Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du 16 juillet 2020 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2020 — Discussion générale

Olivier Dussopt :

Nous avons fait le choix du financement de la dette résultant de la covid par un endettement.

M. le sénateur Joly a plaidé pour le rétablissement d’un certain nombre d’impôts ou pour l’augmentation de la contribution des plus riches, en nous faisant le reproche – il n’y a pas d’autre terme, mais les reproches sont normaux quand l’on débat – d’avoir privilégié le choix du financement des mesures d’urgence et de relance par la dette.

Dès ce stade, nous engageons, indépendamment du plan de relance, plus de 130 milliards d’euros de crédits et nous allons engager une centaine de milliards d’euros pour la relance, dont il faut convenir qu’une partie sera mobilisée par Bpifrance et la Caisse des dépôts et qu’une partie pourra aussi être prise en charge dans le cadre du plan européen. Cela signifie que, si nous avions recours à la fiscalité pour financer ces mesures d’urgence et d’accompagnement, ce n’est pas un choc, mais un tsunami fiscal que subiraient les Français et les entreprises ! Si je suis votre logique, monsieur le sénateur, il faudrait trouver une centaine de milliards d’euros de recettes fiscales supplémentaires, ce qui conduirait à l’asphyxie, à la thrombose du système économique.

Les chocs économiques et fiscaux qu’ont connus les Français à la fois en 2012-2013 et en 2010 nous incitent plutôt à faire le pari de la croissance et au minimum du maintien, voire de la baisse du poids des prélèvements obligatoires sur la production, pour favoriser le retour de la croissance, sur la base des perspectives relativement positives pour l’année prochaine qu’ont tracées l’Insee ou le FMI. Cela nous paraît la meilleure façon de faire, y compris en travaillant sur la question du cantonnement.

C’est ce qui nous amène d’ailleurs – je le dis en écho à ce qu’a dit M. le sénateur Dallier – à considérer qu’un milliard reste un milliard et que, bien qu’extrêmement particulière, la situation, qui nécessite des crédits et un engagement massif pour répondre à la dette, ne doit pas nous détourner de la nécessité d’une forme de rigueur – c’est à dessein que je ne parle pas d’austérité, notre pays ne l’ayant jamais connue. En effet, il convient de veiller à ce que, au-delà des crédits ponctuels engagés pour faire face à la crise, nous soyons les plus proches possible de la trajectoire triennale qui a été fixée et des engagements que nous avons pris. C’est l’une des conditions de la solidité et de la crédibilité de la signature de notre pays sur les marchés financiers.

On peut nous reprocher d’être à leur merci, mais il faut aussi reconnaître que c’est sur les marchés financiers que nous trouvons les financements nécessaires pour répondre à la crise, mais aussi, plus généralement et plus traditionnellement, pour assurer le financement de l’État. Alors que nous empruntons encore aujourd’hui dans des conditions tout à fait favorables, l’une des lignes de conduite que nous devons observer consiste à garantir la crédibilité de cette signature, pour que les choses soient tenables. C’est ce qui nous amène, sur des crédits qui peuvent avoir un caractère récurrent, à nous en tenir à une certaine rigueur. C’est ce qui m’amène désormais, dans les relations que je peux avoir avec mes collègues pour la préparation du PLF pour 2021, à faire preuve de cette même attention à ce que la trajectoire pluriannuelle soit la mieux respectée possible.

Monsieur le sénateur Patient, je veux vous remercier de vos propos et vous dire l’attention du Gouvernement à la situation de la Guyane et, au-delà, de l’outre-mer. Vous avez très justement noté que, à l’Assemblée nationale, j’ai eu l’occasion de défendre des amendements visant à ce que les dispositifs principaux de lutte contre la crise, comme le fonds de solidarité, les prêts garantis, ou encore le dispositif plein et maximal de chômage partiel, soient prolongés, en Guyane, non pas jusqu’à une date butoir arrêtée par la loi, mais jusqu’au dernier jour du dernier mois au cours duquel nous aurons constaté l’état d’urgence, de manière que la durée de ces dispositifs soit adaptée à la situation de ce territoire. Cela dit, je sais que d’autres engagements sont attendus.

Monsieur le sénateur Savoldelli, vous avez estimé que les indicateurs sociaux donnaient le signe qu’il faut agir. Je ne doute donc pas que je pourrai compter sur votre soutien sur un certain nombre de dispositifs. Je pense notamment aux dispositions du projet de loi de finances rectificative qui tendent à soutenir soit l’embauche des plus jeunes, soit l’accompagnement des jeunes précaires, en particulier des étudiants. Je vous rejoins sur la nécessité de faire attention à ces indicateurs. Les dispositions que nous prenons visent à apporter une réponse.

Pour terminer, je fais mien le constat par lequel M. le sénateur Collin a ouvert son propos : la bataille reste à gagner. C’est une évidence. Nous espérons aussi que le plan de relance que nous aurons l’occasion de présenter dès la rentrée, avant même que le projet de loi de finances soit soumis au conseil des ministres, nous fournira des armes supplémentaires pour gagner cette bataille.

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