Intervention de Annie Guillemot

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 23 septembre 2020 à 15h00
Audition de Mme Agnès Buzyn ancienne ministre des solidarités et de la santé

Photo de Annie GuillemotAnnie Guillemot :

Il faut tenir compte de la contraction du temps et juger sur des actes, non sur des paroles. Je voudrais interroger non pas le médecin, mais la ministre, la politique, sur un certain nombre de points qui me paraissent très confus.

Lors de son audition, M. Bourdillon a déclaré qu'il était nécessaire d'injecter de l'expertise dans l'Éprus au moment de son intégration à Santé publique France et qu'il y avait eu une mission d'information sur les stocks. Les conclusions de cette mission reprenaient le chiffre du milliard de masques nécessaires pour faire face à l'émergence d'une pandémie, mais, nous a-t-il expliqué, cette estimation passait à côté du changement de doctrine de 2013, distinguant les stocks de la population générale et ceux des établissements hospitaliers : l'expertise n'était donc pas adaptée. Quand on confie une expertise à quelqu'un sans lui dire que la doctrine a changé, cela pose question...

L'ancien directeur général de Santé publique France nous a également signalé qu'une expertise menée par son agence en 2018 avait montré l'inefficacité de certains masques commandés, concluant que le stock était alors retombé, mais que de nouveaux choix avaient été faits en faveur d'une évolution des commandes vers des stocks tournants, avec des stocks constants moins importants. Il a précisé que ces évolutions n'avaient fait l'objet d'une transmission ni à la ministre de la santé ni à son cabinet.

Quand avez-vous su qu'il ne restait plus que 99 millions de masques, puisque vous n'en avez pas été informée en 2018 à la suite de l'expertise demandée par Santé publique France elle-même?

M. Salomon nous a expliqué que ce n'est pas lui qui avait décidé du niveau du stock stratégique de masques. Il a précisé qu'il avait répondu à la lettre du 6 septembre dès le 30 octobre, avec pour instruction d'acquérir 50 millions de masques et 50 millions supplémentaires si le budget le permettait. Il a ajouté que vous n'avez eu connaissance ni de l'état du stock stratégique ni de ces courriers. Est-il normal que vous n'ayez pas été informée ?

De même, est-il normal que vous n'ayez pas été informée qu'aucune circulaire n'avait été envoyée aux hôpitaux sur le changement de doctrine ? Et donc qui fait la doctrine, si la ministre n'est même pas informée ? Estimez-vous que des sanctions auraient dû être prises ?

Le 26 janvier, vous avez dit en conférence de presse : nous avons des dizaines de millions de masques en stock en cas d'épidémie, ce sont des choses déjà programmées. D'où teniez-vous ces informations ?

Je redis mon trouble : un problème se pose sur le plan de l'organisation de l'État et de la mise en oeuvre d'une politique de santé publique. À l'Assemblée nationale, vous avez dit que l'absorption de l'Éprus par Santé publique France avait pu diluer les compétences de gestion de crise et réduire la réactivité et qu'il faudrait peut-être une agence dédiée aux crises en général. Quelle est votre position aujourd'hui ? N'estimez-vous pas que ces agences doivent rendre des comptes et que le ministre doive leur poser des questions ?

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