Intervention de Philippe Nachbar

Réunion du 4 décembre 2007 à 15h10
Loi de finances pour 2008 — Compte spécial : cinéma audiovisuel et expression radiophonique locale

Photo de Philippe NachbarPhilippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles :

Je me contenterai donc d'aborder trois aspects, les plus importants à mes yeux, de ces deux programmes.

Tout d'abord, en ce qui concerne le patrimoine monumental, l'examen des dotations montre que 334 millions d'euros, soit 30 millions d'euros de plus qu'en 2006 et 17 millions d'euros de moins qu'en 2007, sont prévus en autorisations d'engagement. Compte tenu des contraintes budgétaires qu'évoquait à l'instant mon collègue de la commission des finances, l'effort est réel.

Cependant, la commission des affaires culturelles du Sénat n'a pas caché son inquiétude quant à l'exécution du budget en 2008. Toute mesure de régulation serait lourde de conséquences pour le patrimoine tant public que privé et, par conséquent, pour les entreprises spécialisées dans la restauration des monuments, qui ont vécu, en 2005 et en 2006, une véritable crise.

Comment ne pas rappeler, à cet égard, les propos du Président de la République inaugurant le Palais de l'architecture et du patrimoine et évoquant la mobilisation d'une somme de 4 milliards d'euros sur dix ans pour être à la hauteur des besoins du patrimoine en France ?

Nous serons donc à vos côtés, madame la ministre, pour défendre les crédits du patrimoine et limiter les effets de la rigueur budgétaire en 2008.

Cela concerne le patrimoine monumental de l'État, mais aussi celui des collectivités territoriales. Il faut souligner que 60 % des monuments classés et 45 % de l'ensemble du patrimoine appartiennent aux collectivités locales, pour l'essentiel aux communes. À cet égard, je signale qu'elles attendent avec impatience la mise en oeuvre de la réforme de la maîtrise d'ouvrage, qui doit en principe faire prochainement l'objet de textes d'application.

J'évoquerai aussi le patrimoine privé, qui représente 49 % du patrimoine total et 35 % des monuments historiques classés. Dans ce domaine, l'État doit encourager la diversification des moyens de financement. Sur ce plan, les propriétaires privés attendent avec beaucoup d'impatience la publication des décrets d'application de l'amendement voté l'année dernière sur l'initiative du rapporteur spécial du budget et visant à étendre le bénéfice des dispositions de la loi relative au mécénat, aux associations et aux fondations. Nous en espérons beaucoup.

Je voudrais maintenant saluer le défi, que le ministère s'est lancé, d'instaurer la gratuité dans les musées. En 2008 sera menée une expérimentation qui durera six mois et concernera quatorze musées, huit en province, six à Paris. L'objectif est d'encourager l'accès de tous à la culture. Chacun d'entre nous ne peut que se féliciter de cette expérience ; le Sénat considère que la culture pour tous est un des moyens privilégiés d'assurer l'égalité des chances ou ce que l'on aurait appelé autrefois, d'un mot cher à Jean Vilar, « l'élitisme pour tous ».

Néanmoins, la commission des affaires culturelles s'est interrogée sur l'incidence financière d'une telle mesure. Compte tenu des contraintes qui pèsent sur l'ensemble des crédits, ceux de votre ministère pourront-ils l'an prochain compenser le manque à gagner important que subiront les musées concernés par cette expérimentation ?

Au-delà de la question de la gratuité, le débat doit porter sur les réelles mesures d'éducation qui permettront d'élargir le public des musées hors du cercle des habitués.

Je voudrais citer ici la formule qui figure au fronton du palais de Chaillot : « Ami, n'entre pas ici sans désir. » C'est, je crois, autant le désir d'art et de beauté que la gratuité d'entrée qui permettront d'étendre, comme nous le souhaitons tous, le public des musées.

En tout cas, le défi que se lance votre ministère est important. Je ne doute pas un seul instant que vous saurez le relever. Nous aurons l'occasion d'en discuter à nouveau dans le courant de l'année prochaine, lorsque les résultats de l'expérimentation auront été mesurés par un organisme indépendant.

Je voudrais enfin mettre en exergue, pour m'en féliciter, l'effort consenti, dans ce projet de budget, en faveur de l'éducation culturelle et artistique. Les crédits affectés augmentent de 6 %, ce qui est méritoire en ces temps de difficultés et de rigueur budgétaire. Ils s'élèvent à 32 millions d'euros et traduisent une réelle volonté politique, que je veux ici saluer.

Cet effort permettra de financer, en étroite liaison avec le ministère de l'éducation nationale, des opérations exemplaires, telles que les ateliers artistiques dans les lycées et les collèges, le soutien aux services éducatifs des musées - le nombre de ces structures se multiplie aujourd'hui sur l'initiative des communes pourvues d'un musée -, la formation des enseignants, des actions spécifiques dans les écoles.

S'agissant des actions en milieu scolaire, deux mesures nouvelles m'apparaissent particulièrement intéressantes.

Il s'agit de l'introduction, tant attendue, de l'enseignement de l'histoire de l'art dans les établissements d'enseignement et de la mise en place de liens contractuels entre établissements scolaires et établissements culturels. Ces dispositions permettront, je le crois, d'ouvrir le monde de la culture aux plus jeunes. C'est parmi eux que se recrute le public qui demain fréquentera avec bonheur les musées, les théâtres ou les salles de concert.

Malgré les contraintes, votre projet de budget, madame la ministre, traduit une réelle volonté de démocratiser la culture. C'est la raison pour laquelle la commission des affaires culturelles, qui a tenu à marquer à la fois son soutien à cette volonté de démocratisation et sa vigilance pour ce qui est du patrimoine monumental, a donné un avis favorable à l'adoption des crédits.

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