Intervention de Loïc Hervé

Réunion du 25 juin 2020 à 15h00
Statut de citoyen sauveteur — Adoption définitive en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Loïc HervéLoïc Hervé :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'arrêt cardiaque est, dans notre pays, une cause de mortalité à la fois très importante et très méconnue, notamment du grand public. D'après un rapport réalisé en 2018 sur l'initiative de l'Académie nationale de médecine, on peut évaluer entre 40 000 et 50 000 le nombre annuel de décès par arrêt cardiaque : c'est quinze fois plus que le nombre de morts sur les routes.

L'objet de la proposition de loi que nous examinons en deuxième lecture, qui résulte d'une initiative de notre collègue député Jean-Charles Colas-Roy, également rapporteur du texte à l'Assemblée nationale, est à la fois clair et louable. Il s'agit d'attirer l'attention sur le sujet majeur de l'arrêt cardiaque, d'une part, et de favoriser l'intervention des citoyens, d'autre part, en formant la population aux gestes qui sauvent et en modelant un régime de responsabilité protecteur pour ceux qui viennent au secours d'une victime d'arrêt cardiaque.

Il est à noter que le dispositif dont nous sommes amenés à discuter aujourd'hui trouve déjà à s'appliquer dans de nombreux pays étrangers : aux États-Unis, dans plusieurs provinces du Canada, en Australie, en Finlande ou encore en Allemagne. La loi communément appelée « Good Samaritan Law », ou « loi du bon Samaritain », comporte un ensemble de dispositions destinées à protéger les citoyens, en particulier les secouristes bénévoles qui portent assistance, contre d'éventuelles poursuites judiciaires.

Par exemple, l'article 1471 du code civil du Québec précise que la personne qui porte secours à autrui est exonérée de toute responsabilité pour le préjudice qui peut en résulter, à moins que ce préjudice ne soit dû à sa faute intentionnelle ou à sa faute lourde.

Jérôme Bignon a cité l'application « SAUV Life ». J'évoquerai, pour ma part, l'application « Staying Alive ». Certaines applications sont promues par les SAMU, d'autres, par les services départementaux d'incendie et de secours. Peu importe : l'essentiel est qu'elles se développent et permettent de sauver des vies.

Cela étant, si nous demandons à davantage de citoyens d'intervenir, il faut alors les protéger. C'est le sens de cette proposition de loi.

Je tiens à remercier Mme la rapporteur de la commission des lois du travail qu'elle a réalisé, de son rapport et de la recherche d'un consensus avec nos collègues députés. Elle nous a rappelé tout à l'heure que l'Assemblée nationale avait réintroduit des dispositions que nous avions supprimées en première lecture. Il me semble nécessaire de revenir sur certaines de ces modifications.

Tout d'abord, l'Assemblée nationale a réintroduit l'expression « citoyen sauveteur », que nous avions remplacée par celle, plus juridique, de « sauveteur occasionnel et bénévole », qui nous paraissait davantage appropriée s'agissant d'un concours apporté à l'exercice d'un service public. Cependant, le rapporteur de l'Assemblée nationale a clarifié la manière dont cette expression devait être entendue : ce statut recouvre l'acte de civisme commis par un citoyen qui porte secours et il précise les protections civiles et pénales dont il bénéficie au moment où il vient en aide à autrui.

Le détail des diligences devant être mises en œuvre par le citoyen sauveteur portant assistance à la victime d'un arrêt cardiaque a également été réintroduit. La commission des lois du Sénat avait supprimé ces mentions, considérant qu'elles pouvaient constituer un frein à l'action même des sauveteurs.

Cependant, notre commission des lois salue les suppressions et les adoptions conformes d'articles par l'Assemblée nationale. Je pense aux dispositions tendant à créer une obligation de formation au secourisme pour les juges et arbitres des fédérations agréées ou à l'introduction dans le code pénal de circonstances aggravantes relatives au vol ou à la destruction, détérioration ou dégradation de matériels destinés à prodiguer des soins de premiers secours. On sait que les défibrillateurs sont en accès libre dans les pharmacies et les équipements publics. Malheureusement, ils sont trop souvent l'objet de dégradations, dues à des adolescents ou à des personnes plus âgées qui ne se rendent pas compte de la portée de leurs actes. Le coût, important, est évidemment à la charge des collectivités territoriales. Il importe d'évoquer ce point.

Enfin, d'autres réintroductions d'articles, qui, au départ, ne nous semblaient pas souhaitables sur le fond, nous paraissent aujourd'hui permettre un compromis acceptable entre les deux chambres du Parlement sur cette proposition de loi.

Je reviendrai notamment sur l'article 6, tendant à créer une journée nationale de lutte contre l'arrêt cardiaque et de sensibilisation aux gestes qui sauvent. Les parlementaires sont très souvent associés à ces journées – très nombreuses – déjà dédiées à ces sujets, qui se tiennent pour la plupart en fin d'année. Je ne citerai que certaines d'entre elles : la Journée mondiale du cœur, la Semaine du cœur, la Journée de sensibilisation à l'insuffisance cardiaque, la Journée mondiale des premiers secours…

Vous l'aurez compris, mes chers collègues, les deux chambres du Parlement ont su atteindre un consensus intelligent, en élaborant un texte qui dépasse les clivages politiques. Je salue la volonté de tous les élus de se saisir du sujet de santé publique majeur qu'est l'arrêt cardiaque inopiné et de sensibiliser le plus grand nombre de nos concitoyens aux gestes qui sauvent. Le groupe de l'Union centriste soutiendra cette proposition de loi, dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale.

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