Il est vrai que les dernières évolutions économiques amènent des remises en cause mais elles nécessitent une analyse approfondie et lucide pour éviter d'aller vers des leurres ou de fausses bonnes solutions.
Madame la ministre, je voudrais vous poser trois questions indépendantes les unes des autres.
Au sujet des masques, le Gouvernement a-t-il prévu une gestion publique d'un stock de masques dans la durée, en tenant compte des masques périmés, et donc prévoit-il la mise en place de marchés pluriannuels d'approvisionnement ? Il ne faudrait pas retomber dans les travers d'un précédent gouvernement car, au coeur de la crise, on savait plus ne plus où les masques étaient stockés, ni quel était leur état. Un stock public doit donc être géré dans une logique de moyen terme. Il doit sans cesse être renouvelé ce qui permettrait par ailleurs d'étaler la commande dans la durée et donc de donner des assurances de plans de charge à certaines entreprises spécialisées sur plusieurs années.
Nous évoquions le partage de la valeur, notamment les questions de l'intéressement et de la participation, et je regrette qu'à plusieurs reprises, y compris dans la loi « PACTE », le gouvernement ait refusé une extension de l'intéressement. Je sais qu'il y a eu la suppression du forfait social qui était incitative et dont on ne peut pas encore mesurer les effets, mais je pense qu'il est nécessaire d'aller dans cette direction et de rendre l'intéressement obligatoire non pas à 50 salariés mais beaucoup plus bas. De plus, ont été refusés également plusieurs amendements sénatoriaux qui facilitaient la mise en place de l'intéressement, d'abord dans les entreprises de moins de 10 salariés, puis dans les entreprises de moins de 50 salariés. Il s'agissait pourtant de moyens très simples, et qui participaient à la simplification, puisque dans les entreprises de moins de 10 salariés, cela pouvait être une décision unilatérale du chef d'entreprise, et dans celles de moins de 50 salariés, d'une décision temporairement unilatérale et ensuite classique.
Concernant l'écologie, je ne partage pas forcément les réflexions de mon collègue de groupe et ami Joël Labbé. Je pense qu'il nous faut faire attention, puisque que par exemple, l'économie numérique au niveau mondial a aujourd'hui une empreinte carbone beaucoup plus élevée que la totalité de la circulation automobile dans le monde, y compris celle des poids lourds. Il nous faut faire attention quand on pense que la dématérialisation ne génère pas de pollution, ou n'épuise pas les ressources ; c'est faux, car elle conduit à l'utilisation de métaux rares, de métaux épuisables, pour lesquels on ne prévoit que quelques années ou quelques dizaines d'années d'exploitation supplémentaires, dans des pays lointains. Nous voyons dans la Convention Citoyenne pour le Climat, qui personnellement n'est pas ma tasse de thé car je ne crois pas être de la génération du tirage au sort, des propositions comme la réduction de la vitesse sur autoroutes à 110 km/h. Pourtant, quiconque roule de nuit remarquera qu'il croise 90 % de poids lourds. Ne pourrions-nous pas imaginer dans un cadre européen et français, un plan massif d'investissements pour revenir à un fret ferroviaire digne de ce nom ? Remettre une grande partie des marchandises sur les voies ferrées, ou en mettant en place du ferroutage, aurait ainsi un réel impact sur les gaz à effet de serre. Or, cette possibilité n'est que très peu prise en compte, peut-être parce qu'elle suppose des dizaines de milliards d'euros d'investissements étalés sur une décennie, et qu'elle ne serait donc pas la réalisation d'un seul gouvernement.