Si mon intuition était si prégnante, c'est aussi parce que, à un moment, je n'ai pas cru les chiffres chinois.
Le tournant, pour moi, fut le 24 janvier, avec les trois premiers cas français. Le premier malade a été découvert à Bordeaux : il s'agissait d'un négociant en vins qui avait fait le tour de la Chine et avait été à Wuhan les 13 et 14 janvier. À cette date, la Chine annonçait quarante cas. Or Wuhan est une ville de 11 millions d'habitants. Je me suis demandé : comment ce monsieur, qui n'a pas été au marché aux poissons et se trouvait à Wuhan à un moment où il y avait quarante cas, peut-il s'être infecté ? Je ne dis pas que les Chinois n'ont pas donné les bons chiffres, mais, pour moi, cela voulait dire que l'épidémie était bien plus importante, et qu'on voyait seulement la face émergée de l'iceberg.
Le 25 janvier au matin, cela a été le branle-bas de combat pour moi, parce que je venais de comprendre que ce qu'on nous disait n'était pas possible techniquement. C'est à ce moment que j'ai demandé à mon directeur de cabinet les remontées sur les stocks.