Intervention de Jean Rottner

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 8 juillet 2020 à 18h45
Audition de M. Jean Rottner président de la région grand-est

Jean Rottner, président de la région Grand Est :

Vous avez parfaitement raison sur les Ehpad : notre temps de réaction et notre retard ont été inqualifiables.

Sur les sujets médico-sociaux et sociaux, faisons confiance aux départements ! Il faut qu'il y ait un patron responsable. Les présidents de conseil départemental sont des personnes responsables. Ils sont en capacité d'anticiper, d'accompagner, de prendre des décisions adéquates, de décompter. Les problèmes de décompte ont duré pendant des jours. Je ne m'explique pas les différences de chiffres qu'il a pu y avoir d'un jour à l'autre.

Aujourd'hui, nous sommes en capacité de mettre en place des organisations locales qui nous permettent d'avoir des observatoires, des référencements, des données quasi automatiques. Les régions ont des compétences. Actuellement, elles sont freinées, faute d'autorisations ou en raison de problème de sécurisation ou de souveraineté des données.

C'est le président du conseil régional qui doit présider l'ARS, et personne d'autre. D'ailleurs, ce serait une erreur de confier cette compétence au président de région « ou à son représentant ». La santé est aujourd'hui l'une des premières préoccupations des Français. Le président de l'ARS doit être un élu du territoire, qui connaisse ce territoire, qui favorise la coopération, qui travaille avec les centres hospitaliers universitaires, lesquels ont un rôle majeur dans l'aménagement du territoire. Je pense à la magnifique convention entre le CHU de Reims et Troyes, qui permet d'avoir des praticiens hospitaliers à temps partagé. C'est ce genre de solutions, inventées sur les territoires par les acteurs du territoire, qui doivent être mises en avant.

Il ne s'agit pas de faire plaisir au président du conseil régional en lui permettant de diriger une structure supplémentaire. Il s'agit de répondre à une logique de création, d'équité, d'égalité et d'aménagement du territoire - celui-ci est désormais crucial -, alors que la colère est toujours présente, plus particulièrement sur les questions de santé.

Il y a quatre déterminants pour que les gens s'installent sur un territoire : le très haut débit, les mobilités, la formation et la santé. Les collectivités, particulièrement les régions, interviennent dans ces quatre domaines. En matière de santé, il faut clarifier les choses. Tout le monde s'en est rendu compte avec la crise.

Il faut une responsabilité départementale, avec une délégation territoriale de l'ARS, en lien avec le préfet du département, pour une gestion de proximité du médico-social, du social et de la psychiatrie. C'est très important : on passe aujourd'hui à côté de soins qui sont absolument essentiels. Il faut peut-être une coordination au niveau régional, au travers d'ARS qui seraient plus stratégiques. Osons, à l'instar de certains pays européens, poser la question de la place et de la responsabilité des collectivités locales.

Je suis prêt, à l'image de ce que l'on fait pour les lycées, à prendre la responsabilité à la fois du matériel et des bâtiments hospitaliers. Pour des raisons d'aménagement du territoire, je pourrais décider de ne pas fermer un hôpital et de prendre en charge son déficit de fonctionnement. Nous sommes actuellement dans une vision beaucoup trop budgétaire. Quand on ferme deux maternités sur un même secteur, c'est dramatique pour l'ensemble du territoire concerné, mais il faut aussi parfois accepter de fermer une maternité parce que la sécurité sanitaire n'est pas assurée. En tant qu'élus locaux, nous sommes habitués à prendre ce genre de décisions. Ce que je refuse dorénavant, c'est que l'on nous demande de panser les plaies ouvertes par des décisions administratives et de calmer la vindicte populaire qu'elles suscitent. C'est dans cet esprit de proximité qu'il faut agir aujourd'hui. Les territoires doivent travailler en lien avec les structures de santé, déconcentrées ou non.

Les élus locaux ne peuvent exercer un simple rôle de représentation à la tête du conseil de surveillance. Nous devons être à la tête d'un conseil d'administration, avec un pouvoir de décision et de management. Il faut que le directeur ne soit pas une courroie de transmission de l'ARS, mais qu'il ait lui aussi la possibilité d'agir et soit responsabilisé. Les médecins et les équipes médicales qui sont à la tête des hôpitaux doivent jouer un rôle majeur. Il faut rétablir cette confiance et que chacun puisse assumer pleinement son rôle.

La vindicte qui s'exprime parfois contre les ARS n'est pas gratuite. Le système doit être amélioré. Les ARS ont de vraies compétences, mais nous en avons aussi. Nos directeurs ont des compétences. Nos médecins ont des compétences. Il faut aujourd'hui que la verticalité laisse place à une vraie transversalité dans les actions pour répondre à l'attente de nos concitoyens.

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