Intervention de Christiane Kammermann

Réunion du 21 novembre 2006 à 10h00
Questions orales — Publicité et lutte contre l'obésité infantile

Photo de Christiane KammermannChristiane Kammermann :

Monsieur le ministre, bien que certaines mesures aient été mises en place en France, telles que la création du « programme national nutrition-santé », l'intégration du fait nutritionnel dans les programmes scolaires ou encore l'insertion prochaine d'un message sanitaire dans les campagnes publicitaires, l'obésité est loin de s'arrêter. Elle continue même sa progression à raison de 5, 7 % par an, suivant une courbe comparable à celle qu'ont connue les États-Unis dans les années soixante-dix !

Alors que le surpoids et l'obésité infantile progressent en Europe de manière exponentielle, avec 14 millions d'enfants européens en surpoids et 3 millions d'obèses, notamment en France, comme l'ont souligné, en 2005, la CNAM, la Caisse nationale de l'assurance maladie, et, en 2006, l'enquête ObEpi, selon lesquelles 5, 9 millions de Français et 19 % des enfants âgés de huit ans sont obèses, il importe de lutter contre ce fléau sanitaire, en éradiquant l'ensemble de ses sources.

Parmi les différents facteurs identifiés - manque d'activité physique, offre alimentaire déséquilibrée, consommations alimentaires excessives, hérédité, notamment - le rôle de la publicité télévisée, fréquemment débattu, n'avait, jusqu'à présent, jamais pu être clairement démontré.

Au mois de septembre dernier, l'association de consommateurs UFC-Que Choisir a rendu publique une étude soulignant que 89 % des 217 spots alimentaires visant les enfants, qui ont été relevés pendant quinze jours sur les plus grandes chaînes de télévision à l'heure des émissions enfantines, concernent des produits très sucrés ou gras. Cette même étude démontre que, contrairement à ce qu'affirment certains professionnels, les publicités influencent bel et bien les préférences des enfants en matière alimentaire, et les incitent également à réclamer à leurs parents, lors de leurs achats, les produits qu'ils ont vus à la télévision.

Plus encore, à l'image des préférences alimentaires des enfants qui sont modelées par la politique publicitaire des professionnels, on retrouve, dans les placards et réfrigérateurs des familles françaises, 47 % de produits déséquilibrés.

La pyramide alimentaire est une représentation schématique d'une alimentation équilibrée. À la base se trouvent les aliments dont la consommation en grande quantité est recommandée, les catégories les moins intéressantes du point de vue nutritionnel étant placées vers le haut.

La comparaison entre le relevé de l'étude de l'UFC-Que Choisir et les recommandations officielles montre que les produits présentés dans les spots publicitaires pour enfants sont en proportion inverse des recommandations retenues dans la pyramide alimentaire : une écrasante majorité de sucreries et de céréales trop sucrées, trop de produits laitiers sucrés ou gras, une quasi-absence de fruits ou de céréales complètes.

Face à ce constat, de nombreux pays européens, comme la Suède, l'Italie, le Luxembourg ou le Danemark, ont interdit ou restreint très strictement la publicité à destination des enfants.

Comment expliquer alors que la France, confrontée au même problème, reste passive et ne puisse pas admettre que les professionnels soient empêchés de promouvoir, par le biais de la télévision, des produits déséquilibrés pour les enfants ?

Alors même que le projet de directive « Télévision sans frontières », actuellement en discussion à l'échelle européenne, vise à élargir prochainement la présence publicitaire sur les écrans, la France doit impérativement agir, dans un souci de santé publique, afin d'encadrer plus strictement, voire, comme le font certains de nos partenaires européens, de restreindre la publicité durant les émissions enfantines, en interdisant celles qui concernent des produits déséquilibrés.

Monsieur le ministre, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre, notamment dans le cadre de la directive « Télévision sans frontières », pour lutter contre les publicités montrant des produits déséquilibrés à destination des enfants, et, par là même, pour limiter la hausse exponentielle de l'obésité dans notre pays ?

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