J'ai évoqué l'intervention de Mme Buzyn le 24 janvier. Nous avions renforcé le personnel, mais nous n'avons eu les outils techniques, les autocom, pour avoir des lignes supplémentaires, que le 13 mars. Heureusement, le pic d'appels s'est un peu tassé après le 24 janvier. Mais fin février et début mars, le nombre d'appels a très fortement augmenté. Nous avons eu les deux autres barrettes d'autocom le 24 mars. Nous avons multiplié le personnel disponible, mais sans matériel supplémentaire, du 24 janvier au 13 mars : étudiants en médecine, collègues médecins ayant vu leur service fermer comme des biologistes et radiologues ont aidé à la régulation. Le délai était très long pour une raison simple : à la suite de la grippe H1-N1 et des attentats, il était prévu que nous ayons ces barrettes d'autocom et que nous puissions les activer en moins de 24 heures. Or elles n'étaient toujours pas installées. Il a fallu du temps pour trouver les techniciens, leur faire percer des trous pour passer les câbles, etc.
Nous ne savons pas combien de personnes sont mortes de la covid, nous connaissons juste la surmortalité globale, comme pour la grippe traditionnelle. Certaines personnes sont restées à domicile, avec des formes peu graves au téléphone, ont eu des formes graves ensuite. Au téléphone, on limitait les hospitalisations car on avait des problèmes de capacité d'accueil. Ces personnes ont fait des complications thrombo-emboliques et sont mortes d'embolies pulmonaires. Cela nécessite de réaliser des études, mais il est clair que la prise en charge des patients n'a pas été optimale. Nous ne pouvons pas encore chiffrer cette perte de chance. Il faudra faire la part des choses sur la surmortalité.
Bien sûr, nous nous sommes organisés et nous avons fait le maximum. Mais il ne faut pas rosir les choses : si l'on veut être préparé pour l'hiver prochain, il faut dire les choses, même si parfois il y a des maladresses ou des noms d'oiseaux qui volent. Ces problèmes existent depuis très longtemps, et aucun gouvernement, quelle que soit sa couleur politique, n'a eu le courage de traiter ce dossier. Les deux services publics les plus appréciés des Français - les sapeurs-pompiers et les services d'urgences et de SAMU - ne travaillent pas ensemble. Oui, il y a des endroits où nous travaillons ensemble, mais d'une manière générale, il n'y a pas de doctrine claire qui permette qu'à l'échelle nationale tout aille bien. Cela ne peut pas reposer que sur des individus, c'est de la responsabilité du politique.