Intervention de Laurence Harribey

Commission des affaires européennes — Réunion du 16 juillet 2020 à 8h35
Questions sociales travail et santé — L'union européenne et la santé : examen du rapport d'information de mmes pascale gruny et laurence harribey

Photo de Laurence HarribeyLaurence Harribey, rapporteure :

L'Union européenne, en effet, est intervenue dans au moins quatre domaines différents pour tenter de faire face à la crise sanitaire. Elle a tout d'abord tenté d'éviter une pénurie de dispositifs médicaux et de médicaments. Pour cela, la Commission européenne a lancé quatre procédures conjointes de passation de marché afin de permettre aux États membres de disposer de certains équipements sanitaires à un tarif plus avantageux. Elle a également publié de nouvelles lignes directrices recommandant aux États membres d'encadrer les ventes en pharmacie pour prévenir la constitution de stocks et de s'assurer que les entreprises présentes sur leur territoire augmentent leur production.

En outre, la Commission européenne a demandé à l'Agence européenne des médicaments d'identifier les besoins des États membres et d'évaluer les capacités de production des industriels pour les médicaments utilisés dans les unités de soins intensifs.

Enfin, la Commission a négocié directement avec les autorités indiennes pour obtenir un assouplissement des restrictions à l'exportation de principes actifs mises en place par l'Inde.

Toutefois, l'Union a eu le plus grand mal à obtenir des États membres qu'ils renoncent aux restrictions à l'exportation de dispositifs médicaux et de médicaments que plusieurs d'entre eux avaient instaurées. Chaque État membre a voulu constituer ses propres stocks, aggravant ainsi la pénurie dans d'autres États membres.

En parallèle, la Commission européenne a assoupli, dans le cadre du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, les règles relatives aux aides d'État et aux ententes.

Concernant les aides d'État, l'Union a publié une communication le 19 mars 2020 présentant un assouplissement temporaire des conditions dans lesquelles les États membres peuvent soutenir leurs entreprises nationales. Cette aide peut notamment prendre la forme de subventions directes, de garanties sur les prêts contractés par des entreprises auprès d'une banque, d'avances remboursables et d'avantages fiscaux.

Concernant les ententes, la Commission a publié, le 8 avril dernier, une communication présentant le cadre temporaire pour l'appréciation des politiques anticoncurrentielles dans les coopérations mises en place entre les entreprises pour réagir aux situations d'urgence découlant de la pandémie de Covid-19. Cela permet aux entreprises de disposer d'un cadre juridique clair pour coopérer.

Troisièmement, son intervention dans le domaine de la recherche et de la protection civile a renforcé son action dans le domaine strictement sanitaire. Ainsi, l'Union a débloqué plus d'un milliard d'euros pour la recherche, notamment au travers du programme Horizon 2020. Elle prévoit, pour le prochain cadre financier pluriannuel, de consacrer 3 milliards d'euros à l'Instrument d'aide d'urgence, dont 300 millions au profit de la réserve d'équipements médicaux RescEU, permettant de financer des stocks de matériel médical.

Enfin, l'Union et ses agences, notamment le Centre européen de protection et de contrôle des maladies, ont publié plusieurs recommandations pour tenter de coordonner l'action des États membres, que ce soit en matière de dépistage ou de sortie du confinement.

Après avoir analysé l'action de l'Union durant la pandémie, il nous est apparu qu'elle disposait des compétences nécessaires pour apporter un concours efficace aux États membres, mais encore faut-il qu'elle en ait les moyens.

Le programme « UE pour la santé », présenté le 28 mai dernier, doit permettre d'accroître la capacité de l'Union à répondre aux crises sanitaires et améliorer à moyen terme la résilience des systèmes de santé nationaux. Il serait financé à hauteur de 1,946 milliard d'euros sur le budget de l'Union européenne et de 8,451 milliards d'euros provenant de l'instrument de l'Union européenne pour la relance, soit un total de 10,397 milliards d'euros et 23 fois plus qu'en 2014-2020. Si ce programme fixe des objectifs ambitieux, les modalités pour les atteindre ne sont pas encore définies. Pour nous, il est nécessaire de s'appuyer sur les acteurs de terrain et notamment les collectivités locales.

Enfin, la pandémie nous impose de réfléchir à comment restaurer la souveraineté sanitaire de l'Union, le virus n'ayant pas de frontières. Pour les médicaments, il faudra se concentrer sur un certain nombre d'entre eux, dont les principes actifs devraient être produits au sein de l'Union. Favoriser l'investissement, notamment par une politique fiscale adaptée, pourrait permettre d'accroître la production européenne. Il faut aussi prévoir de valoriser, par le biais des marchés publics, la capacité des entreprises à garantir les approvisionnements. La stratégie industrielle de l'Union doit désormais intégrer un objectif de souveraineté en matière sanitaire. Tout cela est possible dans le cadre juridique actuel et la question est plutôt celle du renforcement des moyens.

Voilà, tracées à grandes lignes, les perspectives futures qui nous semblent devoir orienter le développement d'une Union européenne de la santé. Nous aurons encore besoin d'approfondir le sujet et l'occasion nous en sera certainement donnée par la Conférence sur l'avenir de l'Europe, qui devrait être lancée à l'automne pour permettre aux Européens d'exprimer leurs attentes envers l'Union.

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