Intervention de Jérôme Bignon

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 20 février 2020 à 9h40
Examen des conclusions de l'Audition publique sur les enjeux scientifiques et technologiques de la prévention et la gestion des risques accidentels cédric villani député et gérard longuet sénateur rapporteurs

Photo de Jérôme BignonJérôme Bignon, sénateur :

J'ai été concerné par l'incendie de Lubrizol - on oublie que la Bresle, qui marque la limite entre les départements de la Somme et de la Seine-Maritime, n'est pas comme le Rhin qui aurait magiquement empêché de passer le panache nucléaire venant de Tchernobyl. Nous sommes dans la même situation, c'est-à-dire que le nuage a passé la Bresle et est venu dans la Somme. Pourtant, le préfet et l'agence régionale de santé (ARS) des Hauts-de-France n'ont pas été avisés. L'affaire est restée locale, à Rouen et au mieux à 30 ou 40 kilomètres autour de Rouen, mais pas davantage. Il y a un véritable problème de prise de conscience dans ce genre d'accident. J'ai été frappé par le fonctionnement de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), qui a une méthodologie spécifique : ils ne sont pas seulement un bureau « accident/analyse » comme il en existe sur les accidents aériens par exemple, mais ils ont un centre opérationnel permanent avec du personnel d'astreinte.

J'ai assisté à un exercice où un camion rempli de colis nucléaires était supposé être tombé dans un cours d'eau dans le Cantal, avec tout un ensemble de conséquences catastrophiques. Ce bureau se met à disposition immédiatement et en permanence des pompiers, du préfet, des autorités voisines, etc. Ils ont une vision globale de la situation nourrie de leur expérience. J'ai trouvé cette vision si intéressante que j'en ai parlé à notre collègue Hervé Maurey, qui préside la commission d'enquête du Sénat sur Lubrizol, afin qu'il auditionne le président de l'IRSN. Il me semble que cette piste est intéressante, notamment dans le cas des accidents industriels importants.

Imaginons que le préfet ne soit pas présent dans son département au moment de l'accident ; celui-ci va devoir être géré par un jeune directeur de cabinet, souvent sans expérience ; il peut être utile d'avoir à proximité une instance capable de vous épauler, comme le fait l'IRSN. J'ai quand même été étonné que personne ne s'intéresse aux départements voisins quand l'accident de Lubrizol est arrivé. Plusieurs centaines de cultivateurs ont été pénalisés dans la Somme, ce n'était pas anodin. Donc, attention à ne pas traiter le problème de manière trop locale alors qu'un regard extérieur ou national donne de la compétence et retire de l'émotion dans la manière de traiter le sujet.

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