Intervention de Christian Cambon

Réunion du 23 juin 2020 à 21h30
Débat à la suite de la réunion du conseil européen des 18 et 19 juin 2020

Photo de Christian CambonChristian Cambon :

Madame la secrétaire d’État, je vous remercie des clarifications que vous venez d’apporter. Je tiens en préambule à vous rendre hommage pour votre opiniâtreté à honorer les responsabilités ministérielles qui vous sont confiées dans un contexte particulièrement complexe.

En vérité, comme nous pouvions nous y attendre, le Conseil européen qui s’est tenu vendredi dernier n’a pas vraiment permis d’aboutir à un accord. Nous adhérons bien évidemment au concept défendu par le Président de la République d’une Europe plus forte et plus souveraine, mais il y a encore loin des mots à la réalité.

Vous avez décrit le risque d’absence d’un accord. Or le constat est terrible : une fois de plus, l’Europe a fait étalage de ses divisions, alors que les modalités de réponse à la crise sont en débat depuis mars dernier. Une décision rapide était pourtant absolument nécessaire. On évoque aujourd’hui un possible compromis en juillet, voire à la fin de l’été, mais vous l’avez dit vous-même, le temps presse.

Après les annonces du mois dernier, qui laissaient espérer qu’une enveloppe de 750 milliards d’euros serait allouée au plan de relance, la déception serait bien grande si les États se révélaient incapables d’aboutir.

L’enjeu est économique, bien sûr, mais il est aussi politique, et il aura des conséquences sur la perception que nos concitoyens auront du rôle de l’Europe. La crédibilité de l’Europe est en cause. Si nous ne sommes pas capables de nous mettre d’accord aujourd’hui face à une crise d’une telle ampleur, quand serons-nous véritablement capables de faire avancer l’Europe ?

Y a-t-il eu des avancées lors de la réunion du Conseil de la part des pays dits « frugaux » ? Le Président de la République – vous l’avez dit – est en ce moment même aux Pays-Bas pour tenter de convaincre l’un de ces pays les plus réticents. Vous nous redirez peut-être au cours de la discussion quel est votre véritable sentiment sur les chances d’aboutir lors du prochain Conseil européen qui se réunira en présentiel dès le mois de juillet.

Par ailleurs, des travaux ont enfin démarré pour donner une boussole stratégique à l’Union européenne. Quelle belle priorité ! S’il s’agit d’une forme de revue stratégique, cette initiative est bienvenue. Mais sans moyens ambitieux, quelle sera la crédibilité de cette boussole ?

Avec 9, 5 milliards d’euros, dont 8 milliards d’euros pour le Fonds européen de la défense, la défense européenne ne bénéficie pas de la relance. Quel contresens stratégique ! Nous avions pourtant la possibilité d’accompagner cette relance ô combien nécessaire.

Où sont les 17 milliards d’euros qui étaient proposés il y a seulement deux ans par la Commission pour le Fonds européen de la défense et pour la mobilité militaire ? Vous nous direz si le dernier Conseil européen permet d’espérer des avancées sur cette question.

J’évoquerai enfin la relation future entre l’Union européenne et le Royaume-Uni. Sous l’autorité de mon collègue Jean Bizet, je participe à un groupe de suivi qui entendra Michel Barnier jeudi prochain. Nous sommes très intéressés par cette audition, mais en vérité, nous sommes inquiets.

Les négociations avec la Grande-Bretagne sont dans l’impasse. La conférence de haut niveau entre les dirigeants européens et le Premier ministre Boris Johnson va-t-elle faire naître un espoir ? Rien n’est moins sûr !

Nous fêterons les dix ans des accords bilatéraux de défense de Lancaster House. Au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, j’appelle le Gouvernement à prendre une initiative forte de relance de la coopération franco-britannique dans le domaine de la défense. En effet, le Royaume-Uni est le seul partenaire qui fixe à la défense les mêmes objectifs et lui alloue les mêmes moyens que notre pays.

Le Sénat va s’y employer sur le plan parlementaire, car beaucoup de choses resteront à reconstruire avec le Royaume-Uni. Cette coopération doit rester au cours des prochaines années l’un des moteurs de la construction d’une défense européenne, à laquelle le Royaume-Uni a naturellement vocation à participer.

Madame la secrétaire d’État, tout en rendant encore une fois hommage à votre détermination, comprenez que nous doutions de cette volonté d’aboutir de la part d’un certain nombre de nos partenaires, même si nous espérons encore.

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