Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du 16 juillet 2020 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2020 — Discussion générale

Olivier Dussopt :

Je veux d’abord remercier tous les intervenants de leurs propos et de leurs propositions. Je ne doute pas que, lors de l’examen des amendements, nous essaierons d’apporter des réponses et de trouver des consensus chaque fois que c’est possible.

Je veux m’arrêter sur quelques points qui ont fait l’objet de questions récurrentes.

Premièrement, pour ce qui concerne l’articulation entre le PLFR 3, le plan de relance et le projet de loi de finances pour 2021, nous avons fait le choix, eu égard au calendrier, de ne pas présenter de PLFR 4. L’examen du troisième PLFR va nous occuper jusqu’à la fin du mois de juillet. Le PLF sera ensuite présenté au conseil des ministres à la fin du mois de septembre prochain, avec des mesures de financement.

Cela ne signifie pas que nous n’avons pas d’autres outils ou d’autres véhicules pour assurer le financement de mesures en 2020. En effet, nous avons la possibilité de redéployer un certain nombre de crédits. Surtout, nous disposons d’un projet de loi de finances rectificative de fin d’exercice, que nous utilisons traditionnellement pour adapter la fin de gestion. Cette dernière sera aussi l’occasion d’augmenter autant que nécessaire les crédits dont nous avons besoin.

Nous veillons à ce que toutes les mesures qui ont été annoncées soient financées. Vous pardonnerez, j’en suis convaincu, mesdames, messieurs les sénateurs, le caractère non pas acrobatique, mais parfois un peu compliqué de ce financement. Nous nous adaptons à la crise, à ses conséquences et nous veillons à ce que les dispositifs qui ont été mis en place soient alimentés, pour qu’ils puissent être financés tout au long de la crise. Nous évoquerons également avec vous, pendant ce débat, le financement des mesures annoncées par le Premier ministre et le Président de la République, sachant que certaines d’entre elles feront l’objet de financements soit dans le cadre de la fin de gestion, soit au moyen de redéploiements.

Je tiens à préciser, notamment pour rassurer celles et ceux qui s’inquiéteraient d’une impossibilité de financer les mesures de relance sur la fin de l’exercice 2020, que les premières mesures mises en œuvre – je pense, par exemple, à la prime pour l’apprentissage – sont contenues dans ce PLFR et pourront donc être financées, mais aussi que nous savons pertinemment que les investissements qui seraient décidés aujourd’hui ne donneront pas lieu à décaissement avant le début de l’année 2021. De cette manière, nous savons que nous pouvons sécuriser les financements des différentes actions.

Deuxièmement, je tiens à revenir sur un certain nombre d’interrogations qui ont pu être exprimées.

M. Dallier, comme lors de l’examen du PLFR 2, a évoqué l’équilibre du Fonds national d’aide au logement. Ainsi que je l’ai indiqué, notre perspective est celle de la réforme des APL. Lorsque nous mettrons en œuvre cette réforme, nous tiendrons compte des conséquences budgétaires qui ont été évoquées à l’occasion de la discussion du PLFR 2 pour honorer les engagements pris et prendre en considération le retard. Le PLFR de fin de gestion nous permettra de procéder à ces corrections. Nous ne le faisons pas à ce stade, considérant qu’il est trop tôt pour prendre de telles dispositions, mais nous travaillons toujours à la mise en œuvre de la réforme des APL.

Je veux également aborder la question des collectivités locales. Nous aurons l’occasion d’y revenir lors de l’examen de chacun des articles les concernant, mais je veux souligner le caractère totalement inédit des mesures que nous proposons. À aucun moment de l’histoire récente, les conséquences d’une crise n’ont été compensées auprès des collectivités sous forme de garantie de ressources. La dernière crise systémique que nous ayons connue, celle de 2008-2009, s’était traduite, pour les collectivités, par la possibilité d’anticiper le versement d’une annuité de FCTVA en recettes d’investissement. À aucun moment n’avait été évoquée une compensation des pertes de recettes, qu’elles soient fiscales ou domaniales.

La garantie de recettes sur un niveau moyen calculé sur trois ans que nous mettons en œuvre est donc inédite. Si nous avons retenu cette période de trois ans, c’est à la fois dans un souci de lissage, pour tenir compte de variations qui peuvent être exceptionnelles dans certaines collectivités, mais aussi parce que c’est la durée habituelle pour l’évaluation des transferts de charges, notamment dans le cadre de l’intercommunalité.

Je veux dire à M. le sénateur Menonville que le versement de 1 000 euros minimum ne répond pas à une logique d’aide forfaitaire aux collectivités, puisque nous prenons en charge la différence entre les recettes perçues en 2020 et la moyenne des recettes des trois dernières années. En revanche, l’Assemblée nationale a adopté, avec le soutien du Gouvernement, une mesure selon laquelle ce versement sera au minimum de 1 000 euros pour les collectivités bénéficiaires. Cependant, les collectivités dont les recettes, en 2020, seront égales ou supérieures à la moyenne de celles des trois années précédentes ne seront pas éligibles à un versement. Nous ne pouvons pas admettre la comparaison avec le fonds de solidarité et une forme de versement forfaitaire.

J’entends les demandes de modification des dates butoirs pour les délibérations des collectivités tant pour la CFE que pour certaines exonérations sur des recettes domaniales. Nous aurons l’occasion d’y revenir, mais je le dis d’emblée : nous sommes allés au bout des délais que nous pouvons imposer à la direction générale des finances publiques (DGFiP). En raison de la crise, nous sommes aujourd’hui déjà très en retard par rapport aux délais habituels. Reporter les dates butoirs de délibération mettrait les services des finances publiques dans l’impossibilité de respecter un certain nombre d’étapes à venir. Je pense notamment aux conséquences qu’un report pourrait avoir d’ici à quelques mois sur la production des états 1259, qui sont attendus par les collectivités.

C’est la raison pour laquelle nous communiquons actuellement – nous savons gré au Parlement de nous le pardonner – auprès des élus pour les inciter à délibérer, y compris de manière anticipée par rapport à l’adoption des dispositions par le Parlement. Ce n’est pas une formule totalement classique, j’en conviens bien volontiers, mais c’est la seule que nous ayons trouvée pour permettre aux collectivités de procéder aux délibérations, puis de régulariser celles-ci.

Nombre d’entre vous ont évoqué les départements, considérant qu’il aurait peut-être été préférable que ceux-ci soient accompagnés au moyen non d’une avance remboursable, mais d’une subvention. Nous avons discuté de la formule de l’avance remboursable avec le bureau de l’ADF, avec lequel nous travaillons à la fois sur des sujets extrêmement récurrents, comme le financement des minima sociaux, et sur une forme de clause de retour à bonne fortune. En effet, nous avons aussi en tête que, lors de la dernière crise systémique de 2008-2009, les DMTO avaient diminué de 10 à 11 % la première année et de 25 % la deuxième année, mais qu’ils avaient augmenté de 30 % dès 2010 et de nouveau de 25 % en 2011. Autrement dit, l’inversion des cycles en matière de DMTO peut être extrêmement rapide, ce qui nous amène à considérer que les avances, telles que nous les avons pensées, sont tout à fait opportunes et pertinentes pour répondre aux difficultés des départements.

Je terminerai en évoquant des points plus généraux.

Nous sommes effectivement dans une situation extrêmement particulière, avec une dette qui va atteindre 120 % du PIB et un déficit qui s’élève à 220 milliards d’euros, soit 11 % de celui-ci.

M. le sénateur Delahaye nous dit que nous aurions dû proposer des gels ou des baisses de dépenses. Je note cependant que, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, les propositions en ce sens ne sont pas légion, pour ne pas dire qu’elles sont inexistantes, ce qui est bien normal : il faudrait alors préciser quelles sont les dépenses que l’on diminue…

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