Monsieur le ministre, le 16 octobre, le ministre délégué au budget avait annoncé des mesures en faveur des jeux traditionnels que sont le baby-foot, le flipper, le billard, les fléchettes, etc. dans les cafés et bars-tabacs.
Au regard des enjeux du projet de loi de finances pour 2007, nous avons l'impression que « la montagne accouche d'une souris ». M. Copé a affirmé que « cette mesure en faveur des jeux traditionnels [serait] gagnant-gagnant pour l'ensemble des acteurs » puisqu'elle permettrait la réinstallation de 40 000 jeux et la création de 600 emplois.
Il a ajouté que la fréquentation de ces établissements augmenterait et que l'offre de convivialité en serait accrue. C'est un pari aventureux sur lequel je ne le suivrai pas !
Quant au financement de cette mesure, l'annonce d'une compensation qualifiée d'« avantageuse pour les communes » me fait craindre un nouveau manque à gagner pour les collectivités territoriales.
En effet, l'acte II de la décentralisation, dont le gouvernement de M. Raffarin a pris l'initiative, a engendré un surcroît de charges pour les collectivités, qui se voient dans l'obligation d'augmenter leurs taux d'imposition.
Qu'il s'agisse du transfert des routes nationales aux départements ou des dépenses sociales, l'inégalité territoriale demeure et s'accentue. Nous sommes loin des promesses d'une compensation financière à l'euro près de ces nouvelles compétences.
De fait, ce sont plusieurs dizaines de millions d'euros qui n'ont pas fait l'objet d'une compensation.
Jusqu'à présent, la taxe annuelle sur les jeux automatiques variait selon la taille de la commune. Les conseils municipaux avaient d'ailleurs la possibilité de l'augmenter suivant un coefficient allant de 2 à 4. Aujourd'hui, il est prévu d'instaurer à compter du 1er janvier 2007 une taxe unique de 5 euros par appareil et par an. De ce fait, le budget des communes se trouvera amputé d'une partie des ressources qu'elles étaient en droit d'attendre.
Pour mémoire, je rappelle que cette taxe a rapporté aux collectivités 16 millions d'euros en 1999, 9, 7 millions en 2005 et qu'elle n'en rapportera que 9 millions en 2006. Or le Gouvernement entend prendre comme base d'indemnisation, pour compenser aux communes leurs pertes de recettes, le montant estimé de celles-ci pour l'année 2006. L'État espère probablement - et secrètement - que la TVA sur les machines lui rapportera davantage avec l'augmentation du parc des jeux automatiques.
Le « gagnant-gagnant » annoncé ressemble fort à un marché de dupes !
Au fil des années, 50 % des jeux automatiques ont disparu. Après tout, pourquoi, en effet, ne pas réinstaller flippers, baby-foot et autres juke-box ? Mais les raisons qui ont conduit à la disparition progressive de ces jeux dans les établissements sont multiples et ne sont pas toutes imputables à la fiscalité pesant sur ces appareils.
Ces jeux traditionnels ont distrait plus d'une génération. Force est de constater aujourd'hui qu'ils subissent une désaffection du public. L'attrait pour les consoles de jeux ou les jeux en ligne sur Internet témoigne de l'appropriation des nouvelles technologies par les particuliers. Cette évolution a incontestablement contribué à la diminution du parc des jeux automatiques.
Je doute que la baisse de fréquentation des cafés et des bars-tabacs qui pourrait résulter de l'interdiction de fumer dans ces lieux à compter du 1er janvier 2008 soit compensée par la mise en place d'un flipper, d'un baby-foot ou d'un jeu de fléchettes.
Tout en étant conscient de l'importance des enjeux de santé publique et des conséquences néfastes du tabagisme, je persiste à penser que la mise en place de cette fiscalité en faveur des jeux, qui a été qualifiée d'« attractive », n'est qu'un pis-aller pour les débitants de tabac.
Souhaitons néanmoins que ceux-ci, qui ont sensibilisé le ministre délégué au budget sur la question du flipper, « touchent le jackpot » avec cette mesure.
Monsieur le ministre, comment le Gouvernement entend-il compenser le manque à gagner pour les collectivités qu'engendrera la baisse de la taxe sur les jeux traditionnels ? Sur quelles bases et de quelle manière cette compensation va-t-elle s'opérer ?