Intervention de Thierry Coulhon

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 21 octobre 2020 à 11h30
Audition de M. Thierry Coulhon candidat désigné par le président de la république aux fonctions de président du haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur

Thierry Coulhon, candidat désigné par le Président de la République aux fonctions de président du Haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur :

Le passage d'AAI à API revêt deux dimensions. Il y a l'aspect symbolique et institutionnel de l'indépendance qui a son importance. J'ai connu une époque où, au ministère, il y avait l'étage du cabinet, puis celui du directeur général de la recherche et, en dessous, la mission scientifique, technique et pédagogique, qui était une espèce d'ancêtre du Hcéres. Il était clair qu'il y avait une ligne directe, quelle que soit la qualité - réelle - des personnes concernées... Il n'y avait pas de distinction entre l'évaluation et la décision. L'histoire, les expériences, l'évolution internationale aussi, tout nous mène vers ce type d'indépendance. Le CNÉ était déjà une institution indépendante : il était dans le même bâtiment, mais avec une autre entrée. Le Hcéres a beaucoup progressé de ce point de vue, mais les moyens, les personnels sont gérés par la direction générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle. Il y a donc une discussion entre le président du Hcéres et le ministère. Il est sans doute plus sain, en termes de gestion, d'être responsable de son budget, de le voter avec le collège, et d'en rendre compte au Parlement, sans que ce budget soit une fraction de deux programmes.

Ce qu'on peut attendre de la transformation en API, c'est un impact sur les ressources propres. Il est naturel que le Hcéres évalue des systèmes étrangers. Mais on ne voit pas très bien pourquoi le contribuable français financerait ce travail. Il est plus sain que ces ressources propres figurent dans le budget d'une AAI, plutôt que de passer par la tuyauterie compliquée des services du ministère.

Sur l'égalité femmes-hommes, le constat est difficile à faire. En ce qui concerne la présence des femmes dans les sciences, on ne comprend pas encore tout. Dans les représentations, dans les parcours, il y a des blocages, dont on voit des causes, sans les comprendre toutes. Sur ce point, les sciences sociales peuvent nous aider. Une fois de plus, le Hcéres doit faire de la photographie : le Parlement, le Gouvernement, les établissements peuvent agir en la matière, mais le Hcéres est bien placé pour établir les faits. Le Hcéres élabore et fait voter par son collège des référentiels. Dans la stratégie d'un établissement, on regarde son projet scientifique, la manière dont il gère ses personnels et ses finances, mais il est naturel qu'on regarde aussi ce qu'il fait pour l'égalité femmes-hommes. Comment cet établissement va-t-il chercher des étudiantes ? Est-il attentif à son personnel féminin ? Des associations très utiles existent, comme « Femmes et mathématiques » ou « Femmes et sciences », qui font un travail absolument remarquable. Il faudra que le Hcéres dialogue avec elles.

Sur la diffusion de la culture scientifique et technique, nous avons progressé au fil des années. Nous avons des institutions qui en sont chargées, comme Universcience, avec un réseau d'associations dans les territoires, qui font de l'excellent travail. Les universités ne se sont sans doute pas encore senties assez responsables de ce travail. Sans doute ai-je moi-même pensé, dans ma jeunesse, qu'il s'agissait simplement d'une sorte de supplément d'âme... Mais non, c'est un enjeu citoyen, qu'on parle de vaccins ou d'autres sujets. Si la loi charge le Hcéres de cette mission, il devra encourager les bonnes pratiques en la matière, et les repérer dans les projets de recherche. Le goût de l'ésotérisme, assez partagé dans ma discipline, et dans quelques autres, n'est pas fatal. L'un des plus grands physiciens du XXème siècle, Richard Feynman, a été capable d'expliquer pourquoi Challenger a explosé, et de l'expliquer en des termes simples, et il savait aussi dialoguer avec le politique. En Australie, il y avait « Science Meets Parliament » : de même, j'ai toujours rêvé d'une semaine réunissant des scientifiques et le Parlement.

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