Intervention de Adrien Taquet

Réunion du 9 juin 2020 à 21h30
Protection des victimes de violences conjugales — Articles additionnels après l'article 11

Adrien Taquet :

Cet amendement vise à faire reconnaître qu’un enfant exposé à des violences conjugales peut être traumatisé par celles-ci et à le considérer comme une victime de ces faits, à côté de la personne, le plus souvent sa mère, qui en a été la victime directe.

Pour autant, la loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes a déjà expressément reconnu la qualité de victime de ces mineurs, en prévoyant de retenir comme circonstance aggravante des violences conjugales le fait qu’un mineur y ait assisté. L’objectif visé au travers de cette disposition est, à la fois, d’aggraver la répression et de permettre la constitution de partie civile.

Du reste, dans la circulaire du 9 mai 2019 relative à l’amélioration du traitement des violences conjugales et à la protection des victimes, la garde des sceaux a donné pour instruction aux parquets de systématiquement retenir cette circonstance aggravante, « compte tenu de la coloration particulière qu’elle donne au fait ». Elle ajoutait aussi : « La désignation d’un administrateur ad hoc devra par ailleurs être envisagée afin de permettre au mineur d’être reconnu comme une victime des faits. »

Cela dit, l’amendement soulève une importante difficulté juridique : il n’est constitutionnellement pas possible de créer un délit spécifique d’exposition des mineurs à des violences conjugales, alors même que, depuis la loi du 3 août 2018 précitée, les violences conjugales commises en présence d’un mineur sont aggravées. Un même fait ne peut en effet constituer, à la fois, un délit autonome et la circonstance aggravante d’un autre délit, car cela viole la règle bien connue non bis in idem.

Les travaux menés dans le cadre du Grenelle contre les violences conjugales, sous la responsabilité de la secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, et du plan interministériel de mobilisation et de lutte contre les violences faites aux enfants, sous ma propre responsabilité, ont démontré la nécessité de renforcer les unités d’accueil et d’écoute spécialisées et pluridisciplinaires pour recueillir la parole du mineur.

Au sein de mon plan de lutte contre les violences, présenté en novembre dernier, ces unités d’accueil médico-judiciaires pédiatriques (UAMJP), que l’on appelle désormais unités d’accueil pédiatriques pour l’enfance en danger (UAPED), seront généralisées à l’ensemble du territoire – je le dis à Mme de la Gontrie – d’ici à 2022.

Grâce à l’allocation de moyens supplémentaires, ces unités sont aujourd’hui au nombre de 64. L’objectif est d’en avoir 104 d’ici à 2022. Il est prévu que l’audition des mineurs par ces structures, à l’issue de laquelle une prise en charge psychologique pourra intervenir, concerne également les mineurs témoins victimes de violences conjugales.

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