Vous aurez compris, monsieur le garde des sceaux, madame la ministre, que l’ensemble des sénateurs et des sénatrices qui composent la délégation sénatoriale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes approuvent ce texte, mais le jugent insuffisant. Nous avons véritablement besoin d’une grande loi-cadre pour lutter contre les violences faites aux femmes et toutes les violences intrafamiliales.
Je voudrais revenir sur un seul sujet : la mise en place des dispositions législatives relatives à l’éviction du conjoint violent. Il faut, sur tous les territoires, avoir une politique cohérente qui permette le départ du conjoint violent du domicile conjugal. Sur les territoires insulaires comme le mien, la demande est très forte sur le marché du logement : on relève plus de 28 000 demandes de logement social en attente à La Réunion. Or nous obligeons encore les femmes victimes de violence à quitter, avec leurs enfants, le domicile conjugal, en raison du manque de cohérence entre les différents acteurs publics, entre les services de la préfecture et ceux du conseil départemental, dont les travailleurs sociaux demandent que soient impérativement trouvées des places en urgence.
Un travail sur ce point est donc extrêmement nécessaire et urgent, de manière que les enfants et, a fortiori, les femmes victimes de violences ne subissent pas cette double peine. Même d’un point de vue financier, cela coûtera bien moins cher à la collectivité que de loger pour trois mois, comme le font les services départementaux, ces femmes et ces enfants, qui doivent parfois changer d’école.
Je rappellerai à ce sujet que quand, dans nos territoires ultramarins, survient un uxoricide, c’est-à-dire quand un homme tue sa femme, les membres de sa famille qui veulent quitter l’île ne se voient pas offrir d’accompagnement jusqu’au territoire hexagonal. J’ai eu affaire à de tels cas. J’estime qu’il s’agit d’une injustice très profonde, tout comme celle que subissent les femmes qui veulent quitter un territoire ultramarin pour ne pas subir la violence d’un conjoint qui, souvent, n’accepte pas une décision de justice.
C’est pourquoi il faut de la cohérence entre territoires et entre partenaires. Je fermerai le ban en affirmant à mon tour l’impérieuse nécessité d’une grande loi-cadre pour garantir cette cohérence ; c’est bien la demande de notre délégation, dont je salue la présidente, ainsi que Mme la rapporteure de cette proposition de loi, pour le travail accompli.