Intervention de Raphaël Schellenberger

Commission mixte paritaire — Réunion du 25 juin 2020 à 11h30
Commission mixte paritaire sur le projet de loi organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire

Raphaël Schellenberger, député :

Au cours des débats que nous avons eus, certains concepts ont pu être opposés ou hiérarchisés, à l'image de la différence entre les libertés publiques et les libertés individuelles. Le parti pris de ce texte sur la sortie de l'état d'urgence est de considérer que les libertés individuelles sont plus importantes que les libertés publiques. Pourtant, la liberté individuelle peut aussi conduire à des actes affectant les libertés publiques. Le primat de l'une par rapport à l'autre est contestable.

C'est une clarification qui peut paraître abstraite mais elle souligne une incohérence du projet de loi, qui privilégie la restriction des libertés collectives plutôt que d'appliquer des mesures personnelles permettant de protéger le plus grand nombre.

Dans la panique qui nous a collectivement saisis, nous avons tous manqué de discernement s'agissant de la circulation du virus. Aujourd'hui, dans certains territoires, le virus circule encore, voire beaucoup, dans la mesure où il y a peu circulé auparavant. À l'inverse, dans d'autres départements où il a beaucoup circulé, les risques sont désormais réduits grâce à une forme d'immunité qui s'est développée dans la population.

Il faut à tout prix éviter de reproduire ce manque de discernement territorial. Les Français ont identifié ce problème de cohérence. Cela conduit aujourd'hui à l'inacceptabilité de mesures excessivement restrictives des libertés.

Nous avons été tremblants lors de la commission mixte paritaire de mars dernier. J'ai tendance à considérer que nous ne l'avons pas été assez, ce qui m'incite à croire qu'il faut être davantage vigilant aujourd'hui. Il est peut-être nécessaire de préciser que l'état d'urgence sanitaire peut être circonscrit territorialement. Cependant, nous ne pouvons pas profiter de ce texte de sortie de l'état d'urgence pour maintenir de façon générale l'application de ses dispositions. Cela affecterait l'acceptabilité des mesures que nous allons prendre. Si la sortie de l'état d'urgence permet de restreindre trop fortement les libertés, les Français ne l'accepteront pas. Il s'agirait d'une sortie imprévisible, alors que la fin de l'état d'urgence doit correspondre à un retour des libertés. Un dispositif territorialement localisé pourrait être actionné. Il serait de nature à améliorer la confiance des Français dans la loi que nous nous apprêtons à voter.

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