Intervention de Martin Lévrier

Réunion du 25 juin 2020 à 9h00
Création d'un fonds d'indemnisation des victimes du covid-19 — Rejet d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Martin LévrierMartin Lévrier :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous l’avons tous dit, mais nous ne le répéterons jamais assez : l’engagement de nombre de nos concitoyens, qu’ils soient professionnels ou bénévoles, et quel que soit le stade de l’épidémie de la Covid-19, a suscité l’émotion et l’admiration de tous.

Dès l’apparition des premiers foyers de contamination sur le territoire de la République française, médecins urgentistes, infirmières en réanimation, personnels d’Ehpad ou même jeunes internes, tous se sont mobilisés pour prendre en charge les malades. À cette occasion, ils ont été exposés à un risque parfois élevé de contamination.

Bien au-delà du seul secteur du soin, de nombreuses personnes ont, tant bien que mal, maintenu leur activité pendant cette période afin d’assurer la permanence des services essentiels à la vie de la Nation. Je pense aux pompiers, aux ambulanciers, aux policiers et gendarmes, aux élus, aux enseignants chargés d’accueillir les enfants de soignants, aux aides à domicile, aux éboueurs, aux caissiers ou encore aux transporteurs routiers : qu’ils soient tous remerciés, et que ceux que j’oublie veuillent bien m’excuser.

Parmi ces femmes et ces hommes, certains auraient développé des formes graves de la pathologie, pouvant entraîner des séquelles invalidantes ou incapacitantes – comme des atteintes respiratoires, cardiaques, dermatologiques ou neurologiques – ou provoquer des décès.

Parce que, à leurs yeux, « il appartient à la société dans son ensemble et, donc, à l’État » d’assurer aux victimes de l’épidémie de Covid-19 « une réparation simple, rapide et équitable de tous les préjudices subis », Victoire Jasmin et plusieurs de ses collègues ont déposé, le 12 mai dernier, sur le bureau du Sénat une proposition de loi visant à « créer un fonds d’indemnisation spécifique pour les victimes de l’épidémie de Covid-19, qu’elles soient salariés du privé, fonctionnaires, indépendants ou bénévoles ».

Ce texte comprend dix articles.

L’article 1er pose le principe de la réparation intégrale des préjudices des personnes souffrant d’une maladie ou d’une pathologie consécutive à la contamination par le virus de la Covid-19 et qui, préalablement à cette contamination, ont été, dans l’exercice de leur profession ou d’une activité bénévole sur le territoire de la République française, en contact régulier avec des personnes elles-mêmes contaminées ou avec des objets susceptibles de l’être, ainsi que ceux de leurs ayants droit.

L’article 2 crée un fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19, géré par l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam), le financement de ce fonds étant défini à l’article 7. Enfin, la procédure de demande d’indemnisation auprès du fonds est détaillée aux articles 3 à 5, ainsi qu’à l’article 8.

L’intention de Mme Jasmin et de ses collègues est louable, mais la mise en œuvre de cette initiative parlementaire constituerait un précédent majeur en matière d’indemnisation pour une contamination par une maladie infectieuse ; à cette date, nous n’avons pas encore le recul scientifique nécessaire pour établir les éventuels effets à long terme d’une telle contamination sur la santé.

De plus, le fonds d’indemnisation créé par le présent texte serait adossé à l’Oniam. Permettez-moi de rappeler que, comme son nom l’indique, cet office a vocation à assurer l’indemnisation des « accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ». Ainsi, il a été mobilisé récemment en faveur des victimes du Mediator.

La réparation par l’Oniam suppose en principe que soient en cause des accidents médicaux imputables à des activités de prévention, de diagnostic ou de soin. La contamination par le virus de la Covid-19 n’entre pas dans ce champ, et il serait inconcevable de créer un champ spécifique pour une maladie virale de ce type.

Conscient de ce problème et des conséquences auxquelles les personnels concernés peuvent être confrontés, le ministre des solidarités et de la santé a annoncé que les soignants bénéficieraient d’une reconnaissance automatique comme maladie professionnelle, avec indemnisation en cas d’incapacité temporaire ou permanente. Cette règle s’appliquera aux soignants quels qu’ils soient et « quel que soit leur lieu d’exercice, à l’hôpital, en Ehpad ou en ville ». Les professionnels libéraux bénéficieraient eux aussi de ce mécanisme. Pour les autres travailleurs cités précédemment qui auraient pu être contaminés sur leur lieu de travail, il s’agira également de permettre une indemnisation au titre de la maladie professionnelle sans que celle-ci soit automatique.

Cette reconnaissance sera mise en œuvre dans les prochains jours, à la suite de la publication des décrets. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie d’en avoir clairement détaillé les modalités et de vous être engagé à agir au plus vite : c’est l’essentiel.

Mes chers collègues, pour ces raisons, les membres du groupe La République En Marche voteront en défaveur de cette proposition de loi visant à créer un fonds d’indemnisation spécifique pour les victimes de l’épidémie de Covid-19.

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