Intervention de Albéric de Montgolfier

Réunion du 19 juillet 2020 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2020 — Article 18

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier :

Un très grand nombre d’amendements ont été déposés sur l’article 18 – 118, pour être exact, soit environ la moitié des amendements restant à examiner. Vous me permettrez donc de prendre la parole quelques instants pour vous exposer la position de la commission des finances.

Cet article concrétise l’engagement du Gouvernement d’exonérer de charges sociales les entreprises profondément affectées par les conséquences de la crise sanitaire. Il s’agit d’un dispositif particulièrement attendu, ce dont témoigne le nombre d’amendements. Pour nombre d’entreprises, il y va même de leur survie, car un report de charges, c’est bien, mais encore faut-il avoir les moyens de les payer plus tard ; l’exonération est évidemment préférable pour ces entreprises. Je rappelle que, dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative, la majorité sénatoriale a déjà adopté un dispositif analogue d’exonération pure et simple de charges sociales.

Très nombreux sont les secteurs et les entreprises qui nous ont interpellés, les uns et les autres, sur leur situation très particulière et leurs très grandes difficultés, voire leur quasi-impossibilité de dégager un chiffre d’affaires, donc de payer des charges. Après avoir beaucoup travaillé sur la question, la commission des finances est parvenue à un équilibre.

Le dispositif du Gouvernement repose, d’une part, sur une exonération de cotisations sociales pour les secteurs les plus exposés et, d’autre part, sur un mécanisme complémentaire de remises partielles pour les entreprises ne relevant pas du périmètre de l’exonération. Les amendements proposés visent tous à élargir le champ de l’exonération, soit en y intégrant de nouveaux secteurs d’activité, soit en modifiant les seuils d’application des exonérations.

Les amendements tendant à étendre le bénéfice de l’exonération totale sans condition de chiffre d’affaires sont particulièrement nombreux ; ils visent, par exemple, le BTP, l’agriculture, les fabricants de confiseries ou l’industrie du cacao. Il est vrai que plusieurs secteurs ont été purement et simplement empêchés de poursuivre leur activité. Pour ceux-là, il est normal, logique que le Gouvernement retienne une exonération automatique. Il y a bien une différence de situation entre un secteur en difficulté, qui subit une perte de chiffre d’affaires, et un secteur qui a interdiction de travailler – en clair, un secteur visé par une fermeture administrative. Je pense évidemment aux secteurs du tourisme, de l’hôtellerie, de la restauration, du sport, de la culture et de l’événementiel, où il n’y a quasiment pas de possibilités de poursuite d’activité en ce moment, ce qui justifie une exonération. S’y ajoutent les activités dépendant directement de ces secteurs – en quelque sorte, les « victimes collatérales ».

Il faut préserver cette cohérence d’analyse, en maintenant une exonération concentrée, principalement, sur les secteurs empêchés par l’épidémie. Si nous ne retenions pas un critère objectif, nous risquerions de fragiliser juridiquement le dispositif, puisqu’un traitement différencié doit être justifié par des différences objectives de situation. L’autre risque, dès lors qu’on prévoit des aides sectorielles visant, par exemple, le cacao, est d’oublier des secteurs durement frappés.

Une seconde série d’amendements tend à abaisser le critère de perte de chiffre d’affaires ouvrant droit à exonération. Ils soulèvent un autre risque : faire exploser le coût du dispositif…

La crise sanitaire a affecté l’ensemble de l’économie, ce qui nous impose de trouver une solution globale. Or le dispositif proposé par le Gouvernement ne garantit pas une telle solution globale, dans la mesure où il réserve le « filet de sécurité » – les remises partielles – aux entreprises de moins de cinquante salariés. C’est pourquoi je vous proposerai, au nom de la commission des finances, d’actionner plus largement ce dispositif : d’une part, en étendant son application à l’ensemble des PME ; d’autre part, en renforçant l’intensité de la remise de charges, en la portant, pour les très petites entreprises, jusqu’à 70 %. Cette solution est intermédiaire entre l’exonération de l’ensemble des secteurs d’activité, qui poserait un problème de coût, voire un problème juridique, et le dispositif du Gouvernement, qui laisse de côté de trop nombreuses entreprises durement affectées par la crise.

Tel est le système équilibré que vous propose la commission : exonération totale de charges pour les entreprises fermées ou empêchées d’avoir une activité, remises partielles pour les activités connexes étendues à toutes les PME et avec une intensité renforcée.

Le sujet est très délicat, et le Gouvernement est peut-être à la recherche d’une solution perfectible – nous avons échangé. Le traitement au coup par coup n’est pas forcément possible, compte tenu du nombre de cas. Quoi qu’il en soit, mes chers collègues, si vous vous ralliez aux amendements de la commission des finances, nous retiendrons une approche plus intéressante qu’en adoptant tels ou tels amendements, au risque de laisser des entreprises au bord du chemin.

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