Intervention de Stéphane Mayer

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 14 mai 2020 à 10h00
Audition de Mm. Stéphane Mayer président du cidef et du gicat éric trappier président du gifas et hervé guillou président du gican représentants de l'industrie de défense en téléconférence

Stéphane Mayer, président du CIDEF et du GICAT :

Nous tenons en premier lieu à saluer nos forces armées, qui, à travers leurs opérations intérieures ou extérieures, poursuivent leurs missions au service du pays.

Les industriels de la défense ont parfaitement conscience de leurs devoirs envers nos armées et notre pays. Dès le 16 mars, en concertation avec les partenaires sociaux, des plans de continuité des activités ont été élaborés par les entreprises, même si celles-ci ont dû inévitablement marquer une pause d'au moins une semaine dans la production.

Ces plans de continuité ont pour but, tout en garantissant la santé des salariés au travail et le respect des évolutions successives de la réglementation, d'honorer nos engagements envers les armées françaises et étrangères - certains de nos industriels exportent jusqu'à 50 % de leur production.

Constatant l'impossibilité de maintenir toutes les activités industrielles, nous avons entrepris une démarche de priorisation, en concertation étroite et efficace avec la direction générale de l'armement (DGA) et les armées. Le soutien aux opérations en cours et la continuité du développement et de la livraison de nouveaux matériels ont été définis comme des priorités.

Nous avons beaucoup travaillé pour adapter chacune des activités aux nouvelles mesures sanitaires, en accord avec les médecins du travail, les spécialistes de la santé et de la sécurité et les représentants du personnel. Nous avons aussi recouru dans des proportions importantes au télétravail.

La plupart des entreprises ont souhaité aménager, par la négociation, l'organisation du travail et des congés, afin d'augmenter leurs capacités de production pour la deuxième partie de l'année. Et toutes ont recouru, à des degrés divers, à l'activité partielle et aux mesures d'indemnisation prises par l'État, lesquelles étaient nécessaires.

Le dialogue avec nos clients export est resté nourri, avec l'aide des services dédiés de la DGA. Nous voulons conserver leur confiance et nous sommes vigilants dans un contexte de concurrence très forte, d'autant que la situation de la production est plutôt moins favorable en France que dans d'autres pays.

Au-delà, nous formons le voeu d'un renforcement de la coopération et des programmes européens, notamment à travers le Fonds européen de la défense.

Nous voulons également souligner la pertinence des outils généraux de soutien à la trésorerie, comme les prêts garantis, les reports d'échéances fiscales et sociales, ou encore la réduction des délais de paiement par la DGA. Les plus petites entreprises de la BITD devront toutefois faire l'objet d'une vigilance particulière.

Aujourd'hui, la reprise est progressive, mais très variable selon les entreprises, 10 % d'entre elles, généralement les plus petites, n'ayant pas repris leur activité. Dans le meilleur des cas, les entreprises comptent 75 % de leurs effectifs au travail, et la présence sur site s'élevait en moyenne à 29 % lors de notre dernier recensement hebdomadaire. Le télétravail est encore massivement utilisé par 45 % des salariés.

Les activités industrielles de défense n'ayant pas vraiment cessé pendant le confinement, le mois de mai ne marque donc pas un profond changement, mais plutôt l'amélioration des ratios de reprise.

De façon générale, une belle solidarité s'est exercée au sein de la BITD : une solidarité verticale entre le ministère des armées, les maîtres d'oeuvre industriels et les PME, une solidarité horizontale à l'intérieur des trois groupements, extrêmement actifs au service de leurs adhérents, mais aussi une solidarité nationale, avec la distribution de nombreux masques par les entreprises de défense, ou encore le lancement de la production de gel hydroalcoolique ou d'équipements de protection.

Malgré les mesures de sauvegarde financière mises en oeuvre très rapidement par l'État, nous sommes convaincus que notre BITD est fragilisée et qu'il faut la soutenir. Soutenir notre industrie de défense, c'est non seulement assurer des armées encore plus performantes au service de nos concitoyens, mais aussi renforcer l'autonomie stratégique française et européenne. C'est également préserver des emplois hautement qualifiés, situés à plus de 80 % en France - l'industrie terrestre de défense emploie à elle seule plus de 45 000 personnes - et permettre de relancer efficacement l'économie française. C'est enfin conserver des recettes d'exportation et contribuer à l'innovation technologique.

À court terme, nous voulons continuer à négocier des contrats et recevoir des commandes, autant de signaux positifs attendus par tous, et plus encore par les PME à la recherche de financements. Le processus est en cours avec notre principal donneur d'ordre, la DGA.

À moyen terme, nous voudrions voir confirmer par anticipation les tranches conditionnelles prévues dans la loi de programmation militaire (LPM). Pour l'armée de terre, il s'agit principalement des véhicules du programme Scorpion - Griffon, Jaguar et Serval -, mais aussi de nouvelles commandes de CAESAR, d'hélicoptères et de drones ainsi que les Autres Opérations d'Armements (AOA).

À plus long terme, à l'horizon 2025 ou 2030, nous souhaiterions que ce soutien soit inscrit dans la mise à jour de la LPM prévue pour 2021.

Nous devons, tous ensemble, trouver les moyens de préserver notre industrie, au service d'une défense souveraine et performante. Mesdames, messieurs les sénateurs, nous comptons sur votre action.

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