Intervention de Jean-Yves Le Drian

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 3 mars 2020 à 18h00
Conflit israélo-palestinien — Audition de M. Jean-Yves Le drian ministre de l'europe et des affaires étrangères

Jean-Yves Le Drian, ministre :

Plusieurs d'entre vous ont fait référence à l'hypothèse d'un seul État. Je me suis rendu deux fois en Israël et dans les Territoires palestiniens. Plusieurs de mes interlocuteurs palestiniens s'interrogeaient sur la stratégie à suivre et envisageaient cette solution. Ce n'est pas la position de la France. Cette tentation n'est pas nécessairement le reflet d'un découragement ou d'une volonté de repli, je vous l'accorde. Il peut s'agir d'une stratégie de très long terme, pour sauvegarder l'existence palestinienne. Le président du Congrès juif mondial m'a dit, lui, que la solution à deux États était rendue caduque par le plan Trump, mais que la solution à un État allait contre les intérêts d'Israël. Je le pense également. L'intérêt d'Israël est la solution à deux États, permettant à chacun de vivre dans des frontières sûres et reconnues. Mais cela peut apparaître comme contraire au plan Trump, qui réduit l'État palestinien à la portion congrue. Bref, des acteurs éminents, israéliens comme palestiniens, s'interrogent sur la solution à un État, qui n'a pas la faveur de la France.

Une initiative de paix est urgente, car il n'y a plus que M. Abbas comme fédérateur historique potentiel. S'il n'y a pas de négociation avec le président de l'Autorité palestinienne, nous risquons un émiettement, une balkanisation. Je ne suis pas pour les solutions incantatoires, qui ne servent à rien. Depuis trois ans, tous mes interlocuteurs me disaient attendre le plan Trump. La voix de la France, pour autant, s'est faite entendre sur chaque initiative des autorités israéliennes qui allait contre les paramètres fondamentaux que j'ai rappelés. Mon prédécesseur avait pris l'initiative, début 2017, d'organiser une grande manifestation internationale à Paris : les Israéliens n'y ont pas participé. Je ne le critique pas, il fallait alors le faire. Mais cela a révélé des difficultés.

Un mois après le plan Trump, j'essaie, en bonne intelligence avec Josep Borrell, de regrouper les Européens - plus nombreux qu'on ne le croit - susceptibles de se mobiliser, ainsi que les Arabes disposés à les accompagner : les Égyptiens, les Jordaniens... En tous cas, il faut une initiative partagée, et il n'y aura pas de plan de paix contre les Américains.

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