Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le débat que nous entamons est ambitieux et utile.
Notre collègue Éric Kerrouche l’a dit : si le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ne peut, en l’état, souscrire à l’intégralité des dispositions figurant dans cette proposition de loi constitutionnelle, nous approuvons la démarche engagée par le groupe majoritaire pour plus de territorialisation, plus de différenciation, plus de stabilité financière et plus de sécurisation juridique, même si nous récusons le seul prisme de la liberté territoriale.
Sur ces travées, nous n’avons pas peur des libertés locales. Nous convenons aussi qu’il est désormais nécessaire de faire respirer la Constitution pour permettre à chaque territoire de s’épanouir au sein de notre République. Depuis trop longtemps, ici, dans l’Hexagone, mais aussi dans tous les territoires d’outre-mer – ou presque –, nous attendons une évolution de notre Constitution.
Chacun voit bien ici, bien loin des slogans trop longtemps martelés, que l’« uniformisme » des politiques nationales demeure trop souvent la règle, et la différenciation un mirage. En résultent des politiques publiques parfois déconnectées de nos réalités et peu efficaces pour nos populations. Pour être tout à fait honnête, nous autres élus en prenons toute notre part.
Il faut résolument avancer vers plus de pouvoir décisionnel local, vers un échelon local doté de réels pouvoirs normatifs, tout en réaffirmant l’unité de la République : telle est la ligne de crête.
La rédaction de l’article 6 de la proposition de loi constitutionnelle reste toutefois inaboutie, raison pour laquelle notre groupe propose sa suppression si une autre rédaction ne nous est pas proposée. Nous aviserons en fonction de la discussion et de la souplesse – que j’espère transpartisanes – que nous aurons ici.
Pour ne pas confisquer un choix, qui doit inéluctablement être fait par les populations et les peuples, les parlementaires que nous sommes ne peuvent se défiler devant leurs responsabilités. Je mesure combien ce débat peut être source de discussions passionnelles dans chacun des territoires.
Les amendements que nous proposons sur toutes les travées de cet hémicycle ne font pas de nous une antichambre de l’indépendance ou la chambre de la cristallisation du statu quo. Il s’agit ici d’affirmer notre volonté de cranter des avancées et des convergences de pensée. Nous sommes tous farouchement attachés aux principes de liberté et d’égalité, et non d’égalitarisme. Dans les outre-mer, leur concrétisation devra tôt ou tard passer par une réforme constitutionnelle.
Depuis plusieurs années, chacun chemine à sa façon et à son rythme. Jusqu’à présent, aucun constitutionnaliste n’avait proposé un dépassement de la logique binaire entre spécialité et identité législative, incarnée par les articles 73 et 74 de la Constitution. Nous aurons tout à l’heure à nous prononcer sur une nouvelle rédaction que j’ose qualifier d’« efficace » et d’« ambitieuse ». C’est bien la première fois que nous avons devant nous une proposition, certes perfectible – et je pourrais y revenir –, mais pour le moins concrète et répondant, pour une grande part, à la volonté de différenciation des décideurs locaux.
Par deux fois, les élus du congrès de Guadeloupe nous ont mandatés pour suivre cette affaire au niveau national. Cette proposition ne contraint aucune collectivité, ne force aucun peuple, aucune population : libres à eux de demeurer soit sous le régime de l’article 73 de la Constitution, soit sous celui de l’article 74, soit d’adhérer à une forme que je qualifierai de « différenciation à la carte ».
Selon l’état et le déroulement de la discussion, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain avisera.