Je vous remercie d'avoir engagé cette mission d'information. L'illectronisme constitue, en effet, un enjeu quotidien pour les mairies, notamment pour les secrétaires de mairie confrontés à des citoyens qui rencontrent de graves difficultés dans leur vie administrative. Il arrive fréquemment que des maires soient obligés de jouer un rôle de pompier pour régler des sujets comme le versement d'une pension alimentaire. La problématique de l'illectronisme n'est pas nouvelle pour les collectivités territoriales. Aussi, les associations d'élus ont-elles été invitées à participer à l'élaboration de la stratégie nationale pour un numérique inclusif. Pour autant, nous écopons dans un bateau envahi d'eau. La multiplication des dispositifs oblige parfois les citoyens à un non-choix et l'accès à certains services devient une contrainte.
Votre mission s'inscrit dans un contexte de crise où les collectivités territoriales ont joué un rôle inédit de compensation, par exemple auprès des familles qui ne disposaient pas du matériel informatique nécessaire au suivi des cours à distance. Elles disposent ainsi d'une expertise directe. Les communes rurales, en particulier, rappellent souvent la réalité quotidienne à laquelle elles sont confrontées. Ainsi, lors de la crise du Covid, La Poste a décidé de basculer certains salariés exerçant en zone peu dense vers des zones denses, arguant du fait que 90 % de ses services étaient accessibles en ligne. Concrètement, des secrétaires de mairie ont alors dû créer des mots de passe et des identités numériques à des usagers et des maires avancer certains paiements à des citoyens privés de carte bleue. La dématérialisation forcée des services, sans que le prescripteur ne s'interroge sur les conséquences pratiques de cette évolution, apparaît source de difficultés.
Les dispositifs de médiation numérique, à l'instar du Pass numérique, posent la question du maillage territorial et de l'accès aux maillons. Les mairies ne peuvent évidemment tout gérer ; pour autant, les ateliers de médiation doivent se tenir dans des lieux de proximité. Comment, à cet égard, mieux travailler avec les missions locales et les maisons France Service ? Le dispositif Aidants Connect relève d'une idée intéressante, mais l'écart apparaît considérable entre l'identification des besoins et leur traitement. Plusieurs départements et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) participent au premier appel à projets sur le Pass numérique. Quel sera in fine l'échelon territorial choisi pour sa mise en oeuvre ? En matière de médiation numérique, le choix de la proximité semble le plus cohérent. Cela renvoie également à la méthodologie : nous pensons de manière trop verticale, alors qu'il convient d'abord de traiter le premier kilomètre autour du domicile. L'AMRF a émis, à cet égard, plusieurs propositions, notamment s'agissant des écoles rurales.
L'amélioration de l'accès à Internet ne compense nullement un accompagnement insuffisant. Pourraient, par exemple, être mobilisés à cet effet des jeunes en service civique. Nous essayons des solutions, nous tâtonnons, mais aucun dispositif n'est encore massivement appliqué.
S'agissant des hubs, il semble effectivement trop tôt pour une évaluation, mais la maille communale n'apparaît d'ores et déjà pas suffisamment envisagée. Nous préconisons une prise de conscience, en amont, des prescripteurs publics et privés sur la réalité des besoins.