Je remercie l'ensemble des intervenants pour leur participation à cette table ronde. Je demande à mes collègues de bien vouloir rester présents car nous allons aborder le second point à l'ordre du jour qui concerne la table ronde que nous avions organisée le 5 mars dernier, juste avant la pandémie. Cette table ronde va faire l'objet d'un rapport actualisé à l'aune de cette crise sanitaire. Ce rapport, qui a pour thème : « les communes face à l'inflation des prix de l'immobilier, » et s'interroge sur les moyens d'action dont elles disposent pour réguler le marché. La table ronde avait réuni les représentants des plates-formes de location saisonnière (notamment Airbnb), un professeur d'économie spécialiste de l'immobilier, et un élu, le maire de Suresnes. Elle avait bien illustré l'inflation des prix de l'immobilier ces dernières années. Les conclusions du mini rapport que je vais vous présenter en sont donc issues, et ont été actualisées au cours de la période de confinement.
Il va de soi qu'un certain nombre d'observations, de constats et de pistes de réflexion mériteront évidemment d'être réévaluées et confirmées dans les prochains mois pour conserver toute leur pertinence. La crise sanitaire liée à l'épidémie de cCovid-19 a plongé le marché de l'immobilier dans l'incertitude, comme beaucoup de secteurs de l'économie.
On ne sait pasignore encore quelle sera l'ampleur des restrictions au crédit de la part des banques : l'Observatoire Crédit Logement CSA table sur 220 000 ménages qui pourraient être exclus de l'accès aux crédits immobiliers d'ici à 2021. Quel en sera l'impact sur la demande de logement ? Cela est difficile à prévoir.
Ce que l'on sait d'ores et déjà, c'est qu'avec le confinement le secteur a connu une paralysie historique : 120 000 professionnels de l'immobilier étaient ont été au chômage technique.
Comme vous, je constate, ici et là, dans nos territoires, des dynamiques contradictoires : les demandes de maison avec jardin explosent ; des habitants se disent prêts à quitter les grandes métropoles pour avoir plus d'espace ; et puis, inversement, l'inadaptation des transports en commun et les risques sanitaires associés conduisent certains à se rapprocher des centres -villes.
Juste avant le déclenchement de la crise sanitaire, l'année 2019 avait été celle de tous les records : des taux d'emprunt historiquement faibles, une explosion des transactions immobilières, et, bien sûr, des prix en constante augmentation, ce qui avait d'ailleurs motivé notre table ronde de début mars. En à peine 10 dix ans, les prix à l'achat ont augmenté de 61 % à Paris, 62 % à Lyon, 25 % à Strasbourg et même 79 % à Bordeaux. Certaines villes où les prix sont plus raisonnables sont toutefois restées attractives, comme Mulhouse par exemple.
Si le marché de l'immobilier se portait bien, il y a toutefois eu quelques dommages collatéraux :
- les difficultés à se loger :... Jje pense aux jeunes ménages primo-accédants et aux familles ;
- l'éloignement forcé des centres villes : ... Jje pense aux foyers modestes, qui subissent l'augmentation des temps de transport, l'impact sur les rythmes de vie, etc. ;
- la dévitalisation de certains territoires en relégation économique :... le marché a en effet exacerbé les disparités territoriales entre centres villes, périphéries, zones rurales ;
J'évoque tous ces aspects sans compter les effets récents des plateformes de location saisonnière, accusées de muséifier nos centres, de faire disparaitre le commerce de proximité, ou encore d'entrainer la fermeture d'écoles suite à l'exode des familles avec enfants. Les représentants de ces plateformes ont d'ailleurs eu l'occasion, lors de notre table ronde, de répondre à certaines accusations qu'elles considèrent comme injustifiées.
Comment expliquer en tout cas un tel niveau de prix ? Tout simplement par le dynamisme de la demande, comme l'avait fait remarquer fort justement notre collègue Alain Richard : « l'immobilier est un produit de marché » soumis à l'offre et à la demande. Tant que la demande excédera l'offre, les prix seront tirés vers le haut. »
Une telle demande s'explique d'abord le dynamisme économique de certains territoires : les métropoles notamment, avec des effets en cascade. Je pense à Paris, qui a dépassé la barre des 10 000 euros le mètre carré, causant une flambée des prix en première et deuxième couronnes et ce sans compter le retour des expatriés après le Brexit.
Il y a ensuite l'amélioration des réseaux de transport. Je pense notamment à Bordeaux ou Brest, dont où les prix ont augmenté subitement avec le déploiement de lad'une Ligne à grande v itesse (LGV).
II y a également des raisons financières : les taux sont bas, les banques prêtes prêtent sur de plus longues durées, des volumes plus importants, et sans exiger de gros apports... bBref, les marchés ont solvabilisé la demande.
Et puis, il y a enfin des causes démographiques : la population française gagne des habitants et; les structures familiales évoluent : avec les divorces, la monoparentalité, le célibat, sont autant de phénomènes qui alimentent la demande de logement, ; sans compter les gains d'espérance de vie qui maintiennent une demande forte des personnes âgées.... Or tous ces phénomènes ne sont pas arrivés à maturité.
Au total, nous devons loger en moyenne 350 000 habitants supplémentaires chaque année...
Mais, par ailleurs, l'offre ne suit pas : car on ne construit pas suffisamment : les mises en chantier ont baissé de 6 % l'année dernierère, avant même la crise du Covid.
L'offre est également mal répartie : on construit trop dans certaines zones et pas suffisamment en zones tendues. Sur ce point, il faudra sans doute réorienter les dispositifs de défiscalisation en oeuvre depuis trente ans. Ils ont trop souvent favorisé la construction dans des zones où l'offre était déjà abondante.
Alors que faire ? Comment mieux réguler le marché ? C'est une question que devront bientôt se poser de nombreux maires, nouvellement élus ou réélus ou qui le seront d'ici fin juin.
Le rapport dresse quelques pistes de réflexion. Je les rappelle très vitesuccinctement :
1. Encourager les mises en chantier bien sûr, : celace qui permet de doper l'offre ;
2. Mieux aménager le territoire pour que la population soit mieux répartie : cela permet d'élargir l'offre ;
3. Lutter contre les logements vacants : cela permetafin de réinjecter de l'offre sur le marché ;
4. Réhabiliter les logements anciens dégradés :, notamment dans les centres villes et les centres bourgs. : o Outre l'aspect revitalisation, cela permet de renouveler l'offre.
C'est donc en agissant prioritairement sur l'offre que l'on pourra limiter l'inflation immobilière. À l'inverse, jusqu'à présent les politiques de restriction de la demande ont montré leurs limites. Je pense au renforcement des contraintes à l'égard des plateformes : elles payent la taxe de séjour, elles permettent à des propriétaires d'arrondir leur fins de mois, tout cela est positif, mais, en réalité, ces contraintes n'ont que peu d'impact sur les prix de la pierre, et elles touchent surtout le marché de la location.
Je pense également à l'encadrement des prix des loyers. Mais, même en zone tendue, cela n'a pas enrayé l'augmentation des prix à l'achat... lLes pParisiens le savent très bien !
Je pense enfin à la fiscalité sur l'immobilier. On a récemment créé l'impôt sur la fortune immobilière, ce qui la n'a pas eu d'effet très probant sur les prix. Bref, nos politiques publiques n'ont pas démontré d'efficacité réelle pour enrayer l'inflation des prix du logement.
Nous venons de traverser une crise sanitaire inédite... Oon peut en craindre ldes effets, y compris sur l'immobilier, mais on peut penser que le marché restera soutenu par 2 piliers structurels qui alimentent la hausse des prix à savoir : d'une part, une demande de logement qui excède le stock d'offre et, d'autre part, des investisseurs qui s'orientent vers des actifs jugés plus sûrs, surtout dans un contexte d'incertitude boursière en temps de crise économique. Cela est particulièrement vrai dans le contexte actuel ; où on peut lire que les épargnants risquent d'être touchés par leau lendemain de la crise. Tout cela poussera naturellement à privilégier des choix plus sûrs, notamment dans le domaine de l'immobilier.
Voilà ce qu'on pouvait dire sur cette table ronde qui visait à ouvrir le débat. Il reste à en approfondir les constats. Nous allons avoir quelques échanges dans l'instant. Ce rapport pourrait constituer un pré-rapport prélude à un l'approfondissement de cette question. Je vous remercie de votre patience, mes chers collègues.