Monsieur Bockel, je vais me rendre au Liban, mais pas pour négocier avec les autorités libanaises, car c'est à elles de prendre leurs responsabilités en cette période de crise. J'assurerai nos compatriotes vivant dans ce pays de notre soutien et de notre présence, notamment dans le domaine éducatif. En l'occurrence, la diplomatie parlementaire peut être une démarche positive, mais il faudra respecter les normes sanitaires lors de vos déplacements.
Monsieur Cigolotti, je n'ai pas eu le sentiment que la Turquie regrettait son action sur le territoire libyen. J'observe que les capacités militaires se renforcent de façon significative. Il s'agit aussi de prendre en considération les voisins de la Libye. Avec l'Égypte, les relations de la Turquie ne sont pas très conviviales. Il n'est pas certain que les Tunisiens ou les Algériens apprécieraient la présence à leurs frontières des successeurs de l'Empire ottoman, dont se revendique le président Erdogan. Ces interrogations peuvent être partagées par les milices installées dans la zone de Tripoli. Le message de la France est qu'il ne saurait y avoir de solution militaire, sauf au détriment des acteurs concernés.
Monsieur Vaugrenard, l'hypothèse d'un accord russo-turc sur notre dos ne serait pas à exclure si la communauté internationale se montrait incapable de résoudre la crise et d'aider les différents acteurs à trouver une solution politique. Nous agissons pour que tel ne soit pas le cas. Par ailleurs je ne suis pas certain que la population libyenne accepterait volontiers une partition du territoire.
Il peut y avoir des résurgences de Daech au sud de la Libye, voire même à Derna. Il est vraisemblable que les forces militaires syriennes accompagnant les manoeuvres de la présence turque soient infiltrées par d'anciens responsables de groupes djihadistes qui soutenaient les Turcs à Idlib. Ces militaires rentreront-ils en Syrie ? On ne le sait pas. Nous parlons de milliers de soldats, tout cela à 200 kilomètres de Lampedusa. La situation est extrêmement préoccupante, d'où la nécessité d'agir ensemble pour aboutir à une solution.
Sur le plan économique, celui qui prend Syrte et Koufra a la maîtrise du croissant pétrolier ; cela semble être le cas de l'Armée nationale libyenne. Nous agissons auprès d'elle pour que soient levés les blocages pétroliers et que les ressources financières liées au pétrole soient stockées dans des banques relais, et espérons aboutir à des solutions acceptables par tous. Cette bataille est essentielle.
Revenons à nos relations avec la Turquie. Nous avons en la matière besoin de clarification : sur le non-respect par la Turquie des accords de Berlin sur la Libye, notamment sur le non-respect de l'embargo sur les armes - les preuves sont impressionnantes - ; sur les zones nord-est et nord-ouest de la Syrie ; et sur l'utilisation des ressources gazières en Méditerranée orientale.
Ce dernier sujet comporte deux aspects. D'une part, la Turquie ne reconnaît pas la convention de Montego Bay sur le droit de la mer alors que tous les pays de l'Union européenne l'ont fait.