Intervention de Jean-François Delfraissy

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 15 septembre 2020 à 10h30
Audition du professeur jean-françois delfraissy président du conseil scientifique

Jean-François Delfraissy, président du conseil scientifique :

S'agissant des vaccins, vous avez tous compris que nous sommes dans un modèle de construction vaccinal très différent du modèle habituel : de grands groupes pharmaceutiques, s'appuyant sur les recherches de start-up ou de grandes universités comme Oxford, ont décidé d'expérimenter un certain nombre de candidats vaccins, en suivant les phases 1, 2 et 3 habituelles, et de mettre en place, dans le même temps, les outils industriels permettant une production de vaccin à haut niveau. C'est du jamais vu. D'habitude, les industriels attendent les premiers résultats de leurs produits, vaccins ou médicaments, avant de s'engager dans un processus industriel. Ils prennent donc deux risques, mais demandent aux pays de les « financer » en passant commande de millions de doses, ce qui leur permet d'investir dans l'outil industriel. On a donc un nouveau modèle où l'élaboration d'un vaccin et l'outil industriel se construisent en même temps.

Parmi les différents candidats vaccins, un certain nombre restera sur le carreau. Pour le covid-19, deux types de vaccins sont possibles. Un premier modèle permet de diminuer la gravité des formes sévères chez les patients les plus à risques, ce qui n'est pas très habituel dans la stratégie vaccinale ; le deuxième modèle, plus classique, correspond à des vaccins préventifs qui évitent la transmission d'une personne à une autre. J'ai voulu indiquer que, compte tenu de la dynamique particulière observée et de l'effort considérable entrepris, on peut imaginer que, parmi les sept grands candidats vaccins, deux ou trois donnent de premiers résultats dans le premier trimestre de 2021, pour un vaccin qui aurait une efficacité en termes de transmission de l'ordre de 50 %, par exemple, mais qui permettrait peut-être de réduire la fréquence et la sévérité des formes graves, ce qui serait un élément essentiel, puisque la maladie est bénigne dans 90 % à 92% des cas. Je ne pense pas que Bruno Lina soit en contradiction avec moi sur ce point. Quoi qu'il en soit, le conseil scientifique s'appuie sur les données dont il dispose, mais il ne lit pas dans une boule de cristal ; il y a donc une part de risque à donner une date. Je pense néanmoins que l'évolution sera plus rapide que dans les stratégies vaccinales habituelles.

Sur l'origine du covid-19, je sais qu'il y a eu beaucoup de débats sur l'hypothèse d'un virus qui se serait échappé du laboratoire P4 de Wuhan. Je n'ai aucune opinion sur ce scénario, si ce n'est que ce laboratoire répondait à des critères de sécurité de très haut niveau et que les technologies chinoises ont également atteint un très haut niveau. Je maintiens ma position sur le fait que les Chinois nous disent ce qu'ils veulent et que leur communication scientifique, tout en respectant les conditions habituelles, est quand même sous contrôle. Sur le fond, on peut imaginer qu'il s'agit du schéma habituel d'un virus porté par une chauve-souris, qui passe par un porteur animal avec une rupture de la barrière d'espèce, phénomène qu'on ne comprend pas encore très bien, et atteint l'homme.

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