Intervention de Jean Sol

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 16 septembre 2020 à 9h00
Table ronde avec des experts en santé publique

Photo de Jean SolJean Sol :

Vous avez évoqué la « polémique spectacle », qui a nourri et majoré les inquiétudes et troublé les messages. Comment l'expliquez-vous ? À qui profite-t-elle ? Certainement pas à nos concitoyens... Que proposez-vous pour y remédier ?

Pr Antoine Flahault. - Merci de ces questions. On savait, par l'expérience de Wuhan, que les personnes âgées étaient particulièrement à risque. L'Allemagne en a tenu compte et a donné la priorité absolue à leur protection. Nous n'avons pas eu en France la même attitude s'agissant de la protection individuelle des résidents et du personnel des Ehpad - il aurait fallu en effet équiper jusqu'aux cuisines, jusqu'aux fournisseurs mêmes. Tous les maillons de la chaîne doivent être forts.

L'idée qu'il puisse y avoir aujourd'hui pénurie dans les Ehpad français est tout bonnement inaudible. Peut-être ne faut-il pas tout attendre de l'État et des collectivités locales ; les masques de protection peuvent s'acheter, se fabriquer. La France a les moyens de protéger ses Ehpad.

L'expérience de l'été montre que les personnes âgées ont compris le risque de la covid19 - plus important que celui d'une infection grippale dès 40 ans, très féroce après.

Quelle place pour la parole scientifique dans les médias ? Le monde a changé, les réseaux sociaux sont libres, ouverts, une source inépuisable d'informations peu validées, contradictoires, voire fake. C'est le propre de la démocratie... on peut s'en plaindre ou s'en réjouir, c'est un fait.

Les gouvernements européens, pour la plupart - le Royaume-Uni tardivement, après avoir payé un lourd tribut - ont adossé leurs politiques sur la science. Il faut s'en réjouir. Plutôt que de déplorer un manque d'étanchéité entre le scientifique et le politique, privilégions une politique fondée sur des connaissances scientifiques. En France comme dans tous les pays européens, la gestion de l'épidémie était fondée sur des preuves scientifiques, qui évoluent, changent, sont débattues par la communauté scientifique. Les données scientifiques ne se résument pas aux données sanitaires ; on tient aussi compte de l'apport des sciences humaines, sociales, politiques.

Non, le masque ne présente pas de risque particulier pour les enfants. On entend qu'il pourrait gêner ceux qui souffrent de maladies de peau. L'expérience montre plutôt le contraire : le masque, en ce qu'il dissimule, les soulage en évitant la stigmatisation que peuvent entraîner les problèmes dermatologiques.

Il faut promouvoir le port du masque dans les écoles. Je regrette qu'il ne soit pas préconisé dès 6 ans - cela aurait sans doute évité nombre de clusters dans les établissements scolaires en France et en Suisse. Les instituteurs peuvent accompagner les élèves sans dogmatisme, ôter le masque quand certains apprentissages l'exigent. Les pays asiatiques sont pionniers. Ne disait-on pas, hier encore, que nous ne porterions jamais de masques comme en Asie, que ce n'était pas la culture occidentale ?

Ne soyons pas complaisants, faisons la promotion du masque dans les lieux clos - uniquement les lieux clos, mais tous les lieux clos, surtout ces salles de classe souvent mal ventilées.

Pratiquer un test PCR sur un enfant de 2 ou 3 ans est impossible, sauf à faire un prélèvement salivaire ; le frottis naso-pharyngé donne souvent un faux négatif, car l'enfant se débat. C'est ce qui a sans doute conduit à négliger le portage du virus chez les enfants, dont on sait aujourd'hui qu'il est probablement de même niveau que celui des adultes.

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