, au-delà même du contentieux qui est pendant au niveau de l'OMC ; sur ce dernier point, le groupe spécial a certes permis à l'Union européenne d'obtenir un sursis jusqu'au 11 janvier 2008, mais cela ne réglera pas, loin s'en faut, le problème.

De même, nous nous devons de bien prendre en compte la donne environnementale, préoccupation qu'il faut également inclure dans les règles de l'OMC. Les travaux menés dans le cadre du Grenelle de l'environnement sont une parfaite illustration de cet enjeu, au même titre que les efforts entrepris par la France pour promouvoir la transformation du Programme des Nations unies pour l'environnement, le PNUE, en Organisation des Nations unies pour l'environnement, l'ONUE.

L'ONUE nous apporterait une autorité politique renforcée et nous permettrait de rationaliser le système actuel de bonne gouvernance. Il est, en effet, de moins en moins acceptable que certains pays produisent des biens agricoles en s'exonérant des contingences environnementales auxquelles souscrit l'Union européenne. Je voudrais, sur ce point, souligner la proposition française qui consiste à revisiter la notion de préférence communautaire et qui, sans aller jusqu'au protectionnisme, s'oriente vers la notion de préférence collective ; je fais, en particulier, référence à l'analyse de M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État aux affaires européennes, qui demande davantage de réciprocité entre pays dans les échanges commerciaux internationaux.

Nous devons donc aborder l'actuel « bilan de santé » pour 2008-2009 et le débat sur l'« après-2013 », qui a déjà commencé, dans un esprit offensif, en défendant une PAC ambitieuse, mais aussi dans un esprit ouvert. La situation sera très différente de celle que nous avons connue jusqu'ici, et nous n'avons pas intérêt à l'aborder sous un angle défensif, en essayant de préserver à tout prix les schémas hérités du passé.

La France assurera la présidence de l'Union européenne au second semestre 2008, quand les propositions législatives sur la PAC devront être présentées par Bruxelles. La présidence française devra alors mener à bien la conduite de cette réforme délicate. Je sais, monsieur le ministre, pouvoir compter sur votre expérience en matière de négociation européenne et sur votre détermination pour faire passer un certain nombre de messages auprès de nos partenaires.

Je soulignerai, enfin, l'importance que je continue d'accorder à la valorisation de l'enseignement supérieur et de la recherche agricoles, seuls capables de préserver la compétitivité de nos produits sur le marché mondial. Je me réjouis donc de l'augmentation de 2 % des crédits qui leur sont alloués, dans un contexte budgétaire contraint.

Pour terminer, j'évoquerai d'un mot la nécessaire simplification administrative, qu'il faut intensifier.

Sachez, monsieur le ministre, que je vous apporterai mon entier soutien dans l'examen de votre projet de budget comme de l'ensemble de la politique agricole du Gouvernement.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Alduy

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à ce moment du débat, beaucoup de choses ayant été dites, je me contenterai de me faire le relais de la viticulture, de l'arboriculture et de l'agriculture méditerranéennes françaises.

Vous connaissez la gravité de la crise qu'elles traversent, l'une des plus profondes depuis plusieurs générations. Dans mon département, par exemple, le revenu des viticulteurs accuse une baisse de 40 %, et près de 10 % du vignoble, plus de 2 500 hectares, viennent d'être déclarés « destinés à l'arrachage définitif ».

Ainsi, l'arrachage, qui devait être une mesure qualitative, s'est-il transformé en mesure sociale. C'est un patrimoine irremplaçable qui est jeté dans les décharges ! Pis, nos paysages, matière première de l'économie touristique, sont meurtris, les équilibres écologiques compromis, les friches périurbaines livrées à l'appétit des spéculateurs immobiliers.

Il ne s'agit pas seulement d'une crise sans précédent frappant une filière économique : c'est le développement durable des territoires, c'est leur identité même qui sont atteints.

L'arboriculture et l'agriculture maraîchère méditerranéennes sont dans la même situation. Je signale par exemple que, comme les pêcheurs, les producteurs « sous serre » viennent de prendre de plein fouet la flambée du prix du fuel : un hectare de serre, ce sont 20 tonnes de fuel par an, et le chauffage représente plus de 30 % du coût de production de la tomate sous serre.

Monsieur le ministre, les mesures, légitimes, en faveur des pêcheurs ne seraient-elles pas légitimes aussi pour ces maraîchers, qui subissent en outre une concurrence internationale implacable ?

Il faut le dire clairement : l'agriculture méditerranéenne va de crise en crise et de mesures conjoncturelles en mesures conjoncturelles. Or, à la veille de l'ouverture des marchés méditerranéens, il faut des mesures structurelles d'une ampleur sans précédent pour abaisser le coût de la main-d'oeuvre, pour moderniser les exploitations, pour soutenir les efforts collectifs de commercialisation ou encore l'innovation et la recherche. C'est, en fait, une nouvelle approche de l'agriculture méditerranéenne qu'il faut définir.

Monsieur le ministre, il convient de remettre l'agriculture méditerranéenne au coeur du processus de Barcelone. Nous vous avons proposé qu'un forum EUROMED aborde ces questions - nous avons même suggéré qu'il se tienne à Perpignan ! - et amorce des pistes concrètes.

Nos agriculteurs, nos arboriculteurs, nos viticulteurs, veulent de la lisibilité ; c'est l'exigence des nouvelles générations. Face à une concurrence économique de plus en plus inégale, ils s'interrogent, en effet, sur notre capacité politique à donner un avenir à nos productions méditerranéennes. Ils attendent du Gouvernement un courage politique sans faille.

Je sais, monsieur le ministre, la qualité de votre écoute et votre détermination. En retour, sachez que l'agriculture méditerranéenne attend beaucoup de vous !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Couderc

Monsieur le ministre, je tiens tout d'abord à vous remercier de nous avoir fait l'honneur de votre présence au Salon international des techniques et équipements vitivinicoles et arboricoles, le SITEVI, qui s'est tenu à Montpellier la semaine dernière.

Vous nous y avez, notamment, montré tout le soutien que vous apportez à la viticulture languedocienne et votre engagement à nos côtés pour préserver et promouvoir le « plus grand vignoble de France ». Vous nous avez également présenté les grandes orientations du « plan de modernisation de la viticulture française » que le Président de la République vous a chargé de mettre en oeuvre. Enfin, vous avez répondu dans votre discours à nos inquiétudes plus immédiates, concernant en particulier les préretraites des viticulteurs, la question des arriérés de cotisations sociales pour certains d'entre eux, ainsi que la pérennisation du dispositif de reconversion qualitative différée.

Nous espérons également que les mesures d'exonération ou de report de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, ainsi que les dispositions qui répondent au problème des dotations en droits à paiement unique après arrachage, aboutiront effectivement dans un sens favorable à la viticulture languedocienne en particulier, et française en général.

Mais c'est surtout sur la réforme de l'organisation commune du marché vitivinicole que je souhaite attirer l'attention du Gouvernement.

La proposition de résolution, déposée par notre collègue Gérard César sur ce sujet et adoptée par le Sénat le 21 novembre dernier, va dans le bon sens ; les viticulteurs s'en réjouissent. Cependant, ils souhaitent insister sur deux points qui continuent à cristalliser tout particulièrement leurs inquiétudes : d'une part, la mention du cépage et du millésime sur les vins sans indication géographique et, d'autre part, l'équité de la répartition des enveloppes nationales entre les représentants de la production viticole dans leur ensemble.

Vous n'êtes pas sans savoir, monsieur le ministre, que ma région, le Languedoc-Roussillon, est la première région européenne productrice de vins. Or, elle est précisément parvenue à ce que le vignoble français des vins de cépage soit identifié au label « Vin de Pays d'Oc », dont le succès commercial ne se dément pas et qui représente 90 % des vins de cépage français. Ceux-ci sont axés sur la qualité, en particulier grâce à des agréments, et sur la traçabilité, liée à leur indication géographique ; ils répondent aux tendances internationales de consommation du vin, avec des conditionnements modernes et innovants.

Tandis que les vins du Nouveau monde, en particulier ceux de nos principaux concurrents - la Californie et l'Australie -, adoptent aujourd'hui une stratégie de montée en gamme à travers une multiplication des indications géographiques qui leur permet de territorialiser leurs productions, les vignerons du Languedoc-Roussillon déplorent que les propositions de réforme de l'OCM vitivinicole formulées par la Commission européenne comportent la possibilité de mentionner le cépage et le millésime sur des vins sans indication géographique.

Il s'agit là d'un véritable danger de nivellement par le bas : les vins de cépage seraient assimilés à une simple matière première, sans origine ni critère distinctif de qualité. Cette logique productiviste des vins de cépage risque de favoriser l'offensive des vins du Nouveau monde, qui deviendront de fait plus rassurants pour le consommateur.

Pourquoi vouloir porter atteinte au segment de marché le plus porteur de valeur ajoutée dans une région de monoculture viticole ? D'autant plus qu'un consensus s'est établi en faveur du respect des pratiques oenologiques traditionnelles ayant cours dans certaines régions, telle la chaptalisation - pratiques, d'ailleurs, nécessaires à l'élaboration de vins qui ont fait la réputation mondiale de la France !

En ce sens, je souhaite conforter la position de mon collègue Gérard César quant à la rédaction d'un cahier des charges très strict encadrant l'élaboration de ces vins, afin de ne pas déstabiliser l'ensemble du bassin viticole du Languedoc-Roussillon. Je demande au Gouvernement que ce cahier des charges soit rédigé en étroite collaboration avec les professionnels des Vins de Pays d'Oc, qui voient dans cette nouvelle OCM une atteinte à leur modèle économique qu'ils vivent comme un déclassement, comme un retour en arrière qui anéantirait la révolution qualitative engagée depuis plus de trente ans.

En outre, et c'est le second point, je souhaite que la répartition des enveloppes nationales soit conduite dans le respect du nécessaire principe d'équité, de façon que l'ensemble des représentants de la production viticole en bénéficient.

Pour ce qui est des opérations finançables par ces enveloppes nationales, je tiens à souligner qu'il est impératif, dans les actions de restructuration des entreprises, de prendre en compte les vignerons indépendants, dont la stratégie de commercialisation et de production est tout à fait spécifique par rapport à celle des caves coopératives.

Si l'on devait reconduire en l'état la liste des opérations finançables, cela risquerait de se faire au mépris de ce principe d'équité entre tous les représentants de la production viticole. Je tiens à rappeler que, en Languedoc-Roussillon, la filière compte 253 caves coopératives et 1 477 caves particulières ; vous comprendrez, dans ces conditions, que l'équilibre entre caves coopératives et caves particulières nous tienne particulièrement à coeur ! Nous serons donc particulièrement vigilants sur ce point.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche

Monsieur le président, c'est à un exercice difficile et donc forcément imparfait que je vais me livrer en répondant à autant de questions, qui démontrent un véritable intérêt du Sénat pour ce budget, intérêt dont je ne suis d'ailleurs pas étonné.

Un grand nombre d'intervenants - Yvon Collin, Daniel Soulage, Michel Doublet, Bernard Barraux, Claude Biwer, Bernard Fournier, Gérard Bailly, Philippe Nogrix, Bernard Piras, Georges Mouly, Gérard César, Gérard Le Cam, Alain Vasselle - ont évoqué les sujets sociaux. Je tiens à rendre tout d'abord un hommage particulier à Jean-Pierre Raffarin, car, depuis 2003, époque à laquelle il était Premier ministre - et je suis d'ailleurs extrêmement heureux d'avoir participé à l'un de ses gouvernements -, un certain nombre d'avancées sont enregistrées en matière de retraites.

La mise en place de la retraite complémentaire obligatoire a permis aux pensions d'atteindre le niveau de 75 % du SMIC. Depuis le 1er janvier 2007, la durée minimale d'activité pour bénéficier d'une revalorisation a été abaissée à vingt-deux ans et demi, et la minoration de pension pour années manquantes, qui était de 15 %, est passée à 5, 5 % et s'établira à 4 % au 1er janvier 2008.

Cependant, comme vous avez été très nombreux à le souligner - le chef de l'État l'a d'ailleurs dit lui-même dans son discours de Rennes -, il reste des situations très difficiles pour lesquelles de nouveaux efforts sont souhaitables.

Nous allons veiller à ce que la situation des anciens agriculteurs les plus modestes, et plus particulièrement des agricultrices, soit prise en compte dans le cadre du grand rendez-vous sur les retraites de 2008.

J'en viens au budget social du FFIPSA. Son déficit est important, puisqu'il dépassera 2 milliards d'euros pour 2007, 5 milliards d'euros en cumulé. Ce déficit est lié non pas à un problème de gestion du régime ou des prestations, mais aux recettes insuffisantes qui ont été affectées. Cette année, la dette de l'État à l'égard du BAPSA - 619 millions d'euros -, reprise lors de la création du FFIPSA, sera apurée en loi de finances rectificative.

Le solde du déficit devrait être traité dans le cadre plus large de la réduction de la dette des autres régimes. Je vais engager avec Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, les travaux nécessaires dès les prochaines semaines, et ce avec l'objectif d'assurer le financement pérenne des régimes agricoles tout en préservant leur spécificité et leur gestion mutualiste.

André Lejeune a évoqué le problème des agriculteurs en difficulté. La loi de financement de la sécurité sociale permet, depuis le 1er janvier 2007, de financer les prises en charge partielles de cotisations en faveur de ces agriculteurs : 15 millions d'euros y seront consacrés en 2008 dans le budget de la mutualité sociale agricole.

Odette Terrade et Paul Girod ont évoqué les contrôles et le poids administratif pour les agriculteurs. Nous y reviendrons tout à l'heure lors de l'examen de l'amendement de Claude Biwer.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la réalisation des contrôles est fortement contrainte par le droit communautaire. Il s'agit, en contrepartie des aides européennes, d'assurer la sécurité sanitaire de la production et d'éviter les risques pour l'environnement. Dans ce cadre, les marges de manoeuvre quant au principe et au volume des contrôles sont réduites, mais, j'en conviens, des progrès peuvent être réalisés ; j'entends d'ailleurs bien ce qui est dit à ce sujet lors de mes différents déplacements chaque semaine en province.

Voilà pourquoi un rapport du corps d'inspection du ministère de l'agriculture et de la pêche a publié en 2004 une première série d'engagements.

Afin d'aller plus loin dans cette voie, j'ai demandé à Yves Simon, ancien député, de me présenter des propositions plus innovantes, et, tout en respectant le cadre communautaire, je m'efforcerai de simplifier et de mieux coordonner ces contrôles. C'est vrai pour l'agriculture, mais c'est vrai aussi pour la pêche.

Jean Boyer, par la voix de Philippe Nogrix, mais aussi Jacques Blanc et Adrien Gouteyron par écrit, m'ont interrogé sur l'agriculture de montagne.

Ayant présidé pendant dix-sept ans le conseil général de Savoie, je suis d'ores et déjà convaincu de l'importance de l'agriculture de montagne ! Cette dernière bénéficie d'enveloppes particulièrement importantes : 510 millions d'euros en 2007 pour l'ICHN.

S'agissant du plan « bâtiments » - je répète ce que j'ai indiqué récemment aux représentants des communes des régions de montagne en Lorraine ou en Alsace -, l'expérience de 2005 et 2006 montre que 42 % des crédits - j'y insiste - profitent aux 28 % de dossiers issus des zones de montagne.

En 2008, notre effort sera poursuivi, et l'aide à la mécanisation en montagne, sujet que vous n'avez pas évoqué, sera maintenue.

S'agissant des prêts aux jeunes agriculteurs, le maintien des taux à 1 % en zone de montagne, alors que le loyer de l'argent est depuis le 1er novembre à 4, 77 %, entraîne une bonification de 25 400 euros si le prêt porte sur un plafond de 110 000 euros par bénéficiaire.

Je suis soucieux d'une bonne prise en compte de la spécificité de la montagne dans les réflexions sur la PAC ; c'est d'ailleurs l'un des sujets que j'ai évoqués à l'occasion du bilan de santé dont nous commençons la discussion.

Charles Revet a évoqué les quotas laitiers. J'ai émis des réserves de principe sur la question de la suppression des quotas telle qu'elle est envisagée en 2013.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

La majorité de nos partenaires européens sont favorables à la suppression des quotas, qui constituent une contrainte parce qu'ils nous empêchent d'augmenter nos productions - j'observe toutefois que la France est globalement à 600 000 tonnes en dessous du quota national -, ...

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

...mais qui comportent un avantage, monsieur Revet, dans la mesure où les quotas sont fixés par département. Or, à des quotas départementalisés s'attachent par définition des outils de transformation, des laiteries ou des usines qui sont eux aussi territorialisés.

Par conséquent, avant d'accepter la suppression des quotas, je veux vérifier, en concertation avec la filière laitière, que l'ouverture éventuelle de ce système ne nous conduirait pas à une sorte de « déménagement » de l'économie laitière de notre pays.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

Je serai très vigilant sur ce point.

Georges Mouly, André Lejeune et Gérard Bailly ont évoqué l'ICHN. Cette indemnité est essentielle pour la poursuite d'une activité agricole en zone défavorisée, en particulier en zone de montagne. Le budget qui lui est consacré est de 520 millions d'euros en 2007, cofinancement communautaire compris, à comparer à 427 millions d'euros en 2001, et cette indemnité profite à 100 000 exploitations situées en zone défavorisée.

La majoration des vingt-cinq premiers hectares a été progressivement augmentée de 10 % en 2002 à 35 % en 2007 en zone de montagne, 30 % en zone de plaine et piémont, ce qui a permis de doubler le montant unitaire par exploitation en dix ans.

Je veux dire à Odette Herviaux qu'elle a fait une légère erreur dans son intervention, puisque, s'agissant des aides pour l'installation, ce sont non pas 100 millions d'euros de moins, mais 100 000 euros de moins. Avec l'abondement opéré au Sénat, nous sommes désormais au-delà de ce qui avait été fait en 2007.

Odette Herviaux, André Lejeune, Bernard Fournier, Georges Mouly, Claude Biwer et Michel Doublet ont évoqué le dossier de l'installation des jeunes agriculteurs. Pour répondre à la demande légitime des jeunes agriculteurs qui veulent s'installer - avec 16 000 par an, dont 10 000 concernant des jeunes de moins de quarante ans, nous enregistrons une hausse - j'ai pu, en raclant les fonds de tiroirs, et avec l'accord du Premier ministre, trouver un complément de 20 millions d'euros à la fin de cette année pour abonder les crédits nécessaires pour les prêts. Par ailleurs, je confirme à Bernard Fournier que 1 850 000 euros seront affectés à la région Rhône-Alpes, qui nous est chère, même si je n'en suis plus actuellement l'élu !

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

M. Michel Barnier, ministre. Restons sur notre sujet, si vous le voulez bien !

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

Jean-Paul Alduy, Michel Doublet et Raymond Couderc ont évoqué l'OCM vitivinicole. Je ne reviendrai pas sur la discussion qui a eu lieu ici au Sénat, lors de l'examen et du vote unanime de la proposition de résolution présentée par Gérard César.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

Je m'en tiendrai à ce que j'ai indiqué. J'ajouterai toutefois, en réponse à Jean-Paul Alduy, que je suis très attentif à la dimension agricole du projet d'Union méditerranéenne proposé par le Président de la République. C'est la raison pour laquelle je suis allé récemment en Tunisie et en Libye, et je continuerai ce travail de concertation au niveau des deux rives du bassin méditerranéen pour donner une dimension agricole et rurale, notamment à ces sujets d'écologie et de stress hydrique qui nous concernent de plus en plus en raison du réchauffement climatique.

Monsieur Raymond Couderc, je suis très attentif à la question des étiquettes et des indications géographiques, afin de ne pas pénaliser - je l'ai d'ailleurs dit récemment à Montpellier - l'effort considérable réalisé par les vins de pays en vue de la préservation et la maîtrise de la qualité.

Charles Revet a évoqué le problème du sucre. La réforme de l'OCM du sucre, dont j'ai longuement parlé tout à l'heure avec les producteurs de betteraves réunis en assemblée générale, entraînera une baisse du quota de production de 14 % en moyenne d'ici à 2010 et une restructuration de l'industrie sucrière européenne et française.

Il vaut mieux, me semble-t-il, anticiper et prévenir plutôt que de devoir réparer plus durement encore dans quelques années. Cette restructuration concernera plusieurs régions, et certaines fermetures d'usines sont en effet prévues. Elle sera accompagnée financièrement par la Commission européenne, et je suis attentif à ce qu'elle se prépare en respectant la pérennité de nos principaux bassins betteraviers.

Michel Doublet a évoqué la rotationnelle. Le projet de loi de finances a été en effet établi en prévoyant de suspendre la souscription de nouveaux contrats en 2008. Mais le paiement des contrats en cours est évidemment assuré jusqu'à leur terme, et nous étudierons la possibilité de reprendre cette aide, notamment dans le cadre du bilan de santé de la PAC.

Gérard Le Cam, Jean Desessard - en son nom et au nom de Jacques Muller - et Bernard Piras ont évoqué le plan de développement de l'agriculture biologique.

Je rappellerai les chiffres : en 2006, quelque 12 000 exploitations agricoles étaient engagées dans le mode de production biologique. Nous voulons tripler la surface consacrée à l'agriculture biologique, et c'est la raison pour laquelle, dans le prolongement du Grenelle de l'environnement, j'ai présenté un plan ambitieux - il a été reçu comme tel par la filière bio - pour la recherche, la structuration de la filière, la consommation des produits, la conversion et la pérennité des exploitations. Je vais m'engager sur ce plan de manière très volontariste.

Mais entre le bio, d'un côté, et le productivisme, de l'autre, monsieur Desessard, il y a un grand champ, si je peux dire, à savoir l'agriculture durable. Je vais m'y engager avec les agriculteurs, notamment pour tout ce qui concerne la diminution de l'usage des produits phytosanitaires et la certification des exploitations vers la haute valeur environnementale. Et pour réussir ce pari, monsieur Bizet, nous avons besoin d'un effort supplémentaire en matière de recherche. C'est la raison pour laquelle j'en ai fait l'un des points forts de mon budget. Mais cet effort concernera également d'autres budgets sur lesquels nous allons cibler les efforts de recherche, lesquels permettront de réussir cette certification des exploitations à haute valeur environnementale.

Gérard Bailly, Bernard Barraux, Georges Mouly, Michel Doublet, Claude Biwer, Alain Vasselle et Daniel Soulage ont évoqué l'élevage ovin allaitant, qui nécessite, en effet, des mesures d'urgence conjoncturelles - je les ai prises autant que je le pouvais -, des mesures structurelles - nous y travaillons -, et qui doit être traité de manière plus équitable par la PAC. Et c'est que nous pourrons faire dans le cadre du bilan de santé de la PAC et des premiers redéploiements sur le premier pilier, en particulier vers l'élevage ovin, vers l'agriculture biologique, vers le lait et les zones fragiles.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

Michel Doublet et Bernard Fournier ont évoqué le coût du pétrole. Le Gouvernement proposera dans le projet de loi de finances rectificative, dont l'examen commence dans les prochains jours à l'Assemblée nationale, la reconduction du remboursement de la taxe intérieure sur les produits pétroliers.

Michel Doublet, Paul Girod, Alain Vasselle, Philippe Nogrix et Daniel Soulage ont évoqué les biocarburants. J'indiquerai simplement, comme je l'ai dit tout à l'heure aux producteurs de betteraves, que nous souhaitons préserver les objectifs d'incorporation de 7 % en 2010, en utilisant 7 % de la surface agricole, taux qui me paraît raisonnable. Il nous faut en effet préserver ce qui constitue, à mon sens, la priorité de l'activité agricole, c'est-à-dire la production pour l'alimentation.

Après l'arbitrage du Président de la République et du Premier ministre, le dispositif fiscal prévu pour soutenir les biocarburants a globalement été préservé. Mais je veux encourager plus fortement encore la recherche sur la deuxième génération de biocarburants, laquelle permettra, avec la même surface cultivée, de multiplier les rendements par cinq, afin d'accélérer leur production.

Par ailleurs, dès qu'ils me seront transmis, je vous communiquerai les résultats de l'étude réalisée par l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.

Mme Herviaux et M. Le Cam ont évoqué la culture d'OGM non autorisés en Bretagne. Les informations dont je dispose m'ont conduit à demander aux services de mon ministère de se mobiliser pour apporter leur expertise et leur aide à la gendarmerie qui a été saisie de cette affaire.

S'agissant des OGM, je veux tout simplement dire que les engagements qui ont été pris à l'occasion du Grenelle de l'environnement sont respectés. La Haute Autorité sur les OGM sera créée dans les tout prochains jours.

Un projet de loi, qui a été transmis au Conseil d'État, sera prochainement soumis au Parlement, afin, je l'espère, d'aborder de manière plus rationnelle les questions d'autorisation de mise en culture éventuelle. En attendant, conformément aux décisions du chef de l'État, les cultures commerciales d'OGM, notamment le MON 810, sont suspendues.

M. Fournier a évoqué la crise porcine. J'ai été extrêmement attentif à cette crise, qui est la plus grave des crises économiques que nous vivons en ce moment. C'est pour cette raison que je me suis battu pour obtenir les restitutions à l'exportation, qui s'élèveront à 31, 10 euros pour 100 kilos concernant les carcasses, demi-carcasses et découpes, et à 19, 40 euros pour 100 kilos concernant les poitrines de porc. Les éleveurs de porc ont estimé que cette aide représentait une contribution importante de la Commission européenne au titre de la solidarité.

M. Vasselle a parlé du plan de la crise ovine et des veaux de boucherie. En la matière, j'ai dégagé des crédits conjoncturels à hauteur de 15 millions d'euros pour la crise ovine et de 7, 6 millions d'euros pour les veaux de boucherie.

M. Biwer a évoqué le montant des barèmes d'indemnisation des animaux morts à la suite de la fièvre catarrhale ovine. Ceux-ci sont de 46 euros pour les ovins et de 228 euros pour les bovins, mais je les examinerai de nouveau en 2008.

Je tiens à remercier Paul Raoult de ses propos empreints d'une grande sagesse sur les enseignements à tirer de la crise issue de la fièvre catarrhale ovine.

Cette crise est désormais européenne, car dix pays sont touchés. La vraie réponse se situe donc au niveau européen. C'est pourquoi j'ai demandé, dès le mois de juillet dernier, que l'Europe développe une stratégie en matière de prévention et de coordination des mesures de prévention, afin que nous sortions de la situation présente où tous les pays concernés réagissent de manière juxtaposée. En outre, j'ai également demandé que l'Europe propose une politique de vaccination.

Je vous rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous sommes le premier pays à avoir lancé un appel d'offres pour un nouveau vaccin. Nous espérons disposer de 33 millions de doses au printemps prochain.

Monsieur Barraux, pour ce qui concerne les broutards, le règlement sanitaire, pour lequel je me suis beaucoup battu, a été publié, et les mouvements d'animaux ont repris, vers l'Italie notamment.

Je ne reviendrai pas sur la forêt, car j'en ai longuement parlé dans mon propos liminaire, si ce n'est pour remercier Yann Gaillard et Claude Biwer de m'avoir interrogé à ce sujet.

Je le confirme, j'ai installé les Assises de la forêt le 21 novembre dernier, et des décisions en matière de financement des mesures qui pourraient y être proposées devraient être prises d'ici à la fin du mois de février, dans le cadre des textes qui seront issus des travaux du Grenelle de l'environnement.

Je ne veux pas engager une polémique avec MM. Lejeune, Piras et Le Cam, mais la manière dont ils ont présenté ce budget ressemble plus à une tentative laborieuse pour justifier leur opposition qu'à une analyse objective de son contenu.

Je veux redire à Mme Herviaux, en particulier, s'agissant de l'installation des jeunes agriculteurs, que notre budget est contraint. Toutefois, les grandes interventions prévues pour favoriser l'activité de l'économie agricole ont été préservées ; permettez-moi de vous demander de m'en donner acte.

M. Alain Gérard, Mmes Odette Terrade et Yolande Boyer ainsi que Charles Revet ont évoqué le plan de pêche durable. Pour relever la ligne d'horizon et redonner des perspectives d'espoir à ces hommes et à ces femmes qui travaillent, je le répète, dans les conditions les plus dangereuses qui soient ...

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

... nous voulons un plan global, qui prenne en compte toutes les dimensions de la pêche.

Ainsi, pour ce qui est de la dimension écologique, il s'agit de réfléchir à une navigation moins consommatrice en énergie, c'est-à-dire à des solutions permettant de naviguer autrement en consommant moins. Pour la dimension économique, il faudra examiner la question de la viabilité des bateaux. Pour ce qui est de la gestion, le plan sera inspiré du principe de précaution, en l'occurrence pour la sauvegarde des réserves et des ressources halieutiques. Pour la dimension sociale, il conviendra d'assurer à chaque pêcheur un salaire minimum. Je ne saurais terminer sans mentionner la dimension de la sécurité, individuelle et collective.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la pêche est l'activité qui enregistre le nombre le plus important de morts et de blessés par accident du travail. Je vous le rappelle : vingt décès par an !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

C'est encore arrivé la semaine dernière à Dieppe !

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

Dimanche dernier, j'ai rencontré, et ce fut très émouvant, les six marins pêcheurs rescapés du naufrage du Mon Bijou. En évoquant la disparition, sous leurs yeux, de leur camarade de pêche, ils m'ont donné une bonne idée. En effet, au-delà de l'obligation que doivent respecter les marins pêcheurs de porter un vêtement à flottabilité intégrée, qui, certes, ne leur assure pas d'être sauvés, mais leur permet de rester dans l'eau sans couler, il faudrait prévoir une protection plus personnelle encore, à savoir une balise individuelle portée par chaque pêcheur, comme en sont équipés les pisteurs secouristes en zone de montagne.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

Je vais donc mettre cette idée à l'étude pour permettre au pêcheur qui se retrouve, dans l'eau, la nuit le plus souvent, d'être repéré automatiquement.

S'agissant du Fonds européen pour la pêche, le FEP, je précise à Mme Boyer que la Commission européenne a approuvé notre programme opérationnel le 27 novembre dernier. Il sera signé le 20 décembre et sera applicable à compter de cette date.

Je veux également dire à M. Revet que les deux missions que j'ai confiées à M. Roncière et à Mme Tanguy sont l'occasion d'engager les débats que vous souhaitez.

Mme Panis a évoqué les Assises du cheval, où je devrais d'ailleurs me trouver en ce moment même, mais le Gouvernement est naturellement à la disposition du Parlement. Je répondrai donc ultérieurement dans le détail à sa question.

Mme Panis a également abordé la perspective d'une ouverture maîtrisée des jeux en France et de ses conséquences sur le PMU. Selon moi, cette évolution ne peut être envisageable que dans le respect de certains principes, car il est indispensable et légitime que le secteur des courses bénéficie d'une partie de ces recettes. Il faut en particulier préserver le retour financier à la filière équine. En outre, le Fonds EPERON est une manifestation de solidarité envers la filière équestre, et je veillerai à son maintien.

Concernant le régime de TVA applicable aux équidés, il est vrai que la Commission européenne a adressé une mise en demeure à la France. Je suis ce dossier avec une grande attention, car toute remise en cause du taux réduit aurait des conséquences très négatives sur l'ensemble de la filière.

MM. Soulage, Alduy et Raoult ont évoqué plus globalement la PAC. Le bilan de santé de la PAC doit être l'occasion pour nous d'examiner les outils que la Commission européenne va nous permettre de réutiliser pour proposer à nos partenaires de créer les conditions de régulation, de maîtrise des productions, de gestion des risques et des aléas que nous n'avons ni en France ni en Europe.

Nous ne pouvons continuer à laisser planer cette incertitude, cette instabilité liée aux crises économiques, à des marchés de plus en plus volatils, aux crises climatiques et sanitaires, qui, quelquefois, se conjuguent. C'est la raison pour laquelle je veux absolument proposer ces outils dans la nouvelle PAC.

Je proposerai également un redéploiement au sein du premier pilier afin de mieux traiter certaines filières et certaines productions parce qu'elles n'ont pas été équitablement traitées jusqu'à présent, ...

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

... ou de manière insuffisante ; je pense au lait, aux zones fragiles, aux ovins, à l'agriculture biologique et, monsieur Alduy, aux fruits et légumes.

Je ferai enfin miens les propos de M. Vasselle, lequel a précisé qu'il examinerait ce budget avec vigilance et confiance.

Je conclurai en évoquant, comme Jean Bizet, l'attitude offensive et ambitieuse qui est la nôtre. Si vous le voulez bien, à partir de ce budget, je travaillerai avec mon administration, à laquelle je rends hommage, et avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, à une PAC durable et équitable, qui repose sur une plus grande responsabilisation et sur une meilleure prévention.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous le confirme, le Sénat sera naturellement étroitement associé à chacune de ces étapes. Comme vous le savez, en tant qu'ancien sénateur, j'ai besoin de vos conseils et de vos propositions.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Nous allons procéder à l'examen des amendements portant sur les crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » figurant à l'état B.

En euros

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales

Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural

Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés

Forêt

Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture

Dont titre 2

714 718 022

714 718 022

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-93, présenté par MM. Emorine et César, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural

Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés

Forêt

Conduite et pilotage des politiques de l'agricultureDont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Avec mon collègue Gérard César, nous vous présentons, mes chers collègues, cet amendement parce que nous avons aujourd'hui la possibilité, dans un projet de loi de finances, de déposer des amendements qui visent non pas à augmenter la masse financière du budget, mais à modifier la répartition des financements.

Cet amendement a tout simplement pour objet de mettre l'accent sur les besoins en matière de bâtiments d'élevage. Le plan de modernisation des bâtiments d'élevage, le PMBE, vise, depuis 2005, à mettre aux normes et à moderniser les bâtiments agricoles dans l'ensemble des filières animales en vue d'accroître leur productivité et de mieux prendre en compte l'environnement.

Ce plan a été un vrai succès depuis son lancement, à tel point qu'un phénomène de « file d'attente » est apparu : au 1er janvier de cette année, 5 800 dossiers étaient en instance de traitement, tandis que l'on attendait 2 800 nouveaux dossiers au cours du premier semestre.

Le Gouvernement a donc dû abonder, et par deux fois, avec 23 millions d'euros d'abord, puis avec 6, 2 millions d'euros, la ligne de crédits - 60 millions d'euros en autorisations d'engagement et 56 millions d'euros en crédits de paiement - initialement prévue dans le projet de loi de finances pour 2007.

Si ces moyens ont permis de solder l'essentiel des dossiers en attente pour 2006 et 2007, les crédits prévus dans le projet de loi de finances pour 2008, soit 50 millions d'euros en autorisations d'engagement et 46, 1 millions d'euros en crédits de paiement, seront vraisemblablement insuffisants pour financer le reliquat des dossiers des années passées et ceux qui sont à venir.

Dès lors, l'objet de l'amendement est de majorer le montant des crédits destinés à soutenir le PMBE en dotant le programme 154 « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural » à hauteur de 5 millions d'euros en autorisations d'engagement et 750 000 euros en crédits de paiement.

Le montant moindre de la majoration proposée en crédits de paiement par rapport aux autorisations de programme s'explique par le profil de l'échéancier de paiement propre à ce plan, les engagements en année n ne donnant lieu à paiement qu'à hauteur de 15 % sur l'année n.

L'abondement de 5 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 750 000 euros en crédits de paiement de l'action 4 « Modernisation des exploitations et maîtrise des pollutions », du programme 154 « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural » prévu par cet amendement pourrait être financé - mais je sais que le Gouvernement fera une autre proposition - en autorisations d'engagement, par le transfert de 2, 5 millions d'euros depuis les crédits de l'action 3 « Amélioration de la gestion des forêts » du programme 149 « Forêt » et de 2, 5 millions d'euros depuis les crédits de l'action 2 « Évaluation de l'impact des politiques publiques et information économique » du programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » ; et, en crédits de paiement, par le transfert de 750 000 euros depuis les crédits de l'action 2 « Évaluation de l'impact des politiques publiques et information économique » du programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture », dont les actions semblent moins prioritaires pour la pérennisation d'une agriculture et d'un élevage durables.

À mes yeux, la modernisation de l'élevage est importante sur notre territoire et passe par la modernisation des bâtiments d'élevage. Nous parlons en permanence au niveau européen du bien-être animal, mais n'oublions pas que la modernisation des bâtiments d'élevage peut contribuer au bien-être des éleveurs !

Sourires.- Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° II-141, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural

Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés

Forêt

Conduite et pilotage des politiques de l'agricultureDont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. le ministre, pour présenter cet amendement et donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° II-93.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

En écho à la préoccupation exprimée par M. le président de la commission des affaires économiques, je voudrais vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, dans quel esprit je vous propose cet amendement.

Mon engagement est comparable à celui du président de la commission. Lors de ma prise de fonctions, au mois de janvier dernier, 9 000 dossiers étaient en attente. Aussitôt, nous avons trouvé 23 millions d'euros de crédits nationaux et autant de crédits européens. Avec l'ensemble des organisations agricoles, j'ai négocié un plan d'ajustement visant à résorber cette liste d'attente.

L'idée de continuer à faire face à cette situation est bonne, et je suis favorable à l'objectif d'abonder le plan de modernisation des bâtiments d'élevage à hauteur de 5 millions d'euros. Toutefois, compte tenu de la connaissance qui est la mienne de mon propre budget, je vous proposerai un schéma différent de celui de la commission des affaires économiques.

Ainsi, je propose un abondement de 2 millions d'euros en autorisations d'engagement du PMBE à partir du programme « Forêt » pour 750 000 euros, du programme « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés » pour 750 000 » euros et du programme « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » pour 500 000 euros.

Par ailleurs, je m'engage à redéployer le solde, à savoir 3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 750 000 euros en crédits de paiement, au sein du programme 154, ce qui portera bien à 5 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 750 000 euros en crédits de paiement l'augmentation des crédits du PMBE.

Voilà, monsieur le président de la commission des affaires économiques, la suggestion complémentaire que je me permets de faire pour que l'objectif que vous visez avec vos collègues soit atteint, avec des conséquences les plus acceptables possible pour les différents postes de mon budget.

Le Gouvernement est donc favorable sur le principe, mais préfère son amendement à celui que propose la commission des affaires économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Nous avons entendu le président de la commission des affaires économiques et le ministre, qui ont défendu deux amendements dont les objectifs sont similaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri de Raincourt

M. Henri de Raincourt. Comme la cigale et la fourmi !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Ils comportent toutefois deux différences.

La première, c'est que l'amendement du Gouvernement opère un abondement au profit du plan de modernisation des bâtiments d'élevage, qui ne concerne que les autorisations d'engagement. La seconde, c'est que cet abondement est réalisé à hauteur de 3 millions d'euros par redéploiement interne au sein du programme 154 et à hauteur de 2 millions d'euros financés seulement par une ponction de 750 000 euros sur le programme 227, de 750 000 euros sur le programme 149 et de 500 000 euros sur le programme 215.

La commission des finances est favorable à l'amendement du Gouvernement et se permet donc de demander au président de la commission des affaires économiques de faire un petit effort et d'accepter de s'y rallier.

Cette position n'est pas dictée à la commission des finances par une quelconque préférence subjective. C'est simplement parce que les ponctions opérées sur les programmes de la mission sont moindres, notamment sur le programme 149 « Forêt », qui a déjà été écorné à l'Assemblée nationale.

M. le ministre approuve.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

J'ai compris que mon amendement était susceptible de recevoir un avis défavorable, même si tout le monde est favorable à l'objectif ici visé.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

Exactement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Seule la répartition constitue une pierre d'achoppement.

Sensible aux arguments du Gouvernement et de la commission des finances, je retire cet amendement au profit de celui du Gouvernement.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° II-93 est retiré.

La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour explication de vote sur l'amendement n° II-141.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Monsieur le ministre, tout le monde sera d'accord si vous nous proposez d'abonder davantage les crédits consacrés à l'aménagement des bâtiments d'élevage. Cette mesure fera même l'unanimité, ici comme ailleurs. En effet, la liste d'attente est longue et, nous en sommes tous convaincus, bien des choses restent à faire dans ce domaine-là.

En revanche, si vous nous annoncez qu'il faut supprimer des crédits consacrés à la forêt ou à l'économie agricole, nous risquons fort de réagir !

Monsieur le ministre, j'ai pourtant entendu ce matin votre plaidoyer en faveur de la forêt, notamment. Vous nous expliquiez, à juste titre, d'ailleurs, que la forêt était une source à la fois d'énergie et d'économies importantes pour notre pays, qu'elle rééquilibrait le dégagement de CO2 produit par toute notre industrie - ce n'est quand même pas rien aujourd'hui ! - et que nous aurions certainement bien des choses à faire dans le domaine de la biomasse et la recherche d'énergie à partir de la forêt. Comment pouvez-vous, le matin, prôner la valorisation de la forêt et, le soir, nous proposer de lui ôter des crédits ? Il y a là une certaine ambiguïté !

Il est vrai, je le comprends bien, que vous nous présentez globalement un budget en baisse. Par conséquent, pour majorer un poste, il faut bien déplacer des crédits. Mais, monsieur le ministre, nous sommes prêts à chercher, à vos côtés, ces 5 millions d'euros ailleurs dans le budget !

L'agriculture et le monde rural méritent mieux qu'une stratégie défaitiste qui voudrait faire croire qu'il n'y a plus qu'à baisser les bras en considérant que rien n'est possible. Nous ne sommes pas d'accord avec vous sur une telle stratégie. Essayons, au contraire, de jouer sur la répartition du gâteau que l'on nous présente !

Monsieur le ministre, sur cet amendement comme sur les amendements qui suivent, nous nous abstiendrons donc pour laisser, à vous-même et à la majorité, le soin de choisir à qui vous ferez un cadeau...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Les cadeaux, ils ont été faits au mois de juillet !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

... et qui, au contraire, devra subir une ponction sur ses crédits.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

M. Michel Barnier, ministre. Monsieur Pastor, je pensais que vous auriez une attitude un peu plus constructive sur la proposition que j'ai faite en partageant l'engagement et l'objectif exprimés par le président de la commission des affaires économiques.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Nous sommes prêts à le faire, mais sur des bases solides !

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

Franchement, pour que votre assemblée et ceux qui nous écoutent ou qui liront ces débats soient bien informés, j'insiste sur le fait que tant l'objectif visé que ma proposition sont raisonnables.

Le budget consacré à la forêt est de 300 millions d'euros. Mon « contre-amendement », si je puis dire, a pour objet de ne prélever que 750 000 euros, au lieu de 2 millions d'euros, ce qui permet de ne pas compromettre l'engagement que j'ai pris sur la forêt, l'usage de la biomasse et du bois.

Comprenez bien que j'ai recherché un compromis dynamique et raisonnable à la fois.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Charles Josselin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Josselin

M. Charles Josselin. Monsieur le ministre, dans votre intervention, ce matin, vous avez fait allusion à un article paru dans la presse et intitulé « Le grand retour de l'agriculture ». Nous partageons tout à fait cette analyse, l'agriculture is back !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Josselin

Le temps est passé où d'aucuns remettaient en cause la vocation exportatrice de la France, considérant que l'essentiel était de reconnaître à chacun le droit à la souveraineté alimentaire. On sait que les choses ne se passent plus comme cela - bien au contraire ! -, et que la France doit à nouveau afficher fortement sa vocation à produire et à exporter.

À l'évidence, dans un domaine particulier, celui de l'élevage, une erreur de prévision majeure a été commise. En effet, il manque aujourd'hui 1 milliard de litres de lait à l'Europe et 100 000 vaches laitières à la France. La question posée est bien celle des moyens susceptibles d'aider à relancer l'élevage en France.

Les amendements que nous examinons montrent clairement l'inconfort qui est le vôtre et celui de votre majorité à trouver des solutions dans un budget qui n'en offre pas. Aussi, vous l'aurez compris, après mon collègue Jean-Marc Pastor, tout en regrettant cette situation de pénurie budgétaire dans laquelle vous vous trouvez, fâcheuse pour vous, mais surtout pour les agriculteurs, nous nous abstiendrons.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° II-91 rectifié, présenté par MM. Mortemousque, César, Rispat et Darniche, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural

Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés

Forêt

Conduite et pilotage des politiques de l'agricultureDont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Gérard César.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Cet amendement vise la mise en oeuvre d'un plan de modernisation sanitaire.

Pour financer ce plan d'un coût de 2 millions d'euros, il est proposé de minorer à due concurrence les crédits de l'action n° 01 : « Moyens de l'administration centrale » du programme 215 «Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture », dont les moyens peuvent, semble-t-il, être minorés par une plus grande rationalisation des méthodes de travail. Ces crédits basculeraient sur l'action n° 4 « Modernisation des exploitations et maîtrise des pollutions » du programme 154 « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural ».

L'arrêté du 29 octobre 2007 fixant des mesures techniques et administratives relatives à la lutte contre l'influenza aviaire transcrit la directive 2005/94/CE du conseil du 20 décembre 2005 concernant des mesures communautaires de lutte contre l'influenza aviaire et abrogeant la directive 92/40/CEE. Il instaure l'obligation de déclarer les foyers d'influenza aviaire à virus hautement ou faiblement pathogène, selon les stéréotypes, dirait le docteur Jean Bizet

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Par le présent amendement, nous vous proposons de contribuer à la mise en oeuvre d'un plan de modernisation sanitaire, afin d'évoluer vers de meilleures pratiques susceptibles, d'une part, de prévenir au mieux les risques dans les élevages de palmipèdes et, d'autre part, de démontrer la volonté de notre pays de prendre toutes les mesures qui s'imposent dans le cadre du principe de précaution.

La précédente crise liée à l'influenza a coûté assez cher aux finances publiques pour que l'on accorde aujourd'hui un grand intérêt à ce plan, qui nécessite un investissement financier estimé à 15 millions d'euros pour 3 000 élevages.

La filière s'est engagée à prendre à sa charge 60 % des dépenses, ce qui est très important. Elle souhaiterait que les pouvoirs publics complètent les 40 % restants par un abondement de crédits de 6 millions d'euros sur trois ans par l'intermédiaire de l'Office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions, l'ONIEP, au travers des contrats de projets entre l'État et les régions. Pour 2008, l'État prendrait donc en charge 2 millions d'euros.

Les investissements concernés sont nombreux et très utiles : sas sanitaire, bac d'équarrissage, isolement de l'élevage, protection et clôtures, abris et mise en place de moyens d'abreuvement pour éviter les flaques autour des abreuvoirs, matériel de désinfection, et j'en passe.

Ce plan de modernisation représente un enjeu essentiel en matière de santé publique compte tenu des risques sanitaires encourus. C'est pourquoi les pouvoirs publics doivent inscrire leur action dans un principe de précaution.

Cet amendement est très important pour la filière, qui connaît aujourd'hui de grandes difficultés. Ne pas prendre de telles précautions aurait de graves conséquences sur l'exportation de nos produits, surtout pour le foie gras à l'approche de Noël et du nouvel an !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Cet amendement présenté par Gérard César a pour objet de transférer 2 millions de crédits du programme 215 vers le programme 154 pour financer le plan de modernisation sanitaire qu'il a exposé.

Si la nécessité de cette mesure ne fait aucun doute, je m'interroge sur son financement. Monsieur le ministre, des crédits n'ont-ils pas été prévus à cet effet dans le budget de l'ONIEP ? Cet abondement est-il donc vraiment nécessaire ?

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

L'objectif est en effet tout à fait légitime.

L'obligation d'une déclaration des foyers d'influenza aviaire à virus faiblement pathogène dans les élevages avicoles implique une très forte probabilité de détection de tels foyers dans les élevages de palmipèdes particulièrement sensibles au virus de l'influenza.

C'est pour limiter les risques de contamination de ces élevages que la filière a proposé la mise en oeuvre d'un plan de maîtrise sanitaire des élevages par le biais d'un plan de modernisation dont le coût total est estimé à 15 millions d'euros. Elle sollicite les pouvoirs publics à travers la participation de l'Office de l'élevage dans les contrats de projets entre l'État et les régions pour un financement de 6 millions sur une durée de trois ans, cela a bien été précisé.

Ce plan de modernisation sanitaire permettrait de faire évoluer la filière du « prêt-à-gaver » vers de meilleures pratiques sanitaires, avec pour objectif une diminution de la présence des souches faiblement pathogènes en agriculture.

Ayant rappelé pourquoi ce plan était nécessaire, il est logique de dire qu'il doit être financé. Monsieur le rapporteur, je vous confirme qu'il l'est mais, c'est vrai, pas autant que le souhaitent les auteurs de l'amendement. Le financement n'est que de 1, 5 million d'euros au titre, en effet, de l'ONIEP. Ce crédit est pris en charge financièrement sur le programme 227, par le biais de l'ONIEP, et se fera par redéploiement des crédits affectés à l'Office.

Par conséquent, je vous le confirme, ce plan est nécessaire, surtout à un moment où existent un peu partout des risques de pathogènes émergents, et son financement assuré par l'ONIEP est pratiquement suffisant pour l'année qui vient.

Sous le bénéfice de ces observations, je vous suggère, monsieur César, de retirer cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Nous demandons 2 millions d'euros ; vous nous annoncez 1, 5 million d'euros : monsieur le ministre, il manquera toujours 500 000 euros pour les professionnels de la filière !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

C'est vrai !

Certes, c'est un début, mais, monsieur le ministre, je souhaite que nous abordions de nouveau cette question lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2009, afin de tenter de combler le « manque à gagner » qui résultera du présent projet de loi de finances.

Cela dit, je retire l'amendement, puisqu'il est satisfait aux trois quarts.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° II-91 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-37, présenté par M. Bourdin, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural

Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés

Forêt

Conduite et pilotage des politiques de l'agricultureDont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Cet amendement a pour objet d'inscrire une dotation symbolique au Fonds national de garantie des calamités agricoles, le FNGCA. Je dis bien « symbolique », car 80 millions d'euros par an sont nécessaires en moyenne, alors que la commission ne vous propose de redéployer que 1, 4 million d'euros.

Une fois de plus, je l'ai signalé ce matin, le projet de loi de finances que nous examinons ne prévoit aucune dotation au profit du FNGCA, alors que la contribution de l'État à ce fonds est une obligation instituée par l'article L. 361-5 du code rural.

Ces deux dernières années, cette non-budgétisation a eu des conséquences fâcheuses.

Tout d'abord, en 2006, les conséquences de la sécheresse de 2005 ont conduit à abonder le fonds, en puisant 98, 5 millions d'euros sur les crédits de la PMTVA, la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes. Comme il fallait continuer de servir sans restriction cette prime aux exploitants, l'Office de l'élevage a dû contracter un emprunt bancaire pour un montant de 78, 23 millions d'euros, frais financiers compris.

Ensuite, la PMTVA a de nouveau joué le rôle de variable d'ajustement du FNGCA en 2007, et c'est par décret d'avance qu'il a fallu abonder de 82 millions d'euros la PMTVA, alors que cette procédure doit être réservée aux dépenses urgentes et non prévisibles.

Dans ces conditions, la commission des finances fait de l'inscription de crédits au FNGCA en loi de finances initiale une question de principe.

C'est pourquoi je vous propose, mes chers collègues, de supprimer la subvention prévue pour l'Agence française d'information et de communication agricole et rurale, l'AFICAR, inscrite à l'action n° 4 du programme 215, et de doter à due concurrence, c'est-à-dire à hauteur de 1, 4 million d'euros, l'action n° 2 « Gestion des aléas de production » du programme 227, au profit du FNGCA.

La suppression des crédits de l'AFICAR ne devrait pas porter préjudice à l'accomplissement des missions essentielles du ministère de l'agriculture, puisque cette agence a vocation à organiser des expositions itinérantes ou, parfois, si j'en crois le projet annuel de performance, des colonies de vacances...

Par ailleurs, cet amendement constitue un encouragement à la rationalisation des concours du ministère de l'agriculture, qui, compte tenu de la relative « disette » budgétaire qu'il traverse, devrait s'abstenir de saupoudrer des crédits au profit d'opérateurs dont l'utilité n'est pas évidente.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

L'AFICAR est une toute petite structure. Elle est pratiquement dotée de ces seuls crédits.

Dans la logique qui avait présidé à sa création, il s'agissait de mobiliser des crédits d'État et des crédits professionnels, pour mener des opérations d'intérêt général. Pour éviter tout malentendu, je précise que l'Agence ne prend pas en charge des colonies de vacances, monsieur le rapporteur spécial. Des opérations en direction de jeunes enfants sont organisées, afin de leur faire découvrir, dans leur vie quotidienne, les produits agricoles ou issus de l'agriculture.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

Des jeux-concours sont préparés ; dans le cadre d'une campagne itinérante, un train arrive au moment du salon de l'agriculture.

J'ai réuni récemment M. Philippe Vasseur, qui préside cette structure, et les dirigeants agricoles, pour examiner comment atteindre, effectivement, l'objectif fixé, à savoir la mobilisation, au-delà de cette dotation budgétaire de 1, 4 million d'euros, de crédits professionnels, pour réaliser, grâce à une marge supplémentaire, des opérations d'intérêt général de communication dont le monde agricole a besoin. Mon souci est donc de préserver pour l'année qui vient cette activité, et d'en évaluer les initiatives - cette évaluation a été, jusqu'à présent, plutôt positive - d'ici à la fin de 2008, de façon tout à fait impartiale.

Par ailleurs, une dotation de 1, 4 million d'euros au profit du FNGCA ne serait pas à la hauteur du problème que vous posez et qui est réel, monsieur le rapporteur spécial. J'ai évoqué ce point à plusieurs reprises avec le président de la commission des finances, M. Jean Arthuis.

À la lumière du bilan de santé de la PAC et des propositions pour la future PAC, nous devrons « remettre à plat » l'ensemble des outils de gestion de crise, et pas seulement le FNGCA, qui est doté en cours d'année autant que de besoin. M. le Président de la République m'a demandé très précisément de travailler sur ce sujet. Je me suis mis à la tâche avec Mme Lagarde, notamment en ce qui concerne la généralisation de l'assurance récolte.

Franchement, comme je l'ai déjà dit plusieurs fois, au moment où nous abordons une nouvelle étape de la PAC, compte tenu du nouveau contexte économique, nous devons donner à l'ensemble des producteurs cette garantie, cette protection contre les aléas économiques, climatiques ou sanitaires.

Monsieur le rapporteur spécial, nous travaillons sur ce sujet, sur lequel vous avez mis très fortement l'accent par le biais de cet amendement, afin de mieux doter notre pays et l'Europe des outils nécessaires de stabilisation des marchés, de régulation et de gestion des aléas climatiques et sanitaires. Je ferai des propositions assez fortes en ce sens, mais, pour être efficaces, elles ne devront pas se cantonner au niveau national. Je souhaite mobiliser des crédits du premier et du deuxième pilier pour financer cette garantie, de manière partenariale, avec les crédits nationaux, les crédits professionnels et les assurances individuelles des agriculteurs, qui sont prêts à se responsabiliser.

Récemment, j'ai beaucoup étudié ce qui se fait aux États-Unis, bien que le modèle américain ne s'impose pas systématiquement à mes yeux. Le Farm Bill, toutefois, mérite une étude très précise, puisqu'il s'agit d'un système généralisé d'assurance soutenu par les pouvoirs publics.

Comme vous le savez sans doute, je me suis toujours beaucoup engagé sur ces questions de risque, en tant que ministre de l'environnement, mais aussi lorsque j'étais commissaire européen, et je continue de le faire, car Dieu sait s'il existe, dans le domaine de la protection des agriculteurs, ainsi que de la prévention et de la mutualisation des risques, de vrais progrès à accomplir. Je continue de travailler en ce sens.

Vous ayant donné ces assurances, monsieur le rapporteur spécial, je souhaiterais que vous retiriez cet amendement, pour que l'AFICAR ne soit pas sacrifiée.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Je souhaite en cet instant saluer la rigueur budgétaire tout à fait légitime de M. le président de la commission des finances, Jean Arthuis, et de M. le rapporteur spécial, Joël Bourdin.

Je leur rappelle en toute amitié, parce qu'il n'y a pas de rivalité entre les commissions, que l'AFICAR a été mise en place dans la loi relative au développement des territoires ruraux que j'avais eu l'honneur de rapporter devant le Sénat. Je vous rends d'ailleurs attentif au fait que l'application de cette loi ne mobilise pas beaucoup de crédits, puisque, par exemple, les exonérations fiscales qui avaient été prévues pour les médecins ou les professionnels de santé qui s'installaient en milieu rural sont en passe d'être supprimées.

Pour en revenir à l'Agence française d'information et de communication agricole et rurale, cette structure avait été mise en place dans cette loi, parce que la mobilisation des financements de l'État et de l'interprofession, nécessaire pour communiquer sur notre agriculture et la qualité de ses produits et lancer une information en direction d'un public assez large, rencontrait de nombreuses difficultés.

La mise en place de cette agence a sans doute été un peu longue, comme vous l'avez souligné, monsieur le ministre. Philippe Vasseur, que j'ai rencontré voilà huit jours à l'occasion d'un colloque qui se déroulait au Sénat, en est le président. Mais il faut du temps et des moyens pour la faire fonctionner.

Pour avoir eu l'occasion de rencontrer des responsables agricoles nationaux, je peux vous dire que ces derniers tiennent beaucoup à l'AFICAR. Ils vous proposent même, monsieur le ministre, d'y apporter des participations financières interprofessionnelles, et peut-être même de l'ensemble du monde agricole.

Je plaide bien sûr auprès de Jean Arthuis et de Joël Bourdin le retrait de cet amendement, parce que je souhaiterais que cette agence puisse fonctionner pendant un an.

S'agissant du FNGCA, vous avez évoqué, monsieur le ministre, l'assurance récolte, qui a fait l'objet de longues discussions au sein de la commission des affaires économiques. Cette assurance est aujourd'hui effective, avec, au niveau national, 66 000 contrats. La commission fera des propositions dans ce domaine, car nous devrons aller bien au-delà, en prévoyant une « assurance aléas ».

Vous avez d'ailleurs cité, monsieur le ministre, la fièvre catarrhale. Mais il ne faut pas séparer la problématique des céréaliers de celle des éleveurs ! À mon avis, cette assurance aléas doit - c'est sur ce point que nous avions d'ailleurs débattu à l'époque - avoir une assiette très large et, donc, être rendue obligatoire. Les agriculteurs qui connaissent régulièrement des calamités ne doivent pas être les seuls à s'assurer.

Il faut également, bien sûr, solliciter une participation financière du ministère de l'agriculture. Nous pourrions aussi, dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune, demander des fonds européens, pour encourager vraiment l'ensemble des agriculteurs de notre pays à s'assurer, afin qu'un aléa climatique ou sanitaire ne puisse plus mettre en péril leurs exploitations agricoles.

Par conséquent, mes chers collègues, essayez d'aider l'AFICAR !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

J'adhère totalement aux propos que vient de tenir Jean-Paul Emorine. Nos commissions oeuvrent naturellement en parfaite synergie.

Toutefois, nous sommes ici dans le cadre d'une discussion budgétaire et chacun est conscient que le développement durable prohibe le déficit public en ce qu'il sacrifie l'avenir au présent.

S'agissant de l'AFICAR, nous avons ressenti un certain scepticisme, au moment même de sa création. Nous voulons, monsieur le ministre, vous rendre attentif à ce qui se passe chez les opérateurs de l'État.

L'année dernière, Joël Bourdin avait conduit une mission auprès des Haras nationaux. Les conclusions ont été diversement appréciées, et je ne suis pas sûr que les préconisations aient été suivies d'effet. Il faudra donc, sans doute, « en remettre une couche », si je puis dire, pour vérifier que les principes sont respectés.

S'agissant de l'AFICAR, ce qui a suscité notre attention, c'est la richesse de l'information que vous mettez à la disposition du Parlement, monsieur le ministre : « L'agence a commencé à fonctionner en 2006, après la publication du décret n° 2006-95 du 1er février 2006, qui a fixé les conditions de son organisation et de son fonctionnement. Une première campagne intitulée ?Le Train de la Terre?, consistant en une exposition itinérante sur le thème ?L'agriculture et la forêt dans votre quotidien?s'est déroulée en 2007 sur l'ensemble du territoire. Une opération similaire est prévue en 2008. Deux autres opérations devraient également être reconduites. Elles se déroulent en partenariat avec les centres de loisirs et s'adressent aux enfants et adolescents ne partant pas en vacances. Appréciées en 2007 par les collectivités locales, elles devraient être reconduites en 2008. »

Il s'agit donc d'une action assez diffuse.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial. J'ai tort de parler après M. le président de la commission des finances, mais je lui demande l'autorisation de faire un contrôle sur pièces et sur place dès 2008. Non pas que je veuille prendre le train itinérant de l'AFICAR !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Au demeurant, je suis bien évidemment d'accord pour retirer cet amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° II-37 est retiré.

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » figurant à l'état B.

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits du compte spécial « Développement agricole et rural » figurant à l'état D.

En euros

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Développement agricole et rural

Développement agricole et rural pluriannuel

Innovation et partenariat

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

J'appelle en discussion les articles 41, 41 bis et 41 ter, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ».

Dans le deuxième alinéa de l'article L. 514-1 du code rural, les mots : « pour 2007, à 1, 8 % » sont remplacés par les mots : « pour 2008, à 1, 7 % ». -

L'article 41 est adopté.

I. - Les deux dernières phrases du deuxième alinéa de l'article L. 256-2 du code rural sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :

« Cet agrément est délivré et peut être retiré au vu d'un avis technique délivré par l'organisme mentionné à l'article L. 256-2-1. »

II. - Après l'article L. 256-2 du code rural, il est inséré un article L. 256-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 256-2-1. - Un groupement d'intérêt public, constitué dans les conditions prévues aux articles L. 341-1 à L. 341-4 du code de la recherche, apporte à l'autorité administrative son appui technique dans la définition et la mise en oeuvre des procédures de contrôle et d'agrément prévues à l'article L. 256-2 du présent code et son expertise pour la recherche et la constatation des infractions aux prescriptions mentionnées à l'article L. 256-1.

« Les organismes d'inspection mentionnés à l'article L. 256-2 s'acquittent annuellement auprès de ce groupement d'intérêt public d'une somme forfaitaire fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture, de l'environnement et du budget, dans la limite de 4 € par contrôle effectué. Le montant exigible peut être modulé si l'organisme d'inspection est accrédité dans des conditions fixées par le décret prévu à l'article L. 256-3. Il est versé dans les deux mois suivant l'année civile concernée.

« Les organismes d'inspection non accrédités s'acquittent d'une somme fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture, de l'environnement et du budget, dans la limite de 3000 € par inspecteur employé par l'organisme d'inspection et par visite nécessaire pour rendre les avis techniques mentionnés à l'article L. 256-2. Ce montant peut être modulé selon l'importance de l'organisme. Le montant exigible est versé au plus tard un mois avant la date à laquelle cette visite est programmée par le groupement d'intérêt public et, pour la première visite, au moment du dépôt de la demande d'agrément.

« Le recouvrement de ces sommes est assuré par l'agent comptable du groupement d'intérêt public selon les procédures, sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d'affaires. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées comme pour les taxes sur le chiffre d'affaires. » -

Adopté.

L'article L. 642-13 du code rural est ainsi rédigé :

« Art. L. 642-13. - Il est établi au profit de l'Institut national de l'origine et de la qualité, ci-après dénommé l'institut, un droit sur les produits bénéficiant d'une appellation d'origine ou d'une indication géographique protégée.

« Les taux des droits sont fixés sur proposition du conseil permanent de l'institut et après avis du comité national compétent, par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, dans les limites suivantes :

« - 0, 10 € par hectolitre pour les vins d'appellation d'origine ;

« - 0, 08 € par hectolitre ou 0, 8 € par hectolitre d'alcool pur pour les boissons alcoolisées d'appellation d'origine autres que les vins ;

« - 8 € par tonne pour les produits agroalimentaires ou forestiers d'appellation d'origine autres que les vins et les boissons alcoolisées ;

« - 5 € par tonne pour les produits bénéficiant d'une indication géographique protégée.

« Ce droit est acquitté annuellement par les opérateurs habilités, sur la base des quantités produites en vue d'une commercialisation en appellation d'origine ou en indication géographique protégée au cours de l'année précédente. Sur proposition du conseil permanent de l'institut et après avis du comité national compétent, cette base peut être la moyenne des quantités produites au cours des deux ou des trois années précédentes.

« Les quantités produites en vue d'une commercialisation en appellation d'origine ou en indication géographique protégée sur lesquelles le droit est perçu s'entendent déduction faite des quantités retirées volontairement par l'opérateur. Elles incluent les produits destinés au consommateur final ou à des entreprises de transformation, sur le marché intérieur ou à l'exportation, et quel qu'en soit le conditionnement.

« Les quantités sur lesquelles ces droits sont perçus sont établies sur la base des déclarations effectuées par les opérateurs habilités dans des conditions précisées par les arrêtés fixant le montant des droits.

« Pour les produits bénéficiant d'une indication géographique protégée, le droit est exigible sur les quantités produites à partir de la date de publication du règlement de la Commission européenne enregistrant la dénomination dans le registre des appellations d'origine protégée et des indications géographiques protégées prévu par le règlement (CE) n° 510/2006 du Conseil, du 20 mars 2006, relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d'origine des produits agricoles et des denrées alimentaires, ou dès publication de l'arrêté prévu à l'article L. 641-11 homologuant le cahier des charges de l'indication géographique protégée si ce cahier des charges comprend des dispositions organisant la protection transitoire de cette dénomination dans les conditions prévues par le règlement (CE) n° 510/2006 du Conseil, du 20 mars 2006, précité.

« Les droits sont liquidés et recouvrés auprès des opérateurs habilités par l'institut selon les règles et sous les garanties, privilèges et sanctions prévus en matière de contributions indirectes. » -

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

J'appelle en discussion l'amendement n° II-109 rectifié, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° II-109 rectifié, présenté par M. Biwer et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 41, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement présentera au Parlement un rapport sur la simplification administrative et la réorganisation des contrôles dans le secteur agricole, dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi de finances.

La parole est à M. Daniel Soulage.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Chacun peut le constater, les agriculteurs sont confrontés à de multiples obligations administratives : ils doivent remplir de nombreux formulaires, notamment pour bénéficier des aides européennes, et se soumettre à des contrôles répétés, parfois tatillons.

Cet amendement vise à remettre à plat l'ensemble des contraintes administratives auxquelles ils sont soumis pour permettre d'en alléger le poids, qu'ils ressentent mal.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

La commission s'en remet à la sagesse du Sénat, mais elle attend avec intérêt l'avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Michel Barnier, ministre

J'émets un avis favorable.

En effet, compte tenu de la situation, il me paraît bon que le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la simplification administrative et la réorganisation des contrôles dans le secteur agricole, et ce dans le délai de six mois qui est prévu dans l'amendement.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 41 ter.

Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » et des crédits du compte spécial : « Développement agricole et rural ».

Permettez-moi, mes chers collègues, de remercier M. le ministre de son engagement au service de notre agriculture.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Culture » et du compte spécial : « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits inscrits au titre de la mission « Culture » sont pratiquement stables depuis 2006 et représentent 1 % des crédits de paiement du budget général de l'État, soit 2, 77 milliards d'euros. L'effort principal porte sur le programme « Patrimoines », qui mobilise à lui seul près de 49 % des crédits de la mission. Certaines années ont favorisé le « spectacle vivant », l'année 2008 sera plutôt celle du patrimoine.

Il convient toutefois de prendre en compte la suppression de l'affectation de 70 millions d'euros du produit des droits de mutation à titre onéreux au Centre des monuments nationaux. Cette suppression était souhaitée en raison des circonvolutions administratives et financières mises en place entre le Centre et la direction de l'architecture et du patrimoine.

Si l'on neutralise cette mesure de périmètre, le budget de la mission « Culture » progresse de 0, 5 % par rapport à 2007.

On peut, certes, s'interroger sur le niveau optimal des crédits qui devraient être consacrés à la culture. Je voudrais, pour ma part, faire valoir que cette augmentation n'est pas négligeable, en période de forte contrainte budgétaire.

En outre, on doit faire preuve d'une certaine prudence dans l'analyse, s'agissant en particulier des dépenses de personnel. En effet, les effectifs prévus par le plafond ministériel d'emploi diminuent de 286 unités par rapport à 2007, pour s'établir à 11 256 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT. Mais, à côté de ces personnels, on dénombre 14 370 ETPT au sein des opérateurs culturels. J'observe ainsi que, en deux ans, les effectifs du ministère diminuent de 374 ETPT, alors que ceux des opérateurs progressent de 565 unités.

À cet égard, je m'interroge sur la capacité du ministère de la culture et de la communication à assurer la tutelle des soixante-dix-huit établissements publics, qui captent 40 % des crédits du ministère et contribuent à l'essentiel de la politique culturelle française.

J'ai récemment remis un rapport sur ce sujet, qui constate que le ministère de la culture n'a pas revu son organisation en fonction de la LOLF et n'a pas, en particulier, intégré la notion de pilotage par la performance.

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Cette situation pose les deux questions de fond suivantes : les grands établissements publics culturels sont-ils des instruments de la politique culturelle ou des entités autonomes, définissant elles-mêmes leurs priorités culturelles ? Existe-t-il encore une politique culturelle nationale, quand près de la moitié des moyens humains et financiers du ministère de la culture transite par les établissements publics ? Je reconnais que cette question a un caractère un peu provocateur...

Au terme de mon enquête, j'ai recommandé de rationaliser la tutelle du ministère de la culture et d'impliquer dans son exercice les responsables des différents programmes. Il est également essentiel que des contrats de performances soient établis entre les établissements et le ministère. Je souhaite donc, madame la ministre, que vous nous précisiez les suites que vous entendez donner à mes recommandations.

Je ferai maintenant quelques observations plus ciblées.

Tout d'abord, madame la ministre, je veux insister sur ce que l'on pourrait appeler, d'un terme jargonneux, la « soutenabilité » de la politique culturelle, tout particulièrement dans le domaine du patrimoine. Le programme 175 est, en effet, le plus contraint, puisque les crédits de paiement demandés serviront, en 2008, pour 12, 6 %, à couvrir des autorisations d'engagement antérieures à cet exercice. En 2009, cette proportion passera à 41, 65 %.

On pourrait continuer ainsi pendant les dix prochaines années, ce qui aboutirait à démontrer que, pratiquement, on ne pourra plus rien faire de nouveau, ce qui est sans doute excessif.

Sur l'ensemble des programmes de la mission, les crédits de paiement destinés à couvrir des autorisations d'engagement demandées avant 2008 représenteront 6, 5 % du total alloué en 2008. En 2009, ils s'élèveront à 20, 84 % des crédits de paiement de l'année, si le budget de la mission n'augmente pas, ce qui semble plausible dans le contexte budgétaire actuel. Cette situation suscite une certaine inquiétude.

Cette contrainte budgétaire pèse dès à présent sur les programmes de la mission « Culture » et je souligne que les engagements nouveaux devront être probablement encadrés, dans le domaine des monuments historiques, tout comme dans celui de la réalisation d'équipements culturels nouveaux.

Il faut en être conscient : les contraintes budgétaires devront se traduire par des choix drastiques dans tous les secteurs de la politique culturelle. J'aimerais avoir quelques informations sur vos orientations à ce sujet, madame la ministre.

Afin de disposer d'une vision claire des enjeux, la commission avait demandé, l'an dernier, la transmission d'un rapport sur l'état sanitaire du patrimoine monumental français. Ce rapport n'a pas encore été communiqué au Parlement, alors que le délai prévu a expiré. Je souhaite donc, madame la ministre, que vous relanciez vos services, afin que ce rapport nous soit remis dans les meilleurs délais.

Ma deuxième observation, plus positive, concerne l'Institut national de recherches archéologiques préventives, l'INRAP, dont la subvention d'équilibre est prorogée, pour 2008, à hauteur de 9, 07 millions d'euros. La situation de cet établissement - auquel la commission des finances s'est beaucoup intéressée voilà deux ans - s'est améliorée depuis la parution de mon rapport d'information, et j'observe, en particulier, l'augmentation du produit de la redevance d'archéologie préventive, qui est passé, entre 2005 et 2006, de 32 millions d'euros à 66, 6 millions d'euros.

Il est toutefois nécessaire de garantir, par des crédits budgétaires, l'équilibre des finances de cet établissement public. Je l'avais d'ailleurs indiqué dès l'examen du projet de loi de finances pour 2006, à un moment où le ministère de la culture, sans doute un peu trop optimiste, ne le jugeait pas utile.

Je voudrais souligner que cette subvention devrait permettre, sans toutefois y suffire, de stabiliser la situation financière de l'INRAP, si elle va de pair avec le maintien d'une politique très stricte de gestion des ressources humaines.

Néanmoins, et là réside la difficulté, ce strict encadrement des recrutements doit être compatible avec un délai de traitement moyen des fouilles archéologiques acceptable par les entrepreneurs et les collectivités territoriales concernées.

J'observe, par ailleurs, que l'INRAP n'a pas profité de l'assainissement de ses ressources pour rembourser le prêt du Trésor qui lui a permis de couvrir ses déficits successifs depuis 2002, soit 23 millions d'euros : 15, 5 millions d'euros doivent encore être remboursés. D'ailleurs, les taux d'intérêt demandés par le Trésor ne sont pas négligeables.

Enfin, j'estime que le ministère de la culture doit poursuivre son effort de rationalisation de la politique d'archéologie préventive en réunissant sans tarder, comme il s'y est engagé devant le Sénat, le Conseil national de la recherche archéologique.

L'idée est évidemment de définir des priorités dans le cadre d'une carte archéologique qui serait susceptible de nous donner un certain nombre de bases, mais c'est peut-être un rêve difficile à réaliser !

Je souhaite donc, madame la ministre, que vous nous fassiez part de vos orientations sur ces différents points et, surtout, que vous puissiez présider vous-même l'une des réunions du Conseil national de la recherche archéologique. Bien que j'aie adressé à plusieurs reprises la même demande à votre prédécesseur, il a toujours envoyé à sa place le directeur de l'architecture et du patrimoine, personnalité éminente et infiniment respectable, qui n'est cependant pas en capacité de prendre des engagements politiques.

Ma troisième observation porte sur le Centre national de la cinématographie, le CNC. À ce jour, les taxes qui alimentent le soutien à l'audiovisuel et au cinéma transitent par le compte d'affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale ».

Ce système présente de réels inconvénients. En effet, les crédits alloués au cinéma et ceux qui sont destinés à la télévision sont gérés de manière étanche, alors que la distinction des supports n'a plus de sens à l'heure de la numérisation et empêche les régulations entre les sections du compte.

Sur le plan comptable, le CNC ne peut pas retracer ses créances dans son bilan. En outre, la comptabilisation des recettes affectées au compte d'affectation spéciale se fait sur la base des encaissements et non des droits constatés, ce qui contribue à déséquilibrer la structure financière du CNC.

J'estime donc que l'affectation directe des taxes au CNC présenterait de nombreux avantages. Je soutiendrai ainsi la mesure proposée à l'article 34 du projet de loi de finances rectificative pour 2007, dans l'attente de la réforme de la gouvernance du CNC. Vos services ne semblent pas opposés à cette orientation, madame la ministre.

L'amendement proposé à ce sujet par la commission des finances nous permettant de débattre de manière plus approfondie de l'expérimentation de la gratuité des musées, puisqu'il prévoit le dépôt d'un rapport, je voudrais vous faire part ici des inquiétudes engendrées par la proposition de loi de notre collègue député Jean-François Mancel, tendant « à établir une réelle liberté de gestion des établissements culturels ». Notre collègue député propose de classer les oeuvres détenues par les musées français en deux catégories : d'une part, les « trésors nationaux », oeuvres qui, compte tenu de leur importance, ne pourraient quitter le territoire national et seraient inaliénables ; d'autre part, les « oeuvres libres d'utilisation », qui seraient aliénables et pourraient être louées ou vendues, sous réserve de l'accord d'une commission du patrimoine culturel.

J'entends bien que l'on ne peut pas continuer à accumuler indéfiniment dans les musées des objets qui sont peut-être des « rossignols ». Mais sait-on seulement ce que ces « rossignols » seront à l'avenir ?

Cette proposition de loi va en tout cas à l'encontre de la tradition française et a déclenché de vives inquiétudes dans les milieux museaux. Je souhaite donc que vous nous fassiez partager l'analyse du Gouvernement sur ce sujet.

Enfin, ce point ayant fait l'objet de débats en commission des finances, je voudrais attirer l'attention du Gouvernement sur le décret qui doit permettre aux directions régionales des affaires culturelles d'assister les communes et prévoir la possibilité, pour les DRAC, d' « héberger » les procédures de passation des marchés publics des petites communes. Madame la ministre, ce décret est attendu et nous souhaiterions connaître l'état d'avancement de sa rédaction.

Sous le bénéfice de ces observations et de l'amendement qu'elle présente, la commission des finances propose au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Culture » pour 2008, ainsi que ceux du compte d'affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale ».

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nachbar

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, il m'appartient de rapporter les crédits du programme « Patrimoines » et ceux du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », qui représentent respectivement 41 % et 38 % du projet de budget de la mission « Culture ».

Les cinq minutes qui me sont imparties ne me permettent évidemment pas de présenter l'architecture de ces crédits, et je connais trop les rigueurs de la procédure, et la rigueur du président, pour m'affranchir du délai qui m'est accordé et qui évoque irrésistiblement le lit de Procuste de la mythologie !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nachbar

Je me contenterai donc d'aborder trois aspects, les plus importants à mes yeux, de ces deux programmes.

Tout d'abord, en ce qui concerne le patrimoine monumental, l'examen des dotations montre que 334 millions d'euros, soit 30 millions d'euros de plus qu'en 2006 et 17 millions d'euros de moins qu'en 2007, sont prévus en autorisations d'engagement. Compte tenu des contraintes budgétaires qu'évoquait à l'instant mon collègue de la commission des finances, l'effort est réel.

Cependant, la commission des affaires culturelles du Sénat n'a pas caché son inquiétude quant à l'exécution du budget en 2008. Toute mesure de régulation serait lourde de conséquences pour le patrimoine tant public que privé et, par conséquent, pour les entreprises spécialisées dans la restauration des monuments, qui ont vécu, en 2005 et en 2006, une véritable crise.

Comment ne pas rappeler, à cet égard, les propos du Président de la République inaugurant le Palais de l'architecture et du patrimoine et évoquant la mobilisation d'une somme de 4 milliards d'euros sur dix ans pour être à la hauteur des besoins du patrimoine en France ?

Nous serons donc à vos côtés, madame la ministre, pour défendre les crédits du patrimoine et limiter les effets de la rigueur budgétaire en 2008.

Cela concerne le patrimoine monumental de l'État, mais aussi celui des collectivités territoriales. Il faut souligner que 60 % des monuments classés et 45 % de l'ensemble du patrimoine appartiennent aux collectivités locales, pour l'essentiel aux communes. À cet égard, je signale qu'elles attendent avec impatience la mise en oeuvre de la réforme de la maîtrise d'ouvrage, qui doit en principe faire prochainement l'objet de textes d'application.

J'évoquerai aussi le patrimoine privé, qui représente 49 % du patrimoine total et 35 % des monuments historiques classés. Dans ce domaine, l'État doit encourager la diversification des moyens de financement. Sur ce plan, les propriétaires privés attendent avec beaucoup d'impatience la publication des décrets d'application de l'amendement voté l'année dernière sur l'initiative du rapporteur spécial du budget et visant à étendre le bénéfice des dispositions de la loi relative au mécénat, aux associations et aux fondations. Nous en espérons beaucoup.

Je voudrais maintenant saluer le défi, que le ministère s'est lancé, d'instaurer la gratuité dans les musées. En 2008 sera menée une expérimentation qui durera six mois et concernera quatorze musées, huit en province, six à Paris. L'objectif est d'encourager l'accès de tous à la culture. Chacun d'entre nous ne peut que se féliciter de cette expérience ; le Sénat considère que la culture pour tous est un des moyens privilégiés d'assurer l'égalité des chances ou ce que l'on aurait appelé autrefois, d'un mot cher à Jean Vilar, « l'élitisme pour tous ».

Néanmoins, la commission des affaires culturelles s'est interrogée sur l'incidence financière d'une telle mesure. Compte tenu des contraintes qui pèsent sur l'ensemble des crédits, ceux de votre ministère pourront-ils l'an prochain compenser le manque à gagner important que subiront les musées concernés par cette expérimentation ?

Au-delà de la question de la gratuité, le débat doit porter sur les réelles mesures d'éducation qui permettront d'élargir le public des musées hors du cercle des habitués.

Je voudrais citer ici la formule qui figure au fronton du palais de Chaillot : « Ami, n'entre pas ici sans désir. » C'est, je crois, autant le désir d'art et de beauté que la gratuité d'entrée qui permettront d'étendre, comme nous le souhaitons tous, le public des musées.

En tout cas, le défi que se lance votre ministère est important. Je ne doute pas un seul instant que vous saurez le relever. Nous aurons l'occasion d'en discuter à nouveau dans le courant de l'année prochaine, lorsque les résultats de l'expérimentation auront été mesurés par un organisme indépendant.

Je voudrais enfin mettre en exergue, pour m'en féliciter, l'effort consenti, dans ce projet de budget, en faveur de l'éducation culturelle et artistique. Les crédits affectés augmentent de 6 %, ce qui est méritoire en ces temps de difficultés et de rigueur budgétaire. Ils s'élèvent à 32 millions d'euros et traduisent une réelle volonté politique, que je veux ici saluer.

Cet effort permettra de financer, en étroite liaison avec le ministère de l'éducation nationale, des opérations exemplaires, telles que les ateliers artistiques dans les lycées et les collèges, le soutien aux services éducatifs des musées - le nombre de ces structures se multiplie aujourd'hui sur l'initiative des communes pourvues d'un musée -, la formation des enseignants, des actions spécifiques dans les écoles.

S'agissant des actions en milieu scolaire, deux mesures nouvelles m'apparaissent particulièrement intéressantes.

Il s'agit de l'introduction, tant attendue, de l'enseignement de l'histoire de l'art dans les établissements d'enseignement et de la mise en place de liens contractuels entre établissements scolaires et établissements culturels. Ces dispositions permettront, je le crois, d'ouvrir le monde de la culture aux plus jeunes. C'est parmi eux que se recrute le public qui demain fréquentera avec bonheur les musées, les théâtres ou les salles de concert.

Malgré les contraintes, votre projet de budget, madame la ministre, traduit une réelle volonté de démocratiser la culture. C'est la raison pour laquelle la commission des affaires culturelles, qui a tenu à marquer à la fois son soutien à cette volonté de démocratisation et sa vigilance pour ce qui est du patrimoine monumental, a donné un avis favorable à l'adoption des crédits.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je salue votre performance, mon cher collègue, car vous avez su respecter votre temps de parole sans rien sacrifier de la densité de votre propos !

La parole est à M. Serge Lagauche, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Lagauche

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vous présenterai d'abord, pour ce qui me concerne, le programme « Création », qui représente 38 % des interventions de la mission « Culture » et dont les crédits connaîtront une quasi-stagnation en 2008.

Ce projet de budget s'établit, hors dépenses de personnel, à 736, 6 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 739, 3 millions d'euros en crédits de paiement. En intégrant les dépenses de personnel, le programme atteint 798, 23 millions d'euros en crédits de paiement et 798, 23 millions d'euros en autorisations d'engagement ; la progression est donc seulement de 0, 1 % pour les crédits de paiement et de 0, 6 % pour les autorisations d'engagement.

La première action concerne le spectacle vivant, qui représente 38 % du programme et avait constitué une priorité ces dernières années : sa part dans le budget du ministère était passée de 24 % en 1999 à 35, 9 % en 2006. Après être revenue cependant à 32, 32 % en 2007, elle sera de 30, 87 % en 2008. Les crédits diminueront, par conséquent, de 0, 38 %, ce qui inquiète bien entendu les professionnels concernés.

Les opérateurs nationaux auront un budget contraint ; il leur est donc demandé de poursuivre leurs efforts de rationalisation et de développer de nouvelles ressources, afin d'accroître leurs marges de manoeuvre. À cet égard, avez-vous envisagé, madame la ministre, que les festivals dédiés au spectacle vivant puissent bénéficier des dispositions applicables en matière de mécénat ?

J'avais salué l'an dernier l'ajout d'un indicateur concernant la « part des structures bénéficiant d'une subvention de fonctionnement ayant signé une convention avec l'État ». Il nous semble important que cet indicateur soit désormais respecté, ce qui suppose un renforcement de la politique de contractualisation de l'État avec les structures dont il subventionne le fonctionnement. Dans cet ordre d'idée, je regrette le retard pris dans la mise en place des contrats d'objectifs et de moyens des scènes nationales.

Par ailleurs, j'insiste à nouveau sur la nécessité d'amplifier la diffusion des spectacles.

Certains progrès ont été réalisés depuis la publication du rapport de Bernard Latarjet, qui a jeté la lumière sur les insuffisances en la matière, mais l'évolution s'avère lente. C'est dans le domaine du théâtre et du cirque que les efforts sont le plus importants, puisque chaque spectacle fait l'objet, en moyenne, de 3, 7 représentations, contre 2, 6 représentations toutes disciplines confondues. Mais ces chiffres restent très faibles, et il faut renforcer les efforts dans ce domaine.

Le nécessaire développement de la circulation des spectacles entre les théâtres vaut, au premier chef, pour le réseau des théâtres publics. À cet égard, je souhaite que soient pris aussi en compte les théâtres municipaux. Une meilleure circulation des oeuvres doit également être encouragée entre théâtres publics et théâtres privés. Nous manquons d'informations complètes et fiables dans ces domaines, aussi sommes-nous favorables à la création d'un observatoire du spectacle vivant, qui centraliserait l'ensemble des données statistiques et pourrait produire des données incontestables, notamment sur la place de la création contemporaine et des auteurs vivants dans les théâtres. Que pensez-vous, madame la ministre, de l'idée de confier cette mission au Centre national du théâtre ?

Pour ce qui concerne les arts plastiques, qui représentent 10, 5 % du programme, la hausse des crédits en leur faveur est importante, puisqu'elle atteint 8 %. Nous saluons en outre le « plan de renouveau pour le marché de l'art », que vous avez annoncé en septembre dernier.

Pour ce qui concerne le livre et la lecture, qui représentent 4, 1 % du programme, nous nous réjouissons du lancement d'un « plan livre », que nous avions appelé de nos voeux. Les librairies indépendantes, fragiles, seront les premières concernées.

Ce plan reprend partiellement les propositions du rapport « Livre 2010 » et d'Antoine Gallimard, mais aussi celles qui avaient été avancées par notre commission dans son rapport d'information. Cependant, pourquoi ne pas reprendre l'idée de créer un médiateur du livre, madame la ministre ? Je sais que l'ensemble des professionnels ne l'approuvent pas, mais ne serait-ce pas là le moyen de rééquilibrer un rapport de force le plus souvent défavorable aux auteurs ?

S'agissant de la musique, la situation est très inquiétante, les entreprises étant particulièrement affaiblies par le piratage des oeuvres. Ainsi, depuis 2003, le marché du support musical aura perdu 43, 6 % en volume et 44, 8 % en valeur !

Madame la ministre, pouvez-vous nous préciser les modalités du « plan de sauvetage » annoncé pour cette industrie, qui prévoyait notamment une baisse de la TVA sur le disque, mais aussi l'engagement d'actions innovantes ?

J'en viens à ce que j'ai appelé la « permanence de la question de l'intermittence ».

La Cour des comptes a analysé la gestion du régime d'indemnisation des intermittents du spectacle. Elle conclut que, si l'on tente d'établir un bilan des dispositifs existants au regard des objectifs assignés, force est de constater qu'ils n'y ont qu'imparfaitement satisfait : le système des annexes 8 et 10 de l'assurance chômage n'est pas entièrement vertueux, et le dispositif ne semble pas avoir permis à l'UNEDIC de réaliser les économies attendues.

Lors de la dernière réunion, le 15 octobre dernier, du Comité national des professions du spectacle, le CNPS, vous aviez indiqué, madame la ministre, vouloir demander au Premier ministre de reconduire en 2008 le dispositif applicable aux allocataires du Fonds de professionnalisation et de solidarité, financé par l'État. Où en sommes-nous aujourd'hui, et pouvez-vous nous apporter des précisions sur l'utilisation des fonds publics déjà engagés à ce titre ?

Par ailleurs, je m'inquiète du retard pris dans la négociation des conventions collectives, alors que l'on avait fixé pour objectif de les avoir conclues à la fin de 2006. En effet, si des progrès ont été réalisés dans certains domaines, les discussions semblent s'enliser sur d'autres sujets...

Au total, les artistes et techniciens sont inquiets.

Nous insistons pour que, dans le cadre de la renégociation du régime général d'assurance chômage qui se déroulera en 2008, les partenaires sociaux prennent en compte les spécificités des professions artistiques. Un équilibre doit être légitimement trouvé pour cela, sans pour autant que l'assurance chômage soit conduite à prendre en charge ce qui relève d'autres acteurs : de l'État, au titre de la solidarité nationale ou de la politique culturelle, des employeurs ou des collectivités territoriales.

En conclusion, je vous indique que la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Création » de la mission « Culture » pour 2008.

Applaudissements au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Lagauche

S'agissant maintenant du compte d'affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale », je constate que le secteur du cinéma est globalement en « bonne santé » économique. Le nombre de films produits en 2006 est identique à celui de 2004, après le record enregistré en 2005. Par ailleurs, la fréquentation des salles a progressé de 7, 6 % et la part des films français s'établit à 44, 7 %. Elle n'avait pas été aussi élevée depuis 1984. En outre, les exportations de films français à l'étranger se sont bien tenues en 2006, même si certaines évolutions s'avèrent préoccupantes dans ce domaine.

Cependant, ce tableau positif ne doit pas dissimuler des fragilités, ainsi que la nervosité d'un certain nombre des professionnels que j'ai auditionnés.

Je pense, en premier lieu, au secteur de la vidéo. Ce marché a subi une diminution de 5, 2 % en volume et de 7 % en valeur en 2006, puis une nouvelle baisse de 0, 4 % et de 7 % respectivement au cours du premier semestre de 2007. La vidéo à la demande, quant à elle, démarre lentement.

Je pense, en second lieu, au problème du piratage massif des oeuvres. Depuis l'adoption de la loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, les technologies et les comportements des internautes ont continué à évoluer, et il est, nous le savons, particulièrement difficile de réglementer un secteur aussi sujet à mutations. Toutefois, l'évolution des technologies permet aussi d'envisager de nouveaux moyens de lutter contre ce fléau.

Notre commission se réjouit sincèrement de la signature, le 23 novembre dernier, de l'accord pour le développement et la protection des oeuvres culturelles sur les nouveaux réseaux. Ainsi, dans un délai très rapide, la mission confiée à M. Denis Olivennes a permis d'aboutir, pour la première fois, à une position commune des acteurs du monde de la musique, du cinéma, de l'audiovisuel et des fournisseurs d'accès. Nous tenions à ce que la responsabilité, dans ce domaine, soit partagée entre ces différents intervenants.

Cet accord permettra de protéger nos industries culturelles du fléau de la piraterie de masse. Finie l'idée que la création est gratuite ! Les ayants droit seront mieux respectés, mais l'accord profitera également aux consommateurs, et ce de deux manières : d'une part, en raison de la suppression des mesures techniques de protection qui empêchent d'écouter les titres téléchargés légalement sur tous les types d'appareils ; d'autre part, par l'amélioration de l'offre légale de musique et de films, qui sera plus rapidement disponible sur Internet et moins onéreuse.

La procédure d'avertissement préalable des internautes par le biais d'une autorité indépendante, qui, en cas de récidive, pourrait prononcer des sanctions, nous semble tout à fait adaptée ; elle viendra utilement compléter cette loi.

Pour notre commission, l'Autorité de régulation des mesures techniques, créée à l'initiative du Sénat, devrait se voir confier ces nouvelles responsabilités. Que pensez-vous de cette proposition, madame la ministre ?

Un autre sujet de préoccupation tient à la nécessité de repenser et de réaffirmer la complémentarité entre politique culturelle et droit de la concurrence.

Cette question recouvre de nombreux sujets. Je pense notamment à la carte illimitée. Le récent agrément accordé à la nouvelle carte illimitée a suscité bien des polémiques. Madame la ministre, s'agit-il d'un procès d'intention ou d'un risque véritable de spoliation des ayants droit ?

Par ailleurs, je m'inquiète des possibles conséquences de la remise en cause, par le Conseil de la concurrence, du code de bonne conduite qui encadrait, depuis 1999, les relations entre distributeurs et exploitants, et qui tenait compte de l'économie extrêmement particulière de la diffusion des films en salles. Il serait souhaitable d'éviter tout phénomène de « guerre des prix » dans le secteur du cinéma qui porterait préjudice à l'ensemble du secteur.

En ce qui concerne la cohabitation entre salles privées et salles publiques, l'équilibre est tellement fragile qu'il convient d'y veiller en permanence et de prendre en compte, bien entendu, les réalités locales.

Tous ces sujets justifient à l'évidence la mission sur le thème « Cinéma et droit de la concurrence » qui a été confiée à Anne Perrot et à Jean-Pierre Leclerc. Disposez-vous, madame la ministre, des premiers résultats de cette mission ?

L'équipement du territoire en salles de cinéma est désormais globalement satisfaisant.

Dans le cas où le Gouvernement, suivant les préconisations de la commission Attali, proposerait d'abroger les lois Royer de 1973 et Raffarin de 1996, notre commission juge absolument nécessaire de maintenir les dispositions régulant les créations et extensions d'établissements cinématographiques.

Pour ce qui concerne la projection numérique, la politique en ce domaine me semble se situer entre frilosité et volontarisme. Les exploitants, souvent en situation économique fragile, ne montrent pas tous le même empressement à sauter le pas de la projection numérique. En outre, le modèle économique permettant un développement de ces technologies dans les salles de cinéma n'a pas encore été trouvé à ce jour dans notre pays, même si les réflexions progressent.

L'accompagnement de ces mutations soulève des questions de régulation publique et appelle, sans doute, une adaptation du soutien financier géré par le CNC. Il nous apparaît essentiel que les modes de financements garantissent l'indépendance de programmation des exploitants.

Tant les pouvoirs publics que les professionnels devront également veiller à ce que des écarts ne se creusent pas durablement entre des salles « à plusieurs vitesses ». À cette fin, une attention particulière devra sans doute être portée aux salles d'art et essai, ainsi qu'aux salles jouant un rôle spécifique en matière d'aménagement culturel du territoire.

Dans ce contexte, le programme 711, consacré aux industries cinématographiques, devrait bénéficier d'une hausse de 4, 54 % en 2008, pour s'établir à 280, 8 millions d'euros. Le secteur continuera aussi à être soutenu par une politique fiscale incitative.

Je me suis interrogé sur l'idée d'une taxation des recettes de publicité de la vidéo à la demande, qui me semblerait pertinente et respectueuse du principe de la neutralité technologique.

Il nous a semblé toutefois opportun d'attendre l'an prochain, compte tenu des réflexions en cours sur la réforme du dispositif de soutien du CNC et des règles régissant la publicité télévisée.

Enfin, j'insiste pour que la pérennisation à long terme du régime d'aides publiques aux oeuvres cinématographiques et télévisuelles soit inscrite à l'agenda de la prochaine présidence française de l'Union européenne.

Je conclurai en vous indiquant que la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 711.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

En outre, conformément aux décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quarante minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Madame la ministre, depuis votre prise de fonction rue de Valois, nous assistons à l'ouverture de nombreux chantiers dans plusieurs secteurs de notre politique culturelle : missions Olivennes sur le téléchargement illégal, Gross sur l'éducation artistique et culturelle, « Grenelle de l'audiovisuel ». La lettre de mission que vous a adressée le Président de la République a fixé les grandes lignes de votre action, dont nous commençons à trouver la traduction dans ce budget.

Madame la ministre, je serai très directe : ce budget inquiète les acteurs culturels tout autant que les collectivités territoriales, que nous représentons ici au Sénat, déjà très investies dans la culture. Vous l'avez vous-même admis, votre budget n'est pas seulement contraint, c'est un budget d'austérité. Je dirais que vous avez été quelque peu malmenée par Bercy et nous sommes nombreux ici à le penser.

Certes, nous sommes conscients de l'état critique de nos finances publiques. Nous concevons tout à fait que le ministère de la culture participe à l'effort de réduction des dépenses. Cependant, l'effort demandé est très important pour un secteur qui représente à peine 1 % du budget de l'État. Il ne faudrait pas que l'ensemble du secteur culturel soit pénalisé outre mesure. Gardons à l'esprit cette maxime que l'on doit au cinéaste et humoriste américain Woody Allen qui dit fort à propos que « l'argent est plus utile que la pauvreté pour des raisons financières ».

La lettre de mission du Président de la République vous fixe des objectifs ambitieux. Aussi, dans un contexte budgétaire contraint, notre interrogation concerne les moyens dont vous disposez pour les atteindre.

Comment sauvegarder le patrimoine monumental quand on constate une stagnation des crédits, alors que cette action suppose des moyens importants et un effort constant, selon les termes du Président de la République ?

Comment favoriser la création et la diffusion des spectacles quand les crédits en faveur du spectacle vivant restent, au mieux, au même niveau ?

Comment faire de la démocratisation culturelle une priorité de la politique culturelle lorsque les crédits du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » sont en baisse d'environ 1, 7 million d'euros ?

Ainsi dans le programme « Patrimoines », on constate la stagnation des crédits alloués au patrimoine historique, autour de 300 millions d'euros, qui ne se situent à ce niveau que grâce à la rebudgétisation de la taxe affectée au Centre des monuments nationaux. Nous regrettons cette décision, car cette recette pérenne nouvelle de 70 millions d'euros par an, prélevés sur les droits de mutation perçus par l'État, était particulièrement utile. Nous retombons donc à un niveau de crédits insuffisants pour les besoins de ce secteur, après deux années marquées par des mesures d'urgence qui avaient permis d'atteindre les 350 millions d'euros jugés nécessaires par notre mission d'information. Nous sommes également loin des 400 millions promis par le Président de la République pendant la campagne présidentielle « pour redonner sa splendeur à notre patrimoine ». Dans ces conditions, un certain nombre de chantiers vont de nouveau être arrêtés ou reportés.

Cette situation confirme, au-delà d'un engagement constant, la nécessité de mettre en oeuvre au plus vite les dispositions préconisées par les missions de l'Assemblée nationale et du Sénat en faveur du patrimoine, notamment la diversification de ses sources de financement.

Consciente de ces difficultés, madame la ministre, vous avez évoqué la recherche d'une ressource extrabudgétaire pour assurer la pérennité du financement. Pouvez-vous nous donner des précisions sur cette mesure ?

Cela dit, pour être équitable, je tiens à saluer les efforts déployés en faveur des monuments historiques n'appartenant pas à l'État, puisque 20 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2007 leur seront consacrés. C'est une bonne chose, car les monuments appartenant aux collectivités locales et aux propriétaires privés disposent traditionnellement de moins de moyens que les monuments parisiens, et sont dans une situation très tendue.

Dans ce programme, je citerai également l'action renforcée du ministère en faveur des musées en région qui voient leurs crédits augmenter de près de 18 %. Ces crédits supplémentaires permettront de financer les opérations d'investissement et d'améliorer la qualité des équipes et des lieux qui assurent en région la diffusion des riches oeuvres de notre patrimoine muséal. Ce rééquilibrage en faveur des régions est le bienvenu.

L'effort est aussi conséquent en faveur des archives, puisque ce sont 76 millions d'euros en autorisations d'engagement et 28 millions en crédits de paiement qui sont consacrés à la construction du nouveau Centre des archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine. Ce centre pour les archives de l'État postérieures à 1790, qui devrait voir le jour en 2011, permettra aux chercheurs de disposer d'un lieu moderne et adapté de conservation et de consultation des archives. Par cet engagement, qui sera complété par le projet de loi relatif aux archives - il sera prochainement discuté dans notre assemblée -, l'État confirme que la conservation, l'enrichissement et la valorisation du patrimoine archivistique constituent un objectif majeur de sa politique culturelle.

Concernant la transmission des savoirs et la démocratisation de la culture, je regrette la baisse globale des crédits de ce programme. Certes, figure dans ce budget une augmentation de 6 % des crédits alloués à l'éducation artistique et culturelle qui fait figure de priorité de votre action.

Nous ne pouvons que vous soutenir dans ce choix politique, car nous sommes convaincus que toute réforme profonde de la politique culturelle tient à la place que l'on fera à l'éducation artistique dans le cadre de l'enseignement général. Nous serons bien sûr attentifs aux mesures concrètes que vous mettrez en oeuvre à la suite des recommandations de M. Éric Gross sur la généralisation de l'éducation artistique et culturelle et l'amélioration de ses dispositifs.

Cependant, les actions en faveur de l'accès à la culture sont touchées, ce qui est en contradiction totale avec l'objectif prioritaire de démocratisation culturelle affiché par le ministère. Ce sont les actions de sensibilisation des publics, les politiques de lutte contre les inégalités territoriales, le travail des associations auprès des populations culturellement défavorisées qui sont remis en cause. On ne peut financer l'éducation artistique et culturelle au détriment des dispositifs de démocratisation culturelle.

Il est également difficilement compréhensible aujourd'hui que les ASSEDIC refusent encore de prendre en compte - comme pourtant l'avait souhaité votre prédécesseur, Renaud Donnedieu de Vabres - les heures d'intervention des artistes dans les écoles et dans d'autres lieux pour qu'ils bénéficient de leur régime d'assurance chômage. Nous savons tous que l'éducation artistique et culturelle passe par la présence renforcée des artistes dans les écoles. C'est d'ailleurs le sens des mesures prises dans ce budget. Comment cette politique est-elle possible si les ASSEDIC ne reconnaissent pas ces heures comme faisant partie du travail artistique ouvrant des droits aux intermittents ? Ces derniers ont besoin, madame la ministre, d'être aujourd'hui rassurés.

Un dernier mot pour déplorer la diminution des aides aux établissements d'enseignement spécialisé, qui obligera les collectivités territoriales à venir compenser ce désengagement. C'est le cas dans mon département, comme dans beaucoup d'autres, où les crédits pour l'école des beaux-arts du Havre et de Rouen sont en baisse de 15 %. Je n'ose croire qu'une baisse similaire affectera les conservatoires. À l'heure de la mise en oeuvre, inégalement avancée, d'ailleurs, de la loi relative aux libertés et responsabilités locales d'août 2004 concernant ces établissements, cette décision serait regrettable, car elle donnerait le sentiment d'un « marché de dupes ». On ne peut concevoir la décentralisation comme un désengagement de l'État qui se décharge de ses missions sur les collectivités locales.

Concernant l'expérimentation de la gratuité des musées, je voudrais exprimer les mêmes réserves que notre rapporteur pour avis Philippe Nachbar. Si cette initiative apparaît de prime abord comme une bonne idée, je ne suis pas sûre qu'elle soit particulièrement opportune dans un contexte budgétaire particulièrement contraint et qu'elle soit la panacée pour favoriser l'accès à la culture. De nombreuses études ont en effet montré que ce type de mesure renforçait la fréquentation des publics déjà habitués à venir dans les musées. On ne peut donc pas associer si facilement gratuité et démocratisation.

C'est en outre méconnaître tout le travail de sensibilisation des publics éloignés des pratiques culturelles, qui ne viendront pas dans les musées uniquement parce qu'ils sont gratuits. C'est pour cette raison que les actions en faveur de l'accès à la culture ne doivent pas être délaissées. Cela dit, j'ai bien entendu que cette expérimentation sera ciblée et soumise à évaluation.

Enfin, en ce qui concerne le programme « Création », hormis le secteur des arts plastiques, qui est en progression, les crédits stagnent, ce qui ne manque pas d'inquiéter les professionnels du spectacle vivant, qui tirent aujourd'hui la sonnette d'alarme.

Alors que le spectacle vivant a fait figure de secteur prioritaire ces dernières années, ce n'est plus vraiment le cas aujourd'hui. Le gel des crédits à hauteur de 6 % prévu cette année fait craindre des réductions qui vont se traduire par moins de création, peut-être des licenciements d'artistes ou de techniciens, en tout cas des non-renouvellements de contrat, fragilisant encore plus les structures et les compagnies.

Ainsi, Laurent Hénart, président de la Réunion des opéras de France, vous a alertée sur le désengagement de l'État vis-à-vis des opéras en région. Pardonnez-moi une fois encore de citer un exemple tiré de mon quotidien d'élue locale, mais, très concrètement, à Rouen, ce désengagement se traduit par une baisse de 6 % de la subvention de l'État à l'opéra, et la hausse prévue pour le centre dramatique régional lors du recrutement de sa nouvelle directrice semble remise en cause.

Tout le monde constate l'essoufflement des financements de l'État, notamment dans le secteur du spectacle vivant, ce qui l'empêche de remplir correctement ses missions. Pour ma part, j'appelle de mes voeux une politique contractuelle de l'État avec les collectivités territoriales pour non seulement réduire les déséquilibres financiers, mais surtout clarifier le rôle de l'État et définir l'articulation des différents échelons des collectivités locales, plutôt que chacun fasse sa politique culturelle dans son coin. Cela conduit parfois - il faut bien le dire - à un éparpillement des financements. D'ailleurs, les acteurs culturels eux-mêmes ont besoin de savoir qui fait quoi, avec qui, comment et pourquoi.

On n'a pas non plus encore tiré toutes les conséquences du rôle premier des collectivités locales dans le financement de la culture. Elles sont aujourd'hui en première ligne ; elles jouent un rôle majeur en matière de politique culturelle en finançant des équipements culturels et en accompagnant les structures artistiques à plus des deux tiers des dépenses pour le spectacle vivant.

Faisant le constat des difficultés récurrentes de financement dans l'ensemble de nos départements, les professionnels du spectacle vivant vous demandent l'organisation d'un « Grenelle de la culture ». Il y a maintenant trois ans, lors des débats sur le spectacle vivant organisés au Parlement, nous étions plusieurs parlementaires à souhaiter une loi d'orientation sur le spectacle vivant. Plus récemment, pendant la campagne présidentielle, j'ai personnellement évoqué l'organisation d'états généraux de la culture.

Au-delà de ces différences de terminologie, l'idée est la même : il s'agit de traiter enfin l'ensemble des difficultés liées à ce secteur. Le ministère n'échappera pas à cette remise à plat et, de ce fait, à une profonde réforme de ses structures.

On ne fera donc pas l'économie d'une conférence nationale réunissant l'État, les collectivités territoriales et les acteurs culturels afin de clarifier le rôle de chacun au regard de ses responsabilités et de ses engagements financiers réels, pour faire mieux, peut-être plus simple et plus clair, de façon coordonnée et autour de projets structurants. Pour être réussie, la décentralisation culturelle doit, plus que jamais, être organisée.

« Vivre, c'est ne pas se résigner », a écrit Albert Camus. Aussi, mes chers collègues, je crois venu le temps d'inviter Mme la ministre, et nous souhaitons l'y aider, à ouvrir quelques-uns de ces grands chantiers que je viens d'évoquer. Là sont les enjeux d'aujourd'hui.

Êtes-vous également prête, madame la ministre, à engager cette grande réflexion si nécessaire sur les missions du ministère de la culture, conjointement d'ailleurs avec les ministères des affaires étrangères et de l'éducation nationale, car ils conduisent eux-mêmes un certain nombre d'actions qui ne sont pas toujours clairement articulées avec la rue de Valois ?

Voilà donc synthétisé notre point de vue sur les crédits de la mission « Culture ».

Nous aimerions être constructifs, mais les interrogations sont aujourd'hui trop nombreuses. Nous ne pouvons donc raisonnablement pas voter ces crédits. À vrai dire, depuis que je suis parlementaire, c'est sans doute la première fois que je m'abstiendrai de voter le budget de la culture. C'est dire si notre inquiétude est grande !

J'espère très sincèrement, madame la ministre, vous qui n'êtes pas personnellement à mettre en cause et dont le professionnalisme est reconnu, que ces mises en garde feront réagir le Gouvernement dans le bon sens. Il doit comprendre que, comme l'a écrit Gao Xingjian, « la culture n'est pas un luxe, c'est une nécessité ».

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Lagauche

Madame la ministre, à l'occasion de votre arrivée à la tête du ministère de la culture et de la communication, le 1er août 2007, le Président de la République vous adressait une lettre de mission dans laquelle il vous signifiait les priorités qu'il vous entendait voir mettre en oeuvre : « L'heure d'un nouveau souffle pour notre politique culturelle est donc venue, celle d'adapter l'ambition d'André Malraux au XXIe siècle. Il vous revient de proposer les voies et moyens d'une politique culturelle nouvelle, audacieuse, soucieuse de favoriser l'égalité des chances, d'assurer aux artistes une juste rémunération de leur travail, de développer la création et nos industries culturelles, de s'adresser à tous les publics. »

Ces quelques lignes issues de votre lettre de mission ont suscité chez l'ensemble des acteurs culturels l'espoir que, enfin, après cinq années de mise en berne, la culture soit remise au premier plan de l'action gouvernementale.

Si l'enveloppe budgétaire attribuée à votre ministère ne peut être considérée comme le seul levier de votre action, elle est, vous en conviendrez, madame la ministre, un outil significatif, sinon déterminant.

Or il y a fort à craindre que la rupture chère au Président de la République ne se produise pas, en 2008 et d'un point de vue budgétaire, dans les domaines de la culture et de la communication.

En effet, si les crédits de la mission « Culture » pour 2008 sont affichés comme étant en hausse de 3, 2 %, ils ne sont pas directement comparables avec ceux du budget de 2007, du fait des changements de périmètre : le produit de la taxe affectée au Centre des monuments nationaux, le CMN, d'un montant de 70 millions d'euros, fait l'objet d'une re-budgétisation pour 2008 ; 25 % du produit de la taxe sur les droits de mutation à titre onéreux font désormais partie des lignes budgétaires.

Déduction faite de cette re-budgétisation, et à structure constante, le budget de la culture connaîtra en réalité une diminution de 56, 6 millions d'euros en crédits de paiement, soit une baisse effective de 2 %.

Cette baisse réelle, loin de constituer un souffle nouveau pour notre politique culturelle, aura de lourdes conséquences tant pour les artistes, la création et l'exposition des oeuvres, que pour les publics.

En ce qui concerne le programme « Patrimoines », si l'on déduit la re-budgétisation des 70 millions d'euros que j'évoquais à l'instant, les crédits du patrimoine monumental et archéologique chutent de 272 millions d'euros en 2007 à 269 millions d'euros en 2008. Ils sont même en diminution sensible de 27 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit une baisse de 8 %.

Le moins que l'on puisse dire est que ce secteur a été sinistré au cours des années précédentes, suscitant la colère des professionnels.

Le Président de la République avait d'ailleurs promis durant sa campagne d'allouer 4 milliards d'euros sur dix ans, soit 400 millions d'euros par an, aux monuments historiques afin, je cite, de « redonner sa splendeur au patrimoine ». Force est de constater que le budget pour 2008 est loin d'atteindre cet objectif, puisque seuls 316 millions d'euros seront affectés au patrimoine monumental, soit, déduction faite des 70 millions d'euros re-budgétisés, une hausse de 570 000 euros par rapport à 2007.

Hors dépenses de personnels, et à périmètre constant, les moyens attribués au programme « Création » en 2008 diminuent de 0, 2 % par rapport à 2007.

S'agissant plus précisément du spectacle vivant, la stagnation du budget cache en réalité une baisse de 414 000 euros en crédits de paiement et de 715 900 euros en autorisations d'engagement. Alors que, en 2007, la part du spectacle vivant dans le budget du ministère de la culture était de 32, 3 %, elle passe à moins de 31 % en 2008.

Avec une telle baisse, comment pouvez-vous, madame la ministre, considérer que le spectacle vivant constitue une priorité de votre action, alors même que ces crédits sont destinés à soutenir un réseau de près de 1 000 lieux de création, de production ou de diffusion sur l'ensemble du territoire ?

Ces lieux, vous le savez, sont consacrés au théâtre, aux arts du cirque, de la rue, à la musique, à la danse, à l'ensemble de ces disciplines mono et pluridisciplinaires qui font vivre les artistes et rêver les publics.

De plus, il faut subventionner non seulement les lieux, mais également les troupes qui, à l'image du théâtre de rue, amènent l'art directement au contact du public et de manière souvent gratuite pour le spectateur. Or les acteurs des 1 063 compagnies de théâtre de rues répertoriées sont inquiets. Ils se sentent considérés comme le parent pauvre du spectacle vivant.

La somme annuelle allouée par l'État aux arts de la rue - aux alentours de 8 millions d'euros - est bien trop modeste. Elle représente à peine plus que le budget annuel d'une scène nationale. Comment, dans ces conditions, redonner confiance à ces artistes ?

Je ne pense pas, madame la ministre, que l'évolution du régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle, artistes et techniciens, soit de nature à rassurer les professionnels du spectacle vivant.

Un certain nombre d'avancées ont certes pu être obtenues dans le cadre de l'accord conclu par les partenaires sociaux le 21 décembre 2006, notamment en ce qui concerne la nouvelle possibilité pour les artistes et les techniciens de comptabiliser le nombre d'heures travaillées sur une période pouvant s'étaler au-delà des dix mois ou dix mois et demi prévus dans le protocole d'accord du 26 juin 2003.

Mais ni le fonds provisoire mis en place en 2004, ni le fonds transitoire de 2005, ni le Fonds de solidarité et de professionnalisation instauré depuis 1er janvier 2007 n'ont pu endiguer l'érosion du nombre d'intermittents affiliés au régime d'assurance chômage des annexes 8 et 10.

Il est vrai qu'en durcissant les conditions d'admission au régime de l'intermittence, les accords du 26 juin 2003 et du 21 décembre 2006 n'avaient d'autre objectif que la réduction du déficit de l'UNEDIC. Les chiffres sont éloquents : le nombre d'allocataires indemnisés a chuté de 105 600 en 2003 à 99 300 en 2006 ! Pourtant, la hausse du déficit des annexes 8 et 10 n'a en rien été enrayée. Bien au contraire, ce déficit a crû, passant de 887 millions d'euros à 991 millions d'euros en 2006.

Je ne reviendrai pas sur l'analyse de la Cour des comptes dans son rapport annuel de février 2007 de la gestion du régime d'indemnisation des intermittents du spectacle. J'ai eu l'occasion de l'évoquer il y a quelques instants dans mon intervention au nom de la commission des affaires culturelles sur les crédits du programme « Création ».

Nous souhaiterions cependant connaître, madame la ministre, les suites que vous entendez donner aux recommandations des magistrats du Palais Cambon.

Par ailleurs, la remise en cause des droits sociaux des intermittents du spectacle devait être compensée par l'élaboration de huit conventions collectives couvrant le secteur du spectacle vivant et enregistré, entreprise que les partenaires sociaux, sous l'égide du Gouvernement, auraient dû achever à la fin de l'année 2006.

Or, si des textes ont été pris dans le secteur de l'audiovisuel, les secteurs du spectacle vivant public et du spectacle vivant privé, celui des éditions phonographiques, de la production cinématographique, des prestataires techniques et des personnels non permanents de la radio font toujours l'objet de négociations, qui n'ont à ce jour pas abouti.

C'est d'autant plus regrettable que, à l'heure où les intermittents du spectacle sont plus que jamais fragilisés dans leurs droits sociaux, la signature de ces conventions collectives doit permettre de sécuriser leurs parcours professionnels tout en favorisant la pérennisation de l'emploi artistique et la limitation des abus.

Il est urgent, madame la ministre, d'accélérer l'élaboration de ces conventions collectives, car la définition du périmètre de l'intermittence permettra d'en réguler l'accès.

Les moyens budgétaires que votre ministère attribuera en 2008 aux industries culturelles, c'est-à-dire au livre, au disque, au droit de prêt en bibliothèque et au théâtre privé, sont simplement reconduits pour un montant de 31 millions d'euros. On peut toutefois souligner l'importance des accords dits « de l'Élysée » du 23 novembre dernier, sur lesquels a débouché la mission confiée à M. Denis Olivennes pour le développement et la protection des oeuvres et des programmes culturels sur les nouveaux réseaux, mais ils ne coûtent rien à votre ministère...

Le troisième programme de la mission « Culture » est celui sur lequel le gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre, s'est le plus engagé, du moins par la parole : il s'agit du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ».

Présentée comme la première de vos priorités, cette politique visant à permettre à nos concitoyens d'accéder à toutes les formes de culture a été, et est encore cette année, sacrifiée. L'action en faveur de l'accès à la culture subit en effet une baisse historique de 18 % en crédits de paiement.

À l'heure où déjà deux tiers des financements culturels sont assurés par les collectivités territoriales, ce sont plus particulièrement les crédits destinés à rééquilibrer l'action de votre ministère en faveur des territoires culturellement moins favorisés qui sont touchés par cette baisse. Les actions en faveur des personnes handicapées, des associations d'éducation populaire et des associations de lutte contre l'exclusion sont elles aussi sacrifiées.

Nos quartiers les plus sensibles, parce qu'ils font l'objet d'un ostracisme et qu'ils sont isolés à la marge de nos grandes villes, expriment un besoin d'accéder à la culture sous toutes ses formes et d'exprimer la richesse de leurs diversités culturelles.

Les associations subventionnées par votre ministère sont un formidable relais pour encourager cette diversité des expressions artistiques. Pour la deuxième année consécutive, les moyens qu'elles reçoivent de votre administration chutent à pic. C'est là, je le répète, non seulement un paradoxe, mais aussi une erreur politique majeure.

Madame la ministre, nous sommes d'accord avec vous : votre budget est contraint. Il l'est d'autant plus que, au titre de la révision générale des politiques publiques, 6 % des crédits de votre ministère seront mis en réserve.

Les professionnels de la culture sont inquiets.

Le 19 novembre dernier, les organisations d'employeurs du spectacle vivant public et privé ont fait part à la presse de leur désarroi face à votre budget pour 2008. Ils ont adressé une lettre ouverte au Président de la République, dans laquelle ils appellent à la mise en place d'un Grenelle de la Culture. L'ensemble des acteurs du secteur culturel attendaient un signe fort du Gouvernement en leur direction.

Les professionnels du cinéma et de l'audiovisuel, inquiets du report de la parution des décrets relatifs aux obligations des chaînes de télévision pour soutenir la production cinématographique et audiovisuelle, ont pour leur part dénoncé le 21 novembre dernier le passage de l'exception culturelle à l'exécution culturelle !

Au final, le budget de la culture pour 2008, loin de constituer un souffle nouveau pour notre politique culturelle, ne fait que s'inscrire dans une logique continue d'essoufflement de l'action gouvernementale.

C'est donc avec regret que nous ne suivrons pas l'avis de la majorité de la commission des affaires culturelles, malgré l'excellence de ses rapports.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Lagauche

Nous sommes contraints de vous signifier notre refus d'un tel budget.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans un contexte d'indispensable maîtrise des dépenses et de révision générale des politiques publiques, la culture demeure, avec un budget de près de 4 milliards d'euros, une priorité pour le Gouvernement.

Des politiques seront ainsi confortées et de nouvelles orientations seront décidées, d'autant mieux que le domaine culturel a la particularité de combiner les interventions publiques et privées, les dotations budgétaires et les incitations fiscales.

Aussi, je concentrerai mon propos sur le patrimoine architectural et le développement des enseignements artistiques.

Nous le savons tous : l'état de certains monuments fait parfois peser une menace sérieuse sur une partie de notre patrimoine, et ce depuis des dizaines d'années, malgré les efforts qui ont été réalisés.

C'est la raison pour laquelle a été élaboré, voilà trois ans, un plan national d'action en faveur du patrimoine, dont l'objectif est d'associer l'ensemble des partenaires - l'État, les collectivités territoriales, les propriétaires privés et les associations - pour mettre en place des outils adaptés à la situation.

Malgré cette orientation forte, l'évolution budgétaire a été pour le moins erratique, au point que le problème du sous-financement structurel de l'entretien et de la restauration des monuments historiques rend indispensable la mise en place d'un financement dédié et véritablement pérenne. Les besoins des monuments historiques - faut-il le rappeler ?- sont évalués à environ 4 milliards d'euros sur dix ans, soit 400 millions d'euros par an.

Aussi, et dans le droit fil du discours qu'il a prononcé à la Cité de l'architecture et du patrimoine, par lequel le Président de la République a confirmé l'importance cruciale de la politique du patrimoine, vous avez, madame la ministre, pris l'engagement de trouver cette ressource extrabudgétaire indispensable.

Dans cet esprit, et compte tenu de l'importance des moyens que requiert la préservation des monuments historiques, il me semble nécessaire de porter une attention toute particulière au mécénat patrimonial, qui émerge dans notre pays depuis une dizaine d'années.

C'est notamment grâce au mécénat dit « de compétences », qui permet au mécène d'intervenir financièrement et de suivre les travaux, que la Galerie des glaces du château de Versailles a pu être restaurée dernièrement et que l'Hôtel de la Marine, situé place de la Concorde, le sera prochainement.

Destiné à favoriser le maintien sur le territoire national de trésors nationaux comme l'achat de biens culturels situés en France ou à l'étranger présentant un intérêt majeur pour notre patrimoine, ou bien encore l'acquisition d'oeuvres d'artistes vivants, la diffusion du spectacle vivant ou l'organisation d'expositions d'art contemporain, le mécénat a également un rôle majeur jour en matière de restauration du patrimoine architectural et monumental.

C'est pourquoi, selon nous, il conviendrait de procéder à une évaluation de la loi du 1er août 2003, afin de connaître précisément l'impact réel des mesures d'incitation fiscale concernant le mécénat culturel.

À cet égard, je voudrais faire un rappel. L'an dernier, en adoptant l'article 10 de la loi du 21 décembre 2006 de finances pour 2007, nous avons décidé d'étendre la réduction d'impôt pour mécénat aux dons destinés à des travaux de restauration et d'accessibilité du public des monuments historiques privés. Ainsi, les dons à la Fondation du patrimoine ou à toute autre fondation ou association agréée doivent ouvrir droit à réduction d'impôt pour les entreprises et les particuliers, sous réserve, bien entendu, que le monument soit conservé par son propriétaire et ouvert au public pendant au moins dix ans.

Madame la ministre, comme cela a été souligné tout à l'heure, nous apprécions la forte augmentation - supérieure à 20 millions d'euros ! - des crédits affectés aux monuments historiques n'appartenant pas à l'État qui figure dans le projet de loi de finances pour 2008.

Au total, 123 millions d'euros viendront financer les subventions d'État au patrimoine protégé communal. Cette orientation est donc très positive pour les communes qui ont des projets de restauration ou dont les chantiers ont, par le passé, parfois été interrompus.

Une politique culturelle ambitieuse est forcément multidirectionnelle. La diversité de l'offre culturelle ne prend tout son sens que si elle rencontre son public.

Selon l'INSEE, le spectacle vivant touche chaque année, selon les genres, entre 4 % et 25 % des Français de quinze ans et plus. Environ 15 % de la population fréquente les galeries d'art ou les différents lieux d'exposition en arts plastiques et 31 % de nos compatriotes se rendent dans des bibliothèques.

Il faut donc continuer à réduire les inégalités qui peuvent parfois exister s'agissant de l'accès à la culture, ainsi que les disparités entre les différents types de publics et entre les territoires. Je pense notamment aux zones rurales. En clair, il faut confirmer et accentuer l'effort entrepris.

L'éducation artistique et culturelle constitue l'un des principaux aspects des politiques de démocratisation de l'accès à la culture. Elle est une composante essentielle de la formation des jeunes, car elle forme le regard, la sensibilité, le sens critique et la capacité à émettre un jugement esthétique.

Vous concentrez donc, madame la ministre, l'effort budgétaire sur le développement de cette discipline, en augmentant ses crédits de plus de 6 % par rapport à la loi de finances pour 2007. Nous vous en félicitons !

De leur côté, les collectivités territoriales ne sont pas en reste en la matière. Plusieurs départements ont adopté leur schéma départemental de développement des enseignements artistiques, conformément à ce qui a été défini par le législateur.

Merci, madame la ministre, de nous préciser les conditions qui sont envisagées et les modalités de transfert de crédits nécessaires à la viabilité même de ces schémas.

Ces points évoqués, le budget de la mission « Culture » nous convient, notamment dans un contexte qui, comme cela a été rappelé, n'est pas si simple.

Le groupe de l'UMP salue donc les efforts entrepris par le Gouvernement. Naturellement, nous soutiendrons vos propositions, madame la ministre.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je vous remercie, mon cher collègue, d'avoir respecté votre temps de parole.

La parole est à M. Jack Ralite.

Debut de section - PermalienPhoto de Jack Ralite

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il y a plusieurs façons d'aborder le budget de la culture.

Premièrement, le lire au fil des chiffres et de leur agencement ; cela ne donne pas toujours grand-chose, chaque année étant vorace d'une nouvelle présentation. On devient orphelin. Ainsi, dans le budget 2008, par un changement de périmètre, les crédits du patrimoine monumental sont majorés artificiellement, alors qu'ils baissent de 18 % en crédits de paiement et de 6, 4 % en autorisations d'engagement.

Deuxièmement, croire les chiffres, alors que nombreux sont ceux qui ne sont pas véritablement vrais, d'où un document en simulacre qui somnambulise. Ainsi, dans le budget 2008, le spectacle vivant, stationnaire en écriture, baisse dans ses crédits d'intervention de 414 000 euros en crédits de paiement et de 715 900 euros en autorisations d'engagement.

Troisièmement, il y a la lecture quantitative, celle qui ravale les arts, leur création, leur rencontre avec les publics et leur pluralisme à une comptabilité anonymisant tout, qui conduit à l'invisibilité démocratique. Pour moi, c'est du sarkozysme dans le budget, mais cela ne se voit pas à chiffres nus.

Les clés d'accès à la lecture qualitative du budget sont à prendre ailleurs, dans deux documents. D'une part, L'Économie de l'immatériel : la croissance de demain, de Maurice Lévy, PDG de Publicis, et de Jean-Pierre Jouyet, alors chef du service de l'Inspection générale des finances, paru le 6 décembre 2006. D'autre part, la lettre de mission que le Président de la République vous a adressée le 1er août 2007, madame la ministre.

Synthétisons le premier avec M. Pierre Musso, professeur de Sciences de l'information et de la communication à l'université de Rennes-II : « Ce rapport joue un rôle fondateur. Il est l'équivalent du rapport Nora-Minc de 1978 sur ?l'informatisation de la société française?. À l'époque, ce rapport s'appuyait déjà sur la mutation technique de la numérisation, rendue possible par la convergence des télécommunications et de l'informatique, alors qualifiée de télématique, pour annoncer l'entrée dans une nouvelle société dite ?de l'information?. » Le rapport de 1978 invitait à déréguler le secteur des télécoms.

Aujourd'hui, le même raisonnement est revisité, mais au nom de l'économie et de la « société de connaissances », qui viendrait se substituer à celle de l'information et l'englober. Il faut déréguler les secteurs de la culture, de la recherche, de la création et de l'enseignement. Hier, on dérégulait les tuyaux. Aujourd'hui, ce sont les contenus et les idées.

Le numérique étant érigé au rang de mythe rationnel indiscutable, la naturalisation de la technologie permet au pouvoir de la manier comme un discours de la causalité fatale. C'est la combinaison de la fatalité de la technologie avec celle de la financiarisation du monde. Dans cette approche technico-financière, tout deviendrait immatériel. Les réseaux d'information, notamment Internet, dématérialisent les objets, les territoires, les institutions, voire les hommes, transformés en « actifs immatériels ». Il conviendrait, dit-on, de traiter économiquement le capital humain. La notion d'« immatériel » est appliquée à l'innovation, à la recherche, à la formation, à l'enseignement, au design, à la mode, en passant par la créativité, le jeu vidéo, la publicité, les marques, l'entertainment, l'esprit d'entreprise, l'ensemble du champ des immatériels lié à l'imaginaire, ce qui permet de mettre sur le même plan la création artistique et culturelle, la publicité ou les marques.

Le rapport fait soixante-huit recommandations. J'en retiens une : le rapport demande la transformation des universités et des musées sur le modèle américain en les identifiant par des marques. Pour les musées, il faut lever plusieurs tabous, est-il dit, donc vendre ou louer des toiles.

Ainsi, le discours idéologique sur l'économie de l'immatériel pointe un fait majeur, l'importance de la connaissance et de la culture dans la société et l'économie, mais il vise à les standardiser en « actifs comptables », donc en signes valorisables pour les soumettre à une financiarisation généralisée. L'esprit des affaires prétend s'imposer aux affaires de l'esprit !

Maintenant, la lettre présidentielle sur la culture, d'une gravité extrême pour la création du spectacle vivant. Voyez plutôt : « La démocratisation culturelle, c'est enfin veiller à ce que les aides publiques à la création favorisent une offre répondant aux attentes du public. Vous réformerez à cette fin les conditions d'attribution des aides en créant des commissions indépendantes d'attribution associant des experts, des artistes et des représentants du public. Vous exigerez de chaque structure subventionnée qu'elle rende compte de son action et de la popularité de ses interventions, vous leur fixerez des obligations de résultats et vous empêcherez la reconduction automatique des aides et des subventions. » Ainsi, les artistes seraient essentiellement des commerciaux.

La création du passé et le patrimoine ne sont pas mieux traités : « Vous engagerez une réflexion sur la possibilité pour les opérateurs publics d'aliéner des oeuvres de leurs collections ». C'est la mise en cause de la notion d'« oeuvre inaliénable ».

Cette politique, le Président de la République la veut « efficace » et « moins coûteuse ». Il faut « réallouer les moyens publics des politiques inutiles ou inefficaces au profit des politiques qui sont nécessaires et que nous voulons entreprendre ». Pour se garantir, il conclut en demandant de proposer des « indicateurs de résultat dont le suivi sera conjoint » entre l'Élysée, Matignon, Bercy et, tout de même, le ministère de la culture !

« Je ne suis pas un théoricien, moi, je ne suis pas un idéologue. Oh, je ne suis pas un intellectuel ! Je suis quelqu'un de concret », disait-il après son élection.

Quelle illustration de ce que disait Jean Vilar à André Malraux, en mai 1971, sur les rapports entre pouvoir et artistes, qui sont souvent un « mariage cruel » !

Jean Vilar déclarait ceci : « Il s'agit aussi de savoir si nous aurons assez de clairvoyance et d'opiniâtreté pour imposer au public ce qu'il désire obscurément ». Je pense également à ce propos de Pierre Boulez : « La mémoire du créateur ne doit pas le rassurer dans l'immobilité illusoire du passé, mais le projeter vers le futur avec peut-être l'amertume de l'inconfort, mais plus encore avec l'assurance de l'inconnu. »

Nicolas Sarkozy veut imposer la répétition qui promeut l'entertainment, la culture de l'instant, de l'éphémère, du divertissement et du présentisme, lequel enferme et contribue à ce qu'une immense masse de gens devienne flottante dans « un état d'impondérabilité de ses valeurs ». Cette pratique va jusqu'à interdire l'espérance d'un au-delà de ce qu'on connaît. C'est fade comme le rire permanent de Ruquier. Soyons intransigeants sur la création, car elle désactualise, met en rapport les générations et délocalise à la manière de la chanson de Renaud C'est quand qu'on va où ? : « L'essentiel à nous apprendre, c'est l'amour des livres qui fait qu'tu peux voyager d'ta chambre autour de l'humanité ».

La création permet de nouveaux commencements. Au mois de mai, à Aubervilliers, un professeur au Collège de France, Predrag Matvejevitch, intervenant sur l'oeuvre d'Ivo Andric Le Pont sur la Drina, eut ce propos : « Nous avons tous un héritage et nous devons le défendre et, dans un même mouvement, nous devons nous en défendre. Autrement, nous serions en retard d'avenir, nous serions inaccomplis. » Le Président de la République est bourré de retards d'avenir. J'évoquerai René Char : « L'inaccompli bourdonne d'essentiel ». Voilà la création.

La politique qui ressort du rapport et de la lettre est au service des grands groupes avides d'une dimension internationale. On sait par expérience que, quand Vivendi ou les télécoms ont grandi par achats, notamment aux États-Unis, ils ont connu de lourds déboires préjudiciables aux finances publiques. Ces concentrations, qui faisaient hier des compromis avec le pouvoir politique, s'imposent aujourd'hui à lui.

À la politique industrielle a succédé la politique financière. Aux ententes négociées se sont substituées les stratégies financières imposées au pouvoir politique. Les ententes d'hier étaient à moyen ou long terme. Maintenant, ce sont les actionnaires qui exigent le court terme, à travers des bilans trimestriels que le pouvoir suit. C'est un basculement.

Le monde culturel et artistique vit douloureusement cela. Le gel traditionnel d'un pourcentage de crédits est augmenté et externalisé des subventions. Les subventions de fonctionnement baissent de 375 000 euros à Chaillot, de 475 000 euros à la Comédie-Française, de 250 000 euros au Théâtre national de Strasbourg, de près de 1 million d'euros à la Cité de la musique, de 300 000 euros pour l'École des beaux-arts de Paris, de 1, 1 million d'euros au Parc de la Villette et de 631 936 euros à Monum.

Cela s'inscrit dans la révision générale des politiques publiques, la RGPP, qui a été décidée par l'Élysée et qui est l'étude au ministère et dans un cabinet qui a déjà visité l'Opéra, Chaillot, le Conservatoire et le musée d'Orsay.

Dans les régions, y compris en Île-de-France, les décisions cheminent vers un moins. En Rhône-Alpes, c'est moins 6 % pour l'ensemble des institutions et structures. Sur 37 millions d'euros pour la région, il y a donc une baisse de 2, 4 millions d'euros. Pour la MC2 de Grenoble, c'est moins 140 000 euros, pour le Centre dramatique national de Saint-Étienne, moins 120 000 euros. Même si le directeur régional des affaires culturelles, le DRAC, fait l'impossible pour maintenir aux jeunes compagnies leurs subventions, celles-ci risquent de perdre dans la foulée des diminutions aux institutions.

Le 24 novembre, j'étais au soixantième anniversaire du premier centre dramatique national, à Saint-Étienne. Quel plaisir de voir un public de 700 personnes, qui étaient non pas un chiffre, mais une qualité de partenariats participant à l'aventure lancée par Dasté, et qui, autour d'une belle politique de création de Jean-Claude Berutti et François Rancillac, pratiquent la coopération avec l'Afrique, l'Europe, les compagnies indépendantes ! Neuf jeunes comédiens de l'école de théâtre présentèrent talentueusement l'histoire de la comédie dans un montage de textes roboratifs.

Clôturant cette chaleureuse fête de l'esprit et du coeur, on entendit un merveilleux texte de Michel Vinaver : « Eh bien, je te souhaite, décentralisation, ma mie, de préserver ton identité, liée à tes origines et aux ressources dont tu vis. Je souhaite que tu gardes ta différence ; que tu restes aventureuse et exploratrice prioritairement. Que tu ne cèdes pas à la tendance de tout mélanger à tout pour que tout ait le goût de tout. Fraye avec l'autre si tu veux, mais veille à ce que ne s'effacent pas les contours. Ne laisse pas se diluer ton génie particulier.

L'altérité des deux théâtres, privé et public, est aussi bonne à prendre que celle des sexes. Chacun y trouve son compte. »

Autres soustractions : plusieurs opéras de province sont touchés. Tours avait perdu 300 000 euros, qu'il a récupérés... La scène nationale de Bar-le-Duc perd 150 000 euros sur les 300 000 qu'elle recevait. Les centres dramatiques nationaux de la région parisienne perdent 3 %, résultat d'un plus 2 % d'engagement de l'État et d'un moins 4 % de gel du même État.

Un cas mérite d'être souligné, celui du théâtre de la Bastille, dirigé par Jean-Marie Hordé, dont on connaît les choix de créations si originaux « d'un art inattendu ». Fin 2008, il sera au bord d'un dépôt de bilan si l'intervention nationale ne l'épaule pas. L'exercice des métiers du théâtre dans cette précieuse petite salle est miné.

Je voudrais à cet instant évoquer les salariés dans leurs rapports avec la culture. Leur travail est marqué par une intensification jamais connue, une suractivité, une mobilisation de tous les instants. Pierre Legendre dit : « L'homme symbolise comme il respire. » Précisément, les conditions de travail d'aujourd'hui externalisent la respiration. Le sujet, même agité, devient désoeuvré.

Yves Clot, psychologue du travail au Conservatoire national des arts et métiers, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Mon cher collègue, il faut songer à aller vers la conclusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

M. le président. Monsieur Ralite, vous avez d'ores et déjà dépassé votre temps de parole.

M. Jack Ralite interrompt là son propos et quitte la tribune.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Mes chers collègues, au bout de douze minutes, il me paraissait normal d'inviter l'orateur à envisager de conclure. Je ne disais rien de plus.

Tout à fait ! au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Dauge

Monsieur le président, il est vrai que j'aurais bien continué à écouter Jack Ralite. Nous ne sommes pas si nombreux et, de temps en temps, c'est un vrai plaisir d'entendre un discours aussi profond.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Permettez-moi simplement d'indiquer, mon cher collègue, que nous devons traiter avec un minimum d'équité l'ensemble des intervenants. M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, n'avait que cinq minutes pour présenter l'ensemble de son budget et il a respecté son temps de parole.

Dans ces conditions, je pense que l'on peut admettre que j'invite l'orateur à envisager de conclure au bout de douze minutes. Je n'y vois aucun motif de différend entre nous. C'était un beau discours, et l'assemblée l'a apprécié. Pour autant, il arrive un moment où l'on peut inviter un orateur à conclure.

Veuillez poursuivre, monsieur Dauge.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Dauge

Je vous comprends, monsieur le président, mais je redis tout de même combien j'étais heureux d'entendre Jack Ralite...

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Dauge

...et que j'aurais bien continué. Cela étant dit, nous n'allons pas nous disputer !

Madame la ministre, la politique du patrimoine est une grande politique et il est nécessaire, pour la défendre, de se mettre d'accord sur sa profondeur et son champ d'action.

Sa dimension culturelle est évidente, ne serait-ce que par l'utilisation des monuments restaurés, qui restent des lieux extrêmement forts dans le développement de la culture.

Son aspect économique est considérable, tant par le nombre et la qualité des emplois et des formations que par les entreprises remarquables qui oeuvrent dans ce secteur et qui font honneur à notre pays.

Sa dimension urbaine et d'aménagement du territoire, enfin, est essentielle. Les politiques de la ville manquent bien souvent d'inspiration et auraient tout intérêt à se refonder sur les centres historiques pour donner un sens au développement urbain.

Forts de cette ambition à laquelle nous pourrions tous souscrire, il nous faut avoir les moyens de cette politique. Avec 400 millions d'euros, nous sommes loin du compte. Je peux comprendre la contrainte budgétaire, mais encore faut-il que l'on puisse disposer des sommes annoncées et que tout le monde parle un discours de vérité. J'avoue que j'ai moi aussi quelquefois du mal à comprendre exactement ce qui se passe.

Je voudrais d'ailleurs saluer le travail de la commission des affaires culturelles qui, depuis deux ou trois ans, oeuvre à la compréhension des mécanismes quelque peu obscurs qui se sont développés dans ce domaine. Le Sénat a essayé de comprendre, dans le souci d'aider honnêtement le ministère, madame la ministre.

Il reste que l'année 2008, je le dis franchement, sera difficile. Comment pourra-t-on faire face, avec ce budget, au montage opérationnel que l'État devra opérer pour Monum ? Et les dettes de l'État, qui ne sont pas apurées ? Comment trouvera-t-on de quoi alimenter les directions régionales des affaires culturelles, elles-mêmes endettées, dont les crédits vont baisser alors qu'elles se trouvent déjà en difficulté ?

En définitive, je me demande, même si je ne suis pas sûr que nous soyons en mesure de le savoir clairement, s'il restera des crédits nets, après avoir honoré toutes les dettes, pour monter des opérations nouvelles en 2008.

Je n'insiste pas, mon rôle n'est pas de vous compliquer la tâche, madame la ministre, mais nous avons intérêt à être le plus clair possible vis-à-vis des entreprises et des collectivités locales. L'absence de transparence dans cette affaire serait nuisible à la réputation et à la crédibilité de l'État, que je suis, tout comme vous, décidé à défendre.

La pire des choses serait de poursuivre dans la voie que nous avons suivie pendant des années, car on est arrivé au point où les fonctionnaires, que ce soit au niveau des DRAC ou à l'échelon central, finissent par se faire agresser.

Un effort de clarification est donc indispensable en 2008. Les chiffres étant ce qu'ils sont, il faut dire la vérité : voilà ce que nous ferons, voilà ce que nous ne ferons pas. Payons d'abord nos dettes, nous verrons ensuite ce qu'il reste.

Dans la dotation des DRAC, j'insiste toujours sur les crédits destinés aux espaces protégés, aux espaces sauvegardés. S'il est une politique emblématique, c'est bien celle-là !

Il serait certes possible de trouver un partenariat plus efficace avec les villes pour financer les études, madame la ministre, mais les crédits sont en baisse et l'on assiste à une diminution visible des espaces protégés, des zones de protection du patrimoine, je pense notamment aux abords des monuments historiques. C'est à la dimension urbaine du patrimoine que l'on touche : elle est essentielle et il importe de la défendre ardemment.

Comment pourra-t-on faire face financièrement et répondre à toutes ces interrogations en 2008 ? Je me le demande. Le groupe d'études sur le patrimoine architectural, que vous présidez, monsieur Richert, pourrait se saisir de ce dossier.

Je voudrais dire quelques mots sur l'Institut national de recherches archéologiques préventives, l'INRAP. Des progrès ont été réalisés, l'ambiance est meilleure. Je suis convaincu que, même dans une situation budgétaire difficile, l'INRAP doit absolument parvenir à l'équilibre financier. Simplement, il faut améliorer le recouvrement de la redevance, qui n'est pas suffisamment efficace. Il n'y a aucune raison que nous n'arrivions pas à atteindre les 80 millions d'euros, ce qui nous permettrait d'allouer à peu près 30 millions d'euros au fonds d'intervention. Or, nous en sommes encore loin !

Je souhaite aussi que l'on puisse débloquer l'emploi dans le domaine des fouilles. Partout, qu'il s'agisse des maîtres d'ouvrage, des opérateurs, la demande est formidable. Tout le monde se plaint que les fouilles ne vont pas assez vite, mais l'INRAP n'a pas le droit de créer d'emplois publics.

Il faudrait tout de même pouvoir négocier une possibilité de répondre à la demande. Nous sommes dans un système absurde : la demande existe, les compétences aussi, mais on freine tout faute de créations d'emploi. C'est ridicule ! Notre rapporteur spécial, Yann Gaillard, connaît très bien ce dossier. Je souhaiterais que l'on puisse introduire un peu de respiration dans la gestion de cette affaire.

Voilà une solution simple, madame la ministre, qui vous éviterait de verser 10 millions d'euros supplémentaires à l'INRAP pour boucher les trous, des millions dont vous avez vraiment besoin pour le patrimoine.

Dans le même ordre d'idée, je redis ce que j'ai toujours dit ici : il est inadmissible de maintenir les exemptions de redevance actuelles. Les lotisseurs affligent la totalité de notre territoire d'opérations contestables sur le plan de l'urbanisme et en plus ils ne paient pas la redevance : on se demande bien pourquoi !

Dans ma région, 500 lotissements sont ainsi exonérés. Nous pourrions leur faire payer le juste prix, puisqu'ils relèvent du droit commun. Ils ont simplement été soutenus par un lobby dont vous faites les frais, madame la ministre. Vos collègues sont bien à l'aise pour défendre des exemptions, mais c'est vous qui payez la note. C'est scandaleux !

Il y a là matière à mener des actions concrètes et efficaces et je souhaite vivement qu'elles voient le jour !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur le banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

Monsieur le président, j'étais prêt à accorder les quatre minutes qui m'étaient imparties à mon ami Jacques Ralite. À l'avenir, il serait préférable de laisser à la diligence du groupe la gestion du temps de parole global, afin d'éviter ce qui est malheureusement arrivé. Je comprends les contraintes du président de séance, mais, dans le même temps, il faut respecter les sensibilités et l'on aurait pu laisser Jack Ralite poursuivre.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur Renar, la conférence des présidents fixe la façon de procéder. Si nous devons réserver à des sénateurs remarquables, brillants et captivants, de surcroît anciens ministres - et nous admirons tous ici M. Ralite - un traitement différent, la situation va être compliquée. Le président de séance agit avec le plus de souplesse possible, mais, au bout de douze minutes, quand le temps imparti est de dix, il peut légitimement commencer à s'inquiéter de l'équité de traitement entre tous les parlementaires.

Si vous souhaitez une remise en cause des règles de fonctionnement du Sénat pour permettre à M. Ralite de parler plus longtemps, je n'y vois aucune objection. Mais alors ces nouvelles règles doivent valoir pour tous les budgets et pour tous les parlementaires.

Applaudissements sur les travées de l'UMP ainsi que sur le banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

Pour en revenir au budget, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne souhaite pas rentrer dans une querelle de chiffres, mais il est clair que les moyens affectés à la culture sont en retrait dans le moment même où les pratiques culturelles sont en plein bouleversement.

Le Gouvernement aurait-il perdu de vue que l'art et la culture sont des enjeux de civilisation ? Investir dans la culture, c'est aussi investir dans cette intelligence sensible dont notre pays a tant besoin pour relever le défi d'une société en demande de repères.

Contrairement à ce que titrait le Time Magazine, la culture française est bien vivante, avec un maillage territorial envié de par le monde. Mais un pays qui ne soutient plus résolument les artistes, l'audace de la création, l'imaginaire, se condamne au déclin, comme vient de le dire avec passion, mais aussi raison, mon ami Jack Ralite.

Face à un marché standardisant, qui se sert de la culture plus qu'il ne la sert, le contrepoids d'un service public national de la culture « élitaire pour tous » est plus que jamais une nécessité.

Si la création est mise à mal, la démocratisation, qui est pourtant une priorité affichée par le Président de la République, n'est guère mieux lotie. J'en veux pour preuve la suppression de 18 % des crédits visant à favoriser l'accès à la culture des territoires et des publics les moins favorisés. Cette baisse drastique touche les acteurs de terrain, les associations d'éducation populaire, les zones rurales, les contrats de ville et la lutte contre les exclusions. Comment justifier un tel recul alors que les quartiers ont plus que jamais besoin d'un puissant effort de solidarité nationale afin de combler des inégalités de plus en plus criantes ?

C'est le non-partage qui crée le non-public. Et l'on sait que les extrémismes naissent en grande partie des frustrations engendrées par les disparités de développement et l'absence de culture. La médiation et la sensibilisation sont indispensables, mais elles sont malheureusement les premières sacrifiées quand les moyens diminuent.

Par ailleurs, alors que l'enseignement spécialisé va être transféré aux collectivités territoriales, déjà fortement mises à contribution, comment ne pas déplorer la baisse de 2 millions d'euros dédiés à la transmission des savoirs, qui concerne les conservatoires et écoles de musique, de théâtre et de danse ?

En ce qui concerne l'éducation artistique, pilier déterminant de la démocratisation, il faut acter que le budget est en hausse, ce qui ne veut pas dire que le compte y est. Le retard est tel qu'il faudrait au minimum le doubler.

Pour lutter efficacement contre la « fracture culturelle », il est nécessaire de rendre l'éducation artistique discipline obligatoire, à l'instar de la grammaire ou des mathématiques. Alors que les enfants passent de plus en plus de temps devant la télévision ou sur Internet, il est également incompréhensible que l'éducation à l'image ne soit pas généralisée. Tous les jeunes, de la maternelle à l'université, doivent pouvoir accéder aux oeuvres, à leur compréhension ainsi qu'aux pratiques artistiques. À cet égard, où en est le projet présidentiel de généraliser l'histoire de l'art à l'école ?

Enfin, dans une société où la technique et la technologie sont omniprésentes, malgré une légère augmentation du budget, les efforts en faveur de la diffusion de la culture scientifique restent insuffisants. Il faudra bien, un jour, sortir d'un système dans lequel « il est fatal qu'il soit fatal que la culture soit toujours traitée après », et la culture scientifique encore après. Démocratiser plus résolument la culture scientifique, développer plus largement sa diffusion, c'est essentiel pour que chacun puisse en connaissance de cause maîtriser les choix scientifiques et peser sur ceux qui dessineront le monde de demain.

Je pourrais allonger cet inventaire des moyens qui ne sont pas au rendez-vous des besoins ni à la hauteur de l'ambition du partage du meilleur de l'art et de la culture pour tous. C'est pourquoi, avec mon groupe, je ne peux que voter contre ce budget de non-assistance à culture en danger.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à remercier tous les orateurs : quelles que soient leur sensibilité politique et la tonalité de leur intervention, ils ont témoigné de leur engagement en faveur de la culture. C'est en effet une cause qui nous rassemble tous.

Je m'efforcerai de répondre aux différentes questions sans trop me répéter, certaines interventions se rejoignant. Ces dernières nous ont en tout cas permis de faire un tour d'horizon assez complet des différents aspects de la politique culturelle.

Monsieur le rapporteur spécial, je vous remercie de reconnaître que, cette année, un effort soutenu est effectué en faveur du patrimoine.

Vous m'avez interrogée sur la problématique des établissements publics, en soulignant que le ministère de la culture assurait la tutelle de soixante-dix-huit opérateurs.

Je reconnais que c'est une caractéristique de mon ministère, ce qui renforce effectivement l'enjeu d'une bonne tutelle. Nous essayons ainsi d'améliorer le pilotage stratégique des établissements publics - tout en restant très attachés au principe d'autonomie - par l'envoi aux nouveaux dirigeants de lettres de mission précisant les priorités du ministère. Nous accélérons également la signature des contrats de performance, la question de la contractualisation des moyens dépendant bien évidemment des travaux en cours sur la pluriannualité des budgets des ministères. Nous cherchons à mutualiser les bonnes pratiques et à moderniser la gestion des emplois en nous posant la question d'un transfert de la gestion des personnels aujourd'hui simplement affectés.

Nous avons donc réalisé un effort important pour travailler le plus étroitement possible avec les établissements publics, qui sont des acteurs majeurs de notre paysage culturel.

Vous êtes également intervenu sur ce que vous appelez la « soutenabilité » de nos engagements financiers, en vous demandant si l'on pouvait réaliser des équipements culturels nouveaux. On peut bien sûr le faire, mais, comme l'ont souligné plusieurs orateurs, notre priorité est de faire face à nos engagements antérieurs.

En 2008, les crédits de paiement alloués aux DRAC honoreront en priorité les engagements passés et les opérations ayant bénéficié de financements FEDER. En l'espèce, nous avons des dates butoir au-delà desquelles nous serions obligés de rembourser les apports réalisés ; mais cela ne nous empêchera pas de lancer de nouvelles opérations.

Nous avons ainsi inscrit des autorisations d'engagement et des crédits de paiement pour de grands projets. Je pense, par exemple, à la construction du Centre national des archives de Pierrefitte ou au réaménagement du quadrilatère Richelieu. Mais ce sont des projets à long terme, qui arriveront à maturité en 2012. En nous plaçant dans cette perspective, nous pouvons à la fois porter des projets et donner la priorité au règlement de nos engagements passés.

Comme M. Dauge, vous avez évoqué l'INRAP en indiquant que la situation tendait à s'améliorer. La productivité de la redevance d'archéologie préventive s'est en effet accrue en raison d'un effort particulier en ce qui concerne son recouvrement.

Nous nous sommes beaucoup mobilisés pour améliorer la situation de l'INRAP. Un plan de résorption de l'emploi précaire a été mis en place, ce qui a permis de consolider 350 contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée en 2007, augmentant ainsi la capacité d'intervention de l'établissement. Il y a également eu des efforts de gestion interne, avec une amélioration des ressources humaines et un renforcement du dialogue entre l'INRAP et les services régionaux de l'archéologie.

En outre, nous avons le souci de développer une offre alternative afin que les collectivités locales qui le peuvent mettent en place leur propre service d'archéologie préventive. Actuellement, plus de cinquante services archéologiques de collectivités ont obtenu l'agrément. Des opérateurs privés, comme Archeodunum, en Suisse, ou Oxford, en Grande-Bretagne, peuvent également offrir des possibilités d'intervention et de soutien à l'action d'archéologie préventive.

La dette est réelle : l'INRAP doit encore 15, 5 millions d'euros. Le règlement de cette question sera à nouveau évoqué avec le ministère du budget dans le cadre des discussions sur le futur contrat de performance. Vous l'avez rappelé à juste titre, cette somme était destinée à l'origine à permettre à l'établissement de disposer d'un fonds de roulement lors de sa création.

Le Conseil national de la recherche archéologique s'est réuni plusieurs fois, en 2007, sous la présidence du professeur François Baratte. Après son renouvellement partiel, j'ai l'intention d'assister à la mise en place du nouveau conseil, qui aura lieu en janvier prochain.

Marques de satisfaction au banc des commissions.

Debut de section - Permalien
Christine Albanel, ministre

MM. Gaillard et Lagauche ont évoqué le CNC, qui fera l'objet d'une réforme nécessaire afin de moderniser sa gestion. L'objectif est de simplifier les circuits et les flux financiers en affectant directement au CNC les taxes qui sont aujourd'hui imputées sur le compte d'affectation spéciale. Toutefois, afin de faire coïncider recouvrement et gestion directe en ce qui concerne la taxe sur les entrées en salle, ou TSA, nous avons intégré dans le projet de loi de finances rectificative pour 2007 une disposition permettant au CNC de conserver la trésorerie de cette taxe.

En parallèle, nous travaillons à la nécessaire modernisation de la gouvernance du CNC : comme il n'y a pas de conseil d'administration, les décisions sont prises par la directrice générale et par le comité financier. Un accord général existe sur ces nécessaires évolutions, lesquelles nécessiteront l'intervention de la loi.

Monsieur le rapporteur spécial, vous avez évoqué la proposition de loi de M. Mancel tendant à établir un classement des trésors inaliénables et des oeuvres éventuellement aliénables. Cette proposition rejoint la problématique de la mission que j'ai confiée à Jacques Rigaud, dont je ne veux pas préjuger les conclusions. Nous y serons extrêmement attentifs lorsque nous aborderons cette question sensible. Cela étant, je ne suis pas sûre que cette proposition constitue la meilleure réponse.

La publication du décret sur l'assistance à maîtrise d'ouvrage, qui a été évoqué dans le domaine patrimonial, est prévue pour le premier trimestre de 2008. Le décret sera transmis au Conseil d'État dès le début du mois de janvier. Il prévoit une intervention des services de l'État afin d'aider les collectivités locales à conduire les travaux de restauration.

Quant à la mission confiée à Mme Catherine de Salins et à M. Jean-Paul Godderidge, elle porte sur l'organisation globale de la maîtrise d'ouvrage des monuments appartenant à l'État. C'est un domaine qu'il convient de simplifier, car il est extrêmement compliqué en raison de la multiplicité des intervenants : les DRAC, l'EMOC, le SNT, le Centre des monuments nationaux, etc.

Mme Morin-Desailly, MM. Nachbar, Renar, Fouché et Lagauche ont souligné le caractère insuffisant du programme « Patrimoines » au regard des besoins.

Le chiffre de 400 millions d'euros, qui a été évoqué par différents rapports parlementaires, notamment ceux de M. Richert et de M. Nachbar, et par le Président de la République lors de la campagne électorale, représente un objectif qui permettrait d'aller au-delà de ce que l'on a connu par le passé. On constate en effet que, depuis dix ans, les crédits consommés se sont toujours situés autour de 300 millions d'euros, avec une moyenne de 295 millions d'euros environ.

Sur la période 1997-2001, la moyenne était de 280 millions d'euros. Elle s'est accrue de 2002 à 2006, passant à 310 millions d'euros, avec un pic en 2004. Le projet de loi de finances pour 2008, avec 304 millions d'euros, se situe donc dans la moyenne sur dix ans.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le rapport sur l'état du patrimoine monumental, que vous aviez appelé de vos voeux, est actuellement en cours d'élaboration. Il aurait dû vous être remis, mais nous avons pris du retard compte tenu de l'ampleur de la tâche. Il sera en tout cas à votre disposition avant le 31 décembre 2007, et nous espérons que vous pourrez l'avoir même plus tôt, si possible vers le 20 décembre.

Ce rapport devrait corroborer l'estimation de 400 millions d'euros. Nous nous interrogeons donc sur la possibilité d'un financement extrabudgétaire. Madame Morin-Desailly, vous m'avez également sollicitée à ce sujet, mais il m'est difficile d'être plus précise pour l'instant. Nous en sommes encore au stade de la réflexion, et beaucoup de pistes sont examinées.

Nous souhaitons associer le Parlement à cette réflexion, car chacun sait qu'en matière patrimoniale il y a, d'un côté, le problème du montant des crédits et, de l'autre, celui de la stabilité de ces derniers. En effet, l'interruption et le redémarrage des travaux ont des conséquences particulièrement graves pour les métiers d'art et pour toutes les entreprises.

M. Philippe Nachbar, entre autres intervenants, a également évoqué l'expérimentation actuellement conduite sur la gratuité.

Je rappelle que dix-huit établissements, soit quatorze musées et quatre grands établissements parisiens, font l'expérience de la gratuité : gratuité complète pour les collections permanentes ou gratuité ciblée certains soirs de la semaine.

Cette expérience sera menée pendant les six premiers mois de l'année 2008, et son coût est évalué à près de 2, 2 millions d'euros, qui seront compensés par le ministère.

Cette expérience sera accompagnée d'un audit privé. Nous sommes en train de passer l'appel d'offres pour un montant estimé entre 100 000 euros et 200 000 euros. Cet audit nous permettra de constater si les habitudes du public changent et si cette initiative a vraiment des effets.

J'entends bien les réserves émises çà et là sur ce sujet.

Il est vrai qu'une politique tarifaire offre la possibilité de mener une politique culturelle. Cependant, il y a certainement de la place pour des déclinaisons de gratuités pouvant se révéler tout à fait intéressantes.

Quoi qu'il en soit, il sera passionnant d'avoir clairement tous les chiffres en main, ce qui sera rendu possible dans quelques mois.

M. Philippe Nachbar a également souligné l'effort en faveur de l'éducation culturelle et artistique, avec un budget qui s'élève à 31, 5 millions d'euros. Je l'en remercie.

M. Serge Lagauche a évoqué le spectacle vivant et a parlé d'un budget contraint pour les opérateurs nationaux. Les crédits du spectacle vivant ont cependant été consolidés, et ils s'élèvent tout de même à 640 millions d'euros !

Je rappelle que l'offre culturelle en la matière reste considérable, pour ne pas dire tout à fait exceptionnelle, et que les crédits ont augmenté de plus de 40 % au cours des dix dernières années, ce qui permet de soutenir un tissu extrêmement dense et de subventionner environ 1 200 orchestres ou ensembles.

En tout état de cause, je pense qu'il existe aussi un temps pour la consolidation.

Évidemment, comme différents orateurs l'ont souligné, ce problème est rendu d'autant plus sensible que certains investissements ont été différés.

Il m'arrive, en effet, d'inaugurer des lieux pour lesquels nous n'avons pas encore réglé l'investissement dû : les financements sont allés davantage vers le fonctionnement, et il existe actuellement un gel de précaution de 6 %. Cela ajoute à la sensibilité du sujet.

Je pense néanmoins qu'il n'y a aucunement un désengagement de l'État à l'égard du spectacle vivant et que nous bénéficions toujours d'une offre considérable.

Quoi qu'il en soit, comme Mme Catherine Morin-Desailly l'a très justement demandé, nous ne devons pas faire l'économie d'une réflexion globale sur le sujet et sur les modalités d'intervention de l'État en la matière, en liaison avec les différentes collectivités locales. Que devons-nous soutenir, avec quel projet et où nous faut-il vraiment agir pour que l'intervention publique ait toute sa pertinence ? Telles sont les questions que nous devons examiner cette année.

M. Serge Lagauche a souligné la nécessité de développer le mécénat en faveur du spectacle vivant. À cet égard, nous ne voulons pas qu'il y ait de différence entre les particuliers et les entreprises.

Par ailleurs, nous voulons élargir le champ des institutions bénéficiant du mécénat. Pour l'instant, cet élargissement profitera aux lieux dont le capital est détenu entièrement par une personne publique, ce qui exclut les centres dramatiques nationaux qui sont pour la plupart des SARL.

Nous souhaitons poursuivre la discussion pour que le mécénat en faveur du spectacle vivant se développe, car il est très important.

L'enjeu de la circulation des oeuvres a été souligné par M. Serge Lagauche. Je partage son ambition. Nous souhaitons que les oeuvres soient beaucoup plus diffusées. C'est l'un des éléments que nous inscrirons dans les conventions que nous voulons généraliser avec toutes les institutions culturelles, en particulier avec les scènes nationales.

L'idée de créer un observatoire du spectacle vivant est intéressante, mais, actuellement, la Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles, la DMDTS, au ministère de la culture, a mis en place un bureau de l'observation de l'ensemble du spectacle vivant. Ce bureau fait remonter l'information et procède à des études qualitatives. L'idée est d'implanter en administration centrale une base de données et de l'étendre rapidement aux directions régionales des affaires culturelles.

Nous souhaitons également coordonner le plus possible tous les éléments apportés par le Centre national du théâtre, le Centre d'information et de ressources pour les musiques actuelles, le Centre national de la danse, la Cité de la musique, et établir une convention d'échange d'informations avec la Société des auteurs et compositeurs dramatiques.

Le CNT peut être un instrument intéressant, même s'il reste toutefois sectoriel.

Quoi qu'il en soit, on peut étudier l'idée de la création d'un observatoire. Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, nous sommes en train de réfléchir aux missions des différents organismes. Nous étudions, par exemple, la pertinence des spécialisations entre, d'un côté, l'Office national de diffusion artistique, l'ONDA, et, de l'autre, le CNT.

S'agissant du livre, nous avons présenté un plan, avec trois priorités.

La première priorité concerne le renforcement des librairies indépendantes par la création d'un label « librairie de référence » - c'est sans doute la mesure la plus importante -, qui permettra aux librairies ainsi labellisées d'être exonérées de taxe professionnelle, la création d'un fonds d'aide à la transmission des librairies et le soutien de l'État à la création d'un portail internet des libraires.

La deuxième priorité s'articule autour du soutien au développement de la lecture publique en conduisant une expérimentation quant à l'ouverture des bibliothèques le soir ou les jours fériés. Je travaille avec Valérie Pécresse pour recourir à l'emploi étudiant à cet égard.

La troisième priorité est évidemment la définition d'une économie numérique du livre. C'est aujourd'hui toute la problématique entre les éditeurs et la BNF, pour numériser les ouvrages au rythme de 100 000 par an, mais aussi pour passer un accord en ce qui concerne les ouvrages sous droits.

Telles sont les grandes directions du plan « Livre ».

Je souhaite par ailleurs créer un Conseil du livre qui pourra jouer un rôle de médiation, comme l'a souligné M. Jacques Valade dans son rapport.

Debut de section - Permalien
Christine Albanel, ministre

En ce qui concerne la musique, il a été fait allusion au rapport Olivennes, qui est très prometteur pour l'industrie musicale et l'industrie du cinéma.

M. Serge Lagauche a en effet rappelé, à juste titre, que le piratage touchait également directement le cinéma.

Vous connaissez l'économie générale de cette action, qui tend à renforcer l'offre légale, à la rendre la plus attractive possible, notamment grâce à la suppression des Digital Rights Management, les DRM, ces verrous technologiques qui empêchent de passer d'un support à l'autre.

De plus, nous voulons dissuader les pirates par la mise en place de sanctions équilibrées, qui commencent par de la pédagogie, des avertissements via l'Autorité de régulation des mesures techniques dont les compétences seront élargies par la loi.

Par ailleurs, la rémunération équitable qui accroît les ressources des industries musicales est un élément essentiel, même si ce n'est pas le seul, pour soutenir l'industrie du disque. Il existe toujours, bien sûr, la problématique de la TVA sur le disque. C'est une problématique européenne qui fait partie de nos combats, mais nous sommes loin d'avoir gagné !

En ce qui concerne les intermittents, M. Serge Lagauche, notamment, a évoqué la question des artistes et des techniciens.

Depuis le 1er avril dernier, les nouvelles dispositions relatives aux annexes 8 et 10 sont entrées en vigueur.

Le nombre d'intermittents est descendu à 95 000 personnes. En revanche, l'engagement de l'État reste extrêmement élevé, puisqu'il est toujours de 1, 2 milliard d'euros, notamment à la suite du déplafonnement des indemnisations. C'est donc un système qui demeure relativement coûteux et qui s'accompagne d'un engagement assez marqué de l'État.

Malgré tout, des progrès importants ont été enregistrés. On a fait allusion aux huit conventions, dont quatre ont déjà été signées ou en cours de signature et quatre sont en fin de négociation : la signature de la convention sur les éditions phonographiques est en bonne voie. Quant aux conventions relatives respectivement au spectacle vivant subventionné et au spectacle vivant privé, les choses sont un peu plus difficiles.

Nous nous efforçons aussi de prolonger le fonds de professionnalisation et de solidarité de façon à réaliser une jonction avec les négociations sur l'assurance chômage. Le sujet a été soumis à l'arbitrage du Premier ministre, et nous espérons qu'une décision positive sera prise en la matière.

Par ailleurs, à côté de ce fonds de professionnalisation et de solidarité, il y a aussi un volet social auquel on pense moins, mais qui reste très important dans la mesure où toutes les organisations syndicales sont parties prenantes.

Toutes ces dispositions vont dans le sens de la professionnalisation de ces métiers, ce qui, en soi, est très souhaitable.

M. Serge Lagauche a souligné les très bons résultats de notre cinéma.

En ce qui concerne le jeu vidéo, nous travaillons actuellement à la finalisation d'un accord avec la Commission européenne afin de valider le crédit d'impôt, que le Président de la République a souhaité voir rapidement entrer en vigueur.

La réponse de la Commission européenne à la notification qui lui a été faite est imminente. Cette mesure doit permettre de redonner à la France la compétitivité nécessaire pour concurrencer les studios asiatiques et nord-américains.

Il a enfin été fait allusion au droit à la concurrence. Les cartes illimitées de cinéma ont donné lieu à de nombreuses polémiques de la part des petits exploitants. Ces cartes illimitées sont malgré tout très intéressantes pour les consommateurs, et certains effets pervers ont été corrigés en permettant aux petits exploitants d'y participer.

Toutefois, compte tenu des tensions, une mission a été confiée à Mme Perrot et à M. Leclerc afin de parvenir à trouver de bonnes pratiques et de bons équilibres. Nous voulons élaborer une sorte de code de bonne conduite, comme celui qui avait malheureusement été invalidé dans sa forme par le Conseil de la concurrence, au nom d'une entente illicite.

Le Centre national du cinéma continuera bien évidemment à soutenir l'équipement des salles en technologie numérique.

Lors de la présidence française de l'Union européenne, nous essaierons d'exercer une influence sur la Commission de façon à pérenniser et à stabiliser tout notre système d'aide au cinéma, système qui a probablement rendu possible ce cinéma vivant dont nous pouvons être fiers en Europe aujourd'hui.

Ce cinéma n'est pas en danger. La commissaire européenne Mme Reding est très claire sur ce point.

Toutefois, de nouvelles orientations vont arriver sur le sujet. Il faut les préempter et peser sur elles. La présidence française de l'Union européenne sera un moment important pour la France à ce titre.

Madame Morin-Desailly, vous avez, vous aussi, déploré le caractère contraint de ce budget, en soulignant que nous avions été malmenés par Bercy. Nous ne l'avons pas été plus que les autres ministères ! Le ministère de l'enseignement et de la recherche, comme celui de la justice sont évidemment prioritaires, mais, au-delà, tout le monde doit se mobiliser dans l'effort commun.

Debut de section - Permalien
Christine Albanel, ministre

Vous êtes revenue sur la problématique du patrimoine. Je partage totalement votre souci de trouver une nouvelle source de financement.

Vous avez souligné votre attachement à l'investissement pour le patrimoine privé. En 2008, ce sont bien 123 millions d'euros, soit une augmentation de 20 millions d'euros des crédits, qui seront affectés aux monuments appartenant à l'État. S'il n'est pas possible d'anticiper à ce stade la répartition de ces crédits entre les collectivités territoriales, les particuliers et les autres collectivités, l'objectif d'allouer 10 % de ces crédits aux propriétaires privés demeure.

Madame Morin-Desailly, vous êtes très engagée, nous le savons, dans l'éducation artistique et culturelle. Un effort important est consenti en faveur de l'éducation artistique. La diminution apparente de crédits résulte de la fusion de certaines actions et du recentrage des interventions du ministère en direction des publics les plus éloignés de la culture, notamment les personnes handicapées ou sous main de justice, les malades hospitalisés ou encore les jeunes publics des zones urbaines sensibles, à travers des opérations comme « Les Portes du temps ». L'accent mis sur l'éducation culturelle et artistique est pour nous tout à fait essentiel.

Une mission d'étude sur l'éducation artistique et culturelle, confiée à Éric Gross par Xavier Darcos et moi-même, est sur le point de s'achever. Elle s'articule autour de trois grands axes : la fréquentation des artistes et des oeuvres, l'apprentissage d'une pratique et une initiation consistante à l'histoire de l'art.

L'idée est que l'histoire de l'art ne doit pas être appréhendée comme une matière particulière, mais qu'elle doit irriguer en quelque sorte toutes les matières, y compris les mathématiques, dont les liens avec l'architecture peuvent être nombreux.

S'agissant de la formation à cet égard, mon ministère est à la disposition des IUFM. Je ne peux dévoiler pour l'instant le plan auquel nous avons travaillé, dans la mesure où il n'est pas encore finalisé ; mais nous avons des projets de partenariat entre les établissements culturels et les établissements scolaires, de façon que des compagnonnages étroits se nouent.

Nous souhaitons aussi pouvoir utiliser nos ressources ; je pense, par exemple, à l'INA, qui peut jouer un rôle important comme centre de ressources pour l'éducation artistique et culturelle dans nos écoles. J'indique d'ailleurs, s'agissant de l'INA, qu'un accord de partenariat a été signé aujourd'hui en Algérie, où je me suis rendue, entre cet institut et la télévision algérienne.

Vous vous êtes interrogée sur la problématique des artistes dans les écoles. C'est une perspective intéressante, mais qu'il ne faut évidemment pas ouvrir trop largement : il ne faudrait pas que les artistes effectuent au sein des établissements ce qu'ils doivent normalement réaliser sur scène ; 120 heures, sur les 507 heures qu'ils doivent effectuer pour bénéficier du régime de l'intermittence, sont prévues à ce titre. Des difficultés se posent parfois à cet égard avec les ASSEDIC. C'est un point que nous soulèverons lors d'une réunion qui aura lieu le 17 décembre prochain.

Vous avez évoqué une certaine stagnation des crédits de la création, ce que j'appelle, pour ma part, une consolidation.

Le gel de précaution, il est vrai, se fait sentir. Nous nous efforçons de le lever car, dans certains petits lieux, il est sensible. Il faut toutefois, comme vous l'avez dit très justement, mener une réflexion globale sur la politique de la culture.

S'agissant, par exemple, des opéras, nous soutenons au premier chef les opéras nationaux, ce qui est tout à fait normal, et nous intervenons différemment d'un lieu à l'autre en ce qui concerne les autres opéras régionaux. Il faut à cet égard clarifier les interventions de l'État.

Il faut faire de même, en matière culturelle, entre les différents ministères : de nombreuses actions sont en effet menées par différents départements ministériels, et une approche globale s'impose donc.

Quant au « Grenelle » de la culture, terme dont je me méfie quelque peu, car j'ai le sentiment qu'on ne peut pas partir de zéro dans un domaine d'une telle richesse, ...

Debut de section - Permalien
Christine Albanel, ministre

... nous ne sommes pas opposés à une réflexion globale. En tout cas, nous l'envisageons.

MM. Lagauche et Ralite sont revenus sur la lettre de mission qui m'a été adressée par le Président de la République. Messieurs, j'ai été d'une totale franchise sur ce budget depuis le début ; j'ai ainsi souligné que ce budget n'était certes pas facile, mais qu'il permettait d'agir et s'inscrivait dans l'effort normal que l'État doit mener pour faire face à ses engagements.

Vous m'avez interrogée sur le spectacle vivant. J'ai tout à l'heure rappelé le nombre de lieux que nous subventionnons et le caractère très foisonnant de l'offre culturelle.

Vous avez évoqué en particulier les arts de la rue. Ces derniers ont fait l'objet d'un plan de trois ans, avec une augmentation totale des crédits de plus de 4 millions d'euros. Il existe actuellement neuf centres nationaux des arts de la rue, avec des aides à l'écriture, des aides à la diffusion et une consolidation des équipes. Nous avons demandé le maintien de ces crédits aux DRAC en 2008. Parmi les projets en cours, figure la Cité des arts de la rue, à Marseille.

Ce secteur est important pour le ministère. D'ailleurs, les professionnels des arts de la rue ont exprimé leur satisfaction à Toulouse, le mois dernier, lors d'une rencontre qui a clôturé le Temps des arts de la rue.

M. Fouché a évoqué la question du mécénat. Il a d'ailleurs rappelé plusieurs grandes opérations de mécénat, comme la restauration de la galerie des Glaces du château de Versailles, que j'ai vécue en direct.

Je souligne à cet égard que le décret et l'instruction fiscale relatifs au mécénat en faveur des monuments historiques privés sont en cours de finalisation avec la direction de la législation fiscale. L'éligibilité au mécénat des travaux sur les monuments privés est assortie de deux conditions : l'absence d'exploitation commerciale du lieu et l'ouverture au public pendant au moins dix ans des parties protégées et ayant fait l'objet des travaux.

Pour la condition d'ouverture au public, le projet de décret prend en compte différents éléments, comme le caractère saisonnier de l'exploitation. Par ailleurs, s'agissant de la condition d'absence d'exploitation commerciale, le projet prévoit une possibilité d'éligibilité au mécénat en dessous d'un seuil de recettes annuelles de 60 000 euros.

En tout cas, pour les travaux visant à permettre l'accessibilité à des personnes handicapées, aucune condition de ressources n'est exigée pour bénéficier du mécénat.

Ce décret simple devrait être publié avant la fin de l'année ou, au plus tard, au début de l'année prochaine.

Je remercie M. Fouché d'avoir, lui aussi, reconnu les efforts consentis en faveur de l'éducation artistique.

Il a évoqué la question des transferts de crédits aux départements et aux régions concernant les établissements d'enseignement spécialisé, en soulignant l'effort consenti par les collectivités locales.

Je rappelle que l'article 101 de la loi d'août 2004 n'opère pas de transfert de compétence. Il s'agit en fait d'aménager et d'actualiser l'exercice d'une compétence déjà transférée en 1983, de clarifier les compétences des divers niveaux de collectivités et de transférer aux régions et aux départements des subventions que l'État versait jusqu'à présent aux villes pour les accompagner dans leurs actions.

Une réunion s'est tenue le 6 novembre dernier entre mon cabinet et des représentants de l'Association des régions de France, de l'Assemblée des départements de France et du ministère de l'intérieur. Il a été convenu, à la demande de l'ARF, que la commission consultative sur l'évaluation des charges, la CCEC, du 11 décembre prochain évoquerait, sur le plan général, la mise en oeuvre de cet article de loi.

Un nombre important de départements ayant mené à bien les travaux nécessaires à la signature des schémas départementaux, il a été convenu, pour conforter la dynamique ainsi engagée, de présenter à la CCEC les transferts de crédits des premières régions ayant pu aboutir sur l'ensemble du processus, de poursuivre dans les meilleurs délais l'élaboration des schémas départementaux et les travaux relatifs à l'inscription des cycles d'enseignement professionnel initial dans les plans régionaux de développement des formations professionnels, et, enfin, de procéder aux transferts au fur et à mesure des avancées.

En matière budgétaire, l'ensemble des crédits de fonctionnement - l'action 3 « Soutien aux établissements d'enseignement spécialisé » du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » - devraient être transférés après délibération des schémas régionaux et départementaux d'enseignement spécialisé. Le montant total de ces crédits s'élève à 28, 6 millions d'euros.

M. Ralite est revenu avec beaucoup de passion et de talent sur ce qu'il appelle le « vrai visage » de notre politique, qui s'incarnerait dans le rapport de Jean-Pierre Jouyet et Maurice Lévy, ainsi que dans la lettre de mission du Président de la République.

Je vous le répète, monsieur Ralite - nous en avons cent fois parlé -, je ne crois pas du tout que nous soyons dans un contexte de dérégulation. Nous avons su préserver en France un équilibre entre l'intervention publique et l'intervention privée. Je considère d'ailleurs que cet équilibre s'améliore au fil du temps, que nous avons dépassé certains tabous, sans pour autant mettre à bas les garde-fous qui font de notre politique culturelle précisément ce qu'elle est.

Je ne perçois pas du tout la financiarisation à outrance du monde culturel que vous dénoncez. Des projets comme Abou Dhabi ou Atlanta sont plus une reconnaissance de notre savoir-faire et de notre rayonnement culturel que des opérations strictement mercantiles. Toutes les précautions seront évidemment prises ; la mission confiée à Jacques Rigaud sur la possibilité d'aliéner les oeuvres s'inscrit dans ce cadre.

Quant à la volonté d'une ouverture plus large aux différents publics, exprimée dans la lettre de mission, elle ne signifie en rien baisse de la qualité ou renoncement à l'exigence que nous partageons tous. En tout cas, ce n'est pas du tout ainsi que je la comprends. Je ne pense pas - je l'ai souvent dit -que la qualité fasse fuir le public. J'observe au contraire que les grands créateurs font aussi salle comble.

Debut de section - Permalien
Christine Albanel, ministre

Vous avez vous-même, monsieur Ralite, fait allusion au public enthousiaste que vous rencontrez lors de vos très nombreuses sorties culturelles. Je peux d'ailleurs apporter moi-même un témoignage identique.

La reconduction automatique des aides, la fonctionnarisation de la culture ne sont pas souhaitables, d'autant que, en pratique, nous apportons déjà un large soutien, à très long terme - parfois pendant plusieurs décennies - à de nombreux créateurs. Il me paraît préférable de mettre en place des relations fondées davantage sur l'échange, une logique de conventionnement, d'engagements réciproques et d'accords, sans que soient remis en question les principes fondamentaux.

Quant aux grands groupes, ils jouent eux aussi un rôle important dans l'économie culturelle. Certes, j'apprécie énormément Patrick Zelnik, le fondateur de Naïve, qui est d'ailleurs en passe de devenir un grand groupe, ainsi que nombre d'autres producteurs indépendants. Mais Vivendi Universal apporte aussi beaucoup à l'industrie musicale : nous avons donc également besoin des grands groupes.

Le gel des crédits évoqué par M. Ralite pèse sur l'ensemble de l'État ; c'est un gel de précaution. Je le répète, nous sommes très attentifs à l'ensemble du paysage culturel : nous souhaiterions évidemment qu'il n'y ait aucun gel, afin de réfléchir plus à l'aise à la redéfinition de nos politiques publiques, opération plus facile à mener dans un contexte d'abondance.

Mais l'application de ce gel n'est ni aveugle ni stupide ; nous nous efforçons de préserver les efforts des uns et des autres ainsi que les talents. Vraiment, on ne peut pas dire que nous mettons à bas la politique de soutien au spectacle vivant !

M. Yves Dauge a rappelé très justement tous les aspects économiques de la politique du patrimoine et ce que cette dernière représente en termes de métiers d'art. Il s'est demandé comment faire face. Je tiens à le rassurer : nous ferons face, quoi qu'il arrive !

M. Dauge a également évoqué l'INRAP, sujet sur lequel j'ai déjà répondu, ainsi que l'exonération de la redevance d'archéologie préventive. Sur ce dernier point, je rappelle que sont actuellement exonérés les logements sociaux et les maisons individuelles construits pour le compte des personnes physiques. Ces exonérations ont été voulues par le législateur ; dans le contexte actuel du logement, elles n'ont pas vocation à être abandonnées. Les modifications de la loi du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie préventive votées dans le cadre de l'article 17 de la loi relative au soutien à la consommation et à l'investissement du 9 août 2004 ont également entraîné l'exonération quasi systématique des lotisseurs privés. Cette situation mérite d'être discutée, mais les mesures qui permettraient de corriger les textes en vigueur sont d'une grande difficulté technique, pour un gain financier non évident.

Concernant les espaces protégés, les textes ont tous été modernisés de 2005 à 2007. Le moment est désormais venu de relancer la politique des secteurs sauvegardés. J'aurai d'ailleurs le plaisir de participer à l'une des prochaines séances de la Commission nationale des secteurs sauvegardés que vous présidez, monsieur Dauge.

M. Ivan Renar, comme Mme Catherine Morin-Desailly et d'autres, est revenu sur la problématique de la baisse des crédits. Il s'est aussi intéressé à l'éducation artistique et à l'histoire de l'art. Je dois dire que je partage complètement son souci de voir enseigner l'histoire de l'art, qui est tellement fédératrice pour nos voisins italiens et qui a été trop longtemps négligée en France. Elle doit être un ciment pour tous les élèves, mais aussi pour l'ensemble des disciplines. Beaucoup d'enseignants sont prêts à accepter, et même à porter, ce projet. Voilà des engagements communs et des perspectives tout à fait intéressantes à développer !

J'espère avoir répondu à toutes vos questions, mesdames, messieurs les sénateurs, et je vous remercie de l'engagement culturel dont l'ensemble de votre assemblée fait preuve, toutes sensibilités politiques confondues.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Madame la ministre, le Sénat est sensible au soin que vous avez pris de répondre individuellement et de façon détaillée à l'ensemble des intervenants.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Culture » figurant à l'état B.

§(en euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Culture

Patrimoines

Dont titre 2

152 419 782

152 419 782

Création

Dont titre 2

58 936 100

58 936 100

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

Dont titre 2

368 471 662

368 471 662

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° II-128, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

PatrimoinesDont Titre 2

CréationDont Titre 2

Transmission des savoirs et démocratisation de la cultureDont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Christine Albanel, ministre

L'ensemble des modifications prévues dans cet amendement ont été prises en compte pour la mission « Culture » lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2008. Ces transferts de crédits n'avaient toutefois pu être prévus dans le texte initial du projet de loi, faute d'estimation définitive de leur volume.

Cet amendement technique s'inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et, notamment de ses articles 95 et suivants, relatifs au patrimoine.

Cet amendement est neutre budgétairement pour la mission « Culture » et reflète le souci de l'État de transférer, à l'euro près, les moyens nécessaires à l'exercice des compétences et responsabilités transférées.

L'amendement inclut trois mesures.

Il s'agit, tout d'abord, du transfert des crédits d'entretien et de fonctionnement des monuments historiques appartenant à l'État dont la propriété est transférée aux collectivités territoriales. La somme de 437 630 euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement est transférée de l'action 01 « Patrimoine monumental et archéologique » du programme « Patrimoines » vers la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Ces crédits sont destinés aux communes, aux départements et aux régions. Ils correspondent au transfert de propriété de 27 monuments, dont le château du Haut-Koenigsbourg et la chapelle des Carmélites, à Toulouse.

Ensuite, un transfert de crédits intervient dans le cadre de l'expérimentation par le département du Lot de la gestion des crédits d'entretien et de restauration des monuments historiques n'appartenant pas à l'État. Il porte sur 550 000 euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, transférés de l'action 01 du programme « Patrimoines » vers la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Enfin, nous poursuivons la décentralisation des services de l'Inventaire général du patrimoine culturel, transféré aux régions, et des agents affectés aux monuments transférés aux collectivités territoriales. Une première mesure de transfert de crédits avait été prise en compte dans le projet de loi de finances au titre du transfert des personnels non titulaires et des moyens de fonctionnement. Il s'est avéré que l'estimation retenue était surévaluée. Il est donc proposé de la corriger par cet amendement. Le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » est ainsi augmenté de 248 451 euros.

Inversement, la mesure de transfert de crédits prise dans le projet de loi de finances au titre du droit d'option s'est révélée sous-évaluée. Il s'agit de l'exercice du droit d'option entre le détachement sans limitation de durée ou l'intégration dans la fonction publique territoriale des agents des services de l'Inventaire et des agents affectés dans les propriétés de l'État ou du Centre des monuments nationaux, transférés aux collectivités territoriales. Il est ainsi proposé de corriger à la hausse le transfert, à hauteur de 7 371 574 euros, pour 147 agents.

Au final, après les premiers transferts intervenus dans la loi de finances initiale pour 2007, ainsi que les corrections qui seront apportées tant par la prochaine loi de finances rectificative pour 2007 que par le projet de loi de finances pour 2008, complété par le présent amendement, l'État aura transféré 3, 97 millions euros au titre des moyens de fonctionnement et des agents non titulaires des services de l'Inventaire et 8, 2 millions d'euros au titre du droit d'option des agents titulaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

La commission des finances n'a pas délibéré sur cet amendement qui ne lui a été transmis que très récemment.

Je m'en tiendrai à l'engagement que prend Mme la ministre : elle nous explique que cet amendement technique - il faut toujours se méfier de la technique !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Mme la ministre nous dit cependant que ces transferts n'avaient pas été prévus dans le texte initial du projet de loi de finances, « faute d'estimation définitive de leur volume ». Comme quoi, même les services sont parfois pris en défaut !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Lagauche

M. le rapporteur spécial regrette que cet amendement nous soit soumis un peu précipitamment. Il fait confiance au Gouvernement, ce qui est normal. Quant à moi, je ne m'y fie pas tout à fait ! Le groupe socialiste s'abstiendra donc.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Culture » figurant à l'état B.

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de la mission « Culture », modifiés.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits du compte spécial « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale » figurant à l'état D.

en euros

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale

Industries cinématographiques

Industries audiovisuelles

Soutien à l'expression radiophonique locale

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits du compte spécial « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale ».

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

J'appelle en discussion les amendements n° II-1 et II-110 rattachés pour leur examen à la mission « Culture ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° II-1, présenté par M. Gaillard, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. Après l'article 41 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de 6 mois à compter de la publication de la présente loi, le gouvernement transmet au Parlement un rapport sur l'évaluation des résultats de l'expérimentation de gratuité des musées et monuments historiques mise en oeuvre du 1er janvier au 30 juin 2008. Ce rapport précise les coûts de l'expérimentation pour les services et établissements publics concernés, ainsi que la composition du public accueilli durant la période précitée.

II. En conséquence, faire précéder cet article de la mention :

Culture

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Cet amendement a pour objet d'obtenir du Gouvernement le dépôt d'un rapport sur les résultats de l'expérimentation de gratuité des musées et monuments historiques, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi de finances.

Le Gouvernement souhaiterait, semble-t-il, que le délai de présentation du rapport soit porté à neuf mois ; je suis prêt à rectifier mon amendement en ce sens.

Debut de section - Permalien
Christine Albanel, ministre

Effectivement, monsieur le rapporteur spécial, rendre un rapport en juin 2008 serait prématuré, puisque l'expérimentation s'achèvera précisément à ce moment-là. Un délai de neuf mois serait en revanche tout à fait acceptable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

M. le rapporteur spécial nous a déjà indiqué qu'il acceptait de rectifier cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis donc saisi d'un amendement n° II-1 rectifié, présenté par M. Gaillard, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :

I. Après l'article 41 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la présente loi, le gouvernement transmet au Parlement un rapport sur l'évaluation des résultats de l'expérimentation de gratuité des musées et monuments historiques mise en oeuvre du 1er janvier au 30 juin 2008. Ce rapport précise les coûts de l'expérimentation pour les services et établissements publics concernés, ainsi que la composition du public accueilli durant la période précitée.

II. En conséquence, faire précéder cet article de la mention :

Culture

La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

Mon groupe est perplexe devant cet amendement, car il peut sembler normal qu'un rapport rende compte de l'expérimentation en cours de la gratuité, tout comme il est légitime que la représentation nationale soit associée aux conséquences et préconisations qui résulteront de ce test. En même temps, on peut craindre qu'il ne s'agisse que d'un paravent destiné à dissimuler les problèmes.

Si cette expérimentation ne se révélait pas pertinente, il serait naturel de pouvoir revenir en arrière. Plusieurs études mettent d'ores et déjà en lumière le fait que la gratuité seule n'élargit guère l'accès aux musées. De nombreux professionnels expriment toutefois une nette préférence pour une gratuité ciblée et une politique tarifaire audacieuse, telle qu'elle est souvent pratiquée par de nombreuses institutions.

En effet, à qui doit bénéficier cette gratuité ? Aux habitués des musées, ou à de nouveaux publics pour lesquels des actions de sensibilisation spécifiques sont primordiales pour les inciter à franchir le seuil des musées ? Même avec la gratuité, aller au musée n'est pas donné à tout le monde ! On sait bien que la ségrégation sociale dans le domaine de la culture ne résulte pas du seul problème de l'entrée payante ou gratuite.

Or, cette gratuité représente un coût et risque d'entraîner un appauvrissement des établissements. On peut redouter que cette situation ne conduise à la diminution des actions culturelles en direction des scolaires, des RMIstes, des quartiers, etc. pourtant essentielles à la démocratisation de la culture.

Certes, on le sait, la gratuité dope la fréquentation à court terme. Mais plutôt qu'à une éphémère « lune de miel », il est préférable de concourir à un mariage au long cours entre toute la population et son patrimoine artistique.

En outre, n'est-il pas paradoxal de vouloir combattre la gratuité pour la musique et le cinéma sur Internet et de vouloir l'instituer dans les musées ?

C'est encore un autre paradoxe que de prôner la gratuité des musées et d'envisager, dans le même temps, de vendre une partie des collections publiques ! Comment ne pas faire écho aux légitimes inquiétudes des conservateurs de musée qui craignent la remise en cause du fondement même de la notion de collection publique et le principe de continuité historique des collections ?

Nous devons réfléchir à la meilleure façon de les aider à assumer leur double mission : conserver pour les générations à venir et accueillir le public, depuis les scolaires de tous âges jusqu'aux retraités. À tous, il faut prendre la main pour la visite du musée, comme vous le savez. Le public est aussi au coeur de la préoccupation des conservateurs.

Mais si l'accès à la culture n'a pas de prix, il représente néanmoins un coût. La gratuité est-elle la réponse ? On peut en douter. Quoi qu'il en soit, nous souhaitons qu'un débat très ouvert ait lieu dans la période à venir. Je crois que M. le président de la commission des affaires culturelles a l'intention d'avancer dans ce domaine.

Nous voterons néanmoins cet amendement présenté par notre collègue Yann Gaillard, qui joue toujours le rôle de sentinelle vigilante sur ce genre de problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

Nous souhaitons simplement pouvoir débattre avant les élections municipales de cette question qui mérite d'être creusée. J'ai pris également bonne note de la position nuancée de Mme la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valade

Ce problème n'a pas laissé indifférente la commission des affaires culturelles. C'est la raison pour laquelle il a été décidé récemment en conférence des présidents que, lors de la séance mensuelle réservée du 6 février prochain, je poserai, au nom de la commission, une question orale avec débat consacrée à ce sujet.

De la sorte, nous pourrons entendre les explications de Mme la ministre sur un point qui nous préoccupe tous et prolonger un débat que Ivan Renar vient d'amorcer.

L'amendement est adopté à l'unanimité.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 41 quater.

L'amendement n° II-110, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 41 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le 1 de l'article 238 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« g) d'opérations confiées par une collectivité territoriale (ou un groupement de collectivités) à une société d'économie mixte au moyen d'une convention, ayant pour objet la présentation au public d'oeuvres dramatiques, lyriques, musicales, chorégraphiques, cinématographiques et de cirque ou l'organisation d'expositions d'art contemporain, à la condition que les versements soient affectés exclusivement aux opérations considérées ».

II. - Les pertes de recettes pour l'État sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du Code général des impôts.

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Cet amendement a pour objet d'étendre le bénéfice de l'avantage fiscal visé à l'article 238 bis du code général des impôts, récemment modifié par la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, aux opérations entrant dans le cadre classique du mécénat gérées ou organisées par des sociétés d'économie mixte, lesquelles ne sont pas concernées par ces nouvelles dispositions.

Cet article précise que l'avantage fiscal lié à la qualité de mécène ouvre droit, pour les entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés, à une réduction d'impôt égale à 60 % du montant de leurs versements, dans la limite de 5 pour mille du chiffre d'affaires.

Les sociétés d'économie mixte locales peuvent se voir confier par les collectivités territoriales l'organisation ou la gestion d'événements à caractère culturel ou artistique. Or les manifestations concernées ne peuvent, dans l'état actuel de la législation, recevoir d'aides sous forme de mécénat, le cas de figure n'ayant pas été prévu par le législateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

La commission n'a pu examiner cet amendement, qui ne lui a été transmis que très récemment. Elle souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Christine Albanel, ministre

Je suis évidemment sensible aux intentions de Mme Morin-Desailly en faveur du spectacle vivant. Toutefois, le Gouvernement n'a pu instruire cet amendement. Or, il semblerait que beaucoup de ces sociétés d'économie mixte dont il y est question soient en réalité des Zénith ou des lieux de ce type, qui ont une vocation uniquement commerciale.

C'est pourquoi le Gouvernement, malgré les bonnes intentions des auteurs de l'amendement, émet un avis défavorable sur ce dernier.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Tenant compte du fait que ni la commission des affaires culturelles, ni la commission des finances, ni le Gouvernement n'ont pu examiner cet amendement, je le retire, monsieur le président.

Je considère néanmoins qu'il s'agit d'un amendement d'appel et qu'il nous faudra réexaminer ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° II-110 est retiré.

Mes chers collègues, nous avons achevé l'examen de la mission « Culture » et du compte spécial « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 5 décembre 2007 à neuf heures trente, à quinze heures et le soir :

1. Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale (90, 2007 2008).

Rapport (91, 2007-2008) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.

Examen des missions :

- Enseignement scolaire

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial (rapport n° 91, annexe n° 13) ;

M. Philippe Richert, Mmes Françoise Férat et Brigitte Gonthier-Maurin, rapporteurs pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 92, tome V).

- Sécurité (+ articles 48 octies)

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial (rapport n° 91, annexe n° 28) ;

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (avis n° 96, tome VIII) ;

M. Jean Faure, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (avis n° 94, tome VIII).

- Administration générale et territoriale de l'État

M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial (rapport n° 91, annexe n° 2) ;

M. José Balarello, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (avis n° 96, tome I).

- Relations avec les collectivités territoriales (+ articles 48 à 48 septies)

Compte spécial : avances aux collectivités territoriales

M. Michel Mercier, rapporteur spécial (rapport n° 91, annexe n° 25) ;

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (avis n° 96, tome VII).

- Sécurité civile

M. Claude Haut, rapporteur spécial (rapport n° 91, annexe n° 29) ;

Mme Catherine Troendle, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale (avis n° 96, tome IX).

En outre, à quinze heures :

2. Nomination des membres de la mission commune d'information sur la prise en charge de la dépendance et à la création du cinquième risque.

Personne ne demande la parole ?...

La séance est levée.

La séance est levée à vingt heures cinquante.