Intervention de Philippe Bas

Réunion du 21 novembre 2006 à 10h00
Questions orales — Situation de la greffe et du don de moelle osseuse

Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille :

Madame le sénateur, vous soulevez une question très importante. Aujourd'hui, de nombreux malades en instance de greffe de moelle osseuse n'ont pas trouvé un donneur compatible avec leurs propres génotypes. Par conséquent, le développement du don de moelle osseuse et du fichier des donneurs ainsi qu'une communication efficace pour que davantage de Françaises et de Français, en dehors de la famille du bénéficiaire du don de moelle osseuse, s'inscrivent longtemps à l'avance sur le fichier, constituent pour nous un enjeu majeur.

Pour répondre aux besoins des patients, l'État a engagé un plan d'action sur dix années visant à rendre accessible l'allogreffe de moelle osseuse à davantage de malades. Le recrutement de 100 00 nouveaux donneurs pour le fichier français a été programmé pour une durée de dix ans, c'est-à-dire un recrutement de 10 000 donneurs par an, soit un recrutement d'environ 12 500 donneurs pour en avoir 10 000 qui soient parfaitement compatibles. Il faut savoir que de nombreux donneurs sortent chaque année du fichier parce que, lorsque l'on atteint l'âge de soixante ans, on ne peut plus donner sa moelle osseuse.

Actuellement, le fichier compte 134 578 donneurs, mais il est insuffisant. Le plan d'action tient compte à la fois des recommandations d'un groupe d'experts de très haut niveau et du souhait des associations de voir s'étendre le fichier français.

Il faut également que la France puisse participer à l'effort mondial de recrutement de nouveaux donneurs pour être en mesure de proposer aux patients étrangers les ressources du fichier français, de même que nous faisons appel, pour les patients français, aux ressources du fichier mondial.

Ce recrutement devrait conduire à augmenter de 25 % à 50 % le taux d'allogreffes non apparentées réalisées à partir du fichier français. Tel est l'objectif de ce plan.

En 2005, 71 % des allogreffes de cellules souches hématopoïétiques non apparentées ont été réalisées à partir de donneurs issus du fichier mondial, contre 75 % en 2003. Les centres donneurs s'organisent de mieux en mieux pour assurer la prise en charge des personnes qui se portent volontaires pour un don de cellules souches hématopoïétiques, que ce soit par un don de moelle osseuse ou de sang périphérique.

Le fait de planifier, pendant dix ans, un recrutement contrôlé permet aussi une réévaluation régulière du recrutement, qui est utile pour le fichier, c'est-à-dire pour les patients. Aujourd'hui, l'innovation thérapeutique peut conduire à prendre en charge différemment certains patients pour qui la greffe de moelle osseuse faisait d'emblée partie, jusqu'à maintenant, du projet de traitement. Il est possible d'améliorer l'actuel fichier de donneurs volontaires, dans l'espoir que les patients trouvent, avec une fréquence accrue, un donneur.

Un certain déséquilibre a été constaté au sein du fichier français : il contient plus de femmes que d'hommes, 60 % contre 40 %. Par ailleurs, 60 % des hommes avaient plus de quarante ans.

En outre, la France a la chance de disposer d'une population qui s'est enrichie au fil des siècles des apports des populations migrantes. Les antigènes HLA constituent une véritable richesse, et c'est cette diversité qui doit être représentée au sein du fichier français. Aussi, le recrutement cherche à intégrer plus volontiers dans le fichier français des hommes âgés de moins de quarante ans d'origine géographique diverse, sans pour autant décourager les autres donneurs qui se portent spontanément volontaires.

En matière de constitution de fichiers, vous avez cité, madame le sénateur, les stratégies mises en place par d'autres pays.

En Italie, par exemple, la stratégie de recrutement va uniquement chercher à remplacer les donneurs sortant du fichier du fait de leur âge par de jeunes hommes âgés de moins de quarante ans. Le fichier italien comporte actuellement 300 000 donneurs.

En Allemagne, pays que vous avez cité, le recrutement mené est massif et non ciblé. La stratégie thérapeutique allemande offre volontiers la greffe en première intention, contrairement à la France. S'élevant à plus de 2 millions de donneurs, ce fichier comprend de nombreux phénotypes identiques dont la fréquence n'apporte que peu de gain thérapeutique. La richesse et l'efficacité d'un fichier se mesurent au nombre de donneurs inscrits, mais aussi à la diversité des donneurs.

En matière de greffe, on constate que la méthode de sélection du donneur est différente en Allemagne et en France. En Allemagne, la greffe est pratiquée avec une exigence de compatibilité moins importante que dans notre pays. À ce jour, il n'existe pas d'étude comparative sur les résultats des greffes dans les deux pays.

Enfin, des efforts sont actuellement engagés pour faire connaître le don de moelle et inciter nos concitoyens à se porter volontaire. Vous avez tout à fait raison, madame le sénateur, d'insister sur ce point, car il est essentiel. Ainsi, le ministre de la santé, M. Xavier Bertrand a décidé de lancer, ce mois-ci, une action de sensibilisation dans laquelle le don de moelle a toute sa place.

Dans le même esprit, l'Agence de la biomédecine, dont l'une des missions est d'assurer la promotion du don, a commencé, le 16 novembre dernier, sa campagne nationale sur le don de moelle osseuse, qui sera la première de cette envergure. Ces actions de communication grand public ont été bien sûr organisées avec la coopération des associations de promotion du don et des associations de malades.

Notre volonté est d'accélérer le recrutement des volontaires inscrits sur le fichier français des donneurs de greffe de moelle osseuse, tout en respectant une même exigence qualitative et un impératif de diversité.

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