Intervention de François Dolveck

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 16 juillet 2020 à 13h30
Audition commune du colonel grégory allione président de la fédération nationale des sapeurs-pompiers de france fnspf des docteurs françois dolveck directeur des urgences du centre hospitalier de melun — Marc jacquet et christophe prudhomme porte-parole de l'association des médecins urgentistes de france amuf

François Dolveck, directeur des urgences du Centre hospitalier de Melun - Marc Jacquet :

Pour répondre à la question posée au sujet des équipes multidisciplinaires, il s'agit d'une voie de travail et d'orientation extrêmement intéressante. Des expérimentations entre des établissements référents et de plus petits établissements sont en cours ; on essaye d'avoir des conventions et des collaborations de ce type. Ces essais sont en nombre probablement insuffisant pour avoir une meilleure visibilité de la manière dont on va pouvoir s'occuper d'établissements en difficulté. Toutefois, dans les endroits où cela est mis en oeuvre, les résultats sont plutôt prometteurs.

Quand on entre dans ce type de démarche, on a envie d'avoir un cadre, une valorisation - je ne parle pas ici que d'argent, une valorisation des équipes - pour pouvoir mettre les choses en place et les conforter. J'adhère donc à cette démarche qui reste encore aujourd'hui un peu balbutiante.

Qui déclenche les visites dans les Ehpad. La problématique est simple : c'est le nombre de décès. Lorsqu'on a vu que le nombre de décès augmentait, on a réagi. Globalement, c'est ce que tout le monde a fait.

Quant aux stratégies de prise en charge pour les personnes âgées, elles dépendaient de l'état de santé réel du patient, qui n'est pas forcément lié à l'âge. Et ce sont les sociétés savantes qui travaillent sur un certain nombre d'indicateurs, de codifications, d'éléments objectifs, qui ne sont pas seulement liés à l'âge, qui sont les référentiels. Cela permet normalement d'avoir une stratégie de prise en charge et d'acceptation du patient âgé assez homogène sur le territoire. Comme l'expliquait mon collègue Christophe Prudhomme, les chemins pour aller du point A au point B sont parfois variés, mais il n'empêche que les recommandations des sociétés savantes nous permettent d'avoir des éléments assez homogènes.

Concernant la hiérarchisation des postes de commandement, la question est entière. Selon mon ressenti, la structuration nous a permis, à l'échelle du département, d'avoir une réaction coordonnée avec un poste de commandement, qui était à la préfecture, et des éléments de recommandation et d'organisation en provenance de l'ARS. Je ne veux pas faire le béni-oui-oui, mais je n'ai assisté à aucune forme d'opposition entre les deux circuits, mais plutôt à une vraie complémentarité. En tout cas, pour ce qui me concerne, j'ai constaté cette organisation a été vraiment bénéfique.

Le retour au fonctionnement habituel dans les Ehpad constitue, bien évidemment, la grande inquiétude. La situation a conduit à des embauches de docteurs, ce qui a entraîné une petite dynamique. Je vous le rappelle, on est le département le plus pauvre de France en professionnels de santé, donc avec des ressources limitées. On reste loin du compte, bien évidemment, et la situation a mis en évidence les tensions qu'on peut connaître dans les Ehpad, dans les services d'urgence et dans les SAMU. Sans dresser un auto-satisfecit, j'essaie d'être le plus objectif possible. On connaissait nos fragilités dès avant la crise et les organisations qui ont été mises en place nous ont donné des vraies pistes pour avoir l'action la plus fonctionnelle possible.

Comment décide-t-on de toute la chaîne de prise en charge de nos patients ? Ce sont des décisions médicales, quels que soient le vecteur et l'acteur de terrain sur place. Que ce soit un VSAV des sapeurs-pompiers, une ambulance privée ou une équipe médicale, il y a toujours un lien avec la régulation médicale qui, au regard des éléments qui lui sont donnés et de sa connaissance, va prendre une décision médicale, qui doit être accompagnée. La décision peut être de rester en Ehpad si l'on dispose de l'accompagnement nécessaire à la prise en charge correspondant au référentiel et à la qualité de confort qu'on peut donner au patient. Si ce n'est pas le cas, il sera hospitalisé, et la décision sera prise de concert avec le réanimateur pour savoir si le patient doit aller en réanimation ou pas. C'est toute une chaîne de décision qui est utilisée, bien évidemment dans la crise du Covid, mais aussi en fait dans notre quotidien. En somme, on se repose sur des modes de fonctionnement du quotidien.

L'état de préparation pour la suite ?

Je rejoins mon collègue, la période du déconfinement a été dure. Les équipes se sont vraiment trouvées dans une situation difficile. Il faut récupérer, remettre les esprits à l'endroit, et je crois que les professionnels, comme la population, ont eu peur. J'ai le sentiment que nous sommes dans une phase de récupération - la crise n'est pas tout à fait finie, mais on essaie d'avancer le mieux possible. On a connu des situations de tension alors que la charge d'activité n'était pas si grande, parce que les équipes avaient vraiment été mises à rude épreuve. Je crois que c'est naturel et j'espère que les équipes auront récupéré si une deuxième vague apparaissait.

L'autre point sur lequel je souhaitais rebondir, c'est celui de la préparation. Évidemment, on n'avait pas tout prévu dans le détail pour cette crise. Évidemment, on s'est fait déborder du fait des gros volumes d'activité, mais on a réagi. Nous partageons ces positions. Néanmoins, il n'y avait pas non plus d'impréparation - ce n'est pas vrai. Des plans blancs sont écrits, des plans de continuité d'activité existent, des exercices sont faits, des mises en situation sont menées. Certes, les équipes n'ont pas été à la hauteur de ce qu'on a vécu - on n'avait pas deviné une telle situation. Elles avaient été préparées et prévenues, mais on ne connaissait pas les limites de cette montée en charge. On a essayé d'y faire face de la façon la plus adaptée possible.

Arrivera-t-on à répondre encore mieux à la deuxième phase ? Je l'espère, mais elle peut ne pas ressembler à la première, ce qui peut nous réserver encore quelques surprises, notamment avec des effets qui ne sont pas que des pics, mais peut-être des augmentations d'activité en plateau par exemple. On verra alors quelle sera notre capacité d'adaptation. Plus ce sera long, plus ce sera difficile dans la mesure où nos volumes de personnels et de professionnels sont limités - et ils ont déjà donné. En tout cas, je pense que l'on pourra être un petit peu plus réactifs. Nul ne peut prédire combien de temps cela durera.

Enfin, pour la question du masque, je suis content que cette décision ait été prise et je me réserverai bien de faire tout commentaire sur les dates.

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