Madame le sénateur, le Gouvernement partage totalement votre préoccupation à l'égard de l'alimentation de nos enfants et de la prévention de l'obésité. Le ministre de santé et des solidarités, Xavier Bertrand, a d'ailleurs récemment annoncé des mesures très importantes en la matière.
Je ne peux donc pas vous laisser dire que le Gouvernement est passif puisque, au contraire, il met en place une voie originale. Certes, nous n'avons pas choisi la voie adoptée par le Québec ou certains pays scandinaves, qui prévoient l'interdiction absolue, mais nous nous sommes engagés dans la voie du dialogue et de la concertation avec ceux qui représentent les intérêts de la santé publique, avec une exigence d'autant plus grande qu'il s'agit de nos enfants, et ceux qui représentent la production agroalimentaire et qui, dans leur intérêt, doivent promouvoir, dans le temps, des produits de consommation n'étant pas nocifs pour la santé. Nous attendons des résultats significatifs de cette voie étroite, qui est celle de la responsabilité.
Comme le relève une enquête récente de l'UFC-Que Choisir, près de 90 % des publicités diffusées aux heures d'écoute des enfants concernent encore aujourd'hui des produits gras et sucrés.
Le Gouvernement est particulièrement conscient de l'impact de la publicité sur les comportements alimentaires. C'est pourquoi la loi d'août 2004 relative à la politique de santé publique a prévu une mesure originale destinée à faire rentrer les préoccupations de santé publique dans les publicités elles-mêmes : les messages publicitaires doivent désormais « contenir une information à caractère sanitaire ». À défaut, les annonceurs doivent verser une contribution financière se montant à 1, 5 % du prix de la publicité, destinée à financer des campagnes nutritionnelles.
Cette mesure totalement novatrice que lance la France constitue une troisième voie entre l'interdiction de toute publicité alimentaire à la télévision aux heures d'écoute des enfants, une voie retenue, comme je l'ai indiqué, par le Québec et les pays scandinaves, et le laisser-faire actuel de la plupart des autres pays, que la France avait d'ailleurs connu jusqu'en 2004.
Cette voie pourrait faire école, puisque l'Organisation mondiale de la santé, l'OMS, a marqué son intérêt pour la diffusion de cette bonne pratique, à condition bien sûr que nous fassions la preuve des bons résultats qu'elle peut apporter, mais nous sommes actuellement dans la phase du lancement et non dans celle du bilan.
Le rôle du ministère de la santé est désormais de mettre en oeuvre cette mesure et de la rendre efficace. Comme le prévoit la loi, les messages sanitaires deviendront obligatoires sur les publicités alimentaires, dès le mois de février prochain, à la télévision, à la radio, dans la presse, sur les affiches publicitaires et aussi dans les brochures de la grande distribution. Le décret, actuellement en cours d'examen par le Conseil d'État, sera publié très prochainement.
Pour préparer cette mesure, nous avons fait le choix, je le répète, de la concertation et avons obtenu l'adhésion de l'immense majorité des acteurs concernés, qu'ils appartiennent à la société civile, à l'industrie agroalimentaire ou au monde de la publicité. Tous se sont déclarés prêts à faire passer ces messages.
Pour le choix des messages, nous avons pris l'engagement d'être fermes sur les objectifs de santé publique et de retenir les recommandations sanitaires du « programme national nutrition-santé » : « Pour votre santé, mangez au moins cinq fruits et légumes par jour ». « Pour votre santé, pratiquez une activité physique régulière ». « Pour votre santé, évitez de manger trop gras, trop sucré, trop salé ». « Pour votre santé, évitez de grignoter entre les repas. »
Les industriels pourront choisir d'apposer ces messages sur les produits ou de payer une taxe de 1, 5 % du prix de la publicité. Mais notre objectif est bien entendu que les industriels s'engagent en faveur de la nutrition en apposant ces messages éducatifs.
Toutefois, cette mesure ne saurait être efficace isolément. C'est pourquoi nous avons souhaité l'inscrire dans une politique d'ensemble de prévention nutritionnelle.
Avec le deuxième « programme national nutrition-santé », que M. Xavier Bertrand a eu l'occasion de présenter le 6 septembre dernier, ce sont notamment 10 millions d'euros par an que l'Institut national d'éducation à la santé consacrera à des campagnes de communication orientées vers les enfants, les personnes âgées, les professionnels de santé et les professionnels du monde médico-social.
Vous avez également évoqué le projet de directive « Télévision sans frontières », qui sera prochainement examiné par le Parlement européen.
Cette directive modifie l'organisation de la publicité à la télévision. Le conseil des ministres de la culture a adopté, le 16 novembre dernier, un texte de compromis. Même s'il n'apporte pas toute satisfaction à la France, il permet de poser une nouvelle règle qui aura pour effet d'instituer, dans tous les autres pays européens, un niveau d'exigence qui, malheureusement, ne sera pas identique à celui que nous avons atteint.
Ce projet de directive permet également aux législations nationales d'être plus rigoureuses que le texte européen. Le ministère de la santé a souhaité qu'une attention particulière soit portée, sur le plan européen, à la publicité alimentaire, au titre de la protection des enfants. Des amendements allant dans ce sens pourront d'ailleurs être examinés au cours de la discussion du texte par le Parlement européen.