Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, monsieur le Premier ministre, « acte III du quinquennat », « nouveau souffle » ou encore « dépassement du politique » : peu importent les qualificatifs, votre nomination intervient à un moment particulier, celui de la pire crise sanitaire qui nous a frappés en un siècle. Elle inaugure aussi un nouveau cycle de la vie politique de notre pays, dont l’horizon aura pour terme l’élection présidentielle de 2022.
Nouvelle illustration, s’il le fallait encore, que la Ve République telle que nous la vivons doit être profondément repensée pour en casser la verticalité, pour réhabiliter les corps intermédiaires ou donner plus de souffle à la démocratie locale.
Or l’accélération des cycles politiques imputable à l’instauration du quinquennat, renforcée par le prêt à penser en 280 signes et le diktat médiatique, fait qu’il est de plus en plus difficile de bâtir et de tenir une vision de long terme pour notre pays.
Il faut bien le constater : notre société est psychologiquement épuisée après une succession de crises majeures. La peur de l’avenir paralyse les initiatives et tétanise notre jeunesse. Le sentiment de déclin est prégnant. Notre économie connaît ses pires moments depuis des décennies. Les fractures identitaires gangrènent de plus en plus de zones, quand d’autres territoires excentrés se sentent oubliés.
Votre feuille de route est un immense défi, à l’image de l’ambition que nous devons avoir pour la France : reconstruire une confiance durable entre les citoyens et leurs gouvernants pour relever notre pays.
Nous n’avons pas le droit de céder au défaitisme, car la République, notre bien commun, doit être défendue chaque jour.
Fort de la liberté d’esprit, de ton et de vote qu’il a toujours cultivée, mon groupe, le RDSE, entend soutenir tout ce qui contribuera à ce relèvement, par-delà les attaches partisanes, sans subir la pression de la rue ou des réseaux sociaux. Au nom du seul intérêt général.
Redonner confiance à nos concitoyens, c’est d’abord agir par des mesures simples et concrètes pour leur quotidien.
Ce que mon groupe attend, c’est que la promesse républicaine d’égalité soit une réalité. La crise sanitaire a montré que notre modèle social fonctionnait, n’en déplaise à ceux qui n’en regardent que le coût. Il faut maintenant aller plus loin sur le plan social pour « bâtir les fondations de la France de demain », comme vous l’avez dit.
Face à l’explosion de la précarité et du chômage, votre gouvernement se doit d’agir avec efficacité, afin de mieux accompagner les plus vulnérables et d’offrir, à tous, les mêmes chances de réussite. Tous ceux que la crise a frappés de plein fouet, pour qui ce virage social est indispensable.
La crise des « gilets jaunes » l’a bien souligné : nos concitoyens attendent avant tout une véritable justice sociale, notion que l’on ne saurait réduire à de l’assistanat. Mon groupe y attache une importance fondamentale. Il est temps, par exemple, que le plan Pauvreté tant de fois annoncé se concrétise !
Vous avez également déclaré vouloir promouvoir l’approche par les territoires, et je sais que cet hémicycle vous a écouté d’une oreille très attentive. Monsieur le Premier ministre, mon groupe a envie de vous prendre au mot, quand on sait que nos collectivités n’en peuvent plus de cette instabilité normative désespérante. Et bien sûr sans les financements qui permettraient d’y faire face !
Pourtant, la crise sanitaire a révélé de formidables initiatives des élus locaux, avec, très souvent, des préfets pleinement investis pour les soutenir. Allons plus loin pour une organisation encore plus vertueuse, avec une déconcentration d’abord soucieuse de l’efficacité et des spécificités locales – plutôt que d’en référer en permanence à Paris –, une décentralisation qui ferait confiance aux élus et qui leur permettrait de mettre en œuvre une véritable différenciation dans le respect des libertés locales et de l’unité de la République.
La réalité est tout autre. Nous le constatons quand nous croisons dans nos territoires beaucoup de souffrance et d’incompréhension, du fait de l’abandon de l’État : dans les zones rurales enclavées qui subissent les fermetures de services publics, dans les zones urbaines victimes de retards économiques et sociaux accumulés, dans les zones périurbaines, indispensables pourvoyeuses de main-d’œuvre, mais toisées par des métropoles devenues inaccessibles sur tous les plans.
Monsieur le Premier ministre, mon groupe est totalement investi pour défendre la dignité de nos compatriotes. Il ne saurait exister de citoyens de second rang du fait de leur lieu de résidence. C’est d’ailleurs pour cela que nous avons proposé la création d’une Agence nationale de la cohésion des territoires, avec comme ambition de créer un outil au service de toutes les collectivités. Malheureusement, l’ANCT n’a pas répondu à ces objectifs, se transformant en une machine administrative obèse et édulcorée comme notre technocratie en a le secret.
L’égale dignité de nos concitoyens, c’est encore assurer le désenclavement de certains territoires, pour lesquels une ligne aérienne ou une desserte ferroviaire sont indispensables sur le plan économique. Nous comptons sur vous pour soutenir les collectivités et garantir le respect des obligations de service public des opérateurs. Je pense en particulier à l’aérien.