Intervention de Ivan Renar

Réunion du 4 décembre 2007 à 15h10
Loi de finances pour 2008 — Articles additionnels après l'article 41 quater

Photo de Ivan RenarIvan Renar :

Mon groupe est perplexe devant cet amendement, car il peut sembler normal qu'un rapport rende compte de l'expérimentation en cours de la gratuité, tout comme il est légitime que la représentation nationale soit associée aux conséquences et préconisations qui résulteront de ce test. En même temps, on peut craindre qu'il ne s'agisse que d'un paravent destiné à dissimuler les problèmes.

Si cette expérimentation ne se révélait pas pertinente, il serait naturel de pouvoir revenir en arrière. Plusieurs études mettent d'ores et déjà en lumière le fait que la gratuité seule n'élargit guère l'accès aux musées. De nombreux professionnels expriment toutefois une nette préférence pour une gratuité ciblée et une politique tarifaire audacieuse, telle qu'elle est souvent pratiquée par de nombreuses institutions.

En effet, à qui doit bénéficier cette gratuité ? Aux habitués des musées, ou à de nouveaux publics pour lesquels des actions de sensibilisation spécifiques sont primordiales pour les inciter à franchir le seuil des musées ? Même avec la gratuité, aller au musée n'est pas donné à tout le monde ! On sait bien que la ségrégation sociale dans le domaine de la culture ne résulte pas du seul problème de l'entrée payante ou gratuite.

Or, cette gratuité représente un coût et risque d'entraîner un appauvrissement des établissements. On peut redouter que cette situation ne conduise à la diminution des actions culturelles en direction des scolaires, des RMIstes, des quartiers, etc. pourtant essentielles à la démocratisation de la culture.

Certes, on le sait, la gratuité dope la fréquentation à court terme. Mais plutôt qu'à une éphémère « lune de miel », il est préférable de concourir à un mariage au long cours entre toute la population et son patrimoine artistique.

En outre, n'est-il pas paradoxal de vouloir combattre la gratuité pour la musique et le cinéma sur Internet et de vouloir l'instituer dans les musées ?

C'est encore un autre paradoxe que de prôner la gratuité des musées et d'envisager, dans le même temps, de vendre une partie des collections publiques ! Comment ne pas faire écho aux légitimes inquiétudes des conservateurs de musée qui craignent la remise en cause du fondement même de la notion de collection publique et le principe de continuité historique des collections ?

Nous devons réfléchir à la meilleure façon de les aider à assumer leur double mission : conserver pour les générations à venir et accueillir le public, depuis les scolaires de tous âges jusqu'aux retraités. À tous, il faut prendre la main pour la visite du musée, comme vous le savez. Le public est aussi au coeur de la préoccupation des conservateurs.

Mais si l'accès à la culture n'a pas de prix, il représente néanmoins un coût. La gratuité est-elle la réponse ? On peut en douter. Quoi qu'il en soit, nous souhaitons qu'un débat très ouvert ait lieu dans la période à venir. Je crois que M. le président de la commission des affaires culturelles a l'intention d'avancer dans ce domaine.

Nous voterons néanmoins cet amendement présenté par notre collègue Yann Gaillard, qui joue toujours le rôle de sentinelle vigilante sur ce genre de problème.

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