Intervention de Elisabeth Doineau

Réunion du 29 juin 2020 à 16h00
Revalorisation des pensions de retraite agricoles — Adoption définitive en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Elisabeth DoineauElisabeth Doineau :

Deux ans après l’impasse provoquée par l’utilisation du vote bloqué, nous examinons en deuxième lecture la proposition de loi visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles en France continentale et dans les outre-mer.

Le report sine die de la réforme des retraites nous offre l’occasion de reprendre là où nous en étions restés. Près de quatre ans après le dépôt de la proposition de loi… Que de temps perdu pour le monde agricole !

La crise sanitaire que nous vivons éclaire d’un jour nouveau cette proposition de loi, en rappelant à l’ensemble des Français l’engagement sans faille des agriculteurs au service d’une production de qualité et de la souveraineté alimentaire de notre pays – Franck Menonville l’a évoqué.

Une nouvelle fois, les agriculteurs ont démontré leur grand sens des responsabilités et leur capacité à s’adapter. Et toujours pour un revenu bien trop faible, ce qui est la source de tous leurs maux ! Le travail de la terre ne paie pas.

Le tiers des agriculteurs perçoit un revenu inférieur à 350 euros par mois, ce qui ne permet pas de produire suffisamment de cotisations pour la retraite – M. le rapporteur en a parlé. Aussi, notre objectif collectif doit être de garantir une rémunération décente aux agriculteurs.

Toutefois – faut-il le préciser ? –, le texte que nous examinons aujourd’hui n’est qu’une étape dans la revalorisation des professions agricoles.

Son article 1er vise à augmenter le niveau de pension de base et complémentaire minimal des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, en le passant à 85 % du SMIC, soit un peu plus de 1 000 euros, ce qui le rapproche du seuil de pauvreté.

Il s’agit d’une avancée importante, mais qui demeure à mon avis très incomplète. Elle est même quelque peu rabotée par rapport à son ambition initiale à la suite à son passage à l’Assemblée nationale il y a dix jours. En effet, les députés de la majorité ont adopté un mécanisme d’écrêtement en fonction du montant de retraite tous régimes confondus. Un retraité sur trois ne pourra donc pas bénéficier in fine de la garantie minimale de retraite.

L’argument avancé est de permettre l’équité entre les assurés monopensionnés et les assurés polypensionnés. En réalité, cela illustre une nouvelle fois que le travail agricole n’est pas reconnu à sa juste valeur.

À cela, il faut ajouter le report de la mise en œuvre de cette mesure à 2022, alors même que le président de la Mutualité sociale agricole, M. Pascal Cormery, a assuré que son application était possible dès le 1er janvier 2021.

Je regrette par ailleurs que cette proposition de loi ne traite pas de la situation, encore plus précaire, des conjoints collaborateurs ou membres de la famille aidants sur l’exploitation. À la pauvreté s’ajoute en effet, en matière de retraites agricoles, l’inégalité entre les femmes et les hommes : un différentiel de 258 euros par mois en moyenne est constaté au détriment des premières.

Ces femmes ne sont pourtant pas moins méritantes que leurs conjoints. Elles sont même des maillons indispensables au sein des exploitations agricoles.

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