Je sais bien que nous autres féministes sommes très excessives, mais nous n’exigeons pas des gardes des sceaux qu’ils parlent en écriture inclusive ! Nous saluons néanmoins cet effort, dont je tiens à vous libérer pour l’avenir. Il n’y a pas de quoi monter au créneau, mes chers collègues de l’autre côté de l’hémicycle !
Nous n’en avons pas fini avec les textes consacrés aux violences faites aux femmes. En effet, celui-ci ne va pas jusqu’au bout. Il est encore largement soumis à ce qui a été la doctrine de la Chancellerie et de nombreux experts, la doctrine selon laquelle un mari violent peut aussi être un bon père. Ce texte ne rompt pas avec cette approche. À l’en croire, un mari violent n’est pas forcément un mauvais père ; même s’il l’est, il faudrait privilégier les liens entre le père et l’enfant et ne pas les couper, car ils seraient trop importants.
À ce propos, monsieur le garde des sceaux, je voudrais attirer votre attention sur un point. Vous vous êtes beaucoup exprimé au sujet de la justice pénale, mais la justice civile importe également. Les violences contre les femmes s’y nouent, en particulier dans le cabinet du juge aux affaires familiales. Nous prenons insuffisamment en compte cet aspect aujourd’hui, alors qu’il n’y a pas de lutte efficace contre les violences faites aux femmes qui ne s’appuie, d’abord, sur une profonde évolution de la justice civile et familiale, et qui ne s’attaque à cette fameuse obsession du maintien du lien entre le père et l’enfant, en toutes circonstances. Encore cet après-midi, j’ai eu à examiner le dossier d’un enfant dont les parents sont séparés et dont le père est radicalisé : l’enfant est toujours obligé de se plier au droit de visite et d’hébergement du père, malgré la toxicité et la dangerosité de celui-ci, tout cela parce qu’il est le père !
C’est donc aussi sur cette évolution de la justice civile que nous vous attendons, madame la ministre, monsieur le garde des sceaux.