Intervention de Christian Cambon

Réunion du 14 octobre 2020 à 15h00
Code de la sécurité intérieure — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Christian CambonChristian Cambon :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a souhaité se saisir pour avis de ce projet de loi en raison de son article 2, qui proroge l’article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure relatif à la technique de renseignement dite « de l’algorithme ».

À travers mon intervention, je défends aussi la position de la délégation parlementaire au renseignement, la DPR, que j’ai eu l’honneur de présider l’an passé.

Nous sommes plusieurs dans cette enceinte à nous souvenir des débats nourris que nous avions eus, ici même, en 2015 lors de l’adoption de ce dispositif expérimental. Certains collègues souhaitent rouvrir ce débat aujourd’hui. Tel n’est pourtant pas le calendrier prévu.

Certes, dans une démocratie, il faut toujours garder le cap d’un équilibre entre l’efficacité de la lutte contre le terrorisme et la préservation des libertés publiques, mais, en l’espèce, le projet de loi que nous examinons ce jour ne pose aucune question nouvelle en matière de libertés publiques, comme l’a très bien exposé le rapporteur au fond, Marc-Philippe Daubresse.

Je voudrais brièvement rappeler les limites que le législateur a fixées en 2015 à cette technique, et les garanties qui en découlent.

Citons les principales. Premièrement, l’utilisation des algorithmes doit avoir un objet très ciblé, puisqu’il ne s’agit que de la lutte contre le terrorisme. Deuxièmement, un dispositif tout entier soumis au contrôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, la fameuse CNCTR, doit être mis en œuvre. Je rappelle l’importance du Parlement dans ce dispositif, puisque quatre des neuf membres de cette commission sont des parlementaires, et veux rendre hommage à notre ancien collègue Michel Boutant qui a réalisé un travail absolument extraordinaire en son sein. Troisièmement, l’algorithme ne traite que des données de connexion, et non les données de contenu. Du reste, nous avons abordé ce point dans le rapport de la DPR que je viens de remettre au Président de la République. Quatrièmement, ce dispositif produit des résultats anonymisés. Pour lever l’anonymat, les services de renseignement, en l’occurrence la DGSI ou la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), doivent faire une demande spécifique au Premier ministre, qui statue après avis de la CNCTR.

Naturellement, on peut comprendre que la nouveauté du dispositif ait suscité des craintes en 2015. On voit que la réalité est en fait beaucoup plus modeste. À vrai dire, l’enjeu opérationnel des trois algorithmes qui existent aujourd’hui est précisément de restreindre les résultats aux seuls éléments pertinents et utilisables. On est donc loin du contrôle de masse indiscriminé évoqué à l’époque.

Il me semble, enfin, que, lorsque nous légiférons sur ces questions, il nous faut garder à l’esprit le caractère encore récent de cette technique. De ce point de vue, l’essentiel du débat se situe au niveau non plus de l’analyse du dispositif actuel, mais plutôt de la question de sa pérennisation, et surtout de ses éventuels développements futurs. C’est sur ce dernier point que nous aurons sans doute d’importants débats de fond lorsque le projet de loi relatif au renseignement reviendra devant nous, dans quelques mois je l’espère, comme le Gouvernement s’y est engagé.

Dans ces conditions, la prorogation de l’autorisation d’un recours aux algorithmes n’appelle de notre part aucune appréciation contraire. Aussi, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable sur ce projet de loi.

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