Intervention de Jérôme Salomon

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 16 septembre 2020 à 14h30
Table ronde avec des acteurs institutionnels

Jérôme Salomon, directeur général de la santé :

Je suis un partisan de la réduction des risques depuis le début. Je suis spécialiste de santé publique et spécialiste de maladies infectieuses. J'utilise des masques depuis trente ans. Avec toutes les équipes avec lesquelles j'ai travaillé, j'ai été un obsessionnel du port du masque, en particulier dans les épidémies puisque je gérais le comité de lutte contre les infections nosocomiales d'un CHU. Je suis donc dans le soutien absolu aux démarches de réduction des risques.

Ce n'est pas moi qui ai décidé du niveau du stock. Permettez-moi de vous lire ce qu'ont signé - page 23 du COP - François Bourdillon et Agnès Buzyn, qui étaient en pleine réflexion sur le cadre de la constitution et de l'emploi des stocks stratégiques pour la période 2020-2021 : « Contribuer, en vue d'éclairer les décisions futures des autorités sanitaires, à la réflexion et à la mobilisation de l'expertise sur l'adéquation optimale aux besoins des différents types de stocks ainsi que sur le statut de ces produits ; étudier en lien avec les tutelles les mutualisations et optimisations possibles concernant la gestion des plateformes de stockage, des équipements et des produits - achats groupés au niveau européen, mises en commun avec d'autres ministères, conditions d'acheminement, recyclage des produits avant leur date de péremption ... - ; mobiliser des réseaux d'experts pour produire à destination des ARS et l'établissement de santé des référentiels utiles à la constitution des stocks tactiques. » Il s'agissait donc d'une véritable réflexion globale sur le territoire national : que met-on dans le stock stratégique ? Où doit-il être ? Comment est-il utile en appui aux stocks tactiques ?

On voit bien que nous étions en pleine réflexion entre 2018 et, malheureusement l'irruption de la crise, pour aller vers des stocks roulants et distribués afin de limiter les pertes. Car acheter des masques et les jeter parce qu'ils sont périmés, ce n'est pas une solution quand on doit rendre des comptes à nos concitoyens.

Voilà : la réflexion était en cours ; François Bourdillon, puis Geneviève Chêne, l'avaient initiée. Le fait qu'on ait découvert début octobre 2018 qu'une part importante du stock était périmée était évidemment une mauvaise nouvelle pour Santé publique France comme pour nous.

S'agissant des commandes et de la mobilisation de nos producteurs français, deux éléments totalement exceptionnels ont eu lieu en janvier et février 2020. Premièrement, pour la première fois, une crise a touché l'ensemble du monde en même temps, et en particulier les gros producteurs. Deuxièmement, les besoins ont explosé, ce qui avait été probablement sous-estimé par tous les experts. En France, on consomme habituellement 3 à 5 millions de masques, mais nous sommes passés à des besoins absolument considérables, de l'ordre de près de 100 millions, ce qui n'était pas du tout envisagé - nous n'avions jamais imaginé que l'ensemble d'un établissement de santé devrait être équipé de masques.

Les masques FFP2 ont été réservés aux actes à risques et les masques chirurgicaux aux professionnels de santé. Les producteurs français se sont très rapidement mobilisés pour fournir ces masques, mais surtout pour créer cette nouvelle catégorie de masques que sont les masques grand public. Ils s'imposent petit à petit ; tant mieux, parce que c'est effectivement un outil utile. Nous n'avons pas voulu courir le risque, comme d'autres pays, que chacun fasse son masque, parce que les publications actuelles montrent que le niveau de filtration des masques peut être très varié entre une fabrication artisanale et un produit qui répond à des normes et pour lequel le producteur a une responsabilité au regard des exigences que nous avons posées sur le niveau de filtration.

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