M. Vincent Delahaye demande qui nous prête. Comme nous levons 260 milliards d'euros de dettes sur les marchés, c'est une question essentielle. J'ajoute que, si nous voulons continuer à trouver des prêteurs, il vaut mieux leur garantir que nous leur rembourserons ce que nous leur empruntons ! C'est une évidence, mais elle n'est pas toujours partagée aujourd'hui, puisque certains pensent qu'il y aurait de l'argent magique, qui tomberait du ciel et n'aurait jamais à être remboursé... La dette française est détenue à 46 % par des résidents, parmi lesquels nous comptons la Banque de France et la Banque centrale européenne ainsi que les compagnies d'assurances françaises, soit 19 % de l'ensemble, et les banques françaises, qui représentent 6 % des investisseurs. La répartition entre investisseurs résidents et non-résidents est stable : il y a une très grande stabilité dans le financement de la dette française, ce qui est la preuve que cette dette est solide - et nous avons tout intérêt à ce qu'elle le demeure.
Les investisseurs non-résidents sont principalement des grandes banques centrales étrangères, à commencer par celles de la Chine, du Japon et de la Suisse, et des investisseurs institutionnels étrangers. Nous empruntons aussi à des banques européennes et à des assureurs européens et japonais, ainsi qu'à des fonds de pensions. Tous acteurs que je rencontre régulièrement lorsque je me rends à l'étranger, ce qui est malheureusement de moins en moins fréquent.
J'insiste : le financement de notre dette fait apparaître un équilibre entre investisseurs résidents et non-résidents. C'est un facteur de sécurité auquel nous sommes attachés.
Si les spreads restent stables grâce à l'action de la Banque centrale européenne, le ministre des finances que je suis ne prendrait pas la responsabilité de garantir aux Français que les taux d'intérêt demeureront toujours faibles dans les dix ou quinze ans qui viennent. C'est pourquoi, la crise passée, nous devrons rembourser cette dette : par la croissance, la responsabilité en matière de finances publiques et des réformes de structure - incluant, à mes yeux, la réforme des retraites.
Monsieur Savoldelli, Olivier Dussopt vous répondra sur les compensations prévues pour les collectivités territoriales, dont le milliard d'euros alloué à la DSIL - un effort non négligeable.
S'agissant de l'investissement des entreprises, il se maintient à un niveau satisfaisant compte tenu de la situation. Mais les marges sont évidemment dégradées. La baisse des impôts de production, celle de l'impôt sur les sociétés et le milliard d'euros consacré à la relocalisation doivent permettre de restaurer les marges des entreprises. C'est impératif, car, sans marges, pas d'investissement, et donc pas d'emploi. Si je suis aussi attaché à la réduction des impôts sur les entreprises, c'est parce que les marges de celles-ci font les emplois de nos compatriotes !
Monsieur Delcros, monsieur Laménie, Olivier Dussopt répondra à vos questions sur les collectivités territoriales.
Sylvie Vermeillet a soulevé la question, décisive, de la rapidité d'exécution. Oui, il est essentiel que les services déconcentrés se mobilisent pour la bonne exécution du plan de relance.
J'ai pris bonne note des critiques visant les appels à projets pour les relocalisations industrielles. Le président du Medef estime que les règles sont encore trop compliquées. On peut et on doit toujours faire mieux : je ne serai jamais satisfait, tant que mon pays n'aura pas retrouvé les niveaux de croissance et d'emploi auxquels il peut prétendre.
Si 375 projets ont été déposés dans les secteurs indiqués - automobile, aéronautique, secteurs critiques, dont le médicament, secteurs des territoires d'industrie -, il est vrai que nombre de PME ont rencontré des obstacles dans la formalisation de leur dossier. Ce n'est pas acceptable. Je vais regarder où sont les points de blocage, et nous simplifierons les appels à projets.
Depuis le départ, ma méthode est inchangée : proposer et exécuter vite, corriger au fur et à mesure. Si l'on attend d'avoir le produit parfait, on ne fait jamais rien !
M. Dallier a évoqué mon optimisme. Disons qu'il s'agit de volontarisme...
Ce qui compte, ce ne sont pas les taux de croissance de - 10 et + 8 %, c'est l'écart de production. Or les chiffres que je donne correspondent à un écart de 2,4 %, très inférieur aux 4 % que nous redoutions. L'objectif est d'arriver à un écart nul en 2022.
Bien entendu, je ne maîtrise absolument rien de la situation sanitaire. Une prolongation de l'épidémie au-delà du début de 2021 pourrait avoir des conséquences. Cela dépend aussi de chacun d'entre nous.
Monsieur Bascher, je vous remercie d'avoir insisté sur la visibilité, essentielle, en ce qui concerne la trajectoire des impôts. Assailli de propositions pour modifier les impôts dans tous les sens, plafonner, déplafonner, limiter, ouvrir, refermer ou simplifier le crédit d'impôt recherche, j'ai pris une grande décision : ne rien faire. Dans le fond, je pense que c'est la meilleure politique pour le crédit d'impôt recherche, parce qu'elle offre, au moins, de la stabilité et de la visibilité aux entreprises.