Nous vivons aujourd'hui une révolution de compétences qui représente une réelle opportunité, en particulier pour un département comme la Seine-Saint-Denis, où se situe l'Université Sorbonne Paris Nord. Dans ce département, plus de 7 jeunes sur 10 voient leur avenir dans le numérique, 10 % de plus que la moyenne nationale. Durant la crise sanitaire, nous avons souvent parlé de la fracture numérique, qui touche toutes les populations mais ne se limite pas au matériel, à la connexion ou à l'alimentation en électricité. Elle touche aussi les compétences nécessaires pour utiliser le numérique.
Dans ce contexte, notre université a pour objectif de doter son territoire, qui dispose d'atouts majeurs, d'une grande infrastructure scientifique autour du numérique. Il s'agit d'un pôle d'excellence dédié au numérique, combinant recherche, formation et innovation. Cette approche s'est concrétisée par plusieurs actions, dont la création, en 2016, de la première maison des sciences numériques (MSN). Il s'agit d'un tiers lieu d'innovation qui a pour mission de développer une vision interdisciplinaire du numérique dans un espace mixte entre apprenants, enseignants-chercheurs et entreprise. Ce type de structure doit faciliter le passage de l'innovation au marché. La MSN est structurée autour d'équipes projets thématiques (santé et numérique, art numérique, intelligence artificielle, cybersécurité, science des données, pédagogie et numérique). La MSN propose des services de deux types : formation et conseil. Les formations visent à répondre à des besoins spécifiques en sciences numériques. Elles sont courtes et non diplômantes. Il s'agit en outre d'accompagner les entreprises de toute taille dans leurs projets d'innovation en sciences numériques et développer ainsi une ingénierie de connaissances.
La crise sanitaire s'est révélé être le meilleur accélérateur de la transformation numérique. Elle a révélé les limites techniques et fonctionnelles de l'Université, pour l'enseignement massif et son évaluation à distance. Elle a démontré la nécessité de la transformation numérique et nous a conduits à repenser et changer nos pratiques. Malheureusement, les enseignants n'étaient pas tous préparés pour ce passage brutal. Un cours en distanciel, en effet, pose des problèmes pédagogiques, au-delà des problèmes technologiques. La fracture numérique touche donc les enseignants. Une des équipes de la MSN, spécialisée en pédagogie, a planifié en urgence une cinquantaine de sessions de formation pour accompagner les enseignants-chercheurs dans la transformation de leurs cours présentiels en cours distanciels, à travers des cours à distance. En parallèle de ces formations, nous avons proposé un accompagnement par téléphone ou email à l'ensemble du personnel de l'Université et avons mis à sa disposition des manuels, fiches de synthèse et courtes vidéos d'initiation aux outils numériques, dès la veille du confinement. Depuis le début de la crise, nous avons remarqué une forte demande de formation. Nous avons ainsi reçu plus de 600 demandes en quelques jours. Malheureusement, par manque de moyens, nous n'avons pu répondre à leur totalité. Des sessions de formation restent ainsi programmées jusqu'à décembre.
Du côté des étudiants, nous avons identifié une fracture numérique d'ordre matériel et connectique. Plus de 10 % de nos étudiants éprouvaient ainsi des difficultés. L'Université a donc prêté environ 500 ordinateurs à ses étudiants. La problématique de la connexion n'a pas encore été résolue à ce jour.
Pour renforcer l'ouverture de notre université sur son territoire, depuis trois ans, nous programmons des formations de quatre jours d'initiation aux outils numériques, en collaboration avec un partenaire privé. Ces formations sont ouvertes à tous, y compris au grand public. Leur objectif est d'aider les jeunes à multiplier leurs opportunités professionnelles et enrichir leur CV de compétences clés pour l'avenir. Ce type d'événement a remporté un vif succès, avec plus de 350 participants à chaque étudiant. 57 % sont des femmes, 70 % des employés de TPE et PME et 30 % sont des étudiants ou chercheurs d'emploi. Nous proposons également plusieurs formations aux étudiants, notamment pour la préparation au PIX. Celle-ci est en cours.
La fracture numérique recouvre donc plusieurs dimensions et dépend fortement de chaque territoire, du niveau d'études et du revenu. Pour la traiter, nous devons tenir compte de cette multidimensionnalité.