Intervention de Sophie Primas

Commission des affaires européennes — Réunion du 2 juillet 2020 à 9h00
Agriculture et pêche — Audition de M. Janusz Wojciechowski commissaire européen à l'agriculture

Photo de Sophie PrimasSophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques :

Nous considérons, comme beaucoup de nos concitoyens français, que la politique agricole commune est une politique ancienne mais que ce n'est pas une vieille politique. Elle a été au coeur de la construction européenne en étant la politique la plus intégrée de l'Union européenne. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les pères fondateurs ont confié la mission aux agriculteurs européens de nourrir les Européens, en échange des soutiens distribués par la PAC. Nous sommes très attachés à cette mission nourricière. La crise liée à la Covid-19 a démontré combien elle était encore d'actualité. C'est une politique ancienne qui a, encore aujourd'hui, toute sa place. Il ne s'agit donc nullement d'une vieille politique, car elle se situe aux carrefours de nombreuses attentes de nos citoyens en matière de sécurité stratégique, de sécurité sanitaire, d'environnement, de santé publique, de transparence, d'innovation... Nous considérons ici, au Sénat, et je crois pouvoir le dire, en France, que l'agriculture est un secteur stratégique majeur.

Les positions prises par la Commission européenne depuis le début de la négociation du cadre financier pluriannuel, de la réforme de la PAC ou du Green New Deal laissent supposer qu'elle envisage de réviser ce pacte historique des pères fondateurs de l'Union européenne avec nos agriculteurs, au profit d'un autre contrat qui consisterait à limiter notre production alimentaire européenne pour relever le défi environnemental, quitte à importer ce que nous ne produisons plus depuis d'autres pays. Cette orientation mérite d'être débattue, mais pose certaines difficultés stratégiques, à l'heure où l'agriculture est une priorité absolue sous d'autres latitudes. En outre, la question de la résilience et de la souveraineté alimentaire pose, sans doute, en des termes différents, cette problématique depuis quelques semaines. Loin de dénoncer par principe tout accord de libre-échange, la majorité des commissaires présents devant vous ne peuvent accepter que certains secteurs agricoles soient, systématiquement, des secteurs défensifs dans ces négociations. Ils s'interrogent, à cet égard, sur le bien-fondé d'accélérer les négociations sur les accords avec le Mexique ou l'Australie et la Nouvelle-Zélande en temps de crise.

Ce sentiment général d'une relégation de l'agriculture à un rang secondaire au sein des instances européennes a été corroboré par l'attitude de la Commission durant la crise épidémiologique. La lenteur dont a fait preuve la Commission à déclencher les mécanismes de crise et le budget finalement retenu pour les couvrir ne manquent pas de poser question. Pour le dire clairement, les 88 millions d'euros débloqués par l'Union européenne font pâle figure face aux 45 milliards d'euros débloqués par les États-Unis ou aux 5 milliards du Japon ! Pour combler cette lacune, nous assistons à une multiplication de plans nationaux de relance, qui ont de quoi surprendre dans la mesure où la politique agricole est toujours censée être commune. Et je n'évoque pas les propositions de baisse du budget européen d'une programmation à l'autre.

Ma question sera simple : où en est-on du projet européen en matière agricole ? La Commission européenne considère-t-elle encore l'agriculture comme un secteur stratégique ?

Le budget de la PAC diminuera-t-il entre la programmation 2014-2020 et la suivante ? Quelles sont les orientations de la Commission en matière d'harmonisation des normes fiscales, sociales et environnementales entre États membres ? Quelle est la position de la Commission sur les questions de l'étiquetage de l'origine des produits alimentaires, réclamé par nos consommateurs ? La Commission est-elle disposée à assouplir les règles relatives aux marchés publics afin de favoriser des approvisionnements locaux dans la restauration collective, comme le réclament les consommateurs ?

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