Intervention de Jean-Yves Leconte

Réunion du 10 juin 2020 à 15h00
Élections municipales et consulaires de 2020 — Discussion générale

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

Depuis, les choses ont un peu évolué. Quoi qu’il en soit, nous avons eu besoin des collectivités locales au moment de cette crise et il faudra réfléchir à l’organisation de notre État à la suite de cela.

Le contexte actuel est meilleur et permet d’envisager le deuxième tour des municipales après trois mois finalement, alors qu’il s’agit de deux tours d’un même scrutin. Mais il existe tout de même quelques incertitudes.

La situation sanitaire continuera-t-elle à évoluer dans un sens favorable ? Par ailleurs, la campagne électorale ne pourra pas être traditionnelle. De surcroît, une question prioritaire de constitutionnalité a été déposée devant le Conseil constitutionnel sur l’ensemble de l’article 19 de la loi du 23 mars 2020, ce qui fait également peser un certain nombre d’incertitudes sur l’ensemble du scrutin. Enfin, le rapport du conseil scientifique du 8 mai dernier, même s’il signale une évolution globalement positive, note qu’il existe des difficultés spécifiques à Mayotte et en Guyane. Or la Guyane, comme les Français de l’étranger, doit procéder à un renouvellement sénatorial en septembre.

C’est donc en tenant compte de ces nombreuses incertitudes que nous devons nous décider aujourd’hui sur le projet de loi qui nous est présenté.

Les propositions du Gouvernement sont quand même quelque peu baroques, comme l’a souligné notre rapporteur, puisqu’il s’agit d’un texte mêlant des dispositions qui n’ont pas vocation à s’appliquer et des dispositions qui ont vocation à s’appliquer. C’est difficilement compréhensible et difficilement envisageable. Comment voter une loi qui s’appliquerait de manière partielle ? Si nous acceptions cela et qu’une telle loi était promulguée, ce serait tout simplement une démission totale et définitive du Parlement, puisque nous laisserions le Gouvernement décider par décret ce qui, dans la loi, pourrait s’appliquer !

Une chose est néanmoins certaine : nos élus consulaires, ceux qui depuis presque six mois en Asie, en particulier en Chine, vivent au quotidien la pandémie – nous la vivons depuis trois mois, nous savons maintenant ce que c’est ! –, ceux qui vivent également une tragédie sans précédent dans certains pays d’Amérique latine, en Amérique du Nord, au Moyen-Orient ou dans le sous-continent indien ne peuvent pas aujourd’hui participer à une campagne électorale. Il est donc absolument nécessaire de reporter les élections consulaires.

L’apport principal de notre rapporteur et de notre commission est de proposer de n’inscrire dans la loi que ce qui est certain. Cette clarification a engendré d’ailleurs dans la nuit une autre clarification, de la part du Gouvernement cette fois, par rapport au projet de loi organique. En effet, depuis le dépôt des amendements que nous avons reçus et examinés ce matin en commission, la proposition du Gouvernement a profondément changé puisque ce dernier n’envisage que le report des élections des sénateurs des Français de l’étranger pour une année, et non les autres.

Maintenant que nous connaissons la position du Gouvernement sur ce sujet, nous pourrons en débattre, ce que nous ferons la semaine prochaine, mais nous aurions préféré disposer d’un véritable projet de loi organique, avec avis du Conseil d’État avant de nous prononcer.

Les apports de la commission, in fine, sont assez complets. D’abord, elle a voté quelques amendements permettant d’élargir les possibilités de recourir à des procurations et de faciliter leur établissement.

Elle a ensuite adapté le démarrage des nouveaux conseils communautaires et comités de syndicats de communes devant s’installer dans la foulée des municipales, dans une période aux contraintes sanitaires particulièrement compliquées.

Enfin, concernant les élections consulaires, notre commission considère – et c’est heureux – qu’il convient de respecter à la fois les électeurs et les candidats qui font vivre la démocratie locale, en fixant définitivement une date pour les élections de 2021. Ces élections ont déjà été reportées une fois de fin mai à fin juin. Il conviendra maintenant de dire quand elles auront lieu.

Je rappelle que les élections précédentes de l’Assemblée des Français de l’étranger, prévues en 2012, ont été reportées en 2013, puis en 2014. Cette fois, les élections sont également reportées deux fois : il faudrait leur donner davantage de stabilité, même si je reconnais que la période actuelle est particulière. À l’étranger, nos compatriotes ne bénéficient pas des mêmes filets de sécurité qu’en France et nombre d’entre eux se sont retrouvés dans une situation sanitaire et sociale compliquée. Ils avaient donc franchement autre chose en tête que de penser à une campagne électorale, même si les conseillers consulaires ont eu beaucoup de travail aux côtés des services consulaires.

Monsieur le rapporteur, je veux aussi saluer l’introduction de dispositions votées au moment de l’examen de la loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dite loi Engagement et proximité, et dont l’application était prévue lors du prochain renouvellement des élus consulaires. Elles sont avancées au 1er octobre 2020. C’est heureux, même si c’est un peu étonnant.

Finalement, cette commission fait une application de l’article 45 de la Constitution quelque peu variable. Sur ce texte qui vise le code électoral, on peut parler du statut des élus, mais je rappelle que, lors de l’examen du projet de loi Engagement et proximité, nous n’avons pas pu débattre de ces éléments, la commission des lois ayant considéré que les élus des Français de l’étranger n’étaient pas des élus qui méritaient d’être insérés dans le débat !

Quoi qu’il en soit, ne boudons pas notre plaisir, puisque des élus pourront présider les conseils consulaires dès le mois d’octobre, ce qui est une bonne chose.

Deux ou trois sujets encore soit méritent un débat, soit ont été laissés tels quels. Nous nous sommes posé la question, par exemple, de savoir s’il était souhaitable de nous en tenir à la proposition du Gouvernement de prévoir une dérogation d’un mandat de cinq ans pour les élus consulaires. Au regard de l’élection présidentielle qui devrait se présenter en 2027, nous avons préféré opter pour cette solution, d’autant que nous avons tous en tête les élections sénatoriales, pour lesquelles il ne serait pas bon que les mêmes élus votent trois fois !

Nous avons besoin, monsieur le ministre, de quelques éclaircissements concernant le vote électronique, compte tenu de la mise en liquidation judiciaire du prestataire du ministère des affaires étrangères chargé de l’organiser pour les élections consulaires. Nous débattrons aussi peut-être de la manière dont pourra être complété le collège des grands électeurs pour les élections des sénateurs des Français de l’étranger, au cas où elle se tiendrait en septembre 2020.

En tout état de cause, compte tenu des clarifications apportées par la commission – ce ne sont dorénavant plus des suppositions qui figurent dans la loi, mais ce que nous souhaitons voir appliquer en totalité – dont nous saluons le travail, et malgré quelques amendements que nous défendrons, nous voterons ce projet de loi dans la rédaction issue des travaux de la commission des lois.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion