Intervention de Jérôme Salomon

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 16 septembre 2020 à 14h30
Table ronde avec des acteurs institutionnels

Jérôme Salomon, directeur général de la santé :

Face à l'émergence de la maladie, puis face à l'épidémie, la communauté scientifique et médicale s'est très fortement mobilisée. D'ailleurs, nous avons reconstitué une chronologie extrêmement détaillée de l'ensemble des actions de la DGS et de ses agences depuis l'alerte. Je communiquerai ce document aux membres de la commission d'enquête.

Tout d'abord, l'alerte a été très précoce en France, du côté de Santé publique France comme de la DGS. Nous analysons en permanence ce que nous appelons les signaux faibles. Les émergences sont fréquentes. Heureusement, elles ne débouchent pas toutes sur des alertes mondiales, mais un certain nombre de pathogènes apparaissent régulièrement, sans que l'on sache quels seront leur virulence et leur caractère épidémique. Le principe est celui du partage d'information. La communauté scientifique mondiale est désormais complètement ouverte, grâce aux nouveaux réseaux sociaux et aux outils de communication. Les épidémiologistes, les virologues et les agences échangent très vite.

Nous avons donc disposé de cette information très tôt : dès la première réunion de sécurité sanitaire du mois de janvier, nous avons abordé ce sujet, grâce à la mobilisation de l'ensemble de nos acteurs. Nous avons envoyé des messages aux ARS, aux établissements de santé et aux professionnels de santé entre le 10 et le 14 janvier. Nous avons donc été extrêmement attentifs. Évidemment, la ministre des solidarités et de la santé suivait ce sujet de très près.

S'y ajoute un autre message, peut-être plus difficile à faire passer : nous avions besoin de caractériser le risque. À ce titre, nous nous sommes également appuyés sur notre expertise, qui est de très haut niveau. Nous avons la chance d'avoir, en France, des épidémiologistes très bien formés, ainsi que des virologues de très grande qualité - certains sont parfois demandés comme experts auprès des instances internationales.

Que ce soit à l'institut Pasteur ou au sein des centres nationaux de référence agréés par Santé publique France, nous avons mobilisé l'ensemble de l'expertise scientifique française pour connaître, autant que possible, l'agressivité de ce virus, sa capacité à se répandre et ses cibles. Pour répondre au virus, il est important de savoir si ses cibles sont pédiatriques ou gériatriques, quelle peut être sa gravité pour la population.

L'exemple de 2009 le rappelle : au début, il est difficile de connaître la gravité d'une maladie, tout simplement parce qu'elle est alors décrite par ses formes graves - c'est par les cas graves que l'alerte est donnée. Dans ces conditions, on dispose d'un numérateur sans avoir le dénominateur correspondant.

Tous ces éléments devant être réunis, nous avons saisi Santé publique France, qui d'ailleurs a répondu très vite, d'une analyse de risques. Nous lui avons demandé de détailler les scénarios d'évolution qu'elle envisageait. De plus, les échanges d'informations internationaux ont été nombreux, en particulier au niveau de l'OMS. Beaucoup d'experts se sont rendus, avec le directeur général de l'OMS, auprès des autorités chinoises pour tenter de recueillir des informations.

Ainsi, avant même que ce nouveau coronavirus soit appelé Sars-Cov 2, avant que l'on sache qu'il allait donner la maladie du covid-19, son génome était mis à disposition en ligne pour que des virologues puissent l'interpréter et préparer un test diagnostic, ce qui a été fait très vite, à la fois en Allemagne et en France : mi-janvier, l'institut Pasteur avait déjà la capacité de tester. À ce titre, nous avons également décidé de mobiliser nos virologues et nos établissements de référence, c'est-à-dire le centre national de référence, tous les centres hospitaliers universitaires (CHU) et les laboratoires des établissements de santé de référence, pour que tous les CHU, puis, plus largement, tous les hôpitaux, sur l'ensemble du territoire national, soient capables de procéder aux tests.

Le partage de connaissances a donc été très rapide. Nous avons même fait des réunions dès le mois de janvier avec l'ensemble des experts pour mobiliser notre expertise et tenter de comprendre au maximum ce qui se passait.

L'immunité collective n'a jamais été le choix...

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