Séance en hémicycle du 14 octobre 2020 à 15h00

Résumé de la séance

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  • technique
  • terrorisme

Sommaire

La séance

Source

La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mes chers collègues, afin de respecter les règles sanitaires, je vous rappelle que le port du masque est obligatoire dans l’enceinte du palais et qu’il vous est demandé de laisser un siège vide entre deux sièges occupés.

L’hémicycle fait bien sûr l’objet d’un nettoyage et d’une désinfection en profondeur chaque semaine, tandis que les micros sont chaque fois désinfectés.

Chacun veillera au respect des distances de sécurité. Les sorties de la salle des séances devront exclusivement s’effectuer par les portes situées au pourtour de l’hémicycle, à l’exception de celles des membres du Gouvernement, qui sortiront par le devant.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement – les premières depuis le renouvellement de notre assemblée.

La séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Chacun sera attentif à observer l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu’il s’agisse de celui du temps de parole ou de celui des uns et des autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour le groupe Union Centriste.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à vous, monsieur le Premier ministre.

À l’heure où le Président de la République s’apprête vraisemblablement à durcir les mesures sanitaires pour faire face à la deuxième vague de la covid-19, je voudrais surtout vous parler de leur impact social.

C’est un véritable drame que vivent des centaines de milliers de familles françaises : 715 000 emplois ont été détruits au premier semestre, et, d’ici à la fin de l’année, nous serons vraisemblablement non loin du million.

L’approche que nous avons eue de la pandémie fera sombrer de très nombreux ménages déjà précaires dans l’extrême pauvreté et les classes moyennes dans la précarité.

Le pays est inquiet, vous le savez. Votre tâche n’est pas facile, mais c’est vous qui êtes aux responsabilités. C’est bien pourquoi il ne faut pas seulement recalibrer le volet sanitaire ; nous vous invitons aussi à recalibrer le soutien à l’économie.

La deuxième vague de la pandémie impose d’accélérer en parallèle le plan de relance. Dès le mois de juillet dernier, le Sénat vous avait alerté sur la nécessité d’agir tout de suite, comme l’ont fait nos voisins allemands et anglais, mais le plan de relance n’a cessé d’être différé.

Lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative 2, il avait été annoncé que ces mesures seraient mises en œuvre dès le PLFR 3. À l’occasion de ce PLFR 3, il nous a été annoncé qu’elles le seraient dans un PLFR 4. Or ce PLFR 4 n’est jamais arrivé.

Le plan de relance est finalement porté par le budget pour 2021, donc concrètement différé au début de l’année prochaine. Cela va nous conduire à dégainer avec plusieurs mois de retard… Nos concitoyens ne peuvent pas attendre : de nombreux commerces, de nombreux artisans, des TPE, des PME ne tiendront pas encore trois mois. Des secteurs entiers se trouvent dans une extrême difficulté.

Dans ces conditions, monsieur le Premier ministre, allez-vous accélérer la mise en œuvre du plan de relance, et si oui, comment ?

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous me permettrez tout d’abord d’adresser, au nom du Gouvernement, mes plus sincères félicitations aux nouvelles sénatrices et aux nouveaux sénateurs qui ont rejoint, à la faveur du dernier scrutin, le Palais du Luxembourg.

Je voudrais également, monsieur le président, vous adresser mes félicitations personnelles pour votre brillante réélection à la tête de la Haute Assemblée.

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, UC et Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Monsieur le président Hervé Marseille, vous l’avez dit, la situation de notre pays est extrêmement difficile. La France, tout comme, vous le voyez bien, l’Europe entière, est confrontée à une deuxième vague de l’épidémie, désormais bien installée et forte.

Vous l’avez également souligné, elle va conduire le Gouvernement, dans la continuité des dispositions qu’il a prises, à adopter des mesures complémentaires pour faire face à cette situation. Vous avez raison, le Président de la République aura l’occasion d’y revenir dès ce soir.

Évidemment, je partage tout à fait votre point de vue selon lequel cette crise sanitaire et sa reprise ont des effets délétères, tant sur l’économie que sur la situation sociale de notre pays.

Vous m’interrogez sur les mesures que le Gouvernement a prises et va prendre sur ce registre.

Je me permets tout d’abord de vous indiquer ou de vous rappeler – la Haute Assemblée le sait bien, car nous avons déjà eu l’occasion d’aborder ce sujet au mois de juillet dernier, et un récent rapport vient de le confirmer – que la France a été l’un des tout premiers pays européens à engager des moyens – 470 milliards d’euros, très précisément – dès le début de la crise, pour faire face à ses conséquences économiques et sociales.

Ces sommes tout à fait considérables, qui n’ont d’ailleurs pas encore été toutes complètement dépensées, sont évidemment très utiles dans la période actuelle, et elles continueront à l’être.

Je me permets d’indiquer à la Haute Assemblée que les secteurs les plus touchés, en particulier – pour faire le lien direct avec les mesures à caractère sanitaire – tous les secteurs professionnels qui sont concernés par la mise en œuvre des mesures administratives qu’appelle la présente situation, font l’objet de mesures extrêmement précises relevant de la solidarité nationale, solidarité qui leur est due, car ils ne sont pour rien dans cette situation.

Ainsi, nous avons décidé non seulement, leur ai-je précisé, de reporter au moins jusqu’à la fin de la présente année civile les dates d’échéance des mesures mises en œuvre dans le cadre du fonds de solidarité – temps partiel, exonérations de charges –, mais encore, je le précise devant le Sénat, de renforcer le contenu et la portée de ces mesures. Et cela ne se limite pas au fonds de solidarité.

À cet égard, j’indique au Sénat que les ministres et moi-même ne cessons de discuter avec les représentants des secteurs professionnels concernés de la nature de ces mesures. Pour être très précis, il reste encore à traiter des sujets relatifs aux loyers et aux assurances, sur lesquels des progrès sont nécessaires.

S’agissant du reste de l’activité économique, je précise à la Haute Assemblée – c’est un élément essentiel de notre stratégie – que nous prenons et allons continuer à prendre les mesures de protection sanitaire que la situation exige. Mais notre objectif est, d’une part, que l’activité économique du pays se poursuive autant que possible – plus de 90 % des entreprises françaises fonctionnent à peu près normalement, monsieur le président, ce qui est heureux –, et, d’autre part, que les activités scolaires et éducatives au sens large se poursuivent, elles aussi, normalement. À l’exception de quelques clusters, c’est encore très largement le cas aujourd’hui.

Néanmoins, vous l’avez rappelé, la crise sanitaire a aussi un impact sur le reste de l’économie. Vous avez à juste titre souligné, d’une part, la montée des chiffres du chômage, et, d’autre part, les situations de pauvreté que cela génère, parce que, classiquement, dans une crise, ce sont toujours les plus vulnérables qui sont les premiers concernés.

Au-delà des mesures que j’ai indiquées et qui ont été prises dans le cadre des PLFR successifs que le Sénat a examinés, le plan de relance est en partie destiné à faire face à cette situation. À cet égard, je précise qu’il y aura bien un PLFR 4 !

Je veux insister sur un point : parmi les victimes de la crise actuelle, il y a les jeunes. J’indique à la Haute Assemblée que le volet « jeunes » du plan de relance – 6 milliards d’euros – est déjà entré en vigueur. En août et en septembre, les chiffres de l’apprentissage et de l’alternance, notamment, ont été très positifs : après un effondrement au premier semestre, ils ont augmenté de plus 9 % en août 2020 par rapport à août 2019. Les dispositifs spécifiques en direction des jeunes fonctionnent donc.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

M. Jean Castex, Premier ministre. S’agissant des plus démunis, et sans vouloir être trop long, je confirme que la situation est effectivement préoccupante. J’ai reçu personnellement l’ensemble des associations concernées et je leur ai dit que, samedi prochain, à l’occasion de la journée internationale de lutte contre la misère, après la concertation, j’annoncerai un certain nombre de mesures que les circonstances actuelles exigent.

Murmures sur les travées des groupes SER et CRCE.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, croyez bien que, particulièrement dans les difficultés actuelles traversées par notre pays, qui exigent plus que jamais rassemblement et sens des responsabilités, le Gouvernement tout entier, derrière le Président de la République, est mobilisé et déterminé.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Ma question s’adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Monsieur le ministre, en cette période de rebond de pandémie de la covid-19, notre système de santé est de nouveau sous tension. Tous les voyants sont au rouge. Vous assurez maîtriser la situation. Le Président de la République va faire des annonces ce soir, orientées visiblement vers de nouvelles restrictions de libertés, mais ce n’est pas la solution.

Vous n’avez pas tiré les leçons de la première vague, et de nouveau les hôpitaux sont saturés. Les personnels soignants crient leur inquiétude et leur colère. Ils sont épuisés, démunis, sous-payés, avec des directions de plus en plus autoritaires, et on leur demande de faire face de nouveau.

Cette fois, la pandémie se répand partout sur le territoire ; cette fois, il n’y aura pas de renforts de personnels pour aller au secours de telle ou telle région débordée. Et l’hôpital n’a toujours pas les moyens nécessaires pour faire face de nouveau à un manque insupportable de lits et de personnels. Quant à la médecine de ville, elle est aussi en difficulté.

Aussi, ma question est simple, monsieur le ministre : que dites-vous aux personnels hospitaliers qui seront dans la rue demain pour dire que le Ségur ne fait pas le compte ? Que dites-vous à toutes celles et à tous ceux qui démissionnent, des chefs de service – je pense notamment au docteur Maurice Raphaël, chef des urgences de l’hôpital Bicêtre depuis dix ans –, jusqu’aux infirmières et aux aides-soignantes ?

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, voici ce que je dis, comme ministre des solidarités et de la santé, aux soignants : « Tenez bon, on est avec vous, merci pour votre action, on y arrivera ! »

Protestations sur les travées des groupes CRCE et Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Madame la sénatrice, à entendre le début de votre question, je me suis presque demandé si l’on parlait bien d’une épidémie causée par un virus circulant en France, en Europe et dans le reste du monde, qui a mis à plat les trois quarts de la planète pendant des mois durant…

À entendre votre question, je me suis demandé si, finalement, vous ne pointiez pas, dans la situation sanitaire que nous connaissons, une responsabilité qui ne serait pas d’origine virale ou naturelle. Tel n’était évidemment pas le cas, madame la sénatrice, mais je tenais tout de même à vous le faire préciser.

Madame la sénatrice, dans quelques jours, dans quelques semaines, vous voterez – je l’espère – un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui porte en lui-même le renouveau de l’hôpital public : création de 4 000 lits – alors que, jusqu’à présent, on en fermait des milliers tous les ans –, embauche de 15 000 soignants à l’hôpital – alors que cela fait des années que la masse salariale n’était plus adaptée à la charge de travail –, sortie de la tarification à l’activité pour aller vers une dotation populationnelle, changements des règles de gouvernance internes aux établissements de santé, pour permettre une meilleure représentativité des professionnels de santé en leur sein, enfin – j’allais oublier, pardon ! – quelque 8, 8 milliards d’euros de revalorisation annuelle des salaires pour 1, 6 million de salariés du soin à l’hôpital et en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, dont 85 % sont des femmes.

Mme Patricia Schillinger applaudit.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Madame la sénatrice, vous allez ainsi avoir la possibilité de voter – j’espère que vous le ferez – la plus forte réduction en une seule fois de l’écart salarial entre les hommes et les femmes dans l’histoire de notre pays – 8, 8 milliards d’euros !

Madame la sénatrice, tous les personnels soignants de l’hôpital, et même les personnels non soignants, ont déjà touché 90 euros net par mois de plus, ce qui n’est pas rien.

Dans quelques mois, en mars au plus tard, ils percevront 93 euros net de plus par mois. Grâce à un travail sur les grilles salariales, ils toucheront également en moyenne 35 euros de plus par mois. Au travers de l’engagement collectif de ses membres, l’aide-soignante, au sein d’une équipe, bénéficiera d’une revalorisation identique, relativement, à celle du médecin.

Madame la sénatrice, je respecte profondément le dialogue social dans notre pays. Vous avez indiqué que des syndicats appelaient à la grève. Dont acte ! Mais, sans vous faire affront, je vous rappellerai qu’une majorité de ces syndicats a signé les accords du Ségur – je tiens la liste à votre disposition – et en assure la promotion, parce que ces accords sont bons et apportent au problème de l’attractivité de l’hôpital une solution non pas instantanée, mais durable, nécessaire, efficace et qui était devenue urgente.

Encore une fois, je remercie les soignants et je leur dis de tenir bon. Je crois que, de notre part, c’est aussi cela qu’ils ont envie d’entendre.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Loïc Hervé applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Rassurez-vous, monsieur le ministre, nous n’avons pas oublié qu’il y avait un virus, qui représente un défi important ! Mais vous continuez à ne pas entendre les personnels.

Effectivement, ils se sont battus et ils ont obtenu des augmentations de salaire. Mais ce qu’ils demandent, c’est 300 euros par mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Aujourd’hui, des soignants continuent à démissionner parce qu’ils ne sont pas respectés. Il ne suffit pas de leur dire « tenez bon » ; il faut en finir avec les cadences infernales à l’hôpital, avec le travail sans discontinuer. « On manque de personnels, on manque de lits ! » : voilà ce que nous disent les personnels, et vous ne voulez pas les entendre.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 prévoit encore près de 1 milliard d’euros d’économies. Vous continuez à faire des choix qui étranglent l’hôpital et qui mettent à genoux la médecine de ville. Ce n’est pas ce qu’attendent les personnels.

Effectivement, monsieur le ministre, si vous ne voulez pas les entendre dans la rue

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Mme Laurence Cohen. … vous vous exposerez à répondre de l’accusation de non-assistance à personnels en danger !

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SER et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Bernard Buis, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Buis

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Monsieur le ministre, il n’est pas besoin de rappeler ici la longue histoire d’amitié qui unit la France et l’Arménie et l’affection que nous portons à nos amis arméniens.

De nombreuses villes de mon département, la Drôme, mais aussi du Rhône, de l’Isère et des régions parisienne et marseillaise ont tissé des liens étroits avec le Haut-Karabakh, en raison des liens de fraternité entre Français et Arméniens. Une belle illustration en est la signature d’une charte d’amitié entre le département de la Drôme et le Haut-Karabakh en 2015.

Le 27 septembre 2020, nous avons assisté impuissants à l’entrée en conflit de l’Azerbaïdjan contre les Arméniens du Haut-Karabakh.

Cette offensive militaire est venue brutalement raviver le « conflit gelé » autour de ce territoire, qui bénéficiait, depuis l’accord de cessez-le-feu de 1994, d’une relative stabilité, certes marquée par des épisodes de tension.

Aujourd’hui, avec la nouvelle violation de ce cessez-le-feu, notre inquiétude est grande. Nous constatons des affrontements d’une extraordinaire violence, qui se développent non seulement le long de la ligne de front, mais aussi dans nos villes amies : Stepanakert – amie avec la ville de Valence –, Chouchi, Martuni. Les premières victimes en sont les populations civiles, des familles arméniennes que nous connaissons bien.

Je sais, monsieur le ministre, que, dans le cadre du groupe de Minsk, vous ne ménagez pas vos efforts pour résoudre ce conflit et pour aboutir à une solution garantissant la paix et la sécurité des populations civiles.

Toutefois, notre préoccupation est vive quand nous voyons que le cessez-le-feu humanitaire négocié samedi dernier peine, lui aussi, à être respecté.

Dans de nombreuses villes de France, et hier soir à Paris, nous avons affirmé, nombreux, notre entier soutien au peuple arménien et karabahiote, ainsi que notre indéfectible amitié.

Monsieur le ministre, que peut faire la France pour arrêter cette offensive de l’Azerbaïdjan, qui est meurtrière pour les populations civiles d’Artsakh ? Je vous remercie par avance de votre réponse.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian

Monsieur le sénateur Bernard Buis, dans cette affaire grave, il y a, pour la France, une urgence, un devoir et une exigence.

Une urgence, parce que l’escalade qui se poursuit entraîne de nouvelles victimes, particulièrement des victimes civiles. Cette situation suscite une émotion légitime, en particulier en France, du fait de la proximité des liens humains, des liens culturels, des liens historiques qui nous lient à l’Arménie. Vous avez fait part de cette émotion, que je comprends et que je partage.

Cette émotion, elle justifie que nous accentuions encore nos efforts pour faire accepter l’arrangement qui est intervenu samedi à Moscou, en notre présence, pour aboutir à un cessez-le-feu. Il y a urgence, parce que les ingérences étrangères, en particulier celle de la Turquie, alimentent cette escalade. Elles ne sont pas acceptables.

Il y a aussi un devoir, celui du mandat que nous a confié l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l’OSCE, dans le cadre du groupe de Minsk, que vous avez cité et que nous coprésidons avec la Russie et les États-Unis. Nos efforts se poursuivent en permanence, y compris, monsieur le sénateur, en ce moment même à Erevan et à Bakou.

Il y a enfin une exigence, mesdames, messieurs les sénateurs, celle de l’impartialité. En effet, c’est la condition de notre crédibilité de médiateur.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Et à ceux qui souhaitent voir la France y renoncer, je dis que l’amitié qui nous lie à l’Arménie, au peuple arménien, serait mal servie si nous renoncions à ce rôle d’équilibre, car perdre notre impartialité, ce serait aussi laisser la porte ouverte à un rôle plus direct de la Turquie dans le règlement de la crise. Or il n’est pas possible qu’un pays puisse être à la fois protagoniste d’un conflit et partie prenante de son règlement.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, la crise que nous sommes en train de vivre est grave. Elle sera longue et elle affecte déjà fortement, vous le savez, la vie de nombre de nos concitoyens.

Ce constat, nous le faisons collectivement depuis de nombreux mois, et il vient malheureusement d’être confirmé par ce chiffre dramatique : la crise sanitaire, mes chers collègues, a fait basculer 1 million de Français dans la pauvreté. Ils rejoignent les 9 millions de nos concitoyens qui vivaient déjà sous le seuil de pauvreté.

Dans le même temps, un rapport de France Stratégie nous informe que la suppression de l’impôt sur la fortune et l’instauration de la flat tax au début du quinquennat ont eu pour effet de faire fortement augmenter les revenus des 0, 1 % des Français les plus aisés, tandis que la distribution de dividendes, de plus en plus ciblée, a explosé.

Cette concentration du capital n’est pas acceptable. Elle l’est encore moins quand tant de Français sont dans la souffrance.

Votre politique aggrave les inégalités sociales et territoriales. Vous auriez dû agir ; il est trop tard. Je vous demande donc de réagir.

Ainsi, je fais un rêve : celui d’un gouvernement capable de revenir sur ses erreurs, de supprimer son bouclier fiscal, devenu un tremplin fiscal, et de penser à de nouvelles ressources liées à la taxation du capital ; celui d’un gouvernement qui ouvre le revenu minimum aux jeunes pour les empêcher de sombrer ; celui d’un gouvernement qui abroge sa réforme de l’aide personnalisée au logement, l’APL, qui revalorise le point d’indice pour les agents de la fonction publique et qui donne un coup de pouce au SMIC.

En somme, je fais le rêve d’un gouvernement qui lutte enfin contre les inégalités, qui dégrippe l’ascenseur social et qui empêche de nouvelles catégories de la population de tomber dans la précarité.

Monsieur le Premier ministre, la réalité est là, sous vos yeux, sous nos yeux, tragique. Allez-vous la prendre en compte et enfin changer de cap ?

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président Patrick Kanner, je voudrais rappeler à la Haute Assemblée que, contrairement à vos affirmations, avant la survenue de la crise sanitaire, grâce à la politique que nous avons conduite, inverse de celle que vous préconisez, notamment grâce à une baisse des impôts, la croissance en France était l’une des meilleures de l’Union européenne, …

Debut de section - Permalien
Jean Castex

… le niveau de chômage était également l’un des plus satisfaisants, tandis que les investissements étrangers n’avaient jamais été aussi nombreux depuis dix ans.

Bref, cher président Kanner, des résultats économiques nettement supérieurs à ceux que vous aviez enregistrés à la fin du précédent quinquennat !

Vives protestations sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

M. Philippe Dallier. Ce n’était pas difficile !

Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Je le rappelle, depuis la survenue de la crise sanitaire, nous assistons effectivement, et malheureusement, ici comme ailleurs, à une forte dégradation et des chiffres du chômage et, hélas, de ceux de la pauvreté.

Je rappelle au Sénat que notre système de protection sociale présente heureusement des amortisseurs – soyons-en fiers ! –, qui, si nous établissons une comparaison avec des pays étrangers et proches, ont permis de faire face mieux qu’ailleurs à cette dégradation.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

M. Jean Castex, Premier ministre. Contrairement à ce que vous dites, nous ne sommes pas du tout restés inactifs à l’endroit de ces populations depuis le début de la crise : je vous rappelle que plus de 2 milliards d’euros – vous en avez débattu dans cette assemblée à l’occasion des PLFR successifs – ont été débloqués à destination de ces publics.

Mme Cécile Cukierman s ’ exclame.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Une aide exceptionnelle de solidarité a été versée le 15 mai dernier à 4, 1 millions de foyers en difficulté, tandis que, au mois de juin, 200 euros ont été versés à 800 000 jeunes en difficulté, pour un total de 160 millions d’euros.

Mon gouvernement a revalorisé d’un peu plus de 100 euros l’allocation de rentrée scolaire, cependant que le plan de relance comprend des mesures de soutien aux associations de lutte contre la pauvreté et prévoit 100 millions d’euros également pour renforcer l’hébergement des plus démunis.

Comme je l’ai indiqué tout à l’heure au président Marseille, nous ajusterons nos moyens pour tenir compte de la deuxième vague épidémique et de ses conséquences sociales.

Nous menons aussi une politique de fond. Je vous le dis, nous ne souhaitons pas instaurer un revenu de solidarité active, ou RSA, jeune.

L’objectif de fond du Gouvernement, c’est de faire face aux problèmes que rencontrent les plus démunis dans la crise. Cette réponse sera à la hauteur, mais elle n’invalide pas notre politique de fond, qui, plutôt que d’installer des gens dans les allocations, vise à les insérer par le travail, par l’activité économique, par le logement, par la santé. Là encore, les moyens affectés à ces politiques seront augmentés.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

M. Patrick Kanner . Monsieur le Premier ministre, votre réponse ne définit pas une politique, c’est un slogan ! J’ai le sentiment que, quand les Français tombent, les plus riches de nos concitoyens peuvent dormir tranquillement : le Gouvernement veille sur eux.

Marques de désapprobation sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Je le regrette. Aujourd’hui, ce qu’il nous faut, ce n’est pas de l’égalité, c’est de l’équité : demander un effort supplémentaire à ceux qui ont tant obtenu depuis le début de ce quinquennat n’aurait pas été scandaleux. Vous vous y refusez : je tiens à vous dire que les Français sauront vous juger.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je voudrais saluer nos collègues qui ont accepté de prendre place dans les tribunes du public et les remercier de leur présence.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Henri Cabanel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Cabanel

Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé et de la solidarité.

Dès le mois de juillet, tout le monde s’accordait à dire que nous allions vivre une nouvelle vague de l’épidémie. Ça y est, nous y sommes !

La métropole de Montpellier, dans mon département, vient de rejoindre la liste des territoires en alerte maximale Covid. Pour les populations, cela signifie une série de mesures que nombre de nos concitoyens ont du mal à comprendre. Ils se sentent parfois frustrés par des règles difficiles à appliquer et par les volte-face de certaines annonces. Ainsi, pourquoi fermer les bars alors que les restaurants sont ouverts, même lorsqu’ils ne servent pas à manger ?

Pourquoi, surtout, nous trouvons-nous confrontés, huit mois après la première crise, à une pénurie de lits de réanimation, dont le nombre est loin des 12 000 lits prévus ? S’agit-il d’un manque de moyens financiers ou de personnel compétent ? Pourquoi ne pas avoir pensé à une stratégie d’urgence ?

J’ai conscience que la situation n’est pas facile, mais les Français ne comprennent pas. Il faut leur expliquer simplement. À la crise sanitaire, on répond par des mesures liberticides, mais on ne traite pas la problématique des moyens de l’hôpital public. Pour ma part, je suis pragmatique : quand un tuyau a trop de pression et risque de céder, on ne coupe pas l’eau, on installe un tuyau plus gros !

Sur le terrain, certains médecins généralistes se plaignent du manque de communication et de cohérence avec les hôpitaux. Ils craignent des retards dans la prise en charge des autres pathologies. Ils subissent aussi une surcharge de travail administratif pour traiter les arrêts de travail, malgré le contact tracing et le site dédié, dont certains d’entre eux ne savent pas se servir. Qu’avez-vous prévu à ce sujet ?

Tout cela provoque une véritable inquiétude face à l’épuisement, voire au burn-out de certains personnels. Quelles mesures allez-vous prendre pour soulager les soignants, qu’ils soient sur le terrain ou dans les établissements ? Vous avez raison de penser à eux, nous y pensons aussi, mais je crains que cela ne suffise pas.

Applaudissement sur les travées du groupe RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question.

Votre première phrase était : « Dès le mois de juillet, tout le monde s’accordait à dire que nous allions vivre une nouvelle vague de l’épidémie »… Nous n’avons clairement pas vécu le même été !

Lorsque l’alerte a été lancée, parce que le virus recommençait à circuler au mois d’août chez les jeunes dans certaines villes du Sud, je n’ai pas entendu beaucoup de réactions indiquant que l’épidémie risquait de repartir et évoquant le risque d’une deuxième vague.

J’ai entendu de pseudo-experts – je ne parle pas des politiques – se succéder pour affirmer que ce ne serait pas le cas, puisque le virus avait forcément muté pour être moins méchant. Je les ai entendus dire : « Regardez, il n’y a pas encore d’hospitalisations, c’est le signe qu’il n’y a pas de deuxième vague ! » Nous avons eu beau expliquer qu’un décalage d’un mois se produisait entre les contaminations et les hospitalisations, décalage qui s’allongeait quand la population contaminée était jeune, il y a eu, il me semble, un déni ou un refus de voir les choses.

Peut-être n’avons-nous pas été suffisamment convaincants ? Je veux bien en prendre ma part, mais on ne peut certainement pas dire que, dès le mois de juillet, les Français considéraient qu’il y aurait une deuxième vague.

Monsieur le sénateur, vous me demandez pourquoi nous n’avons pas augmenté le nombre de lits de réanimation. Mais cela ne se fait pas tout seul ! Un anesthésiste-réanimateur, cela ne se clone pas ; cela se forme en dix à douze ans, et nous avons supprimé le numerus clausus, il y a deux ans, pour augmenter le nombre de médecins. Vous et moi ne sommes pas responsables de l’état de la démographie médicale, mais c’est un fait.

En revanche, nous avons formé du personnel pour qu’il puisse aider en réanimation. Rien qu’en Île-de-France, ces derniers mois, 750 infirmières sont venues en service de réanimation ou en apprentissage par simulation, pour prêter main-forte à leurs collègues si la situation l’exigeait.

Hélas, on ne trouve pas des aides-soignantes ou des infirmières performantes en réanimation en claquant des doigts !

S’agissant des lits de réanimation, monsieur le sénateur, nous sommes montés au 15 avril dernier à 10 700 lits armés capables d’accueillir des malades du covid, lesquels étaient alors 8 500, les autres souffrant d’autres pathologies. Nous sommes donc capables de mobiliser des lits, de transformer des blocs opératoires, de préparer des soins continus et vigilants, mais cela nécessite de déprogrammer massivement les soins et de recruter tout le personnel disponible, au détriment des autres malades, ce que nous nous refaisons à faire.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Vous parlez de petits ou de gros tuyaux, mais si nous laissions le tuyau grossir pour agir, nous aurions beaucoup plus de morts. Il faut vraiment comprendre cela : notre logique est non pas de remplir les services de réanimation, mais d’empêcher les gens de mourir.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Pour cela, il ne faut pas qu’il y ait de formes graves. Il faut donc lutter avec efficacité contre la diffusion du virus, y compris quand cela va, hélas, à l’encontre de certaines libertés de circulation. C’est vital pour les Français !

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Pardonnez-moi, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je demande à chacun de respecter son temps de parole !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Pour faire face à une crise économique, sociale et climatique d’une ampleur sans précédent, l’Union européenne a adopté un plan de relance historique de 750 milliards d’euros. Malheureusement, en contrepartie, le cadre budgétaire 2021-2027 est revu à la baisse. Déshabiller Paul pour habiller Jacques n’a jamais fait une politique ambitieuse !

Pour financer la relance européenne, il faut, au contraire, renforcer les ressources propres de l’Union. Dans sa résolution du 16 septembre dernier, sur l’initiative, notamment, des écologistes, le Parlement européen a proposé des solutions clés en main : une taxe plastique, une taxe carbone aux frontières, une indispensable taxe sur les Gafam – pour Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft – et, surtout, une taxe sur les transactions financières, ou TTF, digne de ce nom, à même de rapporter plus de 50 milliards d’euros par an.

Faire contribuer à l’effort les pollueurs, les multinationales qui se soustraient à l’impôt et la finance débridée, quoi de plus juste ? On se demande vraiment pourquoi rien ne bouge depuis des décennies.

Il faut dire que la France, qui a longtemps porté la TTF, n’a jamais été au rendez-vous de son histoire. En 2014, c’est Pierre Moscovici qui torpillait le projet proposé par une Commission de droite, pour défendre le seul intérêt des grandes banques françaises.

L’actuel président de la République n’a pas fait mieux. Il a d’abord refusé l’élargissement de la TTF française, avant de plaider pour une TTF européenne a minima, en prenant modèle sur celle du Royaume-Uni – un simple impôt boursier. Depuis lors, rien ou presque, si ce n’est ce projet d’une microtaxe de 0, 2 % sur le prix d’achat des actions, qui rapporte seulement 3, 5 milliards d’euros par an, soit dix fois moins que le projet de 2013.

Monsieur le Premier ministre, lors du Conseil de demain, le Président de la République va-t-il tout faire pour obtenir des ressources propres ambitieuses, dont la TTF, ou va-t-il se contenter de mots, au détriment de l’intérêt général européen ?

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Monsieur le sénateur, je vous surprendrais si je vous disais que j’étais d’accord avec vos observations et votre question… Quoique ! En effet, au sein de l’Union européenne, la France, par la voix du Président de la République et du ministre ici présent, plaide inlassablement, j’y insiste, pour une taxe sur les transactions financières décidée au niveau européen, et elle va continuer à le faire.

Ai-je besoin de rappeler au Sénat qu’il en existe déjà une à l’échelon national depuis 2012, mais que, comme chacun le comprendra, compte tenu de l’objet même de ce prélèvement, c’est le niveau européen qui est le plus approprié.

En matière fiscale, toutefois, vous le savez tous également, c’est l’unanimité entre les États membres qui prévaut s’agissant du processus décisionnel. Cette donnée n’a pas découragé la France, qui a été, je vous le rappelle, à l’initiative de la relance des négociations sur la taxe sur les transactions financières européennes, lesquelles négociations avaient effectivement été interrompues sous le précédent quinquennat.

Le Président de la République en a rappelé les principes dans son discours sur l’Europe prononcé le 26 septembre 2017 à la Sorbonne, et, depuis lors, des négociations en ce sens se déroulent au sein de l’Union européenne sur l’initiative de la République française. Elles sont difficiles, pour les raisons que vous avez indiquées, mais la France ne baisse pas la garde et la volonté du Président de la République est toujours pleine et entière.

Il en ira de même sur un autre sujet que vous avez évoqué et qui figure dans les objectifs de transition écologique, portés, notamment, par le plan de relance : la taxation du carbone aux frontières extérieures de l’Europe. Sur ce point également, je vous rappelle que les propositions de la France sont parmi les plus audacieuses.

Enfin, je termine par où vous avez commencé, monsieur le sénateur, en appelant une nouvelle fois l’attention du Sénat sur le fait que, à la différence de la crise de 2008-2010, que j’ai bien connue, l’Europe s’est fortement mobilisée – Dieu sait combien c’est compliqué, on le voit encore aujourd’hui ! –, avec un plan de relance européen et une contribution aux plans de relance nationaux à hauteur de 40 %, ce qui est considérable.

Vous connaissez les difficultés rencontrées parce que l’Europe est une union d’États et que l’on ne peut pas décider unilatéralement. Il faut donc encore plus de force de conviction et de volonté, comme en ont eu le Président de la République et la Chancelière allemande pour aboutir à l’accord historique de cet été.

J’en conviens bien volontiers, il y a encore beaucoup de travail à faire en la matière, mais, là encore, ne doutez ni de notre détermination ni de la volonté de la France à porter dans le concert européen ce qui relève finalement de l’intérêt de nos concitoyens.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

M. Guillaume Gontard . Monsieur le Premier ministre, nous resterons attentifs. Nous espérons que, pour une fois, vos actes rencontreront vos discours !

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, qui s’exprime pour la première fois dans notre assemblée, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.

Debut de section - PermalienPhoto de Vanina Paoli-Gagin

Ma question s’adresse à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Madame la ministre, il est des lois dont les effets indésirables se font sentir régulièrement, voire s’intensifient dans la durée. Le précédent quinquennat en a produit un certain nombre, opérant, notamment, des transferts de compétence entre les collectivités territoriales.

Les élus locaux ne sont pas près de les oublier : en fait, ils peinent encore à s’en remettre. J’ai à l’esprit, en particulier, les élus fraîchement arrivés aux responsabilités, en juillet dernier, qui doivent gérer de front l’application des consignes sanitaires et celle des lois votées lors du précédent quinquennat.

Deux cas de figure ont été très présents au cours de cette campagne sénatoriale.

Le premier résulte de la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, laquelle prévoit que les communautés de communes et les intercommunalités non encore compétentes en matière de plan local d’urbanisme intercommunal, ou PLUI, au 31 décembre 2020 le deviendront de plein droit au 1er janvier 2021, sauf à ce qu’un nombre significatif de communes s’y opposent au cours des trois mois précédents. Je vous rassure, nous sommes bien en France !

Sourires sur les travées du groupe INDEP.

Debut de section - PermalienPhoto de Vanina Paoli-Gagin

Le second effet provient de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, qui obligeait à un transfert des compétences eau et assainissement des communes aux agglomérations. Certes, depuis lors, la loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dite loi Engagement et proximité, a apporté un correctif en permettant aux communautés d’agglomération de déléguer, dans un certain délai, tout ou partie de leurs compétences aux communes ou aux syndicats. Or, là encore, ce délai expire au 31 décembre prochain.

Ce sont deux exemples d’un même problème : les élus locaux n’ont pas eu de temps à consacrer à ces questions, lesquelles concernent pourtant des éléments structurants, dont les implications sont très lourdes pour l’avenir des collectivités et des citoyens.

Madame la ministre, le Gouvernement peut-il permettre aux élus, de l’Aube et d’ailleurs, de prendre leurs décisions de façon libre et éclairée ? Un report de ces deux échéances vous paraît-il envisageable ?

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Madame la sénatrice, comme vous l’indiquez vous-même, la loi Engagement et proximité a répondu à certaines questions.

Nous avons notamment assoupli et adapté les modalités de transfert en matière d’eau et d’assainissement. Les intercommunalités peuvent désormais déléguer leur compétence aux communes, et cela sans délai : il n’y a pas de date barrière.

Je précise, par ailleurs, que les communes peuvent elles-mêmes faire une demande de délégation. Dans cette hypothèse, l’intercommunalité a trois mois pour se prononcer.

S’agissant du transfert de la compétence PLUI, les établissements publics de coopération intercommunale, ou EPCI, deviennent compétents de plein droit au 1er janvier de l’année suivant le renouvellement des conseils municipaux et communautaires, sauf si une minorité de blocage a été réunie.

Avec la crise sanitaire et le décalage des élections, ce délai a été mécaniquement raccourci, je vous l’accorde. Or je partage l’idée que, pour faire valoir, ou non, son opposition à un transfert, une commune doit disposer de suffisamment de temps pour échanger avec son EPCI.

À titre exceptionnel, du fait de la situation sanitaire, il pourrait être envisagé, en matière de PLUI, d’étudier la faisabilité d’un tel report. Françoise Gatel m’en a d’ailleurs déjà parlé il y a quelques jours.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ma question s’adresse à M. le Premier ministre et porte sur la Nouvelle-Calédonie.

Le 4 octobre dernier, les Calédoniens ont de nouveau rejeté l’indépendance à l’occasion du second référendum ; il va y en avoir un troisième.

Le premier effet de ces référendums est de cristalliser les clivages entre les communautés et les provinces de Nouvelle-Calédonie, alors que, pendant ce temps, aucune perspective n’est ouverte.

Il me semble que le Gouvernement confond trop facilement impartialité et indifférence à l’avenir de ce territoire. Il ne s’engage pas. Il ne joue pas son rôle d’arbitre, ne contribue pas, avec les parties calédoniennes, à définir des perspectives allant au-delà de ces référendums à répétition. Avec les accords de Nouméa, nous avons connu une période de plus de vingt ans durant laquelle on pouvait construire. Que peut-on construire aujourd’hui, alors que chacun retient son souffle ?

La question que je veux vous poser, monsieur le Premier ministre, est la suivante : le Gouvernement va-t-il enfin s’engager à jouer pleinement son rôle pour fédérer les énergies calédoniennes, afin de définir un avenir qui dépasse l’échéance d’un éventuel prochain référendum inscrit dans la loi organique ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le questeur Philippe Bas – je vous salue dans vos nouvelles fonctions –, je pourrais me contenter de vous indiquer que la réponse à votre question est clairement positive.

Je ne suis pas responsable des vingt dernières années, mais vous me permettrez de douter que les gouvernements précédents aient jamais renoncé à cette ambition, comme vous le sous-entendez. En tout état de cause, j’atteste devant vous que mon prédécesseur, Édouard Philippe, qui s’est pleinement engagé sur ce sujet, l’avait faite sienne. Croyez-le bien, je vais continuer dans cette voie.

Simplement, pour lever toute ambiguïté – parfois méchamment entretenue –, les accords de Matignon, puis de Nouméa, étaient parfaitement clairs : ils prévoyaient l’organisation de scrutins référendaires. On peut le regretter. Vous indiquez que ces scrutins, comme toute élection, peuvent diviser. Dont acte ! Ils représentent toutefois aussi l’expression de la voix démocratique ; on peut considérer qu’elle divise, mais il ne paraît pas souhaitable pour autant d’y renoncer.

Je rappelle que ces accords prévoyaient que, pour l’organisation de ces scrutins, l’État – ce sont mes prédécesseurs qui ont signé cette clause – s’engageait à une stricte neutralité, tant dans la campagne électorale que dans l’organisation du scrutin. C’était notre première mission dans ce deuxième référendum, et nous y avons veillé scrupuleusement.

D’ailleurs, de l’avis de tous, des électeurs, premiers intéressés, mais aussi des observateurs – partis politiques, pays voisins, ONU… – ou de la commission de contrôle ad hoc constituée, ce scrutin s’est déroulé dans des conditions démocratiques incontestables, avec un taux de participation de 86 % – cela fait rêver ! –, malgré la covid, qui a également touché ce territoire. Il faut nous en féliciter !

Pour la deuxième fois, les électeurs ont répondu non à l’indépendance, certes avec un score un peu plus serré que la fois précédente – très précisément, 53, 26 % contre 46, 74 % pour le oui –, mais le choix de rester dans la communauté nationale est clair et désormais réitéré.

Je le dis devant le Sénat : le Gouvernement accueille ce choix de nos compatriotes calédoniens, à plus de 16 000 kilomètres, comme une marque de confiance dans la République et comme un motif de fierté pour ce qu’elle représente.

Ce score est néanmoins serré, c’est tout à fait exact, et nous l’envisageons donc également avec beaucoup d’humilité. Le scrutin passé, et avec lui les obligations que celui-ci, au terme des accords, faisait peser sur l’État, nous allons bien entendu reprendre l’initiative.

Cela passe, comme toujours, par le respect de tous et de chacun, ainsi que par le dialogue. Dès cette semaine, à ma demande et en accord avec le Président de la République, le ministre chargé des outre-mer, Sébastien Lecornu, est parti pour le Caillou, où il va rester un certain temps, pour reprendre le fil du dialogue et examiner les voies du développement de la Nouvelle-Calédonie.

Ce n’est, vous le savez, qu’à partir d’avril prochain que le Congrès pourra réclamer officiellement l’organisation d’un troisième référendum. Au retour du ministre, je reprendrai moi-même l’initiative, puisque, comme cette assemblée n’est pas sans le savoir, depuis l’époque où Michel Rocard était Premier ministre, c’est l’hôtel Matignon qui a pour mission d’organiser les discussions sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie.

Nous le ferons sans tabou

M. Mathieu Darnaud s ’ exclame.

Debut de section - Permalien
Jean Castex

, en exposant bien les conséquences réelles de l’indépendance comme du maintien dans la République, ainsi les conditions concrètes de cette dernière issue, qui est, bien entendu, celle que nous souhaitons.

M. François Patriat applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas . Monsieur le Premier ministre, je ne suis pas convaincu que vous soyez actuellement porteur d’une vision d’avenir pour la Nouvelle-Calédonie qui dépasserait l’échéance d’un éventuel troisième référendum…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ce butoir que nous avons face à nous n’est en effet pas la fin de l’Histoire, et il faut d’ores et déjà que l’État soit capable, comme le demande avec insistance notre collègue Pierre Frogier, que vous gagneriez à écouter davantage et qui est l’un des signataires des accords de Nouméa, de dessiner un avenir et d’ouvrir des perspectives.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas. Vous ne pouvez pas rester simple spectateur à l’abri de la neutralité dont vous devez faire preuve dans le processus électoral. Vous êtes responsable, vous ne pouvez pas rester indifférent. Réunissez à Paris les Calédoniens et donnez-leur des perspectives !

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Loïc Hervé applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Serge Babary, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Babary

M. Serge Babary. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.

« Il n ’ est pas là ! » sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Babary

Le groupe Veolia, leader mondial des services de gestion de l’eau, des déchets et de l’énergie, s’est lancé dans une opération agressive de rachat de son grand rival français, Suez. Après deux tentatives sans lendemain en 2006 et 2012, le groupe Engie a accepté de vendre à Veolia ses parts de Suez.

Cette initiative hostile interroge, d’abord parce que l’argument qui consiste à vanter la création d’un géant mondial est très relatif : réunies, les deux entreprises représenteront moins de 5 % du marché mondial. La France a deux grands groupes sur ce marché ; demain, elle n’en aura plus qu’un. L’opération pourrait s’apparenter davantage au dépeçage d’une entreprise qu’à l’addition de deux groupes.

Ensuite, le bénéfice en matière d’emplois d’une telle évolution est difficile à percevoir. Quel sort réservera Veolia aux 30 000 collaborateurs de Suez en France ? Si l’on regarde Alcatel Lucent, Lafarge Holcim ou General Electric Alstom, des promesses ont été faites, mais les synergies annoncées se sont traduites par des plans sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Babary

Enfin, cette opération va limiter la saine et indispensable concurrence qui existe sur ces marchés au bénéfice des collectivités locales et des citoyens. Veolia et Suez sont deux acteurs importants en concurrence frontale, quoi de plus stimulant ? Ce secteur est connu pour présenter, déjà, des niveaux de concentration élevés. Est-il raisonnable d’aller plus loin ? Est-il raisonnable de faire intervenir un fonds de pension sur un marché où la vision stratégique à long terme est essentielle ?

Face à ces questions, qui concernent l’avenir d’une grande entreprise française et des milliers d’emplois, où est l’État ?

J’ai bien entendu M. Le Maire : il veut des garanties pour l’emploi. Mais comment compte-t-il faire pour que les mêmes causes ne produisent pas les mêmes effets délétères sur l’emploi que dans les fusions précédemment évoquées ? Peut-il nous assurer que, contrairement à ce qu’on lit et entend parfois, l’État n’a pas, sur ce dossier, un double langage, hostile au rachat en apparence, mais facilitateur en coulisses ?

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Babary

La question se pose, dès lors que l’on se souvient que le Premier ministre, le 3 septembre, s’est enthousiasmé pour ce rachat, évoquant un mariage qui « fait sens ».

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Babary

M. Serge Babary. Pourquoi un tel engagement ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.

Debut de section - Permalien
Alain Griset

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Babary, Veolia et Suez sont deux champions français du traitement des déchets et de la gestion de l’eau, présents partout dans le monde. Les Français connaissent bien ces deux entreprises et leur font confiance au quotidien.

Nous ne pouvons pas accepter que ces deux champions industriels français se livrent une guerre en plein cœur de l’une des crises économiques les plus graves qu’ait traversées le pays. Nous avions besoin, au contraire, que ces deux industriels prennent le temps de se parler et d’échanger sur un projet qui soit accepté par toutes les parties.

Pour être un succès pour Veolia et pour Suez comme pour leurs clients et leurs salariés, cette opération ne devait pas être réalisée en force et dans la précipitation. Le ministre Bruno Le Maire en a appelé au sens des responsabilités des deux parties et leur a demandé de prendre le temps.

L’État a fixé des conditions.

La pérennité de l’emploi, tout d’abord, alors que les salariés de Suez, notamment plus de 30 000 femmes et hommes employés en France, ont été en première ligne durant la crise pour garantir le bon fonctionnement des services publics essentiels, comme le traitement des déchets ou l’accès à l’eau.

La logique industrielle, ensuite, notamment en s’assurant que les acteurs susceptibles de reprendre les activités de Suez en France sont crédibles, robustes et engagés à long terme. Il n’est pas question que cette opération soit le prélude à une perte de souveraineté dans des secteurs sensibles et stratégiques.

La préservation d’une offre concurrentielle et de qualité pour remplir les missions essentielles qui relèvent de la compétence de ces entreprises est également soulignée, ainsi, enfin, que l’intérêt patrimonial de l’État, actionnaire d’Engie.

Tels sont les critères que Bruno Le Maire a posés d’emblée et qui ont guidé le choix de l’État au conseil d’administration d’Engie. Faute d’accord entre Suez et Veolia, l’État ne pouvait pas valider cette session, qui n’était pas acceptée par l’ensemble des parties prenantes, notamment par les salariés de Suez.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

Le ton employé est à lui seul une réponse !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Cozic

Monsieur le ministre de l’économie et des finances, ce qui s’est passé la semaine dernière au conseil d’administration d’Engie à propos de l’acquisition de Suez par Veolia est un camouflet sans précédent sous la Ve République !

À ce titre, votre immobilisme m’interpelle grandement, car, en temps normal, cet événement aurait dû déclencher un séisme et une réaction immédiate de l’État actionnaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Cozic

Je m’interroge : comment l’État peut-il accepter d’être mis en minorité de cette façon sur une question aussi importante ?

De ce point de vue, votre attitude dans ce dossier est, pour le moins, très ambiguë : vous semblez avoir agi, si je puis me permettre, à l’insu de votre plein gré… En effet, non seulement vous n’avez pas fait grand-chose pour empêcher cette OPA, mais, en plus, vous vous êtes empressé de justifier votre impuissance dans la presse. Avec le macronisme, nous vous savions disruptif, mais tout de même !

Sourires sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Cozic

Quelle étrange situation : le premier actionnaire d’un groupe, qui en nomme le président, n’est pas capable de se faire entendre… Nous pourrions presque en sourire, si la situation que votre immobilisme a créée n’était pas si grave : 10 000 emplois vont être détruits dans le monde à la suite de ce rachat.

À l’heure où la gestion de l’eau et des déchets représente des enjeux capitaux sur les plans économique, social et écologique, comment laisser faire la création d’une entreprise privée, que vous placez, par votre inaction, en position quasi monopolistique, privant ainsi les élus locaux de la possibilité de faire jouer une quelconque concurrence ?

En définitive, cette opération à la hussarde entraînera, de fait, les mêmes résultats que les précédentes : la disparition d’un groupe français et la fragilisation du second.

Monsieur le ministre, pouvez-vous rendre compte à la représentation nationale de votre inaction dans ce dossier ô combien stratégique ?

Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et Les Républicains. – Mme Valérie Létard applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.

Debut de section - Permalien
Alain Griset

Monsieur le sénateur Cozic, dans cette opération l’État a visé trois objectifs : la préservation de l’emploi et des implantations, le maintien d’une offre concurrentielle et le souhait qu’un accord soit trouvé entre les entreprises.

Les administrateurs d’Engie n’ont pas suivi la position de l’État, et nous le regrettons.

Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Alain Griset

Nous insistons pour que les dirigeants de ces entreprises s’entendent : c’est dans l’intérêt de leur entreprise, des salariés de Suez et des collectivités territoriales, pour lesquelles ces entreprises assurent un service public essentiel.

Nous sommes et resterons vigilants sur la suite des événements.

Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Sébastien Meurant, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Meurant

Monsieur le Premier ministre, la France subit une vague sans précédent de violences brutales et barbares : un commissariat attaqué à Champigny-sur-Marne, quatre policiers en civil attaqués, hier, en plein jour et à proximité d’une école maternelle, à Montbéliard ; cette nuit, à Savigny-sur-Orge, dans mon département du Val-d’Oise, deux policiers se sont fait tirer dessus par des individus qui, selon des avocats, les auraient « pris pour des gitans déguisés en flics »… Admirable et tragique illustration du fameux vivre-ensemble !

Pendant ce temps, au lieu d’agir, vos ministres s’empêtrent dans des querelles aussi irréelles que celles des théologiens de Byzance quand les Ottomans étaient aux portes de la ville : le ministre de l’intérieur parle d’ensauvagement, tandis que le garde des sceaux dénonce cette rhétorique qui ferait le jeu de l’extrême droite.

Mme Patricia Schillinger s ’ exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Meurant

Le b.a.-ba d’une politique efficace dans tous les domaines, c’est de poser un diagnostic clair et partagé par tous. Nous en sommes très loin… Même vos ministres les plus importants ne sont pas d’accord entre eux !

Ainsi, le garde des sceaux recycle la vieille idée socialiste du sentiment d’insécurité, évoquant même un fantasme : il ne doit pas beaucoup sortir des beaux arrondissements de Paris…

La réalité, monsieur le Premier ministre, c’est que, avec ce jeu de rôle convenu entre justice et intérieur, votre Gouvernement se paie de mots et refuse de regarder la réalité en face, avec courage et bon sens. Vous refusez plus encore d’agir par peur panique de remettre en cause votre idéologie multiculturaliste. Or, en politique, seuls comptent les actes !

Souvenez-vous de Gérard Collomb s’inquiétant de la montée de ce que l’on appelait alors le communautarisme : « Aujourd’hui, disait-il, on vit côte à côte, mais, demain, je crains que l’on ne vive face à face. » Depuis lors, rien n’a changé, ou plutôt, tout s’est aggravé.

Monsieur le Premier ministre, quel diagnostic votre gouvernement porte-t-il sur l’ensauvagement de la France et sur ses causes, et que comptez-vous faire pour rétablir la paix civile et la concorde ?

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Monsieur le sénateur Sébastien Meurant, le ministre de l’intérieur, M. Darmanin, aurait souhaité pouvoir vous répondre, mais il est en ce moment même à Juvisy, dans l’Essonne, pour apporter son plein soutien aux collègues du policier qui a été terriblement renversé et dont l’état est très critique. Je vous répondrai donc au nom du ministère de l’intérieur.

Depuis le début de l’année, 8 724 policiers ont été blessés, une grande partie au cours de leur mission. En zone de gendarmerie, on dénombre une agression toutes les deux heures. Au moment de la rentrée scolaire, nous avons rencontré des enfants qui nous ont expliqué que, à l’école, ils n’osent pas dire que leur père est policier, par peur d’être agressés… Voilà la réalité.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Face à cette réalité, le Gouvernement agit – non pas dans l’idéologie, mais dans le concret.

Ainsi, 325 millions d’euros supplémentaires sont alloués au budget de la police dans le cadre du projet de loi de finances et du plan de relance. Pour le matériel, ce sont 15 millions d’euros supplémentaires et, pour le parc automobile, 125 millions d’euros supplémentaires qu’a obtenus Gérald Darmanin. Par ailleurs, 740 millions d’euros sont mobilisés à travers l’appel à projets du plan de relance pour rénover les commissariats et les gendarmeries.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Demain, le Président de la République échangera lui-même avec les syndicats de policiers, que le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a déjà reçus.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Nous ne faisons pas d’idéologie : nous sommes dans l’action, dans l’action concrète et résolue.

Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Très simplement, au nom du gouvernement de Jean Castex, je souhaite rappeler que les forces de l’ordre sauvent des vies tous les jours : ce sont la police de la République et l’ordre républicain qui nous protègent de la loi des clans.

À tous les policiers, tous les gendarmes et tous les pompiers, je veux dire que le Gouvernement est avec eux !

M. François Patriat applaudit. – Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Sébastien Meurant, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Meurant

Madame le ministre, vous parlez budgets, mais c’est d’abord une question d’état d’esprit… Il faut réarmer, dans tous les sens du terme, nos forces de l’ordre !

Nous en avons assez des hommages verbaux, alors que la suspicion pèse en permanence sur les forces de l’ordre ; assez de l’impunité devenue la règle pour les voyous ; assez du relativisme général qui interdirait d’appeler un délinquant un délinquant. La peur doit changer de camp !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour le groupe Union Centriste.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Monsieur le ministre délégué chargé des transports, le sixième comité interministériel du tourisme, qui s’est tenu le 12 octobre dernier, s’est soldé par quelques avancées en matière d’accès au fonds de solidarité, de recours au chômage partiel et d’extension du plan tourisme aux entreprises de transport touristique, jusqu’alors écartées.

Malgré tout, la situation demeure alarmante : 75 % des agences de voyages pensent déposer le bilan dans les prochains mois et les réservations ont chuté de 50 %, alors que le secteur représente 9 % de notre PIB et 2 millions d’emplois directs et indirects.

Au regard de ces enjeux, le plan de soutien à l’activité du secteur présenté en mai dernier, de 18 milliards d’euros, ainsi que les 50 milliards d’euros alloués au tourisme dans le plan France Relance, ne rassurent pas complètement le secteur, inquiet à l’approche de l’annonce de restrictions supplémentaires sur les déplacements et les rassemblements.

Les incertitudes qui entourent l’exonération des charges sociales et patronales et la perte de chiffre d’affaires de l’ordre de 73 % subie par les entreprises de transport touristique annoncent une fin d’année très difficile.

Face à cette situation, les collectivités territoriales, notamment les régions, se sont mobilisées, tout d’abord aux côtés de l’État, de Bpifrance et de la Banque des territoires dans le cadre du plan de relance, puis en vertu de leurs compétences, afin de soutenir le secteur touristique et les tissus économiques locaux.

Ainsi, les régions Normandie et Bretagne se sont associées à hauteur de 85 millions d’euros au plan de sauvetage de l’entreprise Brittany Ferries, alors que l’État n’a avancé qu’une aide de 15 millions d’euros. Il est inquiétant de constater que le sauvetage de ce fleuron du pavillon national, dont le redémarrage des lignes est menacé, n’est pas une priorité stratégique pour le Gouvernement.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous agir structurellement en faveur de ces secteurs, et, très concrètement, pour sauver Brittany Ferries ?

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili

Madame la sénatrice Morin-Desailly, je vous remercie de cette question, qui retient toute l’attention du Gouvernement, comme d’ailleurs de nombre de vos collègues parlementaires. En particulier, Mme Nadège Havet, alors députée, et Mme Nathalie Goulet, sénatrice, m’ont interpellée sur le même sujet.

La crise sanitaire a durement frappé le secteur des transports et du tourisme – nous en sommes collectivement conscients. À titre d’illustration, durant le confinement, Air France n’a opéré que dix vols quotidiens sur les mille qu’elle assure habituellement ! Pour sa part, Brittany Ferries a dû réduire ses rotations de plus de la moitié.

Le déconfinement progressif visait à permettre, avant tout, la reprise des trajets domicile-travail. L’offre de transport liée au tourisme a repris cet été, dans le strict respect des gestes barrières, afin d’accueillir de potentiels touristes.

Toutefois, le maintien de la fermeture de certaines frontières et les mesures de septaine ou de quatorzaine ont compliqué la reprise du trafic touristique.

S’agissant de Brittany Ferries, la décision unilatérale de quatorzaine des autorités britanniques a contraint la majorité des navires à rester à quai. Je pense aussi aux sociétés de transport de voyageurs, en particulier aux autocaristes et aux croisiéristes, ainsi qu’aux lignes ferroviaires qui devaient desservir la Tarentaise. Tous sont fortement touchés par la persistance de la crise sanitaire.

Pour aider le secteur du tourisme et des transports, nous travaillons autour de deux axes.

Tout d’abord, accompagner les acteurs frappés par la crise : c’était l’objectif des mesures de droit commun prises durant la crise, c’est aussi celui de l’élargissement, annoncé la semaine dernière, de l’accès au plan tourisme à tous les acteurs du transport routier, en plus de ceux du secteur aérien, ainsi que des aides annoncées par le Premier ministre au début du mois de septembre pour Brittany Ferries.

Ensuite, harmoniser les règles sanitaires, la politique de tests et les mesures de quatorzaine au niveau européen.

J’ajoute qu’un nouveau comité interministériel du tourisme s’est tenu lundi dernier, sous l’autorité du Premier ministre. Il a permis de rappeler que nous avions renforcé le fonds de solidarité, prolongé l’activité partielle à 100 %, étendu la durée du prêt garanti par l’État et exonéré de charges les entreprises fermées.

Vous le voyez, nous sommes aux côtés du secteur du tourisme !

M. François Patriat applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Sachez, madame la ministre, que les parlementaires normands et bretons, nombreux sur ces travées, restent très mobilisés sur le dossier Brittany Ferries.

Vous m’avez répondu en termes de procédures ; je vous répliquerai en parlant chiffres : très concrètement, les sommes envisagées par le Gouvernement dans le cadre du plan de relance nous semblent nettement insuffisantes !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

Monsieur le Premier ministre, voilà dix-sept jours que nous sommes les tristes spectateurs de bombardements délibérés des populations civiles d’Artsakh et d’Arménie par l’Azerbaïdjan. Voilà près de trente ans que le Haut-Karabakh tente de protéger ses terres ancestrales, alors que l’Azerbaïdjan s’enfonce dans la dictature – rappelons que le régime d’Aliyev est l’un des plus répressifs de la planète…

Dans ces conditions, on imagine le sort réservé aux Arméniens du Haut-Karabakh, avec la complicité du président Erdogan.

Erdogan qui marchande ses migrants, massacre les Kurdes, que nous avons abandonnés, viole les espaces aérien et maritime grecs, dirige un pays qui occupe depuis 1974 Chypre, État de l’Union européenne, tente de déstabiliser encore plus la Libye et la Syrie, souffre d’amnésie dès que l’on parle du génocide des Arméniens et clame sa volonté de reformer l’Empire ottoman, Erdogan dont le régime va jusqu’à envoyer des djihadistes pour tuer des Arméniens !

On le sait : le président Erdogan cherche, pour masquer ses échecs, à s’offrir comme trophée l’Artsakh, puis l’Arménie, et à poursuivre le génocide culturel et ethnique des Arméniens.

Rester neutre face à l’injustice, c’est choisir son camp ! C’est pourquoi la neutralité et l’impartialité ne sont ni acceptables ni responsables : elles reviendraient à soutenir l’agresseur. Lorsque des innocents sont massacrés par des armes interdites, nous ne pouvons rester neutres.

Non, la France ne peut pas abandonner son allié, sa sœur : l’Arménie. Elle ne peut pas être spectatrice d’un génocide. Abandonner les Arméniens serait nous renier ; les ignorer, nous trahir.

L’indignation est nécessaire, mais ne sauve pas des vies. Il faut agir !

Il est urgent de sanctionner la Turquie et l’Azerbaïdjan, de mettre en place de vraies sanctions économiques, de rappeler nos ambassadeurs à Ankara et à Bakou, de cesser tout processus d’adhésion de l’Union européenne avec la Turquie et de lui dire qu’elle n’a plus sa place dans l’OTAN.

Il faut encore demander aux forces internationales d’intervenir au sol en Artsakh pour garantir la paix et reconnaître enfin l’État indépendant Artsakh, seul à même de protéger sa population.

Un nouveau génocide se met en place, et l’on ne pourra pas dire que l’on ne savait pas. Une partie de l’histoire de l’humanité est en train de s’écrire : faisons en sorte qu’elle ne s’écrive pas sans l’Europe et sans la France !

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian

Madame la sénatrice Boyer, j’ai déjà répondu sur ce sujet et rappelé, en réponse au sénateur Buis, l’urgence, le devoir et l’exigence qui s’imposaient à la France.

Vous avez parlé de la Turquie : je constate moi aussi que les actions et les provocations de ce pays sont un facteur de déstabilisation de l’ensemble de la région, de la Libye au Haut-Karabakh en passant par la Méditerranée orientale, l’Irak et Varosha. Venant d’un État membre de l’Alliance atlantique, c’est particulièrement grave. Nous n’acceptons pas cette logique globale du fait accompli.

Au Haut-Karabakh, la Turquie a été la seule à ne pas appeler au cessez-le-feu, qui a été conclu, même s’il est difficile à mettre en œuvre. Elle a été la seule à encourager et à soutenir le recours à la force. Le déploiement par Ankara de mercenaires syriens contribue aussi à l’internationalisation du conflit et fait peser une lourde menace sur la région.

Dans cette circonstance, nous devons agir vis-à-vis de la Turquie, en demandant des clarifications et des vérifications. Toutefois, nous devons agir aussi comme membre coprésident du groupe de Minsk pour mettre fin au conflit, par tous les moyens à notre disposition, mais en respectant notre signature.

Je maintiens la position que j’ai affirmée il y a quelques minutes ; nous sommes donc en désaccord, madame Boyer.

Si nous revenions sur nos engagements de responsables des accords de 1994 et du groupe de Minsk, nous créerions les conditions permettant à la Turquie de remettre en cause l’impartialité de ce groupe et de s’insérer dans le règlement diplomatique d’un conflit dont elle est aujourd’hui partie prenante. Il s’agit d’une logique que nous ne souhaitons pas.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Feret

Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, à la veille de la journée nationale de mobilisation dans la santé, je veux relayer ici les inquiétudes, le découragement, voire la colère des personnels soignants de l’hôpital public, mais aussi des établissements médico-sociaux.

Avec la progression de l’épidémie de covid et l’arrivée de la deuxième vague, vous avez annoncé l’ouverture possible de 12 000 lits de réanimation. Mais vous n’avez pas précisé quels moyens humains supplémentaires seraient prévus pour prendre en charge les malades.

Les personnels soignants manqueront, car non seulement ils quittent aujourd’hui l’hôpital public, mais les recrutements sont de plus en plus difficiles. Et ce ne sont pas les mesures du Ségur de la santé qui rendront ces métiers attractifs, ni les annonces de renoncement aux congés qui motiveront les personnels.

Je tiens à insister sur la situation particulière des personnels des établissements sociaux et médico-sociaux, exclus des récentes revalorisations salariales. Ce sont près de 40 000 agents de la fonction publique hospitalière qui ne bénéficieront pas du bonus de 183 euros ! Cette différence de traitement suscite un sentiment d’injustice, alors même qu’elles et ils ont été très mobilisés pendant la crise sanitaire.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous répondre aux attentes de ces personnels, de tous ces hommes et de toutes ces femmes dont le dévouement et le grand professionnalisme ne sont plus à démontrer, mais qui sont aujourd’hui épuisés et inquiets ?

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal

Madame la sénatrice Corinne Féret, je vous prie d’excuser Olivier Véran : après avoir répondu à Mme Cohen sur le même thème, il a dû quitter cette séance de questions.

Comme il l’a souligné, le Ségur de la santé marque un progrès majeur pour notre système de santé et pour nos personnels hospitaliers.

On peut considérer qu’il faudrait faire encore davantage ou qu’il faudrait faire autrement, mais on ne peut pas nier qu’une augmentation de 200 euros net pour tous les agents, et encore plus importante pour certains, soit un progrès majeur et un moyen de renforcer l’attractivité de l’hôpital public. On ne peut pas nier non plus que financer la création de 15 000 postes et de 4 000 lits supplémentaires à l’hôpital soit un progrès.

Vous le savez, sous le précédent gouvernement, j’étais conseiller au ministère de la santé. Ces moyens supplémentaires, nous en aurions rêvé !

Protestations sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal

Aujourd’hui, nous y arrivons, à la faveur, certes, de cette crise. Sans doute celle-ci a-t-elle permis à la société, au Gouvernement, aux responsables politiques d’ouvrir davantage les yeux sur la situation de l’hôpital. Peut-être est-elle une occasion d’avancer encore plus vite que prévu dans la stratégie Ma santé 2022.

En tout cas, il faut reconnaître le progrès majeur, historique, qui a été accompli. Il n’y a pas eu ces dernières années, ni même ces dernières décennies, un tel progrès, aussi rapide, pour l’hôpital public, ses moyens de fonctionnement et les conditions salariales de ses personnels. Ce sont des raisons d’espérer que notre système hospitalier et notre système de santé avancent avec confiance vers l’avenir.

Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Corinne Féret, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Feret

Monsieur le ministre, je ne voudrais pas vous manquer de respect, mais entendez-vous les alertes des professionnels de santé ? Entendez-vous leur inquiétude, au-delà de leur colère ? Oui, leur inquiétude face à la deuxième vague qui arrive, ainsi que leur questionnement sur les moyens humains qui manquent ? En Île-de-France et partout ailleurs, dans nos départements, ils nous en parlent !

Dans quelques jours, nous aurons à débattre des moyens alloués à la santé publique dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous vous attendons, nous attendons le Gouvernement sur des annonces essentielles pour concrétiser des moyens supplémentaires !

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Madame la ministre, voilà près de deux ans que la loi relative à l’accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites, issue de la proposition de loi de mon collègue Loïc Hervé et de celle du regretté Jean-Claude Carle, a été adoptée. Si ce texte, sur lequel nous avons travaillé avec la ministre Jacqueline Gourault, a marqué une avancée dans la lutte contre les installations illicites, force est de constater qu’il n’a pas été suffisant.

De fait, pas un mois ne passe sans que je sois contacté par des élus désespérés par des installations illicites sur leur commune et hors d’état de lutter contre celles-ci, qui s’accompagnent la plupart du temps de nombreuses incivilités. La situation n’est plus soutenable pour les élus, mais aussi pour les agriculteurs et les chefs d’entreprise qui font face, eux aussi, à ces installations illicites.

L’État a bien évidemment des devoirs envers ces communautés, mais ces dernières en ont aussi envers la société : elles doivent notamment participer au vivre-ensemble et ne pas se prévaloir uniquement de leurs droits. En l’absence de respect de ces règles, des mesures et sanctions efficaces et dissuasives doivent être prises.

Pour améliorer la gestion de ces situations, ce qui est souhaitable pour tous, et atteindre un certain niveau d’apaisement, plusieurs leviers s’offrent au Gouvernement. J’espère, madame la ministre, que vous saurez les saisir.

Tout d’abord, il me paraît important d’organiser une évaluation de l’application de la loi n° 2018-957. Cette démarche permettrait, dans un premier temps, de mieux se rendre compte des faiblesses, mais aussi des forces de ce texte. Avoir ainsi une vision claire de son efficacité ouvrirait la porte, dans un second temps, à un texte complémentaire renforçant les dispositifs en vigueur et en créant de nouveaux, pour combler les lacunes constatées.

À ce sujet, l’expérience du terrain fait apparaître une réactivité variable des services de l’État en matière d’expulsion des gens du voyage en cas d’occupation illicite. De ce fait, il serait opportun d’adresser aux préfets une circulaire leur demandant de répondre à ces situations dans les meilleurs délais.

Par ailleurs, il convient de noter que les schémas départementaux d’accueil sont pour l’essentiel respectés, alors même que les aides de l’État sont en nette diminution.

Madame la ministre, plusieurs dispositions figurant dans le texte initial de notre proposition de loi avaient été refusées par le Gouvernement et supprimées par l’Assemblée nationale, au motif qu’elles étaient trop répressives. Il avait été avancé que les dispositions retenues seraient suffisantes pour lutter contre les installations illicites.

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

M. Cyril Pellevat. Il serait malhonnête de continuer à affirmer que ces mesures sont pleinement satisfaisantes. Madame la ministre, quelle sera la position du Gouvernement pour accompagner les élus confrontés à ces situations qui restent intenables ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Monsieur le sénateur Cyril Pellevat, je vous remercie de cette question intéressante, à laquelle je vais répondre au nom du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, qui se trouve en ce moment même auprès des policiers de Juvisy.

Comme vous le savez fort bien, l’expression « gens du voyage » regroupe une multiplicité de populations aux origines culturelles et géographiques diverses, mais dont le point commun est d’avoir un mode de vie originellement fondé sur la mobilité. Un tiers d’entre eux conservent un mode de vie nomade, un tiers d’entre eux sont semi-sédentaires, un tiers d’entre eux vivent de manière totalement sédentaire.

La loi de 2018 dont vous avez été l’un des initiateurs, et qui a été travaillée avec Mme Jacqueline Gourault au nom du ministère de l’intérieur, a permis des avancées fortes, dont vous avez rappelé certaines ; je pense en particulier à la procédure d’information préalable du préfet et du conseil départemental par les groupes de plus de 150 caravanes trois mois avant leur arrivée, destinée à faciliter l’organisation des passages.

Vous avez également assoupli les conditions permettant de saisir le préfet pour mettre en demeure les gens du voyage de quitter les terrains occupés illicitement, avec, bien évidemment, l’emploi de la force si nécessaire. Par ailleurs, si le maire dispose d’une aire d’accueil conforme au schéma départemental d’accueil des gens du voyage, il peut désormais interdire le stationnement en dehors des terrains aménagés sur sa commune, même si elle appartient à une intercommunalité.

Surtout, avec cette loi, vous avez aggravé les sanctions pénales en cas d’occupation d’un terrain en réunion et sans titre.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Monsieur Retailleau, il me paraît important de rappeler les évolutions déjà réalisées, qui appellent celles qui viendront.

S’agissant de vos propositions, monsieur Pellevat, je rappelle que les préfectures établissent déjà chaque année un bilan des grands passages estivaux des gens du voyage, pour faire état des difficultés qu’elles ont pu rencontrer. Par ailleurs, l’État verse chaque année aux collectivités territoriales divers concours financiers, notamment la dotation globale de fonctionnement.

Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Néanmoins – c’est ici, mesdames, messieurs les sénateurs, que je réponds à l’interpellation qui m’a été adressée –, j’entends votre proposition de circulaire : le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, le garde des sceaux, Éric Dupond-Moretti, et moi-même allons étudier immédiatement cette proposition, pour que les décisions d’expulsion prononcées par la justice soient exécutées dans de meilleurs délais lorsque des gens du voyage occupent un terrain illégalement – en prenant en compte, bien évidemment, tous les enjeux d’humanité, liés notamment à la scolarisation.

Monsieur le sénateur, la réponse à votre demande de circulaire est donc : oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure Darcos

Monsieur le ministre de l’éducation nationale, les collégiens en classe de troisième sont tenus d’accomplir, durant leur année scolaire, un stage de découverte du monde économique et professionnel d’une durée d’une semaine. Ce stage obligatoire leur permet de se confronter à la réalité concrète du travail, mais aussi, pour certains, de préparer déjà leur projet d’orientation.

Nous connaissons tous le contexte sanitaire actuel : il est inquiétant. Nous saisissons tous la dimension économique de la crise : elle est catastrophique.

Alors que de nombreuses entreprises luttent pour leur survie et qu’associations comme collectivités territoriales se concentrent sur les actions de solidarité en faveur des plus démunis, elles n’ont pas le temps de se pencher sur des demandes de stages aussi brefs – même si quelques initiatives locales, comme celles du conseil régional d’Île-de-France et de mon département, promettent d’en satisfaire quelques centaines.

Il faut répondre au stress des familles dont les enfants ne trouvent pas de stage – ils sont une majorité à ne pas avoir des parents pour les pistonner –, répondre aussi aux préoccupations des entreprises.

Alors que les dossiers de convention de stage sont distribués en ce moment même dans les établissements scolaires, il sera presque trop tard, au retour des vacances d’automne, pour faire machine arrière.

C’est pourquoi je vous demande, avec l’ensemble de mes collègues signataires de la lettre ouverte que nous vous avons adressée hier soir, d’annuler l’obligation de ce stage incombant aux collégiens de troisième. Seriez-vous prêt à répondre favorablement à notre demande ?

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

Madame la sénatrice Laure Darcos, je vous remercie de cette question importante, qui permet de souligner le rôle désormais joué par le stage de troisième dans notre système éducatif et, plus largement, dans la vie de notre pays.

Voilà encore quelques années, ce stage n’existait pas ; aujourd’hui, tout le monde est habitué à voir de jeunes élèves faire dans ce cadre, dans l’immense majorité des cas, leur première expérience du monde du travail. Nous tenons tous à ce dispositif très positif et nous souhaitons qu’il se consolide et dure.

J’ai bien lu votre lettre et je sais à quel point ce que vous écrivez correspond à la réalité. Nous le voyons tous : les entreprises ont des difficultés dans la situation actuelle. Dans ces conditions, il n’est pas facile de répondre au grand nombre de demandes de stage.

Dans un passé récent, nous avons pris des initiatives, comme monstagedetroisieme.fr, conçu avec Julien Denormandie dans ses précédentes fonctions, qui offre plus de 30 000 stages aux élèves qui n’en trouvent pas par leur propre réseau.

Nous allons continuer à agir avec volontarisme, mais il est vrai que le caractère obligatoire de ce stage peut être gênant cette année, du fait des circonstances économiques. Je vais donc très bientôt répondre favorablement à votre demande, qui correspond à notre propre réflexion.

Nous serons volontaristes pour ces stages, sans les rendre obligatoires cette année. Nous travaillerons aussi à renforcer notre politique d’orientation – une compétence qui relève désormais des régions, en liaison avec l’éducation nationale –, pour que nos élèves de troisième soient bien informés sur les choix possibles, via des modules vidéos et des formations sur le monde du travail.

Bref, nous allons faire de ce problème un levier pour une meilleure orientation et une meilleure information des élèves. Nous le ferons avec pragmatisme, en rendant facultatif, mais tout à fait souhaitable, le stage de troisième et, quand celui-ci n’aura pas lieu, en prenant des initiatives complémentaires en matière d’orientation et d’information.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure Darcos

Je suis très touchée d’avoir été entendue, et je vous en remercie infiniment, monsieur le ministre.

Vous n’imaginez pas le nombre de familles, d’entrepreneurs et de collègues qui ont répondu très rapidement à ma proposition de lettre ouverte. Une même inquiétude remonte de tous les territoires en ce moment.

Sans doute faut-il donner la priorité aux lycéens en voie professionnelle et aux apprentis, qui ont vraiment besoin de ces stages en entreprise pour valider leur cursus. Je suis donc preneuse des « palliatifs » que vous allez leur proposer cette année.

Par ailleurs, pour ne pas frustrer ces élèves de troisième, peut-être faudra-t-il, à titre exceptionnel, leur donner la possibilité de faire un stage en classe de seconde l’année prochaine. Je vous remercie en tout cas, monsieur le ministre.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le mercredi 21 octobre 2020, à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement retire de l’ordre du jour du Sénat le projet de loi prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l’état d’urgence sanitaire.

Il demande en conséquence que l’ordre du jour de cet après-midi reprenne pour l’examen du projet de loi relatif à la prorogation des chapitres VI à X du titre II du livre II et de l’article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure et du projet de loi organique relatif au Conseil économique social et environnemental, et que l’examen de ce dernier se poursuive ce soir et, éventuellement, demain matin.

Acte est donné de cette modification.

J’invite tous les présidents de groupe à bien vouloir me rejoindre au cabinet de départ, afin d’évoquer la suite de l’organisation de nos travaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Bruno Retailleau, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Monsieur le Premier ministre, hier encore, jusque tard dans la soirée, nous avons discuté, ici même, au Sénat, du texte prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l’état d’urgence sanitaire.

Comment pouvez-vous nous annoncer quelques heures plus tard que vous retirez ce texte de l’ordre du jour ?

Ce retrait brutal et soudain illustre le pilotage à vue du Gouvernement sur la crise sanitaire.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, SER et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

Nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à dix-sept heures quinze, sous la présidence de M. Pierre Laurent.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

J’informe le Sénat qu’une candidature pour siéger au sein de la commission spéciale sur le projet de loi relatif à la bioéthique a été publiée.

Cette candidature sera ratifiée si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement, à la suite des échanges intervenus en conférence des présidents le 7 octobre dernier, demande l’inscription à l’ordre du jour du jeudi 5 novembre au matin d’une série de questions orales.

En conséquence, les séances de questions orales initialement prévues les mardis 20 octobre et 3 novembre sont supprimées. Nous pourrions inscrire à l’ordre du jour du jeudi 5 novembre, à neuf heures trente, quarante-cinq questions orales, dont la liste sera prochainement diffusée sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Il en est ainsi décidé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. le président de la commission des lois, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Monsieur le ministre, nous avons appris, à l’issue des questions d’actualité, que le texte prorogeant le régime transitoire institué à la sortie de l’état d’urgence sanitaire était retiré de l’ordre du jour.

Cela relève – nous le comprenons bien – de la responsabilité du Gouvernement. Nous en avons toutefois été avertis il y a quelques minutes seulement, sans explication aucune, ni de forme ni de fond, alors que nous avons travaillé tardivement hier soir, pour ne pas dire tôt ce matin, si bien que seule une petite vingtaine d’amendements restaient à examiner. Nous voilà privés de ce débat.

Nous souhaiterions donc connaître les raisons de ce retrait.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Monsieur le président de la commission, permettez-moi tout d’abord de saluer votre élection, ainsi que celle des vice-présidents du Sénat, des présidents des autres commissions et de l’ensemble des sénateurs.

J’ai bien pris note, au nom du Gouvernement, de votre question. Je la transmettrai au ministre chargé des relations avec le Parlement et au Premier ministre, qui ne manqueront pas de revenir très rapidement vers le Sénat pour vous indiquer pourquoi vos travaux ont été suspendus.

En effet, bien que mon portefeuille soit important, vous comprendrez qu’il ne m’appartient pas de gérer l’état d’urgence sanitaire en tant que tel devant votre noble assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la prorogation des chapitres VI à X du titre II du livre II et de l’article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure (projet n° 669 [2019-2020], texte de la commission n° 12, rapport n° 11, avis n° 19).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, cher François-Noël Buffet, monsieur le rapporteur, cher Marc-Philippe Daubresse, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous félicite de votre élection et je formule le vœu que, au-delà de nos évidentes différences sur certains sujets – différences qui sont du reste tout à fait respectables –, le ministère de l’intérieur et votre commission puissent travailler de la meilleure façon possible.

Il y a trois ans, le Sénat adoptait la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, dite loi SILT. Il s’agissait alors de sortir de l’état d’urgence, car, chacun en convenait, cet état d’urgence n’avait pas vocation à être permanent.

Il s’agissait aussi de maintenir un niveau extrêmement exigeant de sécurité pour les Français, car la menace reste prégnante et la lutte contre le terrorisme demeure bien évidemment une priorité nationale.

Pour cela, la loi SILT a mis en place des outils nouveaux et adaptés, garantissant un équilibre entre la nécessaire efficacité des actions antiterroristes et la préservation des libertés publiques. Nous avons collectivement conscience, je le sais, du niveau extrêmement élevé de la menace qui continue à peser sur notre pays.

Le 25 septembre dernier, l’attaque terroriste qui a fait deux blessés graves devant les anciens locaux de Charlie Hebdo a montré, si cela était encore nécessaire, que nos efforts ne doivent pas être relâchés et que nous devons collectivement continuer à agir avec la plus grande détermination contre le terrorisme islamiste.

Depuis le début de l’année, quatre attentats ont ainsi touché nos compatriotes sur le territoire national : le 3 janvier à Villejuif, le 4 avril à Romans-sur-Isère, le 27 avril à Colombes et ce 25 septembre à Paris. Depuis 2017, onze attaques ont abouti sur le territoire national, provoquant la mort de plus de vingt personnes. Permettez-moi d’avoir avec vous une pensée pour ces personnes et pour leurs familles.

Je tiens aussi à dire devant la représentation nationale que, depuis 2017, trente-deux attentats ont été déjoués par nos services, c’est-à-dire en moyenne un par mois, dont un encore au tout début de cette année.

Je salue l’ensemble des services de renseignement, singulièrement la direction générale de la sécurité intérieure, la DGSI, placée sous mon autorité, ainsi que nos policiers et nos gendarmes, qui, chaque jour, font un travail exceptionnel pour identifier, poursuivre et comprendre les menaces, interpeller les individus dangereux ou les surveiller, et qui parfois mettent leur vie en péril pour éviter les projets meurtriers.

La loi SILT a permis à ces services de continuer à disposer, après la fin de l’état d’urgence, d’un cadre législatif efficace, adapté et validé par le Conseil constitutionnel. L’autorité administrative – préfet ou ministre de l’intérieur, selon les cas – s’est vue reconnaître des compétences nouvelles, strictement proportionnées à l’état de la menace, s’exerçant toujours sous le contrôle du juge et dans le seul objectif de prévenir des actes de terrorisme.

Il s’agit tout d’abord de la possibilité de mettre en place des périmètres de protection, afin d’assurer la sécurité d’un lieu ou d’un événement. Il s’agit ensuite de procéder à la fermeture de lieux de culte dans lesquels se tiennent ou circulent des idées incitant à la commission ou faisant l’apologie d’actes de terrorisme, et d’édicter à l’encontre d’individus présentant un niveau de menace caractérisée pour la sécurité et l’ordre public des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, ou Micas. Il s’agit, enfin, de pouvoir solliciter du juge judiciaire l’autorisation de procéder à la visite d’un lieu fréquenté par de tels individus.

L’étude d’impact du projet de loi présente dans le détail un premier bilan de l’application de ces mesures, monsieur le rapporteur. Vous avez longuement échangé sur ce point ; je n’y reviendrai pas, mais je souhaite insister sur l’usage qui a été fait de ces outils nouveaux.

Je dois au Sénat l’évocation des 553 périmètres de protection qui ont été mis en place au 9 octobre 2020, notamment par mes prédécesseurs : sept lieux de culte ont été fermés ; dans le même temps, 334 mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance ont été notifiées, dont 60 sont encore actives à ce jour ; 175 visites domiciliaires ont été réalisées. Ces mesures ont toujours été utilisées de manière ciblée et proportionnée, sous le contrôle du juge.

Conformément à l’article L. 22-10-1 du code de la sécurité intérieure instauré par l’article 5 de la loi dite SILT, le Parlement a été informé sans délai de la mise en œuvre de chacune de ces mesures. Chaque année, l’Assemblée nationale et le Sénat ont été destinataires d’un rapport d’évaluation sur la mise en œuvre et de la loi.

De la même manière, le Gouvernement a fait un usage raisonné de la technique dite « de l’algorithme ». Ainsi, depuis 2015, trois traitements automatisés ont été autorisés par M. le Premier ministre, après un avis favorable de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement.

La délégation parlementaire au renseignement a été rendue destinataire d’un rapport classifié au niveau « confidentiel défense », qui décrit la nature de l’apport opérationnel de ces traitements automatisés. Ces derniers ont tout à la fois permis de détecter des contacts entre des individus porteurs d’une menace terroriste, d’obtenir des informations sur la localisation d’individus en lien avec cette menace, de mettre à jour des comportements d’individus connus des services de renseignement et nécessitant des investigations plus approfondies, enfin d’améliorer la connaissance des services sur la manière de procéder des individus de la mouvance terroriste.

À peine nommé, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai souhaité rencontrer les services de la DGSI pour qu’ils me présentent ces algorithmes et qu’ils m’expliquent à quel point ces derniers sont nécessaires. Permettez-moi de redire devant vous à quel point j’en suis convaincu.

Les mesures dont il vous est proposé de prolonger l’application par le présent projet de loi présenté par le Gouvernement constituent donc des outils opérationnels indispensables pour les services spécialisés dans la lutte contre le terrorisme.

Ils ont été mis en œuvre sous le contrôle attentif du juge judiciaire et administratif et, pour certains d’entre eux, après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, avis que le Gouvernement a toujours – j’y insiste – suivis. Ils font l’objet d’un échange permanent avec le Parlement, sous la forme d’une information en temps réel et d’une évaluation régulière que le Gouvernement a strictement respectées.

Ces dispositifs ont démontré toute leur pertinence dans la prévention de la menace terroriste. C’est également ce que conclut la mission de contrôle mise en place par le Sénat dans son rapport de février dernier, après trois années d’expérimentation.

Je relève que la mission sénatoriale estime que la loi a fait l’objet d’une mise en œuvre équilibrée et conforme à l’esprit du législateur. Elle souligne aussi qu’il existe un consensus de l’ensemble des acteurs, judiciaires comme administratifs, sur l’efficacité et l’utilité des quatre mesures introduites dans la loi SILT dans un contexte de menace extrêmement élevée et à un moment où nous savons que le terrorisme peut frapper partout sur le territoire national.

La mission de contrôle, monsieur le rapporteur, s’est en conséquence prononcée en faveur de la pérennisation de ces mesures. Vous-même avez donc logiquement repris les conclusions de la mission dont vous étiez également le rapporteur : sur votre proposition, la commission des lois a adopté la pérennisation des dispositions de la loi.

Le Gouvernement et le Parlement, particulièrement l’Assemblée nationale, souhaitent pérenniser une partie de ces mesures. Je crois toutefois, monsieur le rapporteur, que la discussion des amendements nous montrera que nous avons quelques légères différences d’appréciation d’un certain nombre de dispositifs.

Le Gouvernement a rendu compte au Parlement de la mise en œuvre des mesures de politique administrative à l’occasion de deux rapports annuels. Il lui a également adressé, le 30 juin dernier, un rapport sur l’application sur la technique dite de l’algorithme.

Avant l’émergence de la crise sanitaire, il envisageait par ailleurs, monsieur le rapporteur, de soumettre au Parlement un projet de loi à l’été dernier. Ce projet de loi aurait été l’occasion d’engager, avec le Sénat et avec l’Assemblée nationale, une discussion approfondie sur chacune de ces mesures qui sont nécessaires pour lutter contre le terrorisme mais qui peuvent, nous le savons, susciter des interrogations relatives aux libertés dans l’opinion publique.

Or chaque parlementaire – j’en suis convaincu – a pour vocation de protéger ces libertés, donc de s’assurer que le Gouvernement prend des mesures administratives proportionnées qui permettent leur respect.

Les services de renseignement placés sous mon autorité y étaient prêts. Le ministère de l’intérieur, le ministère des armées et l’ensemble des membres du Gouvernement y étaient prêts. Mais la mobilisation nationale rendue nécessaire par la gestion de la crise sanitaire a fait obstacle à cette discussion parlementaire. Le contexte n’a pas permis aux débats, dans chacune des deux chambres, de se tenir de manière sereine, argumentée et efficace.

Or les sujets dont nous parlons sont essentiels pour la sécurité des Français. Ils touchent aux libertés fondamentales. Ils méritent d’être discutés avec la sérénité et le temps nécessaires.

Aussi, compte tenu de la sensibilité et de la complexité des dispositions en question, il a semblé opportun au Gouvernement de se donner du temps et de reporter d’un an le débat de fond que nous devions avoir cette année.

Pour que ce débat puisse avoir lieu, pour que des dispositions aussi fondamentales ne soient pas entachées de la critique d’un débat démocratique insuffisant, pour qu’elles soient acceptées par l’ensemble de l’opinion, pour que le Conseil constitutionnel puisse les valider, alors qu’elles sont essentielles pour la sécurité du territoire national et pour chacun des Français, j’estime, monsieur le rapporteur, sans vous mettre en difficulté sur le fond, mais en exprimant une légère réserve sur la forme, que la pérennisation ainsi votée serait prématurée.

À ce contexte épidémique est venue s’ajouter, peut-être postérieurement à votre analyse, la décision Tele2 rendue le 6 octobre dernier par la Cour de justice de l’Union européenne sur le régime de conservation des données par les opérateurs de télécommunications.

Les juridictions nationales tireront toutes les conséquences de cette décision européenne. Il nous faudra pouvoir en éclairer le Parlement et examiner avec lui les conséquences potentielles qu’il conviendrait d’en tirer dans la loi. Nous ne sommes donc pas prêts pour les introduire dans le texte que nous présentons aujourd’hui devant le Sénat.

C’est pourquoi le Gouvernement propose un report de l’expérimentation au 31 décembre 2021, échéance plus lointaine que celle du 31 juillet qui a été retenue par l’Assemblée nationale.

En tout état de cause, je l’affirme ici, la prolongation de l’expérimentation permet aux services de travailler comme avant, si j’ose dire. Les préfets, les forces de sécurité intérieure et les services de renseignement continueront à se servir des outils qu’ils considèrent, de manière unanime, comme nécessaires à leur action.

La mobilisation du Gouvernement pour lutter contre le terrorisme est très forte, et je sais qu’elle est soutenue par la quasi-intégralité des mouvements politiques représentés au Sénat, singulièrement par la majorité sénatoriale qui a, chaque fois, apporté son soutien aux dispositions proposées par le gouvernement d’Édouard Philippe, puis celui de Jean Castex.

C’est conscient de la prégnance de la menace terroriste que, depuis 2017, à la demande du Président de la République, le Gouvernement a œuvré avec une très grande détermination au renforcement des dispositifs pour lutter contre le terrorisme islamiste.

Nous l’avons fait en continuant – avec le soutien du Parlement et, en particulier, celui du Sénat – à augmenter les moyens mis à la disposition des services spécialisés en matière de lutte antiterroriste, notamment les services de renseignement. Au total, mesdames, messieurs les sénateurs, ce sont 1 000 postes supplémentaires qui ont été créés depuis deux ans et demi et l’élection d’Emmanuel Macron au sein de la direction générale de la sécurité intérieure et du service central du renseignement territorial.

Les budgets d’investissement et de fonctionnement des services ont également fait l’objet d’efforts sans précédent. Monsieur le président de la commission des lois, vous aurez sans doute à examiner les crédits du ministère de l’intérieur dans le cadre du prochain projet de loi de finances : vous constaterez une hausse, encore une fois, sans précédent de ces crédits. Ceux de la DGSI ont par exemple doublé entre 2015 et aujourd’hui.

La lutte contre le terrorisme exige en effet une mobilisation totale et l’unanimité nationale. Sous l’autorité du Président de la République et du Premier ministre, avec l’engagement de l’ensemble des forces de sécurité et des services de renseignement, avec l’appui du ministère de la justice, nous mènerons un combat sans relâche. Nous ne renoncerons jamais à traquer les ennemis de la République, qui attaquent par la terreur notre identité, notre mode de vie et nos valeurs : la liberté d’expression, la liberté de culte, la liberté de conscience, la laïcité, l’égalité entre les femmes et les hommes.

Respect de l’équilibre initial, recherche du plus large consensus républicain, principe qui a du reste présidé à l’adoption des lois expérimentales, détermination dans la lutte contre le terrorisme : tel est le sens du projet de loi qui vous est soumis et dont l’adoption, je le souhaite, permettra de continuer à faire vivre cet équilibre, pour tenir compte de la période de crise sanitaire, qui ne nous a pas laissés mener à bien une évaluation pleine, entière et sereine. Je sais que cette discussion ne sera pas la dernière.

Compte tenu de ces considérations d’efficacité, mais également pour que le débat démocratique et l’État de droit, qui contribue à nous donner des armes contre les terroristes, soient respectés, et pour que le débat parlementaire, singulièrement ici au Sénat, puisse se dérouler sereinement, je vous propose que nos débats puissent de nouveau avoir lieu l’été prochain.

C’est pourquoi je vous présente aujourd’hui, au nom du Gouvernement, un projet de loi de prorogation, qui nous permettra de débattre ultérieurement de tous les sujets nouveaux qu’a fait naître cette décision que, pour ma part, je considère regrettable, de la Cour de justice de l’Union européenne.

C’est également pour moi l’occasion de remercier les membres de la commission des lois, quelle que soit leur appartenance politique, mais aussi ceux de la délégation parlementaire au renseignement et de la mission d’information commune sur l’évaluation de la loi relative au renseignement, de la qualité du travail mené en commun depuis plusieurs mois avec mes prédécesseurs Gérard Collomb et Christophe Castaner, et avec moi-même.

C’est aussi pour moi l’occasion d’exprimer devant vous le souhait que ce travail en commun, ce travail républicain pour la protection de notre sol, de ses habitants et, ce qui est plus important encore, de la France se poursuive dans les semaines, les mois, voire les années qui viennent.

MM. Alain Richard, Arnaud de Belenet et Philippe Bonnecarrère applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc-Philippe Daubresse

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme cela vient d’être rappelé à juste titre, la France est confrontée depuis maintenant plusieurs années à une menace terroriste élevée, durable, qui s’est malheureusement concrétisée par plusieurs attentats spectaculaires entraînant de très nombreuses victimes blessées, tuées, voire massacrées de manière barbare, comme cela s’est produit au Bataclan.

Le dernier exemple en date est l’attaque perpétrée – vous y avez fait allusion, monsieur le ministre – contre les anciens locaux de Charlie Hebdo, à la suite de laquelle deux personnes ont été blessées.

La menace est multiple, soudaine ou organisée, individuelle ou groupée, bien armée ou non. Grâce à l’efficacité de nos services et aux mesures exceptionnelles qui ont été prises par le Gouvernement, avec l’appui du Parlement, de nombreux attentats ont pu être déjoués. Je veux m’associer, monsieur le ministre, à la gratitude que vous avez exprimée vis-à-vis des services de police, de gendarmerie et, bien sûr, de la DGSI. Je suis moi-même fils d’un policier qui était spécialisé dans le renseignement : je sais la part d’abnégation et de dévouement qu’il faut pour exercer ce type de métier.

Partant de ce constat, ce n’est vraiment pas le moment de baisser la garde. Nous ne pouvons pas nous satisfaire du risque d’une nouvelle attaque terroriste qui plane tous les jours sur la France. Rappelons qu’il n’y a pas si longtemps, en 2018, 30 % des Français estimaient que le terrorisme était le problème le plus important de notre société, classant cette préoccupation en tête de toutes les autres.

Aujourd’hui encore, malgré la période exceptionnelle d’épidémie que nous traversons, cette préoccupation reste prégnante dans notre pays. Le Gouvernement et la représentation nationale doivent donc prendre la mesure de la demande et y répondre. Bien évidemment, nous sommes en phase sur cette question.

Pour faire face à cette menace, au cours des dernières années, nous nous sommes dotés d’un arsenal législatif renforcé en matière pénale comme administrative. Et puisque le Sénat est une assemblée sensible, en premier lieu, aux libertés individuelles, le recours aux outils qui ont été proposés n’a été autorisé, vous le savez bien, qu’à titre expérimental.

L’échéance était fixée depuis longtemps : il en est ainsi des quatre mesures de la loi, dite loi SILT, du 30 octobre 2017. Ces mesures ont fait leurs preuves : grâce aux périmètres de protection qui permettent aux préfets de sécuriser un lieu exposé à une menace terroriste, bien des problèmes ont pu être évités lors des grands événements organisés dans nos communes ou dans les grandes métropoles ; les fermetures de lieux de culte ont connu des résultats significatifs que vous avez rappelés, monsieur le ministre ; les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, les Micas, permettent l’assignation d’une personne sur le territoire d’une commune ; enfin, les visites domiciliaires se sont substituées aux perquisitions et, à la suite de l’état d’urgence, les résultats furent également notoires.

Ces quatre mesures temporaires – et c’est bien sur l’initiative de la Haute Assemblée qu’elles ont ce caractère – arrivent à échéance le 31 décembre prochain. Cette échéance était connue depuis longtemps. Vos services – le président de la commission des lois et moi-même les avons rencontrés à plusieurs reprises – et nous-mêmes avons beaucoup travaillé sur le sujet, monsieur le ministre. Nous avons évalué sérieusement la question et avons beaucoup réfléchi à la meilleure manière d’optimiser et de pérenniser lesdites mesures, puisque nous étions d’accord sur l’objectif à atteindre.

À la même date arrivera à son terme l’expérimentation de la technique dite « de l’algorithme », technique de renseignement qui consiste à imposer la mise en œuvre sur les réseaux des opérateurs de communications électroniques de programmes informatiques qui analysent les flux de données, en vue de détecter les connexions susceptibles de révéler une menace terroriste ou du prosélytisme. Cette technique ayant suscité beaucoup de craintes lors de son adoption, elle n’a donc, elle aussi, été autorisée par le législateur qu’à titre expérimental.

Le débat sur la nécessité de pérenniser ou non ces dispositions aurait dû intervenir dans le courant de l’année 2020. Je vous l’ai dit, nous nous y étions préparés. Pour ma part, j’ai remis deux rapports d’évaluation très explicites de ces dispositifs. Vous l’avez indiqué il y a quelques minutes, le Gouvernement a estimé que la crise sanitaire que nous traversons depuis plusieurs mois risquait de bousculer le calendrier parlementaire et d’empêcher la tenue d’un débat serein au Parlement. Objectivement, nous pensons que ce n’est pas le cas, et c’est là une divergence que nous avons avec vous.

L’objet du projet de loi que nous sommes appelés à examiner aujourd’hui est de procéder à une prorogation « sèche » des dispositions que je viens de présenter dans l’attente d’un texte plus ambitieux. Vous aviez initialement prévu une prorogation d’un an jusqu’au 31 décembre 2021. L’Assemblée nationale, qui a examiné le projet de loi à la fin du mois de juillet, a porté cette durée à sept mois, ce qui supposerait que le Parlement se prononce de nouveau avant l’été 2021, avant le 31 juillet 2021 pour être précis.

Lors de la réunion de la commission des lois du 7 octobre, nous avons souscrit au principe du maintien de ces différents outils juridiques. Je sais que cette position ne fait pas l’unanimité sur les travées de cet hémicycle, certains collègues ayant déposé des amendements de suppression. Je pense pourtant qu’il s’agit d’une nécessité pour maintenir un niveau de vigilance renforcée face à une menace de plus en plus difficile à détecter et nous prémunir face aux risques d’attentats terroristes.

Sur le volet relatif au renseignement, nous n’avons pas de divergences avec vous, monsieur le ministre : la commission a adopté sans modification l’article 2 relatif à la prolongation de la technique de l’algorithme. Cette prolongation nous a paru justifiée, moins par le contexte sanitaire et par la conjoncture que par les premiers éléments d’évaluation de l’expérimentation, qui ont été transmis au Parlement à la fin du mois de juin, faisant état de premiers résultats encourageants.

Évidemment, sur ce type de sujet très sensible, il faut trouver le bon équilibre pour préserver les libertés. Ainsi, les trois algorithmes déployés par les services de renseignement auraient permis d’identifier des individus qui leur étaient jusqu’alors inconnus.

Cela étant, le rapport ne met pas le voile sur le fait que la technique de l’algorithme est encore en phase de développement. Comme vous l’avez souligné, une épée de Damoclès pèse sur l’ensemble de ces techniques depuis la décision de la Cour de justice de l’Union européenne. C’est donc plutôt de la sagesse, et une bonne mesure, que de reporter l’examen de ces dispositifs à la discussion d’un texte relatif au renseignement beaucoup plus complet sur lequel, d’ailleurs, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a beaucoup travaillé.

Sur le second volet du projet de loi, la commission des lois n’a en revanche pas suivi la position du Gouvernement et de nos collègues députés. Nous ne nous opposons évidemment pas au maintien des mesures de la loi SILT, mais nous estimons que le report du débat sur leur pérennisation, ainsi que sur les éventuels ajustements à y apporter, n’est pas justifié, d’une part, parce que l’important travail d’évaluation auquel j’ai fait allusion a été réalisé et, d’autre part, parce que le président de la commission des lois, plusieurs collègues de la majorité sénatoriale et moi-même avons déposé une proposition de loi très détaillée, connue depuis longtemps, qui permettait de travailler tranquillement et sereinement avec le Gouvernement.

Nos travaux concluent tous à l’efficacité des quatre outils que j’ai cités dans le dispositif de lutte contre le terrorisme. Après deux années d’auditions et de déplacements, j’ai moi-même dressé un bilan très positif de l’application de ces mesures.

Je souhaite répondre par anticipation à certaines des critiques que la position de la commission des lois, qui a consisté à réécrire l’article 1er du projet de loi en y apportant des modifications, pourrait susciter. Nous ne voulons évidemment pas porter une atteinte disproportionnée aux droits et aux libertés : ce n’est certainement pas la vocation du Sénat.

Le Conseil constitutionnel a d’ores et déjà validé de nombreuses dispositions sur le plan juridique. Notre commission, tout en pérennisant les mesures de la loi SILT, a souhaité proposer quelques évolutions qui sont, somme toute, assez consensuelles pour l’ensemble des acteurs de la lutte contre le terrorisme, afin de les rendre plus efficaces.

Elles sont au nombre de trois : premièrement, nous souhaitons étendre le champ de la mesure de fermeture administrative des lieux de culte aux lieux connexes – on sait bien que, aujourd’hui, le prosélytisme se manifeste dans des lieux comme des librairies, des salles de sport ou des centres de loisirs –, pour éviter le déport des discours radicaux vers d’autres lieux ; deuxièmement, nous voulons renforcer l’information des autorités judiciaires sur les Micas, de manière à assurer une bonne articulation avec les mesures de contrôle judiciaire, par exemple ; enfin, troisièmement, nous désirons élargir les possibilités de saisie informatique dans le cadre d’une visite domiciliaire au cas où l’occupant des lieux ferait obstacle à l’accès aux données présentes sur un support ou un terminal informatique.

Monsieur le ministre, ces modifications, qui ont d’ailleurs fait l’objet d’un large consensus avec vos services

M. le ministre opine.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc-Philippe Daubresse

Avant de clore mon propos, je tiens à vous faire part de notre inquiétude persistante. Vous le savez, nous avons mené plusieurs missions sur la gestion des condamnés terroristes sortant de détention. Même s’il ne s’agit pas de l’objet du présent projet de loi, raison pour laquelle je n’ai pas déposé d’amendement à ce sujet, nous avions évoqué cette question dans le cadre de la proposition de loi que j’évoquais précédemment.

Dès le mois de février, nous avons proposé la mise en place de mesures de sûreté : cette proposition a trouvé très rapidement une traduction législative, mais a été censurée par le Conseil constitutionnel au début du mois d’août.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc-Philippe Daubresse

Quand on lit la décision, on constate que le Conseil n’a cependant pas complètement fermé la porte. Dans ces conditions, le dépôt d’un nouveau texte est envisageable. Nous savons tous, monsieur le ministre, qu’il existe un trou dans la raquette en matière de suivi des personnes sortant de prison et condamnées pour terrorisme, et nous espérons que vous allez le combler.

Face au défi du terrorisme, nous nous devons de doter nos services des moyens et d’outils adéquats. Le Sénat a toujours fait preuve de responsabilité dans le strict respect des libertés individuelles : c’est cet esprit qui doit nous conduire à approuver le texte tel que la commission des lois l’a amendé.

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Alain Richard applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Mes chers collègues, j’invite chacun à respecter son temps de parole.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a souhaité se saisir pour avis de ce projet de loi en raison de son article 2, qui proroge l’article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure relatif à la technique de renseignement dite « de l’algorithme ».

À travers mon intervention, je défends aussi la position de la délégation parlementaire au renseignement, la DPR, que j’ai eu l’honneur de présider l’an passé.

Nous sommes plusieurs dans cette enceinte à nous souvenir des débats nourris que nous avions eus, ici même, en 2015 lors de l’adoption de ce dispositif expérimental. Certains collègues souhaitent rouvrir ce débat aujourd’hui. Tel n’est pourtant pas le calendrier prévu.

Certes, dans une démocratie, il faut toujours garder le cap d’un équilibre entre l’efficacité de la lutte contre le terrorisme et la préservation des libertés publiques, mais, en l’espèce, le projet de loi que nous examinons ce jour ne pose aucune question nouvelle en matière de libertés publiques, comme l’a très bien exposé le rapporteur au fond, Marc-Philippe Daubresse.

Je voudrais brièvement rappeler les limites que le législateur a fixées en 2015 à cette technique, et les garanties qui en découlent.

Citons les principales. Premièrement, l’utilisation des algorithmes doit avoir un objet très ciblé, puisqu’il ne s’agit que de la lutte contre le terrorisme. Deuxièmement, un dispositif tout entier soumis au contrôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, la fameuse CNCTR, doit être mis en œuvre. Je rappelle l’importance du Parlement dans ce dispositif, puisque quatre des neuf membres de cette commission sont des parlementaires, et veux rendre hommage à notre ancien collègue Michel Boutant qui a réalisé un travail absolument extraordinaire en son sein. Troisièmement, l’algorithme ne traite que des données de connexion, et non les données de contenu. Du reste, nous avons abordé ce point dans le rapport de la DPR que je viens de remettre au Président de la République. Quatrièmement, ce dispositif produit des résultats anonymisés. Pour lever l’anonymat, les services de renseignement, en l’occurrence la DGSI ou la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), doivent faire une demande spécifique au Premier ministre, qui statue après avis de la CNCTR.

Naturellement, on peut comprendre que la nouveauté du dispositif ait suscité des craintes en 2015. On voit que la réalité est en fait beaucoup plus modeste. À vrai dire, l’enjeu opérationnel des trois algorithmes qui existent aujourd’hui est précisément de restreindre les résultats aux seuls éléments pertinents et utilisables. On est donc loin du contrôle de masse indiscriminé évoqué à l’époque.

Il me semble, enfin, que, lorsque nous légiférons sur ces questions, il nous faut garder à l’esprit le caractère encore récent de cette technique. De ce point de vue, l’essentiel du débat se situe au niveau non plus de l’analyse du dispositif actuel, mais plutôt de la question de sa pérennisation, et surtout de ses éventuels développements futurs. C’est sur ce dernier point que nous aurons sans doute d’importants débats de fond lorsque le projet de loi relatif au renseignement reviendra devant nous, dans quelques mois je l’espère, comme le Gouvernement s’y est engagé.

Dans ces conditions, la prorogation de l’autorisation d’un recours aux algorithmes n’appelle de notre part aucune appréciation contraire. Aussi, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable sur ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de ce projet de loi ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par le règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Alain Richard.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Mes chers collègues, nous revenons aujourd’hui sur la législation relative à la lutte contre le terrorisme.

Je n’ai rien à ajouter aux propos du ministre puis du rapporteur en ce qui concerne le poids de la menace et la nécessité de garder à l’esprit tous les points de vigilance que nous avons développés depuis cinq ans.

Alors que nous avons légiféré à bien des reprises depuis cinq ans en matière de lutte contre le terrorisme, nous débattons aujourd’hui d’une mise à jour de portée limitée.

Nous sommes en effet d’accord sur le contenu des quatre prérogatives spécifiques, qui ont été instaurées en 2017 à l’issue de l’état d’urgence, c’est-à-dire les visites domiciliaires, les mesures individuelles de contrôle administratif, les périmètres de protection et les fermetures de lieux de culte. Le projet de loi prévoit aussi la prorogation de l’utilisation, dans les conditions limitées que vient de décrire le président Christian Cambon, des algorithmes de tri de données permettant le repérage des menées terroristes.

Le Gouvernement nous propose de proroger l’application de ces mesures pour une durée d’un an, dans la perspective de textes de loi qui viendront les préciser ou les encadrer, et pour tenir compte du fait que la crise sanitaire a allongé le délai nécessaire à leur préparation.

Il existe une divergence entre la position de la commission et celle du Gouvernement, mais il me semble que celle-ci est surmontable.

En effet, nous souhaitons tous que soient introduites ultérieurement dans le code de la sécurité intérieure des adaptations procédurales aux quatre mesures dont j’ai parlé, notamment pour préciser – ce n’est pas si facile – la notion de lieu de culte, car les lieux dans lesquels se déroulent les activités qu’il convient de contrôler sont parfois complexes et multiples, mais également les conditions d’intervention du juge des libertés et de la détention en termes de délais et de facilité d’approche, parce que nous rencontrons des obstacles pratiques sur certaines parties du territoire.

Nous devons procéder à ces adaptations, mais nous devons également approfondir très sérieusement notre réflexion sur les critères et le cadre de fonctionnement des algorithmes de recherche de données.

Il faut bien le dire – M. le ministre y a fait allusion –, la préparation de ces mesures, disons, de « confortement » des algorithmes est rendue plus difficile par les récentes décisions de justice, qui confirment d’ailleurs une jurisprudence antérieure de la Cour de justice de l’Union européenne. Cette dernière, pour des motifs qui tiennent beaucoup plus à la protection du consommateur de services informatiques qu’à des préoccupations de sécurité publique et de nature régalienne, affirme que l’on ne peut pas imposer aux opérateurs eux-mêmes de conserver des données pour une durée indéterminée sur instruction des autorités de sécurité publique.

Le Conseil d’État aura bientôt à tirer les conséquences de cet arrêt sur la législation française dans les affaires dont il est saisi. Nous verrons que la position de la CJUE ne prive pas entièrement l’État de ses facultés d’intervention : il reste possible d’exploiter ces algorithmes, même en respectant la décision de la Cour de justice.

Le rapporteur Daubresse le soulignait : nous ne pouvons pas non plus rester sur l’échec collectif – il faut bien le dire, nous étions à peu près tous d’accord – qu’a représenté la censure par le Conseil constitutionnel de la proposition de loi instaurant des mesures de sûreté, alors que cette décision nous laisse la possibilité, là encore, de prévoir des mesures de sûreté, certes plus restreintes et plus limitées dans le temps, mais qui permettraient d’encadrer les mouvements des personnes sortant de détention après avoir été condamnées pour terrorisme.

Le groupe que je représente soutient plutôt la position du Gouvernement, c’est-à-dire une simple prorogation des mesures actuelles, puis l’examen d’un texte modificatif au cours la première moitié de l’année 2021, de sorte que la législation soit vraiment stabilisée. Toutefois, la position de la commission est proche.

J’ai eu le privilège de participer à toutes les discussions en matière de législation antiterroriste depuis 2015 : il y a toujours eu un accord entre le Gouvernement, la majorité sénatoriale et les autres groupes du Sénat. Il me semble que la concertation et le débat, qui se poursuivront lors de la réunion de la commission mixte paritaire, devraient nous permettre d’aboutir de nouveau à un texte opérationnel et respectueux des libertés.

M. Bernard Buis applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je rappelle que, en application d’une décision de la conférence des présidents, le port du masque est obligatoire y compris pour les orateurs. Certes, ce n’est pas extrêmement confortable ni agréable, mais chacun doit respecter cette décision.

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi soumis à la Haute Assemblée vise à proroger jusqu’au 31 juillet 2021 deux dispositions d’exception en matière de lutte contre le terrorisme, la seconde ayant valeur d’expérimentation. Le troisième article du texte prévoit les conditions d’application de ces mesures dans le département de Mayotte.

Nous comprenons la nécessité absolue de sécuriser juridiquement des mesures qui pourraient intervenir au-delà du 31 décembre 2020. Pour autant, nous tenons à préciser que, dans notre esprit, cette prorogation ne vaut pas blanc-seing. Le Parlement doit pleinement exercer sa mission constitutionnelle de contrôle du Gouvernement, a fortiori dans un domaine où le respect des droits et des libertés est mis en balance avec l’impératif de protection de nos concitoyens.

Ainsi, comme l’indiquait à juste titre le Défenseur des droits en 2017 dans son avis sur le projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, l’enjeu est de taille. Il s’agit bien de maintenir « l’équilibre qui fonde le droit pénal entre exigences de sécurité et protection des droits et libertés, et, d’autre part, l’équilibre entre rôle de l’autorité administrative et celui de l’autorité judiciaire. »

Si nous entendons l’argument de la crise sanitaire qui contraint le calendrier parlementaire, les conditions d’exercice de nos libertés fondamentales valent bien, à notre sens, un débat approfondi. Nous en avons encore eu la preuve hier lorsque nous avons discuté des mesures de sortie de l’état d’urgence sanitaire. Nous ne pensons pas que la succession de textes d’exception doive devenir une habitude. Au contraire, il faut, je le crois, viser une certaine stabilité de notre législation en matière de sécurité intérieure et de renseignement, sans rien céder pour autant à l’angélisme et aux bons sentiments.

La commission des lois, suivant son rapporteur, a pérennisé des dispositions d’exception, comme la possible fermeture administrative de lieux de culte. Elle a aussi élargi les conditions de saisie informatique à domicile en cas de refus d’accès aux données, tout en renforçant l’information des autorités judiciaires sur les mesures individuelles de contrôle. Là encore, nous aurons bien sûr besoin d’évaluations ultérieures pour mesurer pleinement l’efficacité et les effets de ces dispositions, dont nous comprenons qu’elles sont indispensables à nos services de police et de renseignement.

Mon groupe émet cependant quelques réserves sur l’expérimentation en cours de la technique des algorithmes et a fortiori sur sa prorogation. Nous prenons bien entendu acte de l’avis favorable de nos collègues de la commission des affaires étrangères.

Rappelons toutefois que ces techniques de surveillance, qui font appel à l’utilisation de l’intelligence artificielle, évoluent depuis cinq ans dans un environnement très mouvant sur le plan technologique et dans lequel, de surcroît, notre souveraineté a du mal à se faire valoir. Trois algorithmes différents sont actuellement en vigueur. Le champ d’expérimentation n’est pas le même qu’il y a trois ans et ne sera pas le même dans six mois.

En conclusion, nous plaidons pour un renforcement du contrôle parlementaire. La commission des lois pourrait sans doute se saisir utilement d’une réflexion prospective, et ce dans la perspective de l’examen du projet de loi relatif au renseignement de 2021.

Mes chers collègues, par raison – à savoir notre attachement à l’ordre républicain et à la sécurité de nos concitoyens – plus que par conviction, le groupe RDSE soutiendra et votera ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi s’inscrit, comme d’autres, dans la lignée des dispositifs reconduits par le Gouvernement pour cause d’épidémie de la covid-19.

Son article 1er proroge, dans la version initiale du texte du Gouvernement, les quatre premiers articles de la loi SILT d’octobre 2017.

Ceux-ci revêtaient un caractère temporaire, avec, pour les dispositions qu’ils instauraient, une échéance fixée au 31 décembre prochain. Prenant prétexte de la crise sanitaire et considérant, de ce fait, que le Parlement ne disposait pas du temps nécessaire pour débattre des conditions dans lesquelles ces dispositifs doivent être abandonnés, pérennisés ou aménagés, le Gouvernement a souhaité les proroger d’un an.

Alors que les députés ont raccourci ce délai au 31 juillet 2021, le rapporteur de la commission des lois du Sénat a tout simplement modifié le texte pour pérenniser, d’emblée, les mesures en question. Or aucune évaluation n’en a été faite et leur application suscite au contraire de nombreuses dénonciations.

Ainsi, comme l’indique dans l’une de ses motions le Conseil national des barreaux, « les dispositifs mis en place par la loi dite “SILT”, très intrusifs, qui s’apparentent à des assignations à résidence et des perquisitions contrôlées par l’administration, contournent la procédure judiciaire et les droits de la défense ». Et d’ajouter : « ces dispositifs ont des conséquences très lourdes pour les personnes visées ».

En effet, la loi SILT a transformé les assignations à résidence en « mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance » et les perquisitions en « visites et saisies ». Mais il s’agit bien des mêmes mesures liberticides que celles de l’état d’urgence, contournant la justice pénale ordinaire et les protections qui lui sont associées, mesures, dans leur très grande majorité, fondées sur des informations confidentielles, difficiles à contester et qui ouvrent donc la voie à des discriminations.

L’état d’urgence n’a malheureusement pas prouvé son utilité pour prévenir les actes de terrorisme et il a été la source de dérives inacceptables, comme les assignations à résidence détournées de leurs objectifs initiaux en étant, par exemple, utilisées à l’encontre de militants écologistes.

La loi SILT n’est pas plus utile, malgré ce que veut nous faire croire le rapport rendu chaque année par les services du ministère de l’intérieur, ou encore celui que vous avez produit en début d’année, monsieur Daubresse, et sur lequel vous vous appuyez pour pérenniser ces articles. En quoi votre rapport nous prouve-t-il que ce régime dérogatoire est nécessaire pour notre sécurité ? Le droit pénal et nos services de renseignement, dont les moyens humains doivent être renforcés, sont largement suffisants !

Amnesty International a d’ailleurs déjà démontré que les dispositions de la loi pouvaient mener à des violations du droit au respect à la vie privée et familiale, du droit au travail, de la liberté d’aller et venir et du droit à une procédure équitable, en plus des graves conséquences psychologiques qu’elles pouvaient entraîner.

En outre, en 2018, lors de l’examen périodique universel de la France à l’Assemblée générale des Nations unies, plusieurs États se sont inquiétés du manque de respect des droits humains dans le cadre de la lutte contre le terrorisme dans notre pays et ont insisté sur la nécessité de mettre en place un mécanisme indépendant de suivi.

Quant à l’article 2 du projet de loi, il vise à proroger la disposition expérimentale issue de la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement : la technique de recueil de renseignements algorithmique.

Plus que critiquable sur le fond, cette technique apparaît de surcroît inutile, puisque l’analyse en continu des données par les boîtes noires n’aurait permis de détecter qu’une petite dizaine de profils faiblement à risque. La disproportion entre ces résultats et les moyens mis en œuvre pour écouter et observer la société tout entière est, pardonnez-moi, aberrante !

De plus, dans son arrêt du 21 décembre 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a estimé qu’une réglementation nationale prévoyant, à des fins de lutte contre la criminalité, une telle conservation des données constituait en soi une atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux.

Au moment des débats sur la loi SILT, nous dénoncions déjà la banalisation des mesures d’urgence et la fragilisation de l’État de droit et des libertés fondamentales. Aucune évaluation des dispositifs prorogés n’a été faite. En dépit des décisions de censure de certaines dispositions par le Conseil constitutionnel, ni la nécessité, ni la proportionnalité, ni l’efficacité de telles mesures n’ont été démontrées.

Nous restons aujourd’hui convaincus que les vraies réponses à apporter pour lutter contre le terrorisme résident dans les moyens donnés à la justice et aux services de renseignement, plutôt que dans la surenchère en matière législative. Tous les fonctionnaires de terrain en témoignent : les lois ne manquent pas, les moyens oui !

Pour toutes ces raisons, vous l’aurez compris, nous voterons définitivement contre ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon groupe est à l’aise vis-à-vis de ce projet de loi et des conclusions issues du débat devant la commission des lois.

La menace terroriste est toujours là ! Vous avez eu la pertinence, monsieur le ministre, de mettre les choses en perspective : vous avez rappelé les 11 attaques et 20 morts depuis 2017, tout en mettant en balance les 32 attaques qui auraient été déjouées. Nous comprenons donc bien les difficultés et le niveau du péril.

Pour une fois, nous avons pu, sur ce sujet, travailler sinon en anticipation, du moins largement en amont. La loi de 2017, qui prévoyait la durée d’expérimentation, prévoyait également un suivi tout particulier par le Parlement et vous avez rappelé la communication régulière par vos services des éléments relatifs à la mise en œuvre de ces mesures sur l’ensemble du territoire.

Travailler en amont est toujours une bonne méthode. Sous l’égide de notre collègue M. Marc-Philippe Daubresse, une mission de contrôle a pu être mise en place ; elle nous a permis de mesurer la pertinence, ou non, des quatre mesures adoptées – dans le cas précis, la pertinence est clairement avérée.

C’est donc une bonne méthode de travail pour le Parlement, et c’est ce qui nous permet, au moment où vous revenez devant nous pour nous proposer une prorogation de l’expérience, de vous suggérer, plutôt, une pérennisation.

Celle-ci nous paraît souhaitable pour les quatre mesures, qui, par ailleurs, donnent aujourd’hui lieu à une utilisation tout à fait homéopathique. Quand, par exemple, vous avez fait référence à un volume de quelque 330 Micas, monsieur le ministre, il s’agit pour l’essentiel de mesures intervenues dans la foulée de la loi de 2017. Aujourd’hui, l’utilisation est très raisonnable, puisque vous avez mentionné 60 mesures encore en cours.

Nous pensons par conséquent souhaitable pour ces quatre dispositions, correspondant à des besoins de la pratique, très contrôlées sur le plan juridique et ayant reçu l’aval du Conseil constitutionnel, d’en assurer la pérennisation.

Mon groupe n’est pas opposé aux mesures très précises, et qui ont été ajustées, figurant dans les propositions de la mission de contrôle, notamment l’extension de la fermeture aux lieux connexes lorsque l’on a la preuve d’éléments de radicalisation au niveau d’un lieu de culte. Le renforcement de l’information des parquets sur les autorisations prises par les préfets nous paraît plutôt une bonne méthode. Quant à l’élargissement de la possibilité de saisir les moyens informatiques lors des perquisitions, nous savons que c’est un sujet.

Reste donc, en définitive, la question soulevée préalablement, monsieur le ministre, à savoir votre souhait de maintenir une prorogation de cette expérience au 31 décembre 2021 et de ne pas retenir notre proposition d’inscrire les mesures concernées dans le droit commun.

J’aurais tendance à rester sur la logique adoptée par la commission des lois et à défendre, encore, l’idée d’une consolidation du droit.

D’abord, voilà trois ans que l’expérience est menée. En quoi quatre années seraient-elles de nature à changer notre regard sur ces mesures ? Je suis un peu dubitatif… Le délai actuel me paraît convenable.

Par ailleurs, le bilan est robuste. Je ne vois pas très bien, sur l’une ou l’autre de ces mesures, où se situeraient les points de débat.

Enfin, deux motifs de fond conduisent mon groupe à privilégier la pérennisation à la prorogation sèche.

Premièrement, notre préférence pour le recours au droit commun. Nous sommes en général très réticents à des mesures d’exception. La loi de 2017 avait fait l’objet d’amples débats ; dès lors que nous disposons aujourd’hui d’éléments stabilisés, nous préférons voir ces mesures fixées dans le droit commun plutôt que traitées de manière dérogatoire.

Deuxièmement, la sérénité du débat public, que vous-même, monsieur le ministre, appelez de vos vœux. Nous partageons, bien sûr, cet objectif. Nous nous permettons simplement d’observer qu’une prorogation au 31 décembre 2021 impliquerait la tenue du débat à l’automne prochain. Or une élection majeure dans notre pays sera alors dans tous les esprits. Pour le coup, nous pourrions craindre un manque de sérénité et une possible instrumentalisation du sujet.

S’agissant des algorithmes, nous avons en revanche suivi votre proposition de nouveau délai, car un travail d’évaluation reste à faire.

J’ai pris la peine de lire le rapport dit d’évaluation au 30 juin 2020, très récent, mais antérieur à la décision de la Cour de justice de l’Union européenne. Il s’agit d’un document extrêmement technique, expliquant comment ont été sélectionnés les trois algorithmes et exprimant un certain nombre de demandes, notamment sur les données IP et URL.

Il est clair que, sur ces sujets, les choses ne sont pas du tout stabilisées juridiquement et que les conséquences de l’arrêt de la CJUE, notamment au regard des demandes d’extension des données émanant de vos services – c’était bien le sens des demandes formulées dans le rapport d’évaluation… – exigent une poursuite des travaux. À l’évidence, ces dispositions trouveront assez aisément leur place dans le texte relatif au renseignement auquel le président Christian Cambon faisait référence.

S’agissant des libertés publiques, mon groupe y est, bien sûr, extrêmement attaché. Mais nous avons tout de même le sentiment qu’en matière de terrorisme tout est maintenant bordé : il s’agit – heureusement – d’un segment tout à fait particulier, et non d’atteintes générales auxdites libertés.

Autant, donc, nous sommes extrêmement attentifs à la problématique des libertés publiques, autant, sur ce point-là, nous n’avons pas le sentiment que le texte soit critiquable.

C’est la raison pour laquelle j’ai indiqué, en préambule, que mon groupe était à l’aise sur ces sujets. S’il restait pour le ministère de l’intérieur, ou pour le Gouvernement au sens large, des points de discussion, comme l’a suggéré Alain Richard, il me semble que les jours dont nous disposons avant la réunion de la commission mixte paritaire permettront de lever les dernières difficultés et de pouvoir, ainsi, nous orienter directement vers une pérennisation, dans les conditions de sérénité que vous avez appelées de vos vœux.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Que ce soit 2015 ou 2016, nous avons tous vécu, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ces années dans la douleur, dans la colère aussi, tant le terrorisme nous a frappés dans nos cœurs et dans nos chairs. Ce n’était pas les premiers attentats que nous avions à connaître et la France, cette année-là, ne fut pas la seule touchée. Mais nous fûmes, toutes et tous, stupéfaits par cette violence et par cette haine.

Au sein du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, nous sommes fiers de l’action que menèrent, alors, François Hollande et Bernard Cazeneuve. Jamais ils n’ont dévié d’une ligne de fermeté républicaine dans le cadre de l’État de droit. Car la victoire du terrorisme, mes chers collègues, serait que nous changions, que nous ne chérissions plus notre liberté par peur pour notre sécurité, que nous renoncions à « être Charlie », que nous renoncions à être nous-mêmes.

Au nom de mon groupe, je souhaite d’abord rendre hommage à celles et ceux qui se sont engagés et qui s’engagent dans cette lutte contre le terrorisme, dans les services de police et de renseignement, dans nos armées hors de nos frontières, mais également au sein de notre justice, celle-ci constituant, dans un État de droit, un axe fondamental de cette lutte.

En 2014, nous avons créé de nouvelles infractions, qui permettaient de judiciariser de manière plus précoce des actes susceptibles d’amener à la violence, tout en assurant dans les meilleurs délais un contrôle réel, par le juge judiciaire, des atteintes aux libertés que cela pouvait entraîner.

En 2015, avec la loi relative au renseignement et la création de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, nous avons encadré les actions des services de renseignement, en leur donnant des moyens et en adoptant la possibilité de faire des expérimentations par algorithme des données de connexion.

En 2016, enfin, une proposition d’introduction de l’état d’urgence dans la Constitution aurait pu permettre d’inscrire dans une loi organique les dispositions dont celui-ci permettait la mise en œuvre. Mal introduite, cette proposition n’a malheureusement pas prospéré, et c’est un regret que nous avons encore aujourd’hui, au vu de la situation.

Les mesures de la loi SILT ont été adoptées en 2017, au sortir de l’état d’urgence. En fait, nous avons procédé à une inscription dans le droit commun et à un changement de nom : nous avons remplacé « perquisitions » par « visites domiciliaires » et « assignations à résidence » par « mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance », les Micas. Nous avons en outre mis en place des possibilités administratives de fermeture de lieux de culte et des périmètres de protection.

Compte tenu de la nature de ces mesures administratives, c’est le Sénat, sur l’initiative du président de la commission des lois de l’époque, Philippe Bas, qui a émis le souhait d’une application expérimentale pour trois ans, et le Conseil constitutionnel s’est prononcé dans ce cadre de mesures strictement contrôlées par le Parlement et provisoires.

Par le présent projet de loi, tel qu’il nous parvient de l’Assemblée nationale, il nous est proposé de proroger ces mesures de sept mois, tout comme l’expérimentation d’algorithmes, qui, après avoir été autorisée, en 2015, jusqu’en 2018, a été prolongée jusqu’au 31 décembre 2020, sous le contrôle de la CNCTR.

Les mesures de la loi SILT et les mesures concernant les algorithmes s’éteignent effectivement au 31 décembre 2020 et, faute d’avoir pu débattre cette année d’un texte législatif plus large, compte tenu des circonstances sanitaires, mais aussi de la nouveauté créée par la décision de la Cour de justice de l’Union européenne sur la conservation des données de connexion, il aurait pu sembler raisonnable d’en rester à la proposition du Gouvernement.

En effet, monsieur le rapporteur, on trouve tout de même, dans le texte issu des travaux de la commission des lois, deux contradictions.

D’une part, alors que le Sénat, voilà trois ans, a demandé un renforcement des outils de contrôle parlementaire et imaginé un dispositif s’éteignant au bout de trois ans, eu égard à la menace que pouvait représenter l’usage de telles mesures administratives, c’est en son sein, aujourd’hui, que l’on propose de pérenniser ces mêmes mesures, et ce sans conserver à l’identique les outils de contrôle parlementaire.

D’autre part, monsieur le rapporteur, vous acceptez de changer la première partie du texte pour aller vers une pérennisation, mais, dès lors que l’on vous fait des propositions de simplification de la saisine de la CNCTR ou de conservation des données entre la voix et l’image, vous n’en voulez pas dans la deuxième partie. C’est un peu paradoxal !

Sur la question, déjà évoquée, des personnes sortant de prison, les mesures que nous envisageons d’adopter, les Micas, sont plus fortes que celles qui ont été censurées par le Conseil constitutionnel, après avoir été votées, dans cette enceinte et à l’Assemblée nationale, pendant l’été.

Dans ce contexte, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain défendra la suppression de l’article 1er, au motif que la commission des lois nous propose une inscription définitive dans la loi, sans conserver les mêmes outils de contrôle parlementaire.

Nous proposerons, par amendement, de préciser certaines mesures portant sur les périmètres de protection et de renforcer les exigences relatives aux motivations de mise en œuvre d’une visite domiciliaire.

Enfin, nous refuserons la suppression des mesures permettant un contrôle parlementaire effectif.

S’agissant de la deuxième partie du texte, nous proposerons d’autoriser la CNCTR à accéder aux fichiers de souveraineté dans le cadre de sa mission de contrôle et de simplifier des dispositions relatives à la conservation des données et aux décisions de la CNCTR, propositions qui sont inspirées des récents rapports d’activité de cette Commission.

L’article 2, même non modifié par nos propositions, ne nous poserait en définitive pas trop de problèmes – c’est la suite logique de la loi relative au renseignement – et nous pourrions être prêts à accepter une pérennisation des mesures évoquées à l’article 1er, qui sont et restent néanmoins exorbitantes du droit commun tant elles constituent des mesures administratives susceptibles de porter atteinte aux libertés, si nous avions toutes les garanties d’une mise en œuvre correcte et d’un contrôle parlementaire très pointilleux. Mais il est probable, malheureusement, que nos propositions ne soient pas retenues…

Ainsi, sauf bonne surprise – c’est toujours possible dans un débat parlementaire –, il est également probable que mon groupe soit contraint de voter contre ce texte, à l’issue de nos débats. Mais… espérons une bonne nouvelle !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le niveau de la menace à laquelle la France a été confrontée, en particulier depuis 2015, n’a malheureusement pas faibli. Oui, le risque terroriste est toujours là ! Oui, le danger islamiste est toujours présent !

Le terrorisme islamiste est susceptible de frapper n’importe quand et n’importe où sur notre sol. Le virus n’a pas amoindri la menace, laquelle demeure élevée. La plus grande vigilance reste donc de mise.

Bien au contraire, nous constatons les avancées des islamistes dans nos quartiers, des attentats terroristes à bas bruit. On n’en parle presque plus, mais ils rappellent que la menace reste présente partout.

En témoigne l’acte de l’assaillant terroriste devant les anciens locaux de Charlie Hebdo, voilà quelques jours. Cette attaque était la quatrième perpétrée sur le sol français depuis le début de l’année. Cette menace va se renforcer encore avec des sorties de prison inquiétantes : d’ici à la fin de l’année, 45 détenus condamnés pour terrorisme seront libérés. Au total, on compte encore 5 050 individus condamnés pour terrorisme dans les geôles françaises.

Plusieurs dispositions du code de la sécurité intérieure introduites au cours des dernières années pour renforcer l’arsenal de lutte contre le terrorisme ont reçu, compte tenu de leur sensibilité au regard des libertés publiques et individuelles, un caractère temporaire et arriveront à échéance, sauf intervention du législateur, le 31 décembre prochain.

Sont tout d’abord concernées quatre dispositions de la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, à savoir les périmètres de protection, la fermeture des lieux de culte, les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, les visites domiciliaires et saisies, telles que les perquisitions administratives.

Est également visée la technique de l’algorithme, consistant à imposer la mise en œuvre sur les équipements d’opérateurs de communications électroniques et de fournisseurs de services d’accès à internet de programmes informatiques analysant les flux de données, en vue de détecter des connexions susceptibles de révéler une menace terroriste.

Au regard des craintes qu’elle a suscitées à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif au renseignement au Parlement, cette technique a été strictement encadrée par le législateur et n’a été autorisée qu’à titre expérimental. Initialement fixée au 31 décembre 2018, l’échéance de cette expérimentation a été repoussée de deux ans, en raison des difficultés techniques rencontrées par les services de renseignement pour définir l’architecture et le paramétrage du dispositif. Sauf prorogation ou pérennisation par le législateur, cette mesure prendra donc fin le 31 décembre prochain.

La menace terroriste étant toujours prégnante, l’État a besoin de ces outils pour assurer la sécurité des Français.

L’objet de ce projet de loi, composé de trois articles, est simple : prolonger d’une année la durée de validité de ces différentes dispositions expérimentales, qui prennent fin simultanément le 31 décembre prochain.

Les articles 1er et 2 procèdent, respectivement, à la prorogation des dispositions de la loi SILT et de l’article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure relatif à l’algorithme. L’article 3, quant à lui, vise à rendre cette prorogation applicable dans certaines collectivités d’outre-mer.

Initialement fixée à un an, la durée de ces prorogations a été ramenée à sept mois par l’Assemblée nationale, afin de ne pas retarder excessivement la tenue d’un débat de fond sur les mesures concernées.

Je me réjouis que la commission des lois du Sénat ait souhaité pérenniser, sous réserve de certains ajustements destinés à en renforcer l’opérationnalité, plutôt que prolonger les dispositions de la loi SILT, déjà évaluées et à l’efficacité prouvée.

Je me félicite également que la commission ait accepté la prorogation simple de l’article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure, proposée par le Gouvernement, jugeant qu’il était préférable de reporter le débat sur l’algorithme à une discussion plus large sur la loi relative au renseignement.

Avant de conclure, je souhaite rendre hommage aux services de renseignement – cela a déjà été fait –, aux policiers, aux gendarmes, qui font chaque jour un travail exceptionnel pour identifier les menaces, suivre les individus dangereux et faire échouer leurs projets meurtriers.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, pour toutes ces raisons, mon groupe votera ce texte dans la version issue des travaux de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la tâche qui est aujourd’hui la nôtre est loin d’être aisée, puisqu’il nous est demandé de trouver un précaire équilibre entre la liberté et la sécurité de nos citoyens.

Malheureusement, derrière l’objectif affiché de donner à ceux-ci un cadre de vie serein et apaisé, à l’abri de toute menace terroriste, ce projet de loi ne parvient pas suffisamment à concilier ces deux enjeux essentiels à l’existence d’une société libre et éclairée.

En 2017, la loi SILT avait incorporé dans le droit commun des mesures de l’état d’urgence. Pour la première fois, des dispositions d’exception avaient revêtu un caractère général, banalisant au sein de notre législation des mesures de police administrative qui sont loin d’être anodines.

Le législateur d’alors ne s’y était pas trompé. Il avait donné à ces mesures un caractère temporaire et avait souhaité limiter leur durée d’application au 31 décembre 2020.

Cette échéance arrivant à son terme, l’exécutif s’est tout naturellement saisi de cette question. Mais, alors qu’un débat sérieux aurait dû être mené sur l’abrogation ou la pérennisation de ces mesures, le Gouvernement a préféré prolonger l’expérimentation conduite depuis 2017, estimant que la crise sanitaire pourrait être de nature à biaiser les discussions parlementaires.

Ainsi était-il proposé, à l’article 1er, de proroger de sept mois des dispositions de la loi SILT conférant à la police administrative des pouvoirs trop importants : pouvoirs, notamment, de définir des périmètres de protection, de déclarer la fermeture temporaire de lieux de culte, d’ordonner des mesures individuelles de contrôle et de surveillance, de réaliser des visites domiciliaires. Le projet de loi prévoit également, en son article 2, une prorogation similaire pour les algorithmes votés en 2015 et prolongés en 2017. Ceux-ci permettent notamment de détecter les menaces terroristes via les réseaux internet et de téléphonie mobile.

Il est à déplorer que les travaux conduits en commission des lois n’aient pas été de nature à améliorer ce texte, M. le rapporteur ayant jugé utile de faire voter un amendement qui vise à pérenniser les mesures prévues à l’article 1er.

Il va sans dire que nous ne pouvons pas considérer positivement cette modification, tant elle fait la part belle au soupçon, à l’arbitraire, aux dérives, à la stigmatisation par l’administration, au détriment de tout contrôle du juge judiciaire.

La question de l’efficacité des algorithmes doit également être posée. Entre 2017 et 2018, ceux-ci ont permis d’identifier moins de dix personnes à risque, et aucune d’elles ne présentait un danger immédiat ou sérieux pour la sécurité nationale. Sans une amélioration drastique de ces dispositifs numériques que vous qualifiez vous-même, monsieur le rapporteur, de « trop peu sophistiqués », et à défaut de résultats plus probants, il n’est pour l’heure pas pertinent de continuer à investir dans ces moyens d’espionnage informatique, ne serait-ce que temporairement, jusqu’au 31 juillet 2021.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, personne dans cette enceinte ne nie la menace terroriste qui plane et pèse sur notre nation. Il est évident que nous devons doter massivement nos services de renseignement de moyens humains, techniques et financiers.

En ce sens, tout doit être fait pour préserver la sécurité de nos concitoyens, mais non à tout prix. Je crains, hélas, qu’en l’état l’exécutif ne fasse fausse route.

Sans débat démocratique réel, sans bilans sérieux de ces mesures, celles-ci ne sauraient être prorogées ni pérennisées. Pour ces raisons, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme le rappelait le garde des sceaux, ministre de la justice, au mois de juillet dernier, à l’occasion de nos débats sur la proposition de loi instaurant des mesures de sûreté à l’encontre des auteurs d’infractions terroristes à l’issue de leur peine, dont j’étais rapporteure, les chiffres sont connus et ils sont inquiétants : 260 personnes sont actuellement détenues après une condamnation pour une infraction terroriste en lien avec la mouvance islamiste. Outre ces détenus condamnés, 252 personnes sont en détention provisoire après mise en examen pour des faits de terrorisme. Elles seront jugées dans les mois ou années à venir : 49 procès devraient se dérouler d’ici à 2021.

Parmi les condamnés – n’oublions pas ces chiffres –, 31 seront libérés en 2020, 62 en 2021, 50 en 2022, après avoir exécuté leur peine.

J’aimerais attirer votre attention sur ce point, mes chers collègues : nous faisons face à un phénomène qui était jusqu’à présent inconnu, et dont il est encore très difficile de prendre la pleine mesure.

Pourquoi, alors, tarder encore, comme le suggère le Gouvernement, en se bornant à proroger des dispositions dont notre mission sénatoriale de contrôle et de suivi de la mise en œuvre de la loi SILT a dit toute la pertinence et l’efficacité en février dernier ?

Pourquoi attendre un nouveau projet de loi, alors que le texte que nous examinons aujourd’hui tient déjà compte des « évolutions induites par les besoins opérationnels », pour reprendre les termes employés en conseil des ministres le 17 juin 2020 ?

Notre rapporteur l’a préconisé, et nous l’avons suivi en commission : les quatre dispositions de la loi SILT doivent être pérennisées, et non seulement prolongées !

Bien sûr, il existe un point d’équilibre entre sécurité et liberté, vers lequel nous devons tendre en permanence.

Mais ne détournons pas le regard : notre obligation première est celle d’assurer la sécurité des Français. Si nous ne nous donnons pas les moyens de protéger nos concitoyens, nous aurons en effet beau jeu de leur dire que nous faisons tout notre possible pour garantir leur liberté.

L’une des dernières études du Centre d’analyse du terrorisme communiquée au Sénat atteste une fois de plus la gravité de cette question. Elle révèle en effet que le taux de récidive des djihadistes se situe, selon les situations, au-delà de 50 % : il est souvent probable qu’un islamiste engagé dans une action violente se maintienne dans cette mouvance et récidive.

Mes chers collègues, nous avons pris du retard. La lourde censure par le Conseil constitutionnel de la loi instaurant des mesures de sûreté à l’encontre des auteurs d’infractions terroristes à l’issue de leur peine, que nous déplorons – nous avions pourtant apporté à ce texte un certain nombre de garanties –, nous oblige aujourd’hui à faire preuve de pragmatisme.

« Pragmatisme » : j’emploie ce mot à juste titre. Sur d’autres travées, certains nous reprochent parfois de poursuivre une quête illusoire de sécurité absolue, au détriment d’autres libertés. Il n’en est rien. En effet, mes chers collègues, sans sécurité, l’exercice de nos libertés fondamentales est-il possible ?

Aussi est-il urgent que nous dotions notre arsenal législatif de suivi des auteurs d’actes terroristes de toutes les mesures qui ont d’ores et déjà démontré leur caractère opérationnel.

Pour conclure, je tiens à remercier notre rapporteur, cher Marc-Philippe Daubresse, de la qualité de son travail.

Pour l’ensemble des raisons que j’ai évoquées, le groupe Les Républicains votera ce projet de loi tel qu’amendé par la commission des lois.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

I. – Le chapitre X du titre II du livre II du code de la sécurité intérieure est abrogé.

II. – Le II de l’article 5 de la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme est abrogé.

III. – À la première phrase du quatrième alinéa de l’article L. 226-1 du code de la sécurité intérieure, après le mot : « responsabilité », sont insérés les mots : « et le contrôle effectif ».

IV. – Au premier alinéa de l’article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure, après le mot : « culte », sont insérés les mots : « ainsi que des lieux gérés, exploités ou financés, directement ou indirectement, par une personne physique ou morale gestionnaire d’un lieu de culte qui accueillent habituellement des réunions publiques, ».

V. – L’article L. 228-6 du code de la sécurité intérieure est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les décisions du ministre de l’intérieur mentionnées au premier alinéa sont précédées d’une information du procureur de la République antiterroriste et du procureur de la République territorialement compétent, qui sont destinataires des éléments permettant de la motiver. Elles sont communiquées, ainsi que les décisions de renouvellement prises sur le fondement du cinquième alinéa, au procureur de la République antiterroriste et au procureur de la République territorialement compétent. »

VI. – Après le I de l’article L. 229-5 du code de la sécurité intérieure, il est inséré un I bis ainsi rédigé :

« I bis. – Lorsque les personnes mentionnées au troisième alinéa de l’article L. 229-2 font obstacle à l’accès aux données présentes sur un support informatique ou sur un équipement terminal présent sur les lieux de la visite, à leur lecture ou à leur saisie, mention est faite au procès-verbal mentionné au même article L. 229-2.

« Il peut alors être procédé à la saisie de ces données, dans les conditions prévues au I du présent article. »

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 1 est présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 3 rectifié est présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

L’amendement n° 5 est présenté par M. Leconte, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 1.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Cet amendement vise à supprimer l’article 1er. J’ai développé, lors de la discussion générale, les raisons qui motivent cette suppression. Il est donc défendu, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 3 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Par la loi SILT de 2017, le législateur a introduit dans le droit commun des mesures administratives liées à l’état d’urgence. Parmi elles, quatre relevaient d’un régime temporaire : la définition des périmètres de protection, la fermeture des lieux de culte, les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance et les visites domiciliaires.

Ces mesures arrivant à échéance le 31 décembre 2020, un débat parlementaire aurait normalement dû se tenir, afin d’évaluer leur pertinence et leur proportionnalité. Faisant fi des principes démocratiques de base et du devoir d’information du Parlement, le Gouvernement a décidé de proroger ces dispositions sans véritable évaluation de fond.

La droite sénatoriale est allée encore plus loin, puisqu’elle a décidé, en commission, de pérenniser ces mesures, les incorporant définitivement dans le droit commun.

Mes chers collègues, nous ne pouvons nous satisfaire d’une telle décision. Les dispositifs introduits dans notre droit par la loi SILT donnent à l’administration des pouvoirs exorbitants, qui bafouent les droits de la défense et contournent le contrôle du juge judiciaire.

La sécurité de nos concitoyens est primordiale, mais la lutte contre le terrorisme ne saurait être assurée par le biais de procédés administratifs arbitraires et attentatoires aux libertés publiques individuelles.

Ainsi est-il demandé, via le présent amendement, que soit supprimé l’article 1er du présent projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 5.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Comme indiqué au cours de la discussion générale, nous refusons la pérennisation de ces mesures exceptionnelles qui ont été votées pour trois ans, cette échéance ayant été adoptée sur l’initiative de notre assemblée. Même si le Conseil constitutionnel a validé ces mesures dans un cadre provisoire, nous considérons qu’il nous appartient de déterminer le bon équilibre entre les outils qui assurent notre sécurité et les garanties de notre liberté. Cet équilibre passe par un contrôle parlementaire exigeant de ces mesures, c’est-à-dire par des débats parlementaires successifs mettant en question leur efficacité et leur utilité.

C’est la raison pour laquelle nous refusons cette pérennisation ; c’est précisément parce que ces mesures se trouvent pérennisées à l’issue des travaux de la commission des lois que nous proposons la suppression de l’article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc-Philippe Daubresse

La commission émet, sans surprise, un avis défavorable sur ces amendements, dont les auteurs s’opposent non seulement à la pérennisation, mais aussi à toute prolongation des mesures dont il est question.

Je l’ai dit et répété : nous avons exercé une mission permanente de contrôle, via de multiples auditions, réitérées au gré de l’évolution de la situation du terrorisme, ainsi que des déplacements en province, à Paris, dans les lieux à risques comme les gares, à l’étranger. Dire que la mise en œuvre de ces mesures n’a été assortie d’aucune évaluation est donc tout à fait erroné.

Par ailleurs, après deux ans de pratique, à en croire tous les acteurs que nous avons entendus, judiciaires comme administratifs, un vrai consensus se dessine, du côté aussi bien de l’autorité administrative que de l’autorité judiciaire, pour que ces mesures puissent perdurer.

Enfin – je l’ai dit –, le Conseil constitutionnel a confirmé la conformité à la Constitution de ces mesures. Il n’y a par conséquent pas lieu de s’inquiéter quant à la sécurité juridique de leur pérennisation.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 13, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Au II de l’article 5 de la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, l’année : « 2020 » est remplacée par l’année : « 2021 ».

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

J’ai défendu cet amendement, monsieur le président, à l’occasion de mon discours introductif. Je ne m’y attarderai donc pas, si ce n’est pour dire qu’une différence de forme, mais non de fond, me sépare de M. le rapporteur, de la commission et de la majorité sénatoriale : nous pensons que ces mesures sont importantes, mais que le moment n’est pas venu de les pérenniser en tant que telles. Un débat plus long et plus construit doit avoir lieu entre les deux chambres – c’est la même position que j’ai tenue, d’ailleurs, à l’Assemblée nationale.

Je répète à M. le rapporteur – il le sait –, pour que chacun l’entende bien, que cela ne nous empêchera pas de donner aux services de renseignement et aux forces de l’ordre les moyens d’intervenir en attendant le débat parlementaire qui devrait se tenir l’été prochain.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc-Philippe Daubresse

Sans surprise, avis défavorable – nous avons eu ce débat avec M. le ministre pendant la discussion générale.

Un mot sur la justification donnée dans l’exposé des motifs, selon laquelle nous proposerions une pérennisation de ces mesures sans tenir compte du calendrier parlementaire, alors que nous avons déjà, depuis février, tenté de faire aboutir ces mêmes dispositions dans le cadre d’une proposition de loi : le Gouvernement ne se prive pas lui-même de déposer régulièrement auprès de la deuxième assemblée saisie – on l’a encore vu récemment – des amendements d’importance sans que ceux-ci aient été examinés par la première assemblée. Que chacun, donc, ait la liberté de le faire.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Dans la logique de mon intervention de tout à l’heure, à partir du moment où le principe et la position que défend le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain consistent à refuser la pérennisation, et dès lors que nous permettrions l’application de ces mesures, mais en s’assurant de la tenue d’un nouveau débat parlementaire, nous voterons cet amendement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 8, présenté par M. Leconte, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements n° 8, 9, 6 rectifié et 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 9, présenté par M. Leconte, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, et ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

L’amendement n° 6 rectifié, présenté par M. Leconte, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, et ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Après le sixième alinéa de l’article L. 226-1 du code de la sécurité intérieure, insérer un alinéa ainsi rédigé : « La mise en œuvre de ces vérifications ne s’opère qu’en se fondant sur des critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit entre les personnes. »

L’amendement n° 7, présenté par M. Leconte, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, et ainsi libellé :

Après l’alinéa 6

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

…. – L’article L. 229-1 du code de la sécurité intérieure est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d’État établit un référentiel des pièces types permettant de motiver les requêtes des visites domiciliaires et saisies et d’étayer les critères prévus au présent article. »

Veuillez poursuivre, monsieur Leconte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

L’amendement n° 8 tend à supprimer un alinéa qui lui-même supprime des outils essentiels dont nous disposions jusqu’à présent, en tant que parlementaires, pour contrôler les mesures issues de la loi SILT. Ce contrôle parlementaire est essentiel compte tenu de la nature de ces mesures ; il nous semble inenvisageable de proroger celles-ci, que nous le fassions à titre expérimental, provisoire, ou, a fortiori, de décider de les pérenniser, en nous passant des outils d’un contrôle parlementaire effectif et continu.

L’amendement n° 9 est un amendement de coordination.

L’amendement n° 6 rectifié vise à sécuriser le cadre légal des périmètres de protection en tendant à inscrire dans la loi, par souci de lisibilité, la réserve d’interprétation que le Conseil constitutionnel avait émise concernant les opérations qui sont menées au sein de tels périmètres, contrôle de l’accès et de la circulation, palpations de sécurité, inspection et fouille des bagages, visite de véhicules.

L’amendement n° 7 a pour objet de demander qu’un décret en Conseil d’État établisse un référentiel des pièces types permettant de motiver les requêtes des visites domiciliaires et saisies et d’étayer les critères prévus au présent article. C’est une demande des juges des libertés et de la détention, qui ont fait état d’un certain nombre de difficultés. Il nous semble, compte tenu de la nature de ces dispositions, qu’il est important d’imposer un référentiel transparent et étudié au plus haut niveau.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc-Philippe Daubresse

Concernant l’amendement n° 8, en cohérence avec la position exprimée précédemment, de la même façon que le dispositif de la loi SILT s’autodétruisait à l’échéance fixée – cette échéance atteinte, il était décidé de pérenniser ou non les mesures –, nous ne pensons pas qu’il soit nécessaire de maintenir un contrôle parlementaire renforcé, sachant que, bien évidemment, après le vote d’une loi, quelle qu’elle soit, le rapporteur, entouré de ses collègues, contrôle toujours son utilisation. Avis défavorable.

Sur l’amendement n° 9, de coordination, même avis, défavorable.

En revanche, sur l’amendement n° 6 rectifié, qui vise à inscrire dans la loi SILT la réserve d’interprétation du Conseil constitutionnel sur la réalisation de contrôles dans les périmètres de protection, nous partageons l’avis de M. Leconte, qui plaide à juste titre pour une telle inscription ; avis favorable.

Quant à l’amendement n° 7, nous sommes d’accord sur le fond, mais pas sur le vecteur. M. Leconte propose un décret en Conseil d’État.

Je recommandais, dans mon rapport, la mise en place d’un référentiel pour améliorer la motivation des requêtes des visites domiciliaires. Mais nous pensons, après avoir auditionné en particulier les services de police, que ce référentiel ne relève pas d’un décret en Conseil d’État et qu’il ne faut donc pas en faire un acte réglementaire. Avis défavorable, par conséquent, sur l’amendement n° 7.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements de M. Leconte.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement est adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Même si un petit accord est à noter sur un amendement, il nous semble que l’abandon du contrôle parlementaire sur des dispositions particulièrement importantes et lourdes n’est pas raisonnable. Nous ne saurions donc, malheureusement, adopter cet article dans la rédaction issue de notre débat en séance : sans surprise, nous voterons contre.

L ’ article 1 er est adopté.

(Non modifié)

L’article 25 de la loi n° 2015-912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement est ainsi modifié :

1° À la fin de la première phrase, la date : « 31 décembre 2020 » est remplacée par la date : « 31 juillet 2021 » ;

2° À la fin de la seconde phrase, la date : « 30 juin 2020 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2020 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 2 est présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 4 rectifié est présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Cet article 2 vise à proroger une disposition expérimentale issue de la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement : la technique de recueil de renseignements algorithmique.

Cette technique de renseignement, que nous dénonçons depuis 2015, n’a formellement fait l’objet que d’une application relativement faible et limitée : à la fin de l’année 2019, trois algorithmes auraient été mis en œuvre depuis leur légalisation. Selon un rapport confidentiel, les techniques en question n’auraient même jamais permis d’empêcher un seul acte terroriste. Pouvez-vous infirmer ou confirmer cette information, monsieur le ministre ?

L’analyse en continu des données par les boîtes noires n’aurait jamais permis de détecter qu’une petite dizaine de profils faiblement à risque. Là encore, monsieur le ministre, pouvez-vous infirmer ou confirmer cette information ?

La disproportion, si vous confirmiez ces informations, entre ces résultats et les moyens mis en œuvre pour écouter et observer la société tout entière doit nous conduire à nous interroger. Pour proroger, il nous faut donc faire un bilan de l’efficacité de ce système.

En outre, dans un arrêt du mois de décembre 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a estimé qu’une réglementation nationale prévoyant, à des fins de lutte contre la criminalité, une telle conservation des données constituait en soi une atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux. Cette jurisprudence, qui sera sans doute prochainement confirmée par l’issue donnée aux renvois préjudiciels effectués notamment par le Conseil d’État français, est selon nous l’énième signal du caractère dangereux de cette technique de renseignement intrusive et inefficace qui n’aurait jamais dû être légalisée, même sous forme d’expérimentation.

Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression de l’article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc-Philippe Daubresse

La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements, en cohérence avec ce que j’expliquais lors de la discussion générale.

Il s’agit de dispositifs expérimentaux, et le Gouvernement lui-même propose de prendre le temps de bien réfléchir, de poursuivre l’expérimentation et d’avoir une discussion approfondie sur la loi Renseignement. Cela correspond à ce que nous souhaitions.

Par ailleurs, monsieur Gay, quant à moi, au cours des auditions que j’ai réalisées, les services de la DGSI, en particulier, m’ont dit avoir d’ores et déjà obtenu des résultats grâce à ces algorithmes.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

L’avis défavorable que je m’apprête à émettre ne surprendra pas les défenseurs de ces amendements.

Je voudrais quand même répondre sur le fond, puisque la question m’a été posée, et même si vous avez déjà eu ce débat – mais comme il s’agit de sujets extrêmement importants, il m’appartient de vous répondre en quelques mots, monsieur le sénateur Gay.

Le premier argument est celui de M. le rapporteur – je l’ai moi-même déjà évoqué : nous aurons ce débat, ainsi que d’autres débats de fond relatifs au renseignement, l’année prochaine. Il s’agit – telle est la position du Gouvernement – de prolonger les expérimentations de la loi SILT pour qu’un débat serein puisse avoir lieu entre les deux assemblées.

Deuxième argument : il existe une délégation parlementaire au renseignement. J’ai déjà eu l’occasion de dire que les sujets qui sont ici en question, en particulier les sujets qui relèvent du « confidentiel défense », font évidemment l’objet d’un contrôle du Parlement, par le vote de la loi d’abord, mais aussi par le travail de la délégation parlementaire au renseignement, délégation pluraliste qui – M. Cambon l’a indiqué – a toutes les informations et tous les rapports.

N’hésitez pas – je ne le dis pas pour produire un effet de tribune : c’est une délégation importante dont dispose votre assemblée pour contrôler l’action de l’exécutif – à vous tourner vers elle et à demander les éléments qui relèvent du contrôle parlementaire et qui sont publiables, dans un cadre certes particulier, que chacun comprend, qui est celui de la confidentialité.

Troisième argument : il ne m’appartient pas de préciser si des actions terroristes ont pu être arrêtées grâce aux algorithmes seuls ; ce que je peux vous dire, c’est qu’ils sont efficaces. Ils sont au nombre de trois. Peut-être les services eux-mêmes portent-ils des jugements différents sur chacun de ces trois algorithmes ; nous aurons de toute façon l’occasion de nous pencher sur cette question lorsque nous nous retrouverons pour débattre de la pérennisation d’un certain nombre de dispositifs algorithmiques.

Je voudrais, à ce propos, souligner deux choses.

Premièrement, ces algorithmes permettent quand même de lever des doutes et ainsi, aussi, de protéger les libertés individuelles. Savoir si telle personne est en contact avec telle autre, possède telle information ou doit récupérer tel objet – nous pourrons peut-être en dire plus si vous vous adressez à la délégation au renseignement –, c’est lever des doutes, et c’est aussi, du même coup, s’exempter de faire du travail de renseignement sur des personnes à propos desquelles l’utilisation des techniques de renseignement proprement dites n’est manifestement pas justifiée.

Si je puis me permettre, monsieur le sénateur Gay, votre argument des libertés publiques est ainsi renversé : ces outils permettent précisément d’éviter d’avoir recours à des techniques de renseignement pourtant autorisées par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement et par le Premier ministre, parce que nous savons très bien, grâce à ces outils, que ces personnes ne sauraient relever de chefs d’accusation tels que celui de complicité de terrorisme.

Deuxièmement, en définitive, selon votre argumentation, l’État serait le seul à ne pas pouvoir utiliser les algorithmes. Les Gafam, dans votre téléphone, les utilisent…

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

L’État français, État souverain, dont l’exécutif est contrôlé par le Parlement, par la délégation parlementaire au renseignement, par le Conseil d’État, par le Conseil constitutionnel, par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, qui rend compte de chacun de ses actes, alors que les données stockées – vous l’avez dit, monsieur Cambon – sont anonymisées et in fine détruites et que les actions autorisées le sont sous le contrôle du juge administratif, l’État, donc, serait la seule entité à ne pas pouvoir utiliser ce que la technique moderne met à notre disposition, c’est-à-dire les algorithmes, qui sont d’ailleurs très contrôlés – et vous avez bien compris que je ne plaide en aucun cas pour leur généralisation sur tout, à tout moment et sans contrôle ?

Pour toutes ces raisons – une raison de forme, une raison de lien avec votre délégation parlementaire et deux raisons profondes de fond –, il ne me semble pas opportun, pour l’assemblée que vous représentez, de voter ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Je fais partie de ceux qui avaient été très réservés à l’été 2015 lors du vote de la loi relative au renseignement, même si j’ai tout à l’heure rendu hommage à Bernard Cazeneuve, en particulier sur le traitement massif des données de connexion par algorithme.

Toutefois, depuis, j’ai pu constater à quel point en particulier la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement était impliquée dans sa mission de contrôle, qu’il s’agisse des avis qu’elle devait rendre sur les demandes pour mettre en place une technique de renseignement ciblée ou de la validation des algorithmes.

Compte tenu du suivi effectué par la CNCTR sur ces sujets et des moyens qui lui sont accordés pour qu’elle dispose d’outils lui permettant d’assurer la crédibilité de sa mission, il me semble que nous pouvons valider cette disposition utile et continuer à expérimenter l’algorithme. Voilà pourquoi nous ne voterons pas en faveur de ces deux amendements de suppression.

L’expérimentation, sous contrôle de la CNCTR, mérite d’être poursuivie. Mais nous défendrons ultérieurement un certain nombre d’amendements visant à améliorer le fonctionnement de cette Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement pour qu’elle remplisse au mieux sa mission et puisse nous donner toute confiance sur la manière dont les services de renseignement utilisent les moyens qui sont à leur disposition.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 14, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer la date :

31 juillet 2021

par la date :

31 décembre 2021

II. – Alinéa 3

Remplacer la date :

31 décembre 2020

par la date :

30 juin 2021

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Cet amendement est défendu.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc-Philippe Daubresse

Favorable, pour les raisons exposées précédemment.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 2 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 11, présenté par M. Leconte, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Todeschini, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Marie et Sueur, Mmes Carlotti, Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Roger, Temal, M. Vallet, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l’article L. 822-2 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Au 1°, le mot : « trente » est remplacé par le mot : « soixante » ;

2° Au 2°, les mots : « cent vingt » sont remplacés par le mot : « soixante ».

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Je défendrai successivement trois amendements visant à renforcer l’efficacité de la CNCTR et à lui donner les moyens d’exercer son contrôle. Il importe que nous ayons confiance dans la manière dont elle réalise sa mission.

Nous souhaitons harmoniser un certain nombre d’exigences relatives à la conservation des données. Aux termes de l’article L. 853-1 du code de la sécurité intérieure, la durée maximale de conservation des données collectées par les dispositifs de captation de paroles avant destruction est de trente jours à compter de leur recueil pour les paroles prononcées à titre privé et celle des données de captation d’images est de cent vingt jours à compter de leur recueil pour les images captées dans un lieu privé.

Cette différence entre trente jours et cent vingt jours est totalement aberrante et rend difficile le travail à la fois des services de renseignement, mais aussi de la CNCTR.

Par souci de simplification et de cohérence du cadre légal en vigueur, le présent amendement tend à instaurer une durée maximale de conservation unique pour ces deux catégories de données qui sont souvent récupérées en même temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc-Philippe Daubresse

Avis défavorable, puisque le Gouvernement s’engage à mener une réflexion de fond sur la loi relative au renseignement, loi qui nécessite beaucoup de travail. Le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a reconnu que beaucoup de choses étaient engagées. Au travers de cet amendement et des deux suivants, M. Leconte nous propose de voter des dispositions intéressantes, mais de telles mesures doivent s’inscrire dans le cadre d’un débat plus approfondi annoncé par M. le ministre.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 10, présenté par M. Leconte, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Todeschini, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Marie et Sueur, Mmes Carlotti, Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Roger, Temal, M. Vallet, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 2° de l’article L. 833-2 du code de la sécurité intérieure est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’accès permanent, complet et direct prévu au premier alinéa du présent 2° s’applique notamment aux traitements intéressant la sûreté de l’État dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État, y compris lorsque ces traitements comportent des éléments communiqués par des services étrangers ou par des organismes internationaux ; ».

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Cet amendement vise à donner à la CNCTR un accès permanent, complet et direct aux fichiers de souveraineté. Cet accès s’applique notamment aux traitements intéressant la sûreté de l’État dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État, y compris lorsque ces traitements comportent des éléments communiqués par des services étrangers ou des organismes internationaux. Là aussi, il s’agit de permettre à la CNCTR d’exercer sa mission en confiance. Lorsqu’il est question de confiance, on ne peut pas repousser les débats, d’autant qu’il importe en l’espèce d’agir vite.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Je ne peux pas laisser dire que la CNCTR n’aurait pas les moyens de contrôler les éléments permettant à l’autorité exécutive de réaliser ce que le Parlement lui a autorisé de faire. Vous avez salué, monsieur Leconte, l’action de l’ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve. Je m’associe évidemment à votre hommage, d’autant que les moyens de la CNCTR étaient à l’époque un peu moins élevés. Ils ont été accrus, ce dont j’ai été témoin pendant trois ans en tant que ministre de l’action et des comptes publics.

Pour autant, je ne crois pas que, sous l’autorité du Premier ministre Cazeneuve ou sous celle du Premier ministre Valls, il y ait eu de fortes atteintes aux libertés publiques !

Il convient de rappeler, devant le Parlement, s’agissant d’une autorité administrative indépendante, que cette commission est consultée avant toute autorisation. J’ai eu l’occasion de souligner que le Gouvernement a toujours suivi les avis délivrés par la Commission. Le Premier ministre la consulte et suit scrupuleusement les mises en œuvre des techniques de renseignement. Cette instance dispose d’un accès absolument permanent, complet et direct aux relevés, aux registres et aux renseignements collectés, aux transcriptions et extractions, ainsi qu’aux opérations de destruction. Tous ces moyens d’action accordés par le Parlement figurent déjà dans la loi.

Par ailleurs, sur la propre initiative de la CNCTR ou lorsqu’une personne la saisit pour s’assurer qu’une technique de renseignement n’est pas utilisée de manière irrégulière, elle peut également procéder à tout contrôle des techniques invoquées en vue de vérifier si elles ont été ou non mises en œuvre.

Je souligne, monsieur le sénateur – c’est la raison pour laquelle j’ai donné un avis succinct à vos amendements précédents –, que nous sommes profondément en désaccord, comme en atteste la discussion générale. Lorsque le gouvernement que vous souteniez était aux responsabilités, nous avons été nombreux, à commencer par la majorité sénatoriale, à le suivre parce que la situation était grave. Oui, nous avons mis un terme à l’état d’urgence : c’est à mettre au crédit du Gouvernement parce qu’il a fallu, rappelons-nous des débats, beaucoup de courage pour organiser la transition. Il s’agissait en effet de respecter l’État de droit, l’état d’urgence ne pouvant être permanent. Mais nous ne sommes pas non plus naïfs : la menace terroriste demeure extrêmement prégnante, et nous en avons malheureusement un certain nombre d’illustrations aujourd’hui.

Des voix fortes du Parti socialiste qui ont été aux responsabilités – le Premier ministre Cazeneuve et le Premier ministre Valls, qui ont dû mettre en place le système de l’état d’urgence, ou d’anciens ministres de l’intérieur – s’élèvent. J’ai même entendu Matthias Fekl affirmer que la France avait raison de continuer à s’armer administrativement contre une menace terroriste, sous le contrôle du Parlement et du juge, qu’il soit judiciaire ou administratif.

Quoi qu’il en soit, je ne suis pas d’accord avec les attendus de votre discours, même si je respecte votre liberté de parlementaire. Si je me tiens à la disposition du Sénat pour répondre à vos questions, en tant que membre du Gouvernement, j’ai aussi le droit d’affirmer que je suis défavorable à un amendement : parfois de longues explications la nuit devant le Sénat m’ont démontré que je n’étais pas pour autant convaincant !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Monsieur le ministre, je ne vois pas de désaccord : nous avons voté tous vos amendements !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Nous avons souligné l’importance de la CNCTR, raison pour laquelle il paraît essentiel de lui donner les moyens d’agir. Je n’ai pas affirmé qu’elle n’en disposait pas, puisque j’ai reconnu, malgré mon scepticisme de départ, avoir été convaincu par cette commission. Simplement, et c’est la Commission qui l’écrit, il arrive qu’elle n’ait pas accès à un certain nombre de données communiquées par les services étrangers. Or il est important que la CNCTR ait accès à tous les renseignements. Donnons-lui les moyens qu’elle demande dans ses rapports d’activité de 2018 et de 2019.

Certes, tout cela est compliqué à mettre en œuvre et vous ne voulez pas voter aujourd’hui une telle évolution législative, mais j’espère que nous pourrons être suivis lors de l’examen du texte législatif plus large attendu sur le sujet, lequel devra également prendre en compte l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Monsieur le sénateur, vous avez annoncé vous-même que vous ne voterez pas le projet de loi présenté par le Gouvernement : je ne pense pas qu’on puisse être plus en désaccord ! Pour autant, je respecte votre position, mais je ne peux m’empêcher de constater qu’elle n’est pas la même quand vous êtes dans la majorité !

En tout état de cause, ne minimisez pas ce désaccord, que je regrette très profondément. Cela étant, vous reconnaissez désormais qu’une telle mesure est compliquée à mettre en œuvre et vous admettez que l’on puisse vouloir prendre le temps d’en discuter. Dont acte !

Néanmoins, la position du Gouvernement restera la même sur le combat de compétences entre la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, et la CNCTR. Sur ce sujet très précis, je veux vous dire à quel point cette commission, indépendante, contrôle ce qu’elle peut déjà contrôler dans le cadre de la loi. Parfois, il nous arrive aussi de considérer que nous pourrions aller plus loin pour la protection du territoire. Mais quoi qu’il en soit, in fine, nous respectons toujours les avis de la Commission.

Enfin, en ce qui concerne l’arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne, je ne m’en satisfais pas, pas plus que le Gouvernement. Cela a été rappelé, notamment par Philippe Bonnecarrère, il s’agit d’un arrêt extrêmement compliqué à comprendre. Il n’est pas aussi simple que la presse ou les écrits de vulgarisation l’affirment. En tant que ministre de l’intérieur, je regrette cette décision qui va handicaper le fonctionnement des services de renseignement – DGSE ou DGSI –, d’autant qu’il s’agit d’un sujet souverain pour les États : la protection de leur territoire.

Contrairement à vous, monsieur le sénateur, je ne pars pas du principe que nous allons simplement tirer dans la loi française les conclusions juridiques d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne !

Certes, nous en débattrons, mais il ne faut pas empêcher le politique, qui ne doit pas se contenter d’appliquer des jurisprudences en les inscrivant dans la loi, de faire son travail ! Le politique peut aller plus loin à l’échelon des instances européennes pour faire évoluer un certain nombre de dispositions à l’origine d’un tel arrêt. Il est très important de rappeler devant le Parlement français que le Gouvernement s’interroge sur cet arrêt qui handicape fortement, s’il devait être conclusif, l’action de nos services de renseignement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 12, présenté par M. Leconte, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Todeschini, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Marie et Sueur, Mmes Carlotti, Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Roger, Temal, M. Vallet, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa du I de l’article L. 853-3 du code de la sécurité intérieure est complété par une phrase ainsi rédigée : « L’introduction dans un lieu d’habitation à la seule fin de retirer les dispositifs techniques précités ne peut être autorisée qu’après avis rendu par un membre de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. »

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Il s’agit également d’un amendement de simplification : il paraît surdimensionné que la CNCTR doive se réunir en formation collégiale pour examiner les demandes d’introduction dans un lieu d’habitation à la seule fin de retirer des dispositifs techniques de captation de données.

Monsieur le ministre, je m’étonne de vos propos. Parce que nous sommes socialistes, vous faites mine d’être systématiquement en désaccord avec nous. Parallèlement, vous déposez des amendements qui s’opposent aux propositions du rapporteur, mais vous donnez l’impression de le soutenir ! Force est de constater qu’il existe un hiatus important entre ce que propose la commission des lois du Sénat et ce que vous défendez, au nom du Gouvernement. Pourquoi faire comme si vous étiez d’accord ?

Certes, la CNCTR agit en se conformant à la loi, mais il nous est possible, comme vous l’avez rappelé à l’instant, de changer la loi s’il nous paraît nécessaire de faire évoluer les compétences de cette commission. Tel était l’objet de l’amendement précédent.

Enfin, je ne vois pas pourquoi vous tirez des hyperboles de mes propos sur l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne. Cet arrêt s’impose à nous. Je n’ai pas dit que j’étais content, j’ai juste dit qu’il nous fallait trouver des solutions ! Oui, cela rend bien des choses difficiles, ce dont je ne me réjouis ni plus ni moins que vous. Il sera peut-être possible de faire évoluer cette jurisprudence ou de l’interpréter, mais ce ne sera pas chose aisée, raison pour laquelle le projet de loi prévu dans les prochains mois sera encore repoussé. Disant cela, je ne faisais qu’établir un constat, ne construisez pas à partir de mes propos des hyperboles inutiles !

En l’espèce, nous proposons un certain nombre de simplifications pour qu’un maximum de Français ait totalement confiance. Nous voulons couper court à toute théorie bizarre sur la manière dont nos services fonctionnent, afin de pouvoir affirmer haut et fort qu’il existe des dispositions législatives permettant de contrôler de manière complète et totale les opérations de la CNCTR.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc-Philippe Daubresse

Monsieur le Leconte, c’est précisément en raison de l’arrêt de la CJUE que nous nous sommes préoccupés de cette affaire et que nous avons examiné au cours des auditions ce qu’il était possible de faire. M. le ministre vient d’éclairer la situation : si cet arrêt devait s’imposer automatiquement, les actions antiterroristes de la France seraient sérieusement handicapées. Cela ne date pas d’aujourd’hui : le gouvernement d’hier disait déjà la même chose, tout comme celui d’avant-hier !

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Et probablement comme celui de demain !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc-Philippe Daubresse

Par conséquent, si le Gouvernement décidait de ne pas être d’accord avec cet arrêt, il a juridiquement les moyens de le faire, mais c’est très compliqué. Raison de plus pour avoir un débat de fond dans le cadre de la loi Renseignement. Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

(Sourires.) Nous nous connaissons depuis longtemps : si nous pouvons avoir des désaccords, notre fraternité est faite de bières flamandes et de waterzoi !

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Monsieur le sénateur, je vous sens un peu jaloux de ma proximité régionale et amicale avec Marc-Philippe Daubresse ! §

J’ai écouté votre discours avec intérêt et je le respecte. Votre rôle premier est bien évidemment de faire la loi et si vos amendements sont votés j’en prendrai acte. Simplement, j’ai ma propre conviction politique. Et votre point de vue était différent, me semble-t-il, sur ces questions lorsqu’un gouvernement que vous souteniez était aux responsabilités… Mais au demeurant vous n’êtes pas le seul à pratiquer ainsi.

Soyez rassuré au sujet du renseignement et des théories du complot. Certes, les parlementaires, qui exercent une mission de contrôle de l’action du Gouvernement, y compris des services de renseignement, peuvent trouver qu’il existe une certaine opacité. Mais je n’accepte pas d’entendre dire ici ou là que les services de renseignement français pourraient ne pas respecter la loi. C’est faux : ils sont extrêmement contrôlés et les temps lointains où ils pouvaient être aux ordres d’un exécutif, quel qu’il soit, pour mettre en place des écoutes illégales ou réaliser des interventions intempestives, non contrôlées par la loi et relevant du fait du prince, sont révolus, ce qui est heureux pour la démocratie française.

J’espère que les représentants de la Nation sont convaincus que les services de renseignement sont là pour protéger les Français et la souveraineté nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Je regrette que, quels que soient les échanges avec M. le ministre, nous n’évoquions jamais le fond de ces amendements, qui visent à une simplification ou à une harmonisation. Ces petites discussions retraçant l’historique de l’action des différents gouvernements nous empêchent d’aborder le fond du débat, ce qui est pourtant le cœur du travail parlementaire. Je peux comprendre que nous ne résolvions pas aujourd’hui les trois points que j’ai soulevés, mais il aurait été utile de connaître l’avis du Gouvernement sur le fond.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

I. – Le II de l’article 1er et l’article 2 de la présente loi sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

II. – Au premier alinéa des articles L. 285-1, L. 286-1, L. 287-1 et L. 288-1 du code de la sécurité intérieure, la référence : « l’ordonnance n° 2019-738 du 17 juillet 2019 » est remplacée par la référence : « loi n° … du … relative à la prorogation des chapitres VI à X du titre II du livre II et de l’article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure ».

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 15, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Les dispositions de la présente loi sont applicables en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Cet amendement de coordination est défendu.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 3 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi.

Le projet de loi est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

En application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 prises pour son application, la commission des affaires économiques a émis, lors de sa réunion de ce jour, un avis favorable – 33 voix pour – à la nomination de M. Philippe Mauguin à la présidence de l’Institut national de la recherche, de l’agriculture et de l’environnement.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Georges Patient.