Intervention de Yves Sciama

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 23 septembre 2020 à 9h30
Table ronde sur la communication de crise : mme sibeth ndiaye ancienne porte-parole du gouvernement et m. yves sciama président de l'association des journalistes scientifiques de la presse d'information ajspi

Yves Sciama, président de l'Association des journalistes scientifiques de la presse d'information :

Sur la maison de la science et des médias, je crois qu'il y a eu un malentendu, car je voulais plutôt exprimer mon opposition à cette idée.

Je partage vos propos relatifs au financement de la recherche. Je me suis entretenu avec le principal spécialiste structurel des coronavirus en France, Bruno Canard, qui m'a confié qu'il avait demandé à plusieurs reprises des financements pour étudier les coronavirus en prévision d'une possible pandémie.

Depuis le SRAS en 2002, il était couramment admis dans les milieux scientifiques que le risque pandémique le plus grand était celui d'un virus respiratoire, probablement de la famille des coronavirus. Les travaux sur les structures des coronavirus n'ont été financés ni par la France ni par la Commission européenne, à laquelle Bruno Canard avait demandé des crédits. Or une fois que la pandémie était là, on lui a proposé de lui ouvrir toutes les lignes de crédit nécessaires. C'était dix ans trop tard...

La question de la préparation pandémique est fondamentale, car d'autres virus, peut-être plus méchants encore, peuvent apparaître. Ce sujet est régulièrement débattu au sein de la communauté scientifique.

J'entends vos remarques sur le professeur Raoult, mais je pense tout de même qu'il a joué un rôle particulier dans cette crise. Il ne s'est pas contenté de tester un traitement sur lequel il avait une intuition - c'est parfaitement respectable -, mais il a pris des postures d'oracle, disant que le covid était terminé, puis que ce virus avait simplement touché deux ou trois Chinois, ou encore qu'il n'y aurait pas de deuxième vague. Mais son attaque la plus ravageuse, reprise par le professeur Perronne, fut d'accuser tous ses adversaires de conflits d'intérêts avec les laboratoires pharmaceutiques. C'est peut-être le signe qu'il faudrait que notre institution médicale révise son rapport aux laboratoires pharmaceutiques, car cela la rend extrêmement vulnérable à la critique et à ce type d'attaque démagogique.

Notre corps médical a aussi un problème de mandarinat. Ce n'est pas nouveau, mais nous avons payé un peu cher l'intouchabilité des sommets de l'institution médicale, leur conviction d'infaillibilité et leur habitude des arguments d'autorité. Dans le fonctionnement ordinaire de la médecine, ce n'est peut-être pas tragique, mais en l'occurrence, le coût en termes de santé publique a été important.

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